Publié le 26.11.2025 à 12:47
Manuel Pavard
Le sujet s’est déjà invité à plusieurs reprises dans les débats parlementaires, notamment à l’initiative des élus communistes et insoumis. Dernier épisode en date le 5 novembre 2025, lors des discussions sur le projet de budget 2026, avec un amendement déposé par le député LFI Aurélien Saintoul demandant « la nationalisation complète du groupe Atos ». Une revendication que la CGT porte, elle, depuis plus de deux ans sans discontinuer, à l’image de ses multiples interventions sur le sujet au Sénat et à l’Assemblée nationale.
Aujourd’hui encore, « [sa] ligne n’a pas changé », assure Pascal Besson, coordinateur adjoint de la CGT Atos et représentant syndical au CSE, tout en reconnaissant un curieux paradoxe : « On défend la nationalisation pour sauver l’entreprise alors qu’une partie est vendue à l’État. » Il fait ici référence à la vente, pour 410 millions d’euros, de l’entité HPC (fabrication et gestion des supercalculateurs) — héritière de Bull — à l’Agence de participation de l’État (APE). Un accord annoncé en juin dernier mais qui sera effectif à partir du premier semestre 2026.
À première vue, l’opération pourrait sembler plutôt bénéfique. L’État français fait ainsi l’acquisition d’une branche stratégique, vitale pour la dissuasion nucléaire et la recherche scientifique. Fabriqués à Angers, les supercalculateurs d’Atos sont notamment utilisés par le CEA pour la simulation nucléaire ou encore par Météo-France pour les prévisions météorologiques et les modélisations climatiques.
D’ailleurs, la CGT elle-même avait fait appel à l’État « pour combler la dette » faramineuse d’Atos — montée jusqu’à 5 milliards d’euros — et « pour défendre la souveraineté numérique » du pays. Mais, corrige Pascal Besson, « on voulait sauver l’ensemble de la boîte. Or, il s’agit là de vente à la découpe. » Nuance de taille.
Quid en effet des services restants ? Forfaits d’accompagnement chez les clients, régies, entretien des structures, maintenance opérationnelle des applications… De FranceConnect à l’Assurance maladie, en passant par la SNCF, la Caisse des dépôts ou EDF, de nombreux logiciels utilisés au quotidien par les Français sont gérés par Atos. Sans compter la sécurité informatique des collectivités territoriales.
Pascal Besson peine à cacher son dépit. Aujourd’hui, l’objectif à court terme de la CGT est de « sauver les meubles », avoue-t-il. Pas de résignation mais un constat lucide : « Le démantèlement était prévu, avec la vente de Worldgrid ; maintenant, c’est fait. » Atos a ainsi finalisé la vente de son activité Worldgrid (qui fournit des services d’ingénierie pour les entreprises du secteur de l’énergie et des services publics) à Alten, en décembre 2024, pour 270 millions d’euros. Sur le site d’Échirolles, qui comptait environ 1 000 salariés avant la cession, l’impact a été presque immédiat :« 500 personnes sont passées sous le giron d’Alten », précise le syndicaliste.
Le campus Iseran, centre de recherche et développement d’Atos inauguré en 2022 à Échirolles.Avec la vente de HPC, ce sont en outre 1 200 à 1 300 salariés supplémentaires qui vont quitter les effectifs d’Atos, en France. « À Échirolles, c’est catastrophique », se désole Pascal Besson. Une hémorragie qui touche même la section syndicale CGT locale, « passée de vingt-deux avant la vente de Worldgrid, à douze, puis à deux après la cession de HPC ».
On observe « la même dépréciation » aux niveaux national et international. En septembre 2023, « le groupe Atos comptait 110 000 salariés, dont 11 000 en France ; aujourd’hui, l’effectif est en-dessous de 70 000, dont environ 9 600 en France » — chiffre qui tombera donc à un peu plus de 8 000 après le départ de HPC -, détaille la CGT Atos dans une lettre ouverte adressée aux salariés et aux dirigeants de l’entreprise ainsi qu’aux décideurs politiques, en septembre 2025. « On est en train de se faire laminer », résume Pascal Besson.
Malgré ce sombre tableau, la CGT conserve « toujours le même but : sauvegarder l’emploi ». À ce stade, la direction a évoqué un PSE de 135 emplois, qui concerne aux deux tiers les fonctions support (commerciaux, service communication, marketing…) et pour un tiers l’opérationnel. Néanmoins, la vague de départs sur l’année 2025 atteint en réalité « plusieurs centaines de personnes », dépassant largement les 135 postes annoncés, souligne le délégué syndical.
C’est notamment le résultat, selon lui, de « l’énorme pression mise sur les salariés », avec une charge de travail difficilement supportable et des effectifs allégés. Pascal Besson dénonce une stratégie délibérée de la direction : « Des salariés sont poussés à la démission, d’autres sont licenciés pour inaptitude alors qu’ils sont là depuis quinze ans… » Autre technique malveillante, des objectifs inaccessibles sont fixés, par exemple, à des commerciaux. L’échec inévitable fait alors office de prétexte pour engager une procédure de licenciement, au motif d’une insuffisance de résultats.
« Le harcèlement des salariés en intermission, les licenciements abusifs, les ruptures conventionnelles forcées, la discrimination liée à l’âge ou au sexe sont devenus le quotidien de nos collègues », accuse la CGT Atos dans sa lettre ouverte. « L’employeur mène un plan social à bas bruit et s’exempte de ses obligations en termes de formation, d’encadrement et de prévention des risques psycho-sociaux », ajoute le syndicat.
Difficile pourtant de parler d’économies quand les dirigeants profitent indûment des primes et parts variables, « même lorsque leurs entités sont en déficit », tandis que les honoraires de jetons de présence au conseil d’administration sont doublés. « En 2025, quatre-vingt-huit privilégiés ont bénéficié de ces largesses pour un montant de 5,5 millions d’euros, soit 62 500 euros par personne, alors que les négociations salariales ont abouti à une misérable revalorisation moyenne de 0.62 % pour les neuf mille salariés qui créent la richesse dans l’entreprise », s’insurge la CGT.
Pascal Besson, ici dans son bureau syndical, à Échirolles, a des mots très durs pour la direction d’Atos.Pascal Besson, lui, n’est pas tendre avec la direction d’Atos : « Les gens aux manettes n’ont aucune vision globale. Ce ne sont pas des industriels mais des purs financiers qui ne connaissent rien au métier. » Depuis fin 2024, affirme-t-il, ces dirigeants ne sont que « les marionnettes » et même « le bras armé des actionnaires ».
En cause, le plan de restructuration de la dette validé, fin 2024, par le tribunal de commerce, qui a entériné la reprise d’Atos par ses créanciers, devenus les principaux actionnaires du groupe. Une partie de la dette a donc été en partie effacée, celle-ci passant de 5 à 3 milliards d’euros environ. Un succès en trompe-l’œil. L’objectif de restructuration fixé à l’époque par la justice est en effet « déjà obsolète » un an plus tard, d’après la CGT, « puisque le plan d’affaire associé prenait en compte des activités rémunératrices qui ont été vendues depuis (WorldGrid et supercalculateurs) ».
Et même si la direction du groupe se félicitait alors de ne pas avoir d’échéance de remboursement de la dette avant 2029, les perspectives n’incitent guère à l’optimisme. « Rembourser près de 3 milliards de dette d’ici là, en l’état actuel des choses, Atos est incapable de le faire », estime Pascal Besson. Loin d’être sauvée, l’entreprise a au contraire été « livrée aux vautours de la finance pour un démantèlement en règle », s’indigne la CGT Atos.
Dès lors, que peuvent espérer les salariés et que peut faire le syndicat ? « On va essayer de toute faire pour qu’il y ait le moins de licenciements possibles », indique le responsable syndical, promettant de « combattre le PSE par tous les moyens légaux ». Pour le reste, la France est-elle prête à brader ce qui reste d’Atos, donc la gestion des données des citoyens, au plus offrant ? Car c’est bien de la souveraineté numérique dont il s’agit.
Soutenue sur ce point par le PCF ou LFI, la CGT n’a en revanche « aucun soutien du gouvernement », déplore Pascal Besson. Sans grande surprise toutefois. « La souveraineté, ce n’est pas la tasse de thé de ce gouvernement », ironise-t-il. D’où la requête formulée par la CGT Atos dans sa lettre ouverte : « Le gouvernement refusant d’être clairvoyant sur la situation d’Atos, les représentants parlementaires doivent posent la question critique : quelle est la cartographie des risques pour la population française et les services d’État si Atos fait défaut ? Et d’en déduire la conclusion la plus rationnelle : la nationalisation. »
Cet article Atos. « On se fait laminer ! » : pour la CGT, une seule solution, la nationalisation est apparu en premier sur Travailleur alpin.
Publié le 25.11.2025 à 19:14
Maryvonne Mathéoud
« Quel avenir pour les Palestiniens après le plan Trump ? » C’était la question posée aux quelque deux cent cinquante participants à cette rencontre.
Agnès Levallois, présidente de l’Institut de recherches et d’études Méditerranée Moyen-Orient, consultante spécialiste du Moyen-Orient, chargée de cours à Sciences Po Paris, et autrice du livre Le livre noir de Gaza paru au Seuil en 2024, explique le « plan Trump. » « Plan de paix ? Où est la paix dans le plan élaboré par les Américains et les israéliens. Il ne prend absolument pas en compte l’avis des Palestiniens ? Un plan de paix se construit avec toutes les parties concernées. » Ce « nouveau » plan de paix est le même que celui de la Riviera, c’est la même logique mais présenté différemment. Le plan a l’air plus acceptable mais c’est un piège, ce plan est inacceptable
La première phase qui consiste à libérer les otages israéliens et libération assortie d’un cessez-le-feu immédiat n’a pas de réalité : la litanie des morts continue, les bombardements se poursuivent. Trump a besoin d’obtenir des résultats pour montrer qu’il fait mieux que ses prédécesseurs. De plus il a des difficultés en interne et la pression internationale contre Israël le pousse à proposer un plan plus entendable. Le plan Trump est voué à l’échec car il ne prend pas en compte les Palestiniens.
Agnès Levallois, présidente de l’Institut de recherches et d’études Méditerranée Moyen-Orient.Ainsi n’est-il fait aucune mention d’un État palestinien dans son plan dans ce qui est mis sur la table. Dans la résolution de l’ONU, il y a certes une vague mention à la souveraineté palestinienne. Cependant Netanyahou, Premier ministre israélien, n’en veut pas. Tandis que les résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies n’ont jamais été respectées par Israël.
Par ailleurs, les Etats se raccrochent à ce processus trumpien, y compris la France. La reconnaissance par la France de l’État de Palestine — un fait positif — doit se concrétiser. Il faut que cette folie meurtrière depuis deux ans cesse. Et, le jour où Macron reçoit Mahmoud Abbas, il ré-autorise la vente d’armes à Israël.
La stratégie d’Israel n’est pas nouvelle, elle consiste à faire partir les Palestiniens. Mais, depuis le 7 octobre 2023, les dirigeants d’extrême droite israéliens annoncent clairement qu’ils veulent finir le travail qu’ils ont commencé en 1948 : chasser les Palestiniens de leurs terres. Depuis le 7 octobre, c’est assumé et revendiqué sans que cela pose aucun problème à la majorité de la classe politique internationale. Faire disparaître les Palestiniens n’émeut pas nom plus l’opinion publique.
Anne Tuaillon, présidente de l’Association France Palestine solidarité.Une phrase décrit bien la situation : Si le Hamas l’accepte (le plan) la Palestine n’existe plus ; si le Hamas le rejette les Palestiniens n’existent plus.
À Gaza la vie ne peut pas repartir. L’aide humanitaire devait rentrer massivement, mais l’armée israélienne contrôle et empêche certaines denrées de rentrer car elles auraient deux usages comme par exemple des seringues. Les 600 camions nécessaire par jour n’arrivent pas, ils sont bloqués par des contrôles qui n’en finissent pas. En Palestine, 8000 oliviers ont été détruits. Comment les Palestiniens peuvent ils vivre, les oliviers sont la base de leur économie.
Quel avenir politique pour les Palestiniens ? Israël veut choisir ses interlocuteurs mais il a toujours décrédibilisé les dirigeants palestiniens comme Yaser Arafat . Dans le contexte actuel comment organiser des élections. Il y a des Palestiniens qui peuvent représenter leur peuple comme Marwan Barghouti, cependant Israël n’en veut pas.
Israël a choisi Mahmoud Abbas et après il l’a décrédibilisé et ils disent ; on a personne avec qui négocier. On ne peut pas discuter avec le Hamas. Pourtant il faut discuter avec toutes les parties concernés par le conflit.
Si les Européens arrêtaient de vendre les pièces pour l’armement d’Israël la guerre finirait. Les Américains ne suivront pas Israël s’il bombarde l’Iran car ils ont trop d’intérêts dans la région. Israël se pose en maitre du jeu mais les Américains ont besoin des pays du golfe qui considèrent maintenant que c’est Israël qui est le pays dangereux.
« C’est la première fois depuis 40 ans que je travaille sur cette région que je suis incapable d’élaborer des perspectives », conclut Agnès Levallois.
Les trois jeunes Palestiniens de Hara 36.En deuxième partie de la manifestation trois jeunes Palestiniens proposent une performance Hara 36. Hara 36 est une plateforme médiatique et culturelle palestinienne, dédiée à promouvoir la culture, l’histoire, et le vécu quotidien des Palestiniens à travers des histoires humaines. Le but de Hara 36 est de valoriser l’expérience humaine des Palestiniens dans le contexte de leur pays, et en relation avec leur passé. Pour Hara 36, tout le monde parle de la Palestine mais on n’écoute pas les Palestiniens.
Hara 36 veut remettre au centre du débat le quotidien des Palestiniens. En transmettant la mémoire collective, l’art, la littérature, et les histoires humaines de la Palestine, ces jeunes cherchent à faire face à la déshumanisation du peuple palestinien, et à faire connaître l’histoire en continu de la Palestine, au-delà de l’actualité médiatique
Ces jeunes vont sillonner la France pour parler du vécu des Palestiniens et ont une newsletter en projet dans laquelle ils vont inclure des chroniques, des interviews, des histoires personnelles, des traductions littéraires et artistiques, des analyses, des podcastes… Une partie de leurs articles seront publiés sur leur blog.
Le forum de la bourse du travail de Grenoble accueillait la manifestation.Cet article 10 heures pour la Palestine. Elles avaient lieu à la bourse du travail est apparu en premier sur Travailleur alpin.
Publié le 25.11.2025 à 13:50
Laurent Jadeau
Devant une assemblée de militants, de professionnels de l’Éducation nationale et des collectivités locales, Stéphane Bonnery, invité à Grenoble par la fédération de l’Isère du PCF, a décrypté les enjeux qui se cachent derrière ce serpent de mer des « rythmes scolaires » qui agite régulièrement la société depuis des décennies. Il en a fait un livre, Temps de l’enfant, rythmes scolaires : vraies questions et faux débats (Éditions de la fondation Gabriel Péri, 2025, 246 pages), qui a le mérite de secouer un peu le sujet.
De fait, l’histoire même de ce livre constitue un recentrage du débat. En effet, Stéphane Bonnery travaillait sur un ouvrage consacré aux inégalités scolaires et aux dégâts des renoncements politiques successifs qui ont fini par faire accepter la notion « d’enfants inenseignables ».
Quand il a entendu le président Macron lancer sa convention citoyenne, il a immédiatement compris que cette question de l’école de la réussite pour tous allait encore être l’oubliée des travaux. Si cette convention citoyenne est, selon lui, plutôt bien faite et avec une méthodologie incontestable, les problèmes posés sont justes, mais pris à l’envers.
Stéphane Bonnery a donc fait un rapide tour d’horizon des évolutions de l’organisation de l’école depuis plus de cinquante ans et de leurs conséquences. Il note que tous les changements, en dehors des débats sur l’organisation de la journée, la semaine ou l’année, n’ont eu de cesse de diminuer globalement le temps que l’école consacre à chaque enfant, pour les confier aux mairies, au privé, aux familles qui le peuvent ou à la rue et aux écrans.
Stéphane Bonnery a échangé avec des militants et des professionnels de l’éducation.Ainsi, pour ne parler que du premier degré, avant 1969, les élèves avaient 30 heures d’école par semaine. On est ensuite passé à 27 heures (à l’époque avec le samedi matin), puis la réforme Jospin, en 1989, a réduit ce temps à 26 heures avant que l’instauration de la semaine de quatre jours ne porte le total hebdomadaire à 24 heures. C’est l’équivalent, en heures, d’une année scolaire entière qui a été « volée » aux élèves. Et dans le même temps, on a vu les écarts de « performances scolaires » exploser entre les élèves des catégories sociales les plus élevées et ceux des plus défavorisées. C’est tout sauf une coïncidence.
Et tous les discours qui affirment qu’il faut alléger les attentes et les programmes pour des enfants qui ne seraient « pas faits pour l’école » et fatigables ne sont que la défense de l’idéologie des dons. Parler des rythmes propres de l’enfant à respecter participe également de cette vision fataliste dont tout progressiste ne peut se satisfaire.
Pourquoi les enfants des classes favorisées ne sont pas « fatigables », eux ? En effet, bien souvent, en plus de leur journée d’école, il ont de nombreuses activités sportives, culturelles, musicales. Et surtout, ils bénéficient d’un environnement qui intègre les codes culturels de l’école, de sa façon d’interroger et appréhender le monde.
Pour Stéphane Bonnery, la reconquête de ces heures perdues doit être la première question à traiter. On le doit aux enfants qui n’ont que l’école pour acquérir cette « culture savante ». Nous avons une opportunité importante avec la chute de la démographie scolaire. Plutôt que d’y voir une fois de plus l’occasion de réduire le nombre d’enseignants, on pourrait en profiter pour remettre au goût du jour une vielle revendication du corps enseignant : déconnecter le temps de travail des enseignants du temps d’école des élèves. Le fameux « plus de maîtres que de classes ».
Stéphane Bonnery alerte aussi sur le danger, sous couvert de rythmes et de temps « allégés » l’après-midi, de voir une nouvelle tentative d’éjecter de l’école publique des enseignements tels que l’éducation physique et sportive, les arts, voire les sciences et l’histoire-géographie !
Dans son livre parsemé de textes emblématiques de chercheurs, éducateurs, philosophes, de 1969 à nos jours, on voit se dessiner une réflexion globale autour d’une conception de l’éducation qui va à l’encontre des discours et des réformes libérales de ces soixante dernières années. Lesquelles portent toutes ce qu’il faut bien appeler une vision de classe de l’éducation.
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Publié le 25.11.2025 à 13:11
daniel Oriol
Le syndicat CGT Trédi Salaise s’est réuni au foyer Henri-Barbusse, à Roussillon, en présence de vingt-sept adhérents, quatre représentants du syndicat CGT Trédi Saint-Vulbas (autre entité de la SAS Trédi appartenant à Séché Environnement), du secrétaire général de l’UL Roussillon Beaurepaire, Anthony Martinez, et d’une représentante de l’union départementale, la FNIC-CGT étant excusée. Au menu, un ordre du jour très chargé.
Adrien Poirieux , secrétaire du syndicat, a ainsi présenté un rapport d’ouverture mêlant actualités et retour sur le bilan de l’ensemble des actions que la CGT Trédi Salaise a menées au cours des trois dernières années. Il a relevé une implication importante dans le fonctionnement global et les structures de la CGT (UL, UD, fédération) où des membres du syndicat siègent dans les instances décisionnaires.
Le trésorier a, lui, détaillé les comptes du syndicat. Un exercice particulièrement difficile, chaque euro dépensé devant être issu d’une décision collective préalable, avec un justificatif associé de manière systématique. La commission financière de contrôle a toutefois constaté que tout était parfaitement en ordre et que les dépenses s’inscrivaient toutes dans des démarches de luttes, de formation ou de participation aux évènements organisés par les structures.
Le site Trédi de Salaise-sur-Sanne, dans le Nord-Isère. © Séché EnvironnementLe syndicat a également fait un point quant aux objectifs qu’il s’était fixé trois ans auparavant. À savoir gagner les élections professionnelles, avoir une vie syndicale régulière, réaliser des plans de formation ambitieux, gagner sur les luttes internes sur les salaires et conditions de travail (liste non exhaustive).
À ce niveau, la CGT Trédi Salaise n’a pas à rougir. Déjà car elle est devenue majoritaire. Ensuite pour son dynamisme : quatorze AG et cinq CE se sont ainsi tenus sur la période, montrant une envie de réaliser des échanges réguliers, tandis que les plans de formations ont pu être réalisés à plus de 85 %. Quant aux luttes internes, celles-ci ont accouché d’un bilan là aussi positif, avec près de 400 euros d’augmentation collective obtenue sur la même période et beaucoup d’améliorations sur les postes de travail et leurs conditions.
Même si ce tableau semble parfois idyllique, beaucoup de choses restent néanmoins à conquérir. C’est d’ailleurs dans cette optique qu’une nouvelle commission exécutive (CE) et un nouveau secrétariat ont été désignés pour continuer la lutte. Comme on l’apprend en effet en formation « Participer à la vie de la CGT », il faut toujours recommencer.
Le temps ne fut en revanche pas suffisant pour aller au fond des débats qui traversent le syndicat telles les prises de positions politiques ou la lutte contre l’extrême droite. Mais d’ores et déjà, des dates sont fixées pour prendre le temps nécessaire à ces discussions. Pour couronner le tout, Anthony Martinez, secrétaire de l’UL, a remarqué positivement l’activité de cette base syndicale, souhaitant que d’autres prennent exemple sur leurs camarades de Trédi Salaise.
Cet article Salaise-sur-Sanne. Retour sur le troisième congrès de la CGT Trédi est apparu en premier sur Travailleur alpin.
Publié le 25.11.2025 à 12:02
Luc Renaud
« Supprimer les cotisations sociales sur le salaire pour redonner du pouvoir d’achat, c’est ce que veut le RN ; j’ai rencontré quelqu’un qui m’a dit que c’était une bonne idée, quand je lui ai demandé comment il allait payer l’hôpital s’il en avait besoin, il m’a répondu qu’il présenterait sa carte vitale. » Un résumé en forme d’anecdote, présenté par Claude Farge lors du débat qui a eu lieu le 24 novembre à Voiron.
Un résumé de la soirée, somme toute. La part du salaire versée à la Sécurité sociale sous forme de cotisation, c’est ce qui finance l’accès aux soins pour tous. Au médecin, à l’hôpital, à la retraite aussi. Ce que l’on ne répétera jamais assez.
Claude Farge.L’intervention de Thierry Braillon, militant de la CGT et administrateur de la mutuelle Solimut ne disait pas autre chose. Un exposé détaillé, riche d’informations, qui remontait aux origines de la solidarité face à la maladie, et à la création de la Sécurité sociale par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945, dans laquelle le ministre communiste Ambroise Croizat a joué un rôle déterminant. « Un parti communiste à 29 % et une CGT forte de cinq millions d’adhérents, ça aide », constatait-il.
Thierry Braillon rappelait les principes constitutifs de la Sécurité sociale. La répartition, tout d’abord. Les cotisations sont immédiatement reversées sous la forme de prestations, ce qui évite tout risque de défaillance d’un intermédiaire financier. La cotisation, ensuite : destinée aux prestations, elle n’est pas un impôt qui serait susceptible d’être utilisé pour d’autres dépenses – « on a vu ce que ça pouvait donner en Angleterre ». L’unicité, autrement dit des droits égaux pour tous à une prestation selon ses besoins : le bon moyen de garantir l’adhésion de tous, de faire société autour d’un système commun. L’universalité enfin : l’accès à la santé, aux prestations sociales et à la retraite est garanti à tous.
Thierry Braillon, administrateur de la mutuelle Solimut et militant CGT.Un système qui, dès son origine, a fait l’objet d’attaques conduites par la droite et le patronat. Les ordonnances du 21 août 1967 en constituent une des étapes : c’est la fin de l’élection des administrateurs représentant les salariés – les cotisants – pour gérer la Sécurité sociale et l’instauration du paritarisme : une moitié d’administrateurs désignés par les syndicats de salariés et une autre moitié par les employeurs – avant cette date, la gestion de la sécu était assurée des directions composées de salariés à 75 %. Thierry Braillon en profitait pour rappeler que « ce qu’on appelle les charges patronales est prélevé sur la richesse créée dans l’entreprise… par les salariés ». Les administrateurs patronaux n’ont par conséquent pas de légitimité particulière : l’argent ne sort pas de leur poche, à l’inverse des cotisations des salariés.
Une soirée qui fera l’objet d’un reportage vidéo.Du plan Veil de 1975, à celui de Raymond Barre qui, en 1980, crée les dépassements d’honoraires, au plan Juppé de 1995… les remises en cause sont nombreuses. Celle de 2019 n’est pas la moins importante : la loi de financement de la Sécurité sociale adoptée par la majorité macroniste supprime l’obligation pour l’État de compenser les exonérations de cotisations sociales patronales décidées par les gouvernements – exonérations d’ailleurs à l’origine d’un déficit proclamé.
Aujourd’hui, que reste-t-il de la sécu ? Beaucoup de choses, pourtant, soulignait Thierry Braillon.
Des principes de solidarité auxquels les citoyens sont attachés et une structure, une organisation, des fondamentaux, qui représentent un atout pour envisager les défis à venir que sont le vieillissement de la population, le changement climatique et les interactions entre la santé humaine et l’environnement. Défis qui imposent le renforcement de la solidarité et non pas le repli sur soi dans un individualisme promu par l’ultralibéralisme.
Damien Bagnis, secrétaire de l’USD santé CGT.Thierry Braillon proposait ainsi d’axer la défense de la Sécurité sociale sur des luttes offensives : la dénonciation des exonérations des cotisations patronales – « le sénateur communiste Fabien Gay a montré que l’aide aux entreprises était le premier budget de l’État » –, le projet d’une Sécurité sociale intégrale assurant des remboursements à 100 %, d’une sécu gérée par des représentants élus des salariés cotisants, aux champs d’activité élargis à la perte d’autonomie, aux situations de handicaps, mais aussi au logement social ou au chômage.
Le débat qui a suivi l’exposé a parfois pris des allures très techniques, démontrant la connaissance des participants des rouages de la protection sociale dans notre pays.
Technique, mais aussi revendicatif. Damien Bagnis, secrétaire de l’Union syndicale départementale CGT santé, montrait combien sont liés les combat pour la défense de l’hôpital, la lutte contre les déserts médicaux « y compris à Grenoble » et la promotion de la Sécurité sociale. Il notait également que « ce sont des firmes multinationales qui fixent le prix du médicament » et réitérait la proposition de la CGT de création d’un pôle public du médicament.
Nicolas Benoit, secrétaire de l’union départementale CGT.Nicolas Benoit, secrétaire de l’union départementale CGT, appelait les salariés à se rapprocher de la CGT pour saisir l’opportunité du renouvellement des représentants des salariés à la Sécurité sociale qui aura lieu l’année prochaine et à participer à la journée d’action du 2 décembre.
Depuis sa création, la Sécurité sociale a toujours été une affaire de luttes.
La réflexion pouvait se poursuivre avec les livres et la documentation disponible dans les stands partenaires.
Un exposé et des débats suivis par plus de cent personnes.
Une exposition sur la Sécurité sociale était présentée aux participants.
Un apéritif dinatoire a conclu la rencontre.Cet article Voiron. La riche histoire de la Sécurité sociale garante de son avenir est apparu en premier sur Travailleur alpin.
Publié le 24.11.2025 à 19:33
Manuel Pavard
« Des logements maintenant ! » Le slogan, affiché sur les banderoles et scandé par le cortège défilant ce lundi midi entre le siège de Grenoble Alpes Métropole et la mairie de Grenoble, illustre autant la « simplicité » des revendications que l’urgence de la situation. De fait, les familles dormant depuis mercredi 19 novembre dans les locaux de la Métropole ne font « que » demander un toit sur leur tête, chose à laquelle celles-ci ont droit au vu du « caractère inconditionnel » de l’hébergement. Mais les conditions d’accueil de plus en plus précaires, place André-Malraux, rendent la quête d’une solution particulièrement pressante.
Les familles devant le siège de la Métropole, avant le départ de la manifestation en direction de la mairie de Grenoble, lundi midi.Le premier jour, ils étaient en effet quelques dizaines, pour la plupart des livreurs à vélo et leurs familles, expulsés à la demande du bailleur social Actis, les 28 octobre et 18 novembre, des logements qu’ils occupaient, place des Géants, à la Villeneuve. Un nombre qui a très vite gonflé, pour atteindre aujourd’hui près de 180 personnes, entassées dans une salle de réunion du siège métropolitain. Parmi eux, « des femmes enceintes, des bébés, beaucoup d’enfants », détaille Kadiatou, l’une des occupantes. Quant aux conditions d’hygiène, « impossible de se laver ou prendre une douche », déplore Mohamed Fofana, secrétaire général du syndicat CGT des livreurs à vélo et président de l’association Adali. « Beaucoup de gens sont tombés malades », constate-t-il.
Malgré la pluie continue, les manifestants ont défilé dans les rues jusqu’à l’hôtel de ville, interpellant l’ensemble des collectivités (préfecture, métropole, municipalités).Dans de telles conditions, les militants de Droit au logement (DAL), du syndicat des livreurs et des autres associations soutenant l’occupation ont décidé d’organiser une déambulation jusqu’à la mairie de Grenoble, ce lundi 24 novembre. La préfecture étant comme toujours aux abonnés absents, ceux-ci ont décidé d’interpeller les maires, à commencer par celui de la ville-centre. « On est venu demander au maire de Grenoble des actions rapides », explique Raphaël Beth, du DAL 38. « Il s’est engagé en mai 2025 à réquisitionner des logements vides privés appartenant à des multipropriétaires. Mais ça traîne beaucoup ! »
Le DAL avait également identifié des immeubles appartenant au patrimoine municipal, lesquels se sont finalement avérés inadaptés, comme l’ont indiqué les services de la ville à la délégation reçue en mairie. Cette réunion, menée avec l’élue à la grande précarité Céline Deslattes, le directeur de cabinet du maire et la directrice du CCAS, a accouché d’un « bilan en demi-teinte », estime Raphaël Beth. Côté « positif », la municipalité va « déclencher un travail contre les expulsions à la Villeneuve ».
Concernant les demandes de réquisition, c’est pour l’instant le statu quo. Néanmoins, tout pourrait se décanter à partir de ce mardi 25 novembre au soir. « On leur a demandé [NDLR : aux représentants de la ville de Grenoble] de revenir avec des propositions à l’issue de la réunion prévue demain soir, à l’initiative de la Métro, entre les maires », précise le militant du DAL, qui espère que les édiles pourront « emboîter le pas à la mairie de Saint-Martin-d’Hères ».
Parmi les occupants du siège de la Métropole, de nombreuses familles avec des enfants en bas âge.La Métropole a en effet demandé aux maires du territoire de « mettre à disposition leurs logements », ajoute-t-il. « Le maire de Saint-Martin-d’Hères a répondu qu’il était d’accord pour jouer le jeu, notamment dans un hôtel vide de la commune, si les autres maires s’y mettaient. » Dans ce dossier, la position de David Queiros, maire de Saint-Martin-d’Hères, et des autres élus communistes est clairement affichée : ok pour héberger des occupants mais, souligne un militant PCF, « il faut une solidarité intercommunale pour éviter de concentrer la misère » en un même point.
Quid des services de l’État ? Pour Raphaël Beth, « avec un gouvernement bien à droite et ayant repris la plupart des idées d’extrême droite », difficile de compter dessus. Toutefois, Christophe Ferrari, président de la Métropole, et Jérôme Rubes, vice-président au logement, ont bien interpellé la préfète de l’Isère Catherine Séguin, dans une lettre datée du samedi 22 novembre, l’implorant « d’ouvrir un dialogue » pour trouver une solution. Car « l’État, en charge de l’hébergement d’urgence, ne peut pas être absent », assènent-ils.
L’inaction et le silence de la préfecture depuis le début de l’occupation questionnent cependant. Jérémie Giono, secrétaire départemental du PCF Isère, n’hésite pas ainsi à pointer le rôle trouble joué par l’institution : « L’hébergement d’urgence et la lutte contre le mal-logement relevant des compétences de l’État, c’est inadmissible que la préfecture se défausse sur les collectivités et crée elle-même des tensions. »
Les manifestants — parmi lesquels beaucoup de livreurs à vélo — sur le parvis de l’hôtel de ville de Grenoble.Il accuse cette dernière de « complicité objective avec les marchands de sommeil ». Lesquels ont pourtant exploité la misère des familles en leur relouant à prix d’or les logements vides qu’ils s’étaient appropriés illégalement. Et en les menaçant. Mais au lieu de sévir contre ces individus, « l’État a préféré expulser les victimes », s’indigne le responsable communiste, constatant que cette position n’est « pas nouvelle » — référence au module de prise de rendez-vous en ligne pour le renouvellement des titres de séjour.
Jérémie Giono s’interroge en outre sur les réels objectifs poursuivis par les services préfectoraux à quelques mois des élections municipales, allant jusqu’à évoquer une « préfecture politisée. Elle ne gère pas les problèmes, fabrique des crises, attise les divisions et le racisme », égrène-t-il. Tout cela, assure le secrétaire départemental, « pour déstabiliser la gauche ».
De son côté, Raphaël Beth incite les mairies qui se montreraient hésitantes à « prendre les devants et financer les hébergements, puis derrière envoyer la facture à l’État. Les tribunaux suivent », affirme-t-il. La ville de Grenoble l’a déjà expérimenté, tout comme, de manière plus importante, « la ville de Rennes et surtout la communauté d’agglomération du Pays basque qui a fait un recours et a vu l’État condamné à lui reverser un million d’euros ».
Au mégaphone, Mohamed Fofana, secrétaire général du syndicat CGT des livreurs à vélo et président de l’association Adali.Les quelque 180 occupants sont plus que jamais déterminés à ne pas céder d’un pouce. « Tant que les bâtiments vides ne seront pas réquisitionnés, on ne bougera pas de la Métro », prévient ainsi Mohamed Fofana. Il en va, selon le livreur, de « la dignité et du respect des droits humains » de ces familles.
Appelant la population à la solidarité, Raphaël Beth rappelle quant à lui une évidence : les Grenoblois sont bien contents de trouver ces femmes pour faire le ménage dans les bureaux ou ces hommes (en majorité livreurs à vélo pour les plateformes comme Uber Eats ou Deliveroo) pour leur livrer des repas à domicile à toute heure, « qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige ».
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Publié le 24.11.2025 à 12:16
Manuel Pavard
« Mehdi est mort pour rien ». Des mots prononcés par Amine Kessaci et repris par Amandine Demore, ce samedi 22 novembre, devant les personnes réunies sur le parvis de l’hôtel de ville. La maire PCF d’Échirolles avait, comme ses homologues de Grenoble ou Meylan, tenu à répondre à l’appel du militant écologiste marseillais Amine Kessaci, qui souhaitait voir se tenir des rassemblements partout en France, en hommage à son petit frère Mehdi et à toutes les victimes du narcotrafic. Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné par deux hommes à moto, le 13 novembre, à Marseille, mais la justice étudie la piste d’un « crime d’intimidation » dont la véritable cible serait son frère, figure médiatique de la lutte contre le narcobanditisme.
Aujourd’hui, aucun territoire ne semble épargné par le phénomène, comme l’a souligné Amandine Demore dans son discours. « Il est grand temps que l’État agisse car à chaque nouveau mort, à chaque nouvelle victime innocente, nous voyons la même émotion, la même colère, parfois la même désespérance, a‑t-elle déploré. Mais il faut que notre pays ne se laisse pas enfermer dans le piège du narcotrafic, comme d’autres pays. Il est encore temps. »
Amandine Demore a appelé l’État à agir dès maintenant, dans son discours. © Salima Nekikeche / Communication ville d’EchirollesL’édile a insisté sur sa détermination et son refus de « la résignation ». Hors de question « de baisser la tête », a‑t-elle affirmé. « Nous refusons qu’un assassinat efface la voix de ceux qui se battent pour la dignité, pour la paix, pour le vivre ensemble. Nous serons là, nous ne lâcherons rien », a prévenu Amandine Demore, avant une minute de silence, qui a ponctué cet émouvant rassemblement solennel.
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