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27.11.2025 à 11:32

On vient vous parler de comment vit Regards

la Rédaction
La newsletter du 27 novembre 📨
Texte intégral (1486 mots)

La newsletter du 27 novembre 📨

par Catherine Tricot et Pablo Pillaud-Vivien

On vient vous parler de comment vit Regards.

Jour après jour, avec Regards, nous tentons de rendre compréhensibles ces temps troublés et inquiétants. Et de nous situer dans ce moment.  

La newsletter de Regards est de plus en plus lue et participe au débat, notamment à gauche. Initiée il y a 18 mois, elle devient la locomotive de notre site qui connaît une nouvelle fréquentation pour ses publications. Regards.fr c’est aussi les vidéos où nous donnons la parole à des acteurs, des intellectuels, des militants. Nous accueillons de nombreuses tribunes et podcasts… Le débrief s’est installé chaque week-end pour décrypter la semaine politique.

Évidemment, Regards est un mensuel et une revue qui permettent de nous détacher de l’actualité immédiate pour mieux comprendre notre moment.

Enfin Regards, c’est une présence soutenue sur les réseaux sociaux, sur les radios et télés, dans les émissions politiques, de débat, de culture. Arnaud Viviant, Rokhaya Diallo, Pablo Pillaud-Vivien et Catherine Tricot sont des visages identifiés par leur paroles singulières.

Pour suivre au quotidien l’actualité américaine, nous avons noué une relation avec un traducteur, Baptiste Orliange.

Par mesure de sécurité et de précaution, nous avons déménagé le site regards.fr. Historiquement installé chez AWS aux Etats-Unis, nous l’avons fait migrer chez un nouvel hébergeur en France. Ce chantier a été long, réussi… et onéreux.

Toutes nos publications, nombreuses, sont depuis toujours en accès libre. Mais si c’est gratuit pour vous, c’est en vérité coûteux : salaires et piges, locaux et coûts informatiques… Or nous vivons pour une part essentielle des abonnements à la revue et de vos dons. 

En 2024, vous nous avez apporté près de 100 000 euros de dons : ils sont décisifs.

Ces dons, pour l’essentiel, passent par Presse et pluralisme, organisme contrôlé par l’État. Cela vous permet de défiscaliser 66% du montant. Ainsi, si vous nous versez 30 euros, cela vous coûte 10 euros car 20 euros seront déduits de vos impôts. Choisissez le montant et le rythme de votre soutien : annuel ou mensuel. C’est facile : carte bancaire, virement, Paypal ou chèque.

Nous vous savons très sollicités en ce mois de décembre. C’est aussi particulièrement crucial pour Regards.

Nous comptons vraiment sur vous,

Haut les cœurs !

Catherine Tricot et Pablo Pillaud-Vivien

🔴 FAUSSE SURPRISE DU JOUR

Sur CNews, l’extrême droite le jour, la gauche la nuit

Reporters sans frontières a sorti une enquête édifiante ce mercredi. Sur CNews, aux heures de grande écoute, entre 7 et 10h et entre 18 et 21h, l’extrême droite (RN et Philippe de Villiers) concentre 40,6% du temps d’antenne lorsque la gauche seulement 15,4%. Mais ne vous inquiétez pas, cher Arcom, entre minuit et 7h du matin (c’est-à-dire quand plus personne n’est devant sa télé NDLR), la gauche passe à 60,1% contre 1,6% pour l’extrême droite ! Toujours selon RSF, sur LCI, un tiers des invités en plateau sont des journalistes du Figaro. Ainsi va le pluralisme. Mais y’a des alternatives : par exemple, Regards que vous pouvez soutenir ici !

P.P.-V.

ON VOUS RECOMMANDE…

On ne veut pas être insistants… mais y’a le feu au lac médiatique ! On vous recommande ce Complément d’enquête de France 2 ce soir : Des infos ou désinfo ? La méthode CNews. Retour sur les manquements et les obsessions de la chaîne de Bolloré, entre désinformation et manque de pluralisme… mais aussi sur les raisons de son succès. Au cœur de cette enquête : Pascal Praud, présentateur vedette de la chaîne, qui, à l’été 2024, s’est vu proposer la modique somme d’un million d’euros par an par Rodolphe Saadé pour venir sur BFMTV. Tout. Va. Bien.

Si vous voulez soutenir un média indépendant, c’est toujours par ici !

C’EST CADEAU 🎁🎁🎁

Et oui, à Regards, on est vénal. Hihihi, donnez ici !

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26.11.2025 à 11:15

Audiovisuel public : l’intelligence ou la capitulation

Pablo Pillaud-Vivien
Alors que l’extrême droite rêve de museler l’audiovisuel public et que les gouvernements l’asphyxient doucement, une alternative existe : réaffirmer une information critique et éclairante. L’actuelle commission d’enquête contre l’audiovisuel public version Ciotti n’est pas un simple épisode parlementaire : c’est une pièce de plus dans la grande bataille pour affaiblir ce qui résiste à…
Texte intégral (979 mots)

Alors que l’extrême droite rêve de museler l’audiovisuel public et que les gouvernements l’asphyxient doucement, une alternative existe : réaffirmer une information critique et éclairante.

L’actuelle commission d’enquête contre l’audiovisuel public version Ciotti n’est pas un simple épisode parlementaire : c’est une pièce de plus dans la grande bataille pour affaiblir ce qui résiste à la marchandisation intégrale de l’information. Après la disqualification des syndicats, la mise au pas de l’université et la stigmatisation des associations, voici venu le tour de la radio et de la télévision publiques. Logique.


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Pour l’extrême droite, il ne s’agit pas ici de « réformer » mais bien de délégitimer, de marteler que France Télévisions et Radio France seraient des bastions idéologiques, des repaires de « bobos », des officines de gauche financées par l’impôt. L’objectif est limpide : préparer l’opinion à leur démantèlement ou à leur mise sous tutelle par des intérêts privés amis. Bollorisation ou disparition, voilà l’horizon défendu par Éric Ciotti et Marine Le Pen.

Pour la droite, et en particulier pour l’actuelle ministre de la culture, la solution s’appelle holding : une structure unique censée chapeauter l’ensemble de l’audiovisuel public. Présentée comme une modernisation rationnelle, cette réforme apparaît comme la première étape d’un processus bien plus brutal : mutualisations forcées, réduction drastique des effectifs et affaiblissement méthodique des missions. Autrement dit, une mise sous tension permanente du service public, prélude à sa normalisation libérale, et qui sait, à son démantèlement pur et simple après constat d’échec.

Le service public, pris en étau entre la pression politique et la course à l’audience, a choisi d’euthanasier toute aspérité, tout humour mordant, toute parole réellement critique. À force de vouloir plaire à tout le monde, on finit par ne plus déranger personne. Et donc par ne plus servir à grand-chose.

Face à cela, la gauche a raison de défendre l’audiovisuel public. Mais elle aurait tort de le faire comme on défend un totem sacré. Le service public de l’information n’est pas un temple immaculé et hors du monde : il est traversé de tensions, de renoncements comme de véritables trésors, de professionnalisme comme de tentations populistes.

La critique globale des journalistes relève du ressentiment. Mais on ne peut ignorer ce qui gronde à l’intérieur même de ces maisons : les lettres des sociétés de personnel, les communiqués de syndicats, les témoignages de journalistes qui parlent d’une perte de sens, d’un cap éditorial flou, d’une gestion managériale brutale.

Et puis, il y a ces évictions, ces silences, ces disparitions progressives de voix classées à gauche : Daniel Mermet hier, Guillaume Meurice récemment. Comme si le service public, pris en étau entre la pression politique et la course à l’audience, avait choisi d’euthanasier toute aspérité, tout humour mordant, toute parole réellement critique. À force de vouloir plaire à tout le monde, on finit par ne plus déranger personne. Et donc par ne plus servir à grand-chose.

Mais le problème est plus profond. Défendre l’audiovisuel public ne signifie pas vouloir en faire une télévision ou une radio de gauche. Cette idée est absurde, contre-productive et dangereuse. L’argent public doit financer une information rigoureuse, exigeante, éclairante. Une information qui aide à comprendre.

Pour cela, France Télévisions et Radio France ont besoin de moyens qu’on ne cesse de leur retirer depuis des années, les contraignant à tailler dans tous les effectifs dont ceux des rédactions. L’enquête en fait les frais ; elle est pourtant au cœur de leurs missions et sur laquelle leurs analyses peuvent ensuite s’appuyer.

Aujourd’hui, le champ médiatique est saturé par ceux qui font l’inverse : transformer chaque fait divers, sans enquête ni intelligence, en symptôme civilisationnel, chaque crise en panique idéologique, chaque débat en exutoire haineux. L’extrême droite prospère sur la bêtise organisée, sur la simplification brutale, sur l’exploitation méthodique des angoisses sociales. Mais attention : France Télévisions et Radio France ne peuvent être le miroir inversé de cette déferlante. Être « contre » CNews ne fait pas un projet éditorial. Comme être « contre » le RN ne fait pas un projet politique. 

Le service public doit produire du savoir là où d’autres fabriquent de l’opinion industrielle. C’est là que se joue l’essentiel : pas dans une guerre de camps médiatiques, mais dans un choix de civilisation. Veut-on d’un espace public gouverné par la peur, la simplification et le ressentiment ? Ou d’un espace nourri par la connaissance, la rigueur et le débat réel ? Défendre l’audiovisuel public, c’est le défendre pour ce qu’il doit être : un lieu où l’on apprend à penser, pas un simple rempart contre pire que soi.

26.11.2025 à 11:02

Audiovisuel public : l’intelligence ou la capitulation

la Rédaction
La newsletter du 26 novembre 📨
Texte intégral (1884 mots)

La newsletter du 26 novembre 📨

par Pablo Pillaud-Vivien

Alors que l’extrême droite rêve de museler l’audiovisuel public et que les gouvernements l’asphyxient doucement, une alternative existe : réaffirmer une information critique et éclairante.

L’actuelle commission d’enquête contre l’audiovisuel public version Ciotti n’est pas un simple épisode parlementaire : c’est une pièce de plus dans la grande bataille pour affaiblir ce qui résiste à la marchandisation intégrale de l’information. Après la disqualification des syndicats, la mise au pas de l’université et la stigmatisation des associations, voici venu le tour de la radio et de la télévision publiques. Logique.

Pour l’extrême droite, il ne s’agit pas ici de « réformer » mais bien de délégitimer, de marteler que France Télévisions et Radio France seraient des bastions idéologiques, des repaires de « bobos », des officines de gauche financées par l’impôt. L’objectif est limpide : préparer l’opinion à leur démantèlement ou à leur mise sous tutelle par des intérêts privés amis. Bollorisation ou disparition, voilà l’horizon défendu par Éric Ciotti et Marine Le Pen.

Pour la droite, et en particulier pour l’actuelle ministre de la culture, la solution s’appelle holding : une structure unique censée chapeauter l’ensemble de l’audiovisuel public. Présentée comme une modernisation rationnelle, cette réforme apparaît comme la première étape d’un processus bien plus brutal : mutualisations forcées, réduction drastique des effectifs et affaiblissement méthodique des missions. Autrement dit, une mise sous tension permanente du service public, prélude à sa normalisation libérale, et qui sait, à son démantèlement pur et simple après constat d’échec.

Face à cela, la gauche a raison de défendre l’audiovisuel public. Mais elle aurait tort de le faire comme on défend un totem sacré. Le service public de l’information n’est pas un temple immaculé et hors du monde : il est traversé de tensions, de renoncements comme de véritables trésors, de professionnalisme comme de tentations populistes.

La critique globale des journalistes relève du ressentiment. Mais on ne peut ignorer ce qui gronde à l’intérieur même de ces maisons : les lettres des sociétés de personnel, les communiqués de syndicats, les témoignages de journalistes qui parlent d’une perte de sens, d’un cap éditorial flou, d’une gestion managériale brutale.

Et puis, il y a ces évictions, ces silences, ces disparitions progressives de voix classées à gauche : Daniel Mermet hier, Guillaume Meurice récemment. Comme si le service public, pris en étau entre la pression politique et la course à l’audience, avait choisi d’euthanasier toute aspérité, tout humour mordant, toute parole réellement critique. À force de vouloir plaire à tout le monde, on finit par ne plus déranger personne. Et donc par ne plus servir à grand-chose.

Mais le problème est plus profond. Défendre l’audiovisuel public ne signifie pas vouloir en faire une télévision ou une radio de gauche. Cette idée est absurde, contre-productive et dangereuse. L’argent public doit financer une information rigoureuse, exigeante, éclairante. Une information qui aide à comprendre.

Pour cela, France Télévisions et Radio France ont besoin de moyens qu’on ne cesse de leur retirer depuis des années, les contraignant à tailler dans tous les effectifs dont ceux des rédactions. L’enquête en fait les frais ; elle est pourtant au cœur de leurs missions et sur laquelle leurs analyses peuvent ensuite s’appuyer.

Aujourd’hui, le champ médiatique est saturé par ceux qui font l’inverse : transformer chaque fait divers, sans enquête ni intelligence, en symptôme civilisationnel, chaque crise en panique idéologique, chaque débat en exutoire haineux. L’extrême droite prospère sur la bêtise organisée, sur la simplification brutale, sur l’exploitation méthodique des angoisses sociales. Mais attention : France Télévisions et Radio France ne peuvent être le miroir inversé de cette déferlante. Être « contre » CNews ne fait pas un projet éditorial. Comme être « contre » le RN ne fait pas un projet politique. 

Le service public doit produire du savoir là où d’autres fabriquent de l’opinion industrielle. C’est là que se joue l’essentiel : pas dans une guerre de camps médiatiques, mais dans un choix de civilisation. Veut-on d’un espace public gouverné par la peur, la simplification et le ressentiment ? Ou d’un espace nourri par la connaissance, la rigueur et le débat réel ? Défendre l’audiovisuel public, c’est le défendre pour ce qu’il doit être : un lieu où l’on apprend à penser, pas un simple rempart contre pire que soi.

Pablo Pillaud-Vivien

🔴 APPEL DU JOUR

Pour la libération du journaliste Christophe Gleizes

Christophe Gleizes, journaliste français travaillant pour les magazines So Foot et Society, est emprisonné en Algérie depuis la fin du mois de juin. Il a été condamné à sept ans de prison ferme pour apologie du terrorisme. Son crime : avoir réalisé un reportage auprès du club de foot de la Jeunesse Sportive de Kabylie. Il s’avère que le président de ce club est aussi responsable du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie, que l’Algérie considère comme une organisation terroriste. Ce mercredi, la plupart des organisations professionnelles et syndicats de journalistes lancent un appel pour sa libération : « Un reporter qui interroge un responsable sportif n’est pas complice de ses positions : il fait son travail ». Regards se joint à l’exigence de respect de la presse et à l’exigence de la libération immédiate du journaliste. Christophe Gleizes est l’un des 361 journalistes emprisonnés dans le monde, selon le décompte le plus récent du Comité de protection des journalistes (CPJ, fin 2024).

L.L.C.

ON VOUS RECOMMANDE…

« Telegram, l’affaire Pavel Dourov », sur Arte. Un documentaire très bien fichu sur le milliardaire russe, propriétaire de l’application Telegram. Cette messagerie cryptée est souvent au cœur de tourmentes pour son implication avec le monde de la cryptomonnaie et tout ce qu’il charrie de grand banditisme et de pédocriminalité. Arte pose des bonnes questions et achève son reportage sur une ouverture : le problème, c’est que Telegram appartient à une seule personne alors qu’il est utilisé par près d’un milliard de personnes. Ne faudrait-il pas penser à sa socialisation ? Super bonne idée, et si on y pensait aussi pour les deux autres grandes applis concurrentes, l’américaine WhatsApp (Meta-Facebook) et l’israélienne Signal ? Chiche ?

C’EST CADEAU 🎁🎁🎁

L’égalité, ça progresse… Mais on part de loin ! Repérée par le média Simone.

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25.11.2025 à 16:15

« À Paris, les manifs pour la Palestine doivent être à la hauteur des autres capitales européennes »

Pablo Pillaud-Vivien
Anne Tuaillon, présidente de l’Association France Palestine Solidarité, est l’invitée de #LaMidinale. Ce samedi 29 novembre, 85 organisations dont LFI, le PS, le PCF, les Écologistes, la CGT et beaucoup d’autres, organisent une grande mobilisation pour la défense des droits du peuple palestinien sur la base du droit international.
Lire plus (139 mots)

Anne Tuaillon, présidente de l’Association France Palestine Solidarité, est l’invitée de #LaMidinale. Ce samedi 29 novembre, 85 organisations dont LFI, le PS, le PCF, les Écologistes, la CGT et beaucoup d’autres, organisent une grande mobilisation pour la défense des droits du peuple palestinien sur la base du droit international.

25.11.2025 à 14:54

L’ATTAQUE DES CLONES

la Rédaction
SOMMAIRE Pendant ce temps-là, sur la planète Gauche Déjà disponible pour les abonnées !Et pour les autres, ça se passe dans notre boutique 😉 MENSUEL –NOVEMBRE 25 – 4 € en version numérique
Lire plus (257 mots)

SOMMAIRE

  • Après la censure, un « socle commun » avec le RN ?
    (4 décembre 2024, censure de Michel Barnier)
  • Le pacte de « non-censure », risque pour la réhabilitation du contre-pouvoir parlementaire
    (8 décembre 2024)
  • On ne déteste pas toujours les lundis
    (8 septembre 2025, censure de François Bayrou)
  • Les premiers ministres se succèdent et rejouent la même scène : tendre la main au RN
    (septembre 2025, nomination de Sébastien Lecornu)
  • Le gouvernement Lecornu !
  • Ce désordre a-t-il une fin ?

Pendant ce temps-là, sur la planète Gauche

  • Lettre aux socialistes
  • Face à la crise : à gauche, toute la gauche
  • Réforme des retraites : quand la Macronie tend le piège, la gauche cherche la sortie

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25.11.2025 à 12:37

La tentation du deal

Pablo Pillaud-Vivien
Des socialistes et des écologistes imaginent ouvertement un compromis avec le bloc central. À quel prix ? Celui d’un renoncement stratégique majeur et d’un brouillage politique assumé. Il y a des moments où la politique cesse d’être un combat pour devenir un exercice de contorsion. Face au blocage budgétaire qui s’annonce et à l’épouvantail brandi…
Texte intégral (798 mots)

Des socialistes et des écologistes imaginent ouvertement un compromis avec le bloc central. À quel prix ? Celui d’un renoncement stratégique majeur et d’un brouillage politique assumé.

Il y a des moments où la politique cesse d’être un combat pour devenir un exercice de contorsion. Face au blocage budgétaire qui s’annonce et à l’épouvantail brandi de la loi spéciale, voilà qu’une partie de la gauche parlementaire s’improvise VRP du compromis avec le bloc central. Un deal. Un arrangement pour doter la France d’un budget.


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Pour faire passer cette pilule macroniste, plusieurs chemins sont imaginés : loi spéciale, ordonnances, etc. Mais, en toute hypothèse, cela suppose un accord entre socialistes et bloc central (sympa, les socialistes espèrent embarquer communistes et écologistes). Ce serait un chemin ouvert vers la grande confusion. Et ceux qui s’y préparent le savent. Le sénateur socialiste Patrick Kanner en appelle au retour du 49.3 sur un texte négocié. Les socialistes pourraient alors s’abstenir de voter la motion de censure consécutive. Il n’est pas le seul. Les députés socialistes Philippe Brun et Laurent Baumel sont sur la même longueur d’onde : mieux vaut un mauvais compromis qu’un conflit clair suivi d’une dissolution.

La social-démocratie, sous ses diverses histoires, n’est pas en train d’inventer une autre façon d’être de gauche ; elle se concentre sur la – vaine – réhabilitation du bilan Hollande, préalable à la légitimation de leur candidature. On leur souhaite bien du plaisir.

Même mouvement du côté de l’écologiste Yannick Jadot. Il plaide désormais pour un « accord global » avec le bloc central. Cette évolution s’inscrit dans une crise plus profonde qui traverse les Écologistes. Plusieurs figures historiques travaillent à la « normalisation » de l’écologie politique. L’ancien candidat à la présidentielle assume son côté « réalo » et théorise une écologie dite responsable. Quant à Cécile Duflot, dans Gagner, son dernier livre, elle revient avec autocritique sur son départ du gouvernement Valls-Hollande. Elle va jusqu’à mettre en cause « la vieille tradition anarcho-syndicaliste associant trop facilement la répression à l’usage légitime de la violence d’État ». On se souvient de son émotion après la mort de Rémi Fraisse. Mais ça, c’était avant. Son refus d’appartenir à l’équipe de Manuel Valls faisait écho aux frondeurs socialistes. Il aurait, selon l’ancienne ministre, gâché les chances d’un bon gouvernement de gauche. La social-démocratie, sous ses diverses histoires, n’est pas en train d’inventer une autre façon d’être de gauche ; elle se concentre sur la – vaine – réhabilitation du bilan Hollande, préalable à la légitimation de leur candidature. On leur souhaite bien du plaisir.

Dans le désordre politique actuel, ça s’agite donc à gauche. Car enfin, de quelle culture politique se prévalent-ils ? De que compromis parlent-ils ? Tout part de leur panne politique. La stabilité devient leur bouée de sauvetage et leur horizon. Et, aujourd’hui, celle-ci passe par le vote du budget qui, rappelons-le, a été construit par le bloc central selon ses logiques de compétitivité et de réduction de tous les investissements d’avenir. Et certains voudraient que la gauche signe au bas de la page, quitte à maintenir le chaos social et écologique, bien plus dangereux, selon eux, que le bazar politique ?

La gauche n’en sortirait pas grandie : elle n’en serait que plus floue, illisible, disqualifiée.

25.11.2025 à 12:35

La tentation du deal

la Rédaction
La newsletter du 25 novembre 📨
Texte intégral (1325 mots)

La newsletter du 25 novembre 📨

par Pablo Pillaud-Vivien

Des socialistes et des écologistes imaginent ouvertement un compromis avec le bloc central. À quel prix ? Celui d’un renoncement stratégique majeur et d’un brouillage politique assumé.

Il y a des moments où la politique cesse d’être un combat pour devenir un exercice de contorsion. Face au blocage budgétaire qui s’annonce et à l’épouvantail brandi de la loi spéciale, voilà qu’une partie de la gauche parlementaire s’improvise VRP du compromis avec le bloc central. Un deal. Un arrangement pour doter la France d’un budget.

Pour faire passer cette pilule macroniste, plusieurs chemins sont imaginés : loi spéciale, ordonnances, etc. Mais, en toute hypothèse, cela suppose un accord entre socialistes et bloc central (sympa, les socialistes espèrent embarquer communistes et écologistes). Ce serait un chemin ouvert vers la grande confusion. Et ceux qui s’y préparent le savent. Le sénateur socialiste Patrick Kanner en appelle au retour du 49.3 sur un texte négocié. Les socialistes pourraient alors s’abstenir de voter la motion de censure consécutive. Il n’est pas le seul. Les députés socialistes Philippe Brun et Laurent Baumel sont sur la même longueur d’onde : mieux vaut un mauvais compromis qu’un conflit clair suivi d’une dissolution.

Même mouvement du côté de l’écologiste Yannick Jadot. Il plaide désormais pour un « accord global » avec le bloc central. Cette évolution s’inscrit dans une crise plus profonde qui traverse les Écologistes. Plusieurs figures historiques travaillent à la « normalisation » de l’écologie politique. L’ancien candidat à la présidentielle assume son côté « réalo » et théorise une écologie dite responsable. Quant à Cécile Duflot, dans Gagner, son dernier livre, elle revient avec autocritique sur son départ du gouvernement Valls-Hollande. Elle va jusqu’à mettre en cause « la vieille tradition anarcho-syndicaliste associant trop facilement la répression à l’usage légitime de la violence d’État ». On se souvient de son émotion après la mort de Rémi Fraisse. Mais ça, c’était avant. Son refus d’appartenir à l’équipe de Manuel Valls faisait écho aux frondeurs socialistes. Il aurait, selon l’ancienne ministre, gâché les chances d’un bon gouvernement de gauche. La social-démocratie, sous ses diverses histoires, n’est pas en train d’inventer une autre façon d’être de gauche ; elle se concentre sur la – vaine – réhabilitation du bilan Hollande, préalable à la légitimation de leur candidature. On leur souhaite bien du plaisir.

Dans le désordre politique actuel, ça s’agite donc à gauche. Car enfin, de quelle culture politique se prévalent-ils ? De que compromis parlent-ils ? Tout part de leur panne politique. La stabilité devient leur bouée de sauvetage et leur horizon. Et, aujourd’hui, celle-ci passe par le vote du budget qui, rappelons-le, a été construit par le bloc central selon ses logiques de compétitivité et de réduction de tous les investissements d’avenir. Et certains voudraient que la gauche signe au bas de la page, quitte à maintenir le chaos social et écologique, bien plus dangereux, selon eux, que le bazar politique ?

La gauche n’en sortirait pas grandie : elle n’en serait que plus floue, illisible, disqualifiée.

Pablo Pillaud-Vivien

🔴 ABERRATION DU JOUR

Budget : non… pas Groucho Marx !

« Un budget Frankenstein ? Non Groucho Marx », titre Dominique Seux dans l’éditorial des Échos de ce lundi 24 novembre. Désolé Dominique ! Certes, on vous reconnaît de plus en plus par votre tendance à tout oser. Comme d’exonérer le gouvernement de toute responsabilité dans le naufrage du débat budgétaire. Ou comme votre adoration soudaine d’Amélie de Montchalin, nouvelle idole de la politique de la raison. Mais utiliser Groucho Marx de préférence à Frankenstein pour qualifier l’évolution parlementaire du budget, c’est trop. Quand on se réfère à quelqu’un, il vaut mieux ne pas le trahir. Non, Groucho Marx (en réalité les Frères Marx), ce n’est pas « l’aberrant et l’absurde » qui se seraient fait la courte échelle dans le débat budgétaire. L’absurde chez Groucho Marx et ses frères n’est jamais aberrant. Ce qui les caractérise, c’est la subversion et la jubilation. Amis lecteurs, vérifiez le par vous-même si vous ne les connaissez pas encore (ici ou çà ou même ).

Bernard Marx

ON VOUS RECOMMANDE…

Le documentaire « On n’est pas des racailles » sur France Télévisions interroge le poids des mots politiques, la construction médiatique des banlieues, et la puissance du récit personnel pour réparer. Un voyage sensible et lucide, où la petite caméra d’hier éclaire, vingt ans plus tard, la grande Histoire.

C’EST CADEAU 🎁🎁🎁

À la Sainte Catherine, tout arbre prend racine.

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25.11.2025 à 12:31

Est-ce qu’on a perdu Ruffin ?

Catherine Tricot
François Ruffin est un homme de surprise. C’est son style. Alors, quand il vote la suspension de la réforme des retraites, beaucoup se sont demandé où était passé le Ruffin de Nuit debout. « Je suis social-démocrate » : en novembre 2022, la Une du Nouvel Obs avait fait grand bruit. Le député-reporter n’avait pas dit exactement cela :…
Texte intégral (2355 mots)

François Ruffin est un homme de surprise. C’est son style. Alors, quand il vote la suspension de la réforme des retraites, beaucoup se sont demandé où était passé le Ruffin de Nuit debout.

« Je suis social-démocrate » : en novembre 2022, la Une du Nouvel Obs avait fait grand bruit. Le député-reporter n’avait pas dit exactement cela : il se déclarait social et démocrate. Qu’à cela ne tienne, François Ruffin modifiait son image, troublait ses soutiens.

Que devenait celui qui, associé à l’économiste « plus radical tu meurs » Frédéric Lordon, proclamait « Plus jamais PS » ? C’était le serment prononcé devant et avec une foule mobilisée contre les lois Travail du ministre de l’économie, Emmanuel Macron, et son prête-nom Myriam El Khomri. C’était pendant les « Nuits debout », invention toute ruffinienne qui renouvelait les formes d’engagements en ces années 2016.

Un an plus tard, c’est contre l’élection d’Emmanuel Macron que François Ruffin se lève. Au soir du débat entre le candidat et Marine Le Pen, il écrit un texte qui marquera ses lecteurs. Il répète 20 fois à l’endroit de celui qui va être élu président de la République « Vous êtes haï » : « Vous êtes haï, monsieur Macron, et je suis inquiet pour mon pays […] que la « fracture sociale » ne tourne au déchirement. Vous portez en vous la guerre sociale comme la nuée porte l’orage. À bon entendeur. » Toute cette missive contient ce que va faire et être François Ruffin : le porte-parole de ceux qui ont souffert de la mondialisation, de l’Europe libérale. Il va le faire d’une façon qui lui est propre : comme un journaliste et comme un artiste-réalisateur. Chez François Ruffin, la forme c’est le fond. Il ne parle pas des gens en général, il leur donne un prénom, un métier. Il parfait son image d’homme enraciné et proche du quotidien en débarquant à la tribune de l’Assemblée nationale avec un maillot de foot pour défendre les clubs amateurs et trouver les mots qui le racontent. Il n’est pas de Paris et ne parle pas la langue Science Po.

La gauche à l’ancienne

Ainsi François Ruffin s’est bâti une popularité et une visibilité. Son identité politique va de plus en plus s’autonomiser de celle de La France insoumise. Est-ce avec le tournant de 2019 que cela vrille entre François Ruffin et le mouvement de Jean-Luc Mélenchon ? Alors que le leader insoumis, hier à cheval sur la laïcité façon intransigeante, fait le choix de participer à une manifestation contre l’islamophobie, François Ruffin sèche : il a foot. Faux et ridicule de prétendre qu’il est raciste comme l’ont scandé des manifestants ce soir de juin 2024, place de la mairie de Montreuil. Mais vrai qu’il n’adhère pas au virage stratégique de La France insoumise. François Ruffin ne comprend pas vraiment les questions « identitaires » : elles ne font pas partie de son expérience et restent largement hors de son champ. Le féminisme, les mouvements décoloniaux, les luttes LGBT…

Il n’est pas contre mais ce n’est pas sa came. « Il m’a fallu changer et je ne suis pas au bout de mon chemin », reconnait-il volontiers. Il pense que c’est par la remise au centre de la question sociale que l’on surmontera les divisions qui rongent le peuple. Il traque Bernard Arnault dans « Merci Patron ! » pour donner un visage aux riches et aux puissants : que la colère puisse se cristalliser sur eux et non sur « les cassos » et sur les immigrés. C’est donc du social qu’il parle et il le fait dans des termes connus. François Ruffin fait dans le classique : « Depuis Marx et Jaurès, la gauche, notre gauche, rassemblait le peuple sur une base de classe, d’intérêts matériels,les ‘travailleurs« . Dans une note de blog, Manuel Bompard, le coordinateur de LFI, lui répond : « En refusant que l’on puisse aussi construire des rapports de classe par la mobilisation des affects, et pas seulement dans la conflictualité capital/travail, il fait preuve d’une conception économiciste du marxisme extrêmement réductrice. En assumant de positionner le racisme en dessous du ‘social’ dans la pile des priorités, il montre son incompréhension de la dimension pleinement sociale de la lutte antiraciste. »

Si François Ruffin n’est pas tellement intersectionnel, il est très gilet jaune. Il est parmi les premiers à se rendre sur les ronds-points avec sa caméra. Il dira souvent sa joie de voir ceux qu’il considère comme les siens relever la tête.

En parallèle, il développe une approche singulière des enjeux écologiques. François Ruffin croit à l’alliance entre une jeunesse éduquée critique du consumérisme, et le monde populaire. Il défend une logique de plafond et de plancher plutôt qu’une limitation par l’argent. Il se montre assez dubitatif sur les technologies, le « technosystème » ; plus volontiers low-tech ; il interroge la question du sens du progrès.

Avec ses vidéos bricolées dans sa cuisine, sa diction saccadée, il construit sa place dans le paysage politique : bien à gauche mais très singulier ; social et quasi décroissant.

En 2022, il repart sous les couleurs de La France insoumise… mais dès l’été, les désaccords se disent, se lisent avec le reste de LFI. Après les 22% de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle et la création de la Nupes, les insoumis installent durablement leur magistère au cœur de la gauche. Leur groupe est passé de 17 à 75 députés. Mais François Ruffin, lui, chagrin, voit l’écart grandir entre « les tours et les bourgs ». « Nous avons des faiblesses géographiques, presque partout hors des métropoles, dans les communes de moins de 100000 habitants. Nous avons une faiblesse sociale, dans le salariat modeste, un peu au-dessus du Smic. Et nous avons une faiblesse démographique, chez les personnes âgées, qui sont de plus en plus nombreuses et qui vont voter. Nous ne serons pas majoritaires sans combler ces lacunes, au moins un peu.La ‘jeunesse et les ‘quartiers populaires ne suffiront pas. » François Ruffin reproche au mouvement de Jean-Luc Mélenchon de ne s’implanter que là où il gagne et d’abandonner trop d’ouvriers au RN.

Le désaccord va se généraliser. Il porte aussi sur la tactique politique. François Ruffin plaide pour que LFI se montre moins clivante, qu’elle exerce sa nouvelle hégémonie politique. « Au lieu de se placer au centre de l’échiquier, LFI s’est mise dans un coin. Elle est même devenue un repoussoir. Elle a ouvert un espace au centre-gauche. » Il fut très modérément écouté. En juillet 2024 c’est la rupture, sanglante. François Ruffin se casse. Et se fait réélire député, seul dans un département devenu terre de force du RN. Il suit ses camarades ex-insoumis au groupe Écologistes – le groupe communiste leur ayant claqué la porte au nez – mais il reste à distance des autres têtes dures : François Ruffin n’a aucun goût pour les réunions et ne veut rien négocier avec Clémentine Autain et Alexis Corbière. Il ne rejoint pas l’Après et crée son parti, « Debout ! ». Il voyagera léger. 

C’est donc d’accord avec lui-même qu’il énonce ses positions protectionnistes. Depuis longtemps « plus nation que commission (européenne) », François Ruffin voit dans la nouvelle ère trumpienne l’occasion de relancer ses propositions : souveraineté et protection sur 100 produits vitaux pour la nation. En tête de liste l’acier, pour avoir les moyens d’une politique industrielle. François Ruffin trace sa route.

Stratégie d’un président-reporter

Son nouvel objectif : gagner la primaire de la gauche non-mélenchoniste. Il nous confiait en septembre 2024 : « Ma mission, c’est que la gauche referme la parenthèse libérale ouverte par le PS en 83 ». François Ruffin a-t-il la stratégie du coucou ? Espère-t-il se faire adouber par les sociaux-démocrates pour mieux les sauver du social libéralisme ? Il en a dérouté plus d’un avec son abstention sur la partie « recettes » du budget de la sécurité sociale et son vote pour la « suspension » de la réforme Borne. Ses arguments en faveur des petits gains ont peiné à convaincre les siens. JMSenaud le lui écrit sur X « Sur les retraites vous m’avez perdu. Bonne route à vous. Je resterai fidèle à vos films ». « Ruffin courbe l’échine, au lieu de combattre. Triste trajectoire de celui qui voulait changer le monde, mais que le monde a changé », écrit un lecteur de Regards, Michel Davesnes.

François Ruffin désarçonne et fâche. Lui, un traître ? Manuel Bompard semble le voir ainsi : « Il est mieux que nos chemins se soient séparés. Car il y a des pentes qui ne trompent pas. On en connaît le point de départ mais pas le point d’arrivée. » 

Manuel Bompard n’a pas tort de relever une inflexion dans le discours de François Ruffin. Loin de ses saillies anticapitalistes, il se dit hanté par ses terres qui ont glissé élection après élections vers le RN tandis que la gauche ne décolle pas. « Je ne veux pas donner l’idée que ma stratégie serait de conquérir les électeurs du RN parce que, malheureusement, nous sommes dans un temps où ça s’est enkysté. Je ne gagne pas sans stratégie électorale dans une circonscription où la gauche fait 25%.« 

Généralisant sa réflexion au niveau national, il écrit dans Ma France, en entier pas à moitié : « La bataille, c’est d’attirer les particules qui décollent du bloc central, les gros morceaux maintenant […] Se les représenter, socialement, comme des bourgeois, comme des chirurgiens qui prendraient leurs vacances à la Baule, avec un voilier dans le port et un pull-over autour du cou, c’est du n’importe quoi. Ces gens, jusqu’alors dans le ventre moi, que recherchent-ils ? Pas la Révolution, je ne crois pas. Plutôt stabilité, sécurité, protection. »

Comme il le répète lors de l’émission « Au poste », il « cherche ». Son inspiration, il la trouve en ce moment dans le CNR, le conseil national de la résistance de 1944 qui réunissait les résistants communistes, gaullistes, chrétiens : « Il nous faut désormais un appel à tous les républicains authentiques, aux voix et personnalités libres des chapelles de partis, libres des puissances de l’argent, libres des ingérences étrangères, tous ceux qui n’ont pas sombré avec la Macronie agonisante ou sur la pente du pire ». François Ruffin veut une nouvelle grande alliance transcendant les clivages et les partis. Dur à avaler.

La clé de compréhension de la nouvelle stratégie est explicitée dans une note de blog du 11 octobre. François Ruffin est alarmiste : « Nous subissons une triple offensive, de nature diverse : les drones russes, les surcapacités industrielles chinoises, l’impérialisme illibéral (pour ne pas dire fasciste) américain ». Face à ces dangers qu’incarne le RN en France, il ne croit pas que l’unité de la gauche suffira. « C’est à une unité du pays, qu’il faut appeler. » L’agitateur se veut grand rassembleur. Il ne croit plus au « barrage », « en défensif ». Pour réveiller l’espoir, il propose deux piliers : « progrès social et indépendance nationale »

Comment remobiliser le peuple ? François Ruffin croit que là réside la clé. Il espère une primaire avec deux millions d’électeurs. « Il faut essayer quelque chose, ordonnait Roosevelt. Le pays ne nous en voudra pas d’avoir échoué, mais il nous en voudra de ne pas avoir essayé. Essayons quelque chose », conclue-t-il dans sa note de blog.

François Ruffin est intellectuellement mobile. Il a été à bonne école avec Jean-Luc Mélenchon. Il bouge sans hésiter. Son discours reste néanmoins identifié autour des enjeux industriels et du combat contre la mondialisation. Convaincra-t-il la France des bourgs, des tours… et des métropoles ? Répondra-t-il aux grands enjeux de l’époque ? Pourra-t-il rassembler, en commençant par les électeurs de la primaire ? Qui vivra verra.

25.11.2025 à 12:30

Immigration : pas de cadeau à l’extrême droite

Roger Martelli
Un récent article du Monde nous explique que « si la gauche veut regagner les classes populaires, elle ne peut plus faire l’impasse sur l’immigration ». Une idée qui n’a rien de neuf et qui sent toujours autant le rance. Consciemment ou non, l’éditorialiste du Monde Philippe Bernard reprend un thème largement développé en Europe selon lequel…
Texte intégral (2761 mots)

Un récent article du Monde nous explique que « si la gauche veut regagner les classes populaires, elle ne peut plus faire l’impasse sur l’immigration ». Une idée qui n’a rien de neuf et qui sent toujours autant le rance.

Consciemment ou non, l’éditorialiste du Monde Philippe Bernard reprend un thème largement développé en Europe selon lequel il ne faut pas laisser à l’extrême droite le monopole de la réduction nécessaire des flux migratoires. Cette idée est une aubaine pour le RN et un gage de déroute, pas seulement pour la gauche, mais pour la démocratie elle-même.

Il y a quelques mois, la Fondation Jean Jaurès publiait une longue contribution collective vantant l’émergence européenne d’une « gauche post-sociétale ». La gauche, expliquaient ses auteurs, n’a pas tiré les conséquences du basculement provoqué par les grandes crises économique, migratoire, territoriale et écologique. Elle a traité à l’ancienne les questions montantes de la sécurité, de l’immigration et de l’identité nationale. Du coup, elle a perdu les classes populaires, laissées en pâture à l’extrême droite. Le but assigné à la gauche serait donc simple et clair : calmer le jeu des crispations culturelles et identitaires et assumer les exigences populaires sur la sécurité et l’immigration, « pour mieux relancer la conflictualité sur l’axe économique et social ».

Où se trouvent les nouveaux modèles du « post-sociétal » ? Au Danemark, en Suède et en Australie, où les sociaux-démocrates prônent désormais une régulation très stricte de l’immigration. Au Royaume-Uni, où le « Blue Labour » de Maurice Glasman veut parler aux « gens ordinaires » autour des valeurs de la famille, du travail et de la communauté. Il influence d’ores et déjà des travaillistes qui, talonnés par le parti de Nigel Farage, ont décidé avec le désastreux Keir Starmer de « reprendre le contrôle des frontières ». Il s’exprime depuis longtemps dans l’Allemagne de Sahra Wagenknecht, qui veut « clairement inverser la politique migratoire [car] nous ne pouvons pas accueillir tout le monde en Allemagne ».

On ne sait si Philippe Bernard se situe explicitement dans ce courant de pensée, mais il ne le contredit pas. La gauche, nous dit-il aujourd’hui, ne veut pas voir que le terreau du vote d’extrême droite se trouve dans la triple préoccupation de la baisse du pouvoir d’achat, de la hausse de l’insécurité et de la croissance de l’immigration. Mais que faudrait-il voir exactement ? Que le pouvoir d’achat baisse parce qu’il y a trop d’assistés, parmi lesquels trop d’étrangers ? Que la montée des violences et de l’insécurité est due avant tout aux résidents étrangers ? Que le risque principal qui nous menace est le séparatisme islamiste ? Qu’il y a trop d’immigrés et qu’ils sont massivement les tenants du terrorisme islamiste ? En bref, ne faudrait-il voir que ce que le RN veut nous mettre devant les yeux ?

Au motif d’enrayer la montée de l’extrême droite, rien ne justifie que l’on entérine si peu que ce soit son fonds de commerce idéologique. Enfourcher les thématiques du sécuritaire et de l’immigration excessive n’empêchera pas un ascendant du lepénisme construit en longue durée. Elle ne fera que le légitimer un peu plus.

L’éditorialiste s’appuie sur le récent sondage de l’Ifop, consacré au rapport à l’islam et à l’islamisme des musulmans de France. Ce document a fait d’ores et déjà l’objet de polémiques sur ses résultats et sur ses présupposés1. Il contient certes des éléments préoccupants, confortant l’idée de formes de radicalisation, notamment dans les jeunes générations, une « radicalisation » qui n’est hélas pas propre au seul univers mental de l’islam. Mais, si l’on s’en tient aux données les plus solides, que constate-t-on ? Que sur 14 000 personnes interrogées, 7% se disent de religion musulmane et que, sur ces 7%, 38% (soit environ 2,6% des sondés) approuvent « au moins quelques-unes des positions des islamistes » et 8% (soit 0,6% du panel) en approuvent « la plupart ». Cela peut à juste titre inquiéter, comme tout potentiel de violence extrême. 

Mais, sauf à penser qu’il existe une chaîne nécessaire qui relie le croyant, le fidèle, le fanatique et le criminel, il est périlleux de faire, d’un nombre restreint d’indices, le signe annonciateur d’un cataclysme inévitable, légitimant toutes les peurs. À bien y réfléchir, le nombre et la virulence d’un fanatisme d’extrême droite peuvent, dans une société divisée et perturbée, être tenus pour au moins aussi inquiétants que ceux d’une intransigeance religieuse sans garde-fou.

Le plus préoccupant, dans l’article du Monde, est ailleurs. Philippe Bernard commence par la cécité supposée de la gauche sur la trilogie des peurs françaises. Mais les deux tiers de son article sont concentrés sur la troisième peur, celle d’une immigration excessive. Comme si, de fait, sa dangerosité devait à elle seule cristalliser toutes les angoisses et toutes les crispations. Or, on sait par ailleurs que, si une très large majorité d’individus interrogés répondent volontiers qu’il y a trop d’immigration, le degré de tolérance dans la société française a plutôt augmenté au fil des ans2. Ne vaut-il pas mieux travailler sur cette lueur d’espoir, plutôt que d’attiser ses contraires, qui ont déjà trop de place dans notre espace public ?

À mettre l’accent sur le seul « ressenti », on finit par oublier ce qui est la température « vraie » et, de fil en aiguille, on peut se laisser emporter par la petite musique insistante qui nous conduit vers le pire. C’est donc un autre cheminement que devrait suivre tout partisan de l’expérience démocratique, à commencer bien sûr par celui qui se situe à gauche.

1. C’est en 1989 que Michel Rocard a lancé la malheureuse formule selon laquelle « nous ne pouvons pas héberger toute la misère du monde ». En vertu de quoi, la gauche de gouvernement s’est accoutumée à l’idée qu’il fallait réguler les migrations, les contrôler, les limiter, voire les réduire. La France s’est ainsi alignée sur une logique européenne de consolidation des frontières, sous l’égide brutale de l’organisation Frontex. C’est dans ce cadre que se sont multipliées les tragédies des noyades en Méditerranée. C’est à partir de là que s’est installée la pratique des « hotspots », ces « points d’accès » qui équivalent à demander à moins riche que soi de trier les migrants dignes d’accéder à l’eldorado européen. En vertu de quoi… les flux migratoires ne se sont pas interrompus et le RN a accéléré sa percée.

2. Nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde ? Mais ce ne sont pas les plus pauvres que nous accueillons ! Ceux-là, quand ils veulent échapper à leur sort, vont au plus près et donc dans les pays pauvres. Les plus pauvres vont chez les pauvres et les moins pauvres vers les plus riches… Et quand bien même la frontière devient un mur, la clôture n’a jamais empêché véritablement le passage. En fait, ce que réussit l’obsession de la frontière infranchissable n’est pas l’arrêt des migrations, mais la fabrique des clandestins, et donc de ceux qui, devenus des sans-droits, pèsent sur la masse salariale et l’accumulation des dysfonctionnements sociaux, dans les zones urbaines déjà défavorisées. L’accumulation de personnes très pauvres dans le « Sud » et de clandestins dans le « Nord » : est-ce ainsi que nous pouvons résoudre les déséquilibres mondiaux et apaiser les craintes de déclin chez nous ?

3. Au motif d’enrayer la montée de l’extrême droite, rien ne justifie que l’on entérine si peu que ce soit son fonds de commerce idéologique. Ce qui joue sur le marché du travail n’est pas la pression migratoire, mais l’universalité de la dérégulation, qui réduit tout à la fois les salaires directs et indirects (au nom de la compétitivité), sanctuarise la précarité (au nom de la flexibilité), réduit l’aide aux démunis (au nom de l’équité) et valorise l’assurantiel au détriment de la solidarité. Affirmer que la régulation des migrations créera du mieux-être est donc dangereusement mensonger. Comme au temps où la social-démocratie européenne expliquait que les profits du moment feraient les salaires du lendemain ou que le monétarisme et la politique anti-inflation profiteraient à terme aux salariés de notre continent.

4. Et d’ailleurs, qu’est-ce qui fait la force du RN ? Ce n’est pas qu’il « verrait » mieux la réalité que les autres : c’est plutôt qu’il sait raccorder les angoisses populaires à un récit cohérent qui les valorise et qui légitime la pseudo-évidence des solutions les plus simples. La base de ce récit est dans l’inquiétude et le ressentiment, auxquels l’extrême droite répond en exaltant la protection et la frontière nationale, en attisant la peur de ne plus être chez soi, en exacerbant, dans un même mouvement, le désir de préserver un entre-soi et la détestation des « parasites » et de « l’assistanat ». Face à un tel récit, on s’en accommode ou on le combat et on en propose un autre.

Ce n’est pas la « bonne conscience » qui a conduit la gauche à sa crise, mais la capitulation devant les idées reçues des forces dominantes. Ce ne sont pas les migrations qui sont au cœur du marasme vécu, mais le trio infernal de la concurrence, de la gouvernance et de l’obsession identitaire. Ne pas porter l’accent sur ce trio revient à lui laisser le champ libre. De même que les concessions au libéralisme n’ont pas enrayé la contre-révolution libérale dans les années 1980-1990, de même la gauche et le mouvement social critique n’enraieront pas la poussée de l’extrême droite et de la droite radicalisée en flirtant avec une part de ses discours.

5. Enfourcher les thématiques du sécuritaire et de l’immigration excessive n’empêchera pas un ascendant du lepénisme construit en longue durée. Elle ne fera que le légitimer un peu plus. « Nous ne pouvons pas accueillir tout le monde », a repris à son tour Emmanuel Macron, quelques mois après son arrivée au pouvoir. Ce faisant, il a donné la main à la gestion administrative et policière de ses ministres de l’Intérieur, de Gérard Collomb à Bruno Retailleau, comme François Hollande s’était appuyé sur la gestion répressive de Manuel Valls.

Ce qui sert le RN est avant tout la division des catégories populaires, « métropolitains » et « périphériques », Français et étrangers, immigrés et « issus de l’immigration ». « Social », « sociétal », « post-sociétal » : autant de mots qui ont l’air de désigner des alternatives possibles et qui, pensés dans leur séparation, désarment tous les efforts de convergence des combats émancipateurs et divisent un peu plus celles et ceux qu’il conviendrait de rassembler.

6. Ralentir ou assécher les flux migratoires ? Cela va à rebours de ce qui fut le long processus historique de l’hominisation et ne correspond aucunement à l’avenir prévisible : les déplacements de population se maintiendront, souhaités ou contraints. Ils constitueront un fait social, dont l’effet positif ou négatif ne dépendra pas de leur volume, mais de l’environnement social dans lequel ils se déploieront.

L’extension des droits pour tous, la protection élargie, la reconnaissance de statuts salariaux stabilisés, la formation permanente, la démocratisation au travail comme dans la cité, la lutte contre les discriminations sont les clés des dynamiques à construire. L’objectif est contradictoire avec le repli sur soi, la méfiance à l’égard du nouvel arrivant, la peur de ne plus être chez soi, l’enfermement communautaire et l’égoïsme ethnique et/ou national. Affirmer tout cela n’est pas de l’angélisme, mais du réalisme bien compris.

Il n’y a pas de bonne technique pour une gestion « raisonnable » des flux migratoires. L’importance actuelle et prévisible des migrations oblige donc chaque peuple à réfléchir aux choix de société possibles. En fait, il n’y en a que trois qui soient cohérents aujourd’hui : la mondialisation de la marchandise, de la finance et de la gouvernance ; l’égoïsme à courte vue des protections de nantis ou de pseudo-nantis ; la mondialité assumée d’un développement sobre et partagé.

Ne pas se battre autour du troisième terme conduit aux désastres futurs. Se placer du côté du peuple, c’est avant tout promouvoir sa dignité et donc lutter pour l’universalité de ses droits. Tel devrait être notre alpha et notre oméga.


  1. Le Monde lui-même a évoqué ces polémiques. Le sociologue Hugo Touzet donne son point de vue de façon mesurée. ↩
  2. Vincent Tiberj, La Droitisation française : mythe et réalités, Paris, Presses universitaires de France, 2024. ↩

24.11.2025 à 12:41

Ukraine : sur des bases pourries, les négociations s’engagent enfin

Catherine Tricot
Le président ukrainien est sommé d’accepter avant Thanksgiving le « plan de paix » des Américains. Ses alliés européens, faibles et veules, ne sont pas de la plus grande aide. Restons prudents mais il semble qu’une fenêtre de négociation sur l’Ukraine s’ouvre. Il le faut absolument. La guerre s’éternise et devient de plus en plus coûteuse, notamment…
Texte intégral (1156 mots)

Le président ukrainien est sommé d’accepter avant Thanksgiving le « plan de paix » des Américains. Ses alliés européens, faibles et veules, ne sont pas de la plus grande aide.

Restons prudents mais il semble qu’une fenêtre de négociation sur l’Ukraine s’ouvre. Il le faut absolument. La guerre s’éternise et devient de plus en plus coûteuse, notamment en vies humaines. Évidemment, la poursuite de la guerre n’apportera aucune solution stable aux questions posées : celles des frontières, celles de la sécurité à long terme de l’Ukraine, de la Russie, des pays européens, celles de la reconstruction et de l’avenir de l’Ukraine.


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Ce round de négociations s’est engagé, comme chacun le sait, sur la base d’une proposition de « plan de paix » élaboré par l’administration américaine. Depuis dimanche, Ukrainiens et Européens tentent de l’amender. Lâches ou faux culs, ils n’osent parler de contre-propositions mais évoquent « des améliorations » ou « des compléments » au plan américain.

On regrette amèrement qu’une telle initiative ne soit pas venue des Européens. Les nombreuses rencontres autour du président Volodymyr Zelensky ont permis d’affirmer la solidarité européenne, d’armer et de promettre de nouvelles armes aux Ukrainiens. Mais pas d’éclairer les questions pour trouver un chemin de paix. Étrangement, il semble qu’aujourd’hui cela devienne possible. Que de temps perdu ! Quel désastreux bilan politique : laisser Trump-le-fascistoïde s’installer en faiseur de paix… Atterrant ! Totalement velléitaires sur Gaza, veules dans les négociations commerciales et dans leurs échanges avec Donald Trump, les Européens sont mis à l’écart sur un sujet qui les concerne absolument.

Il ne saurait être question d’ici de faire le tri entre le bon grain et l’ivraie des propositions contenues dans les deux plans (le plan américain et le contre-plan européen). Elles sont en débat et sont soumises à l’appréciation des parties. L’avis que chacun s’en fera en tiendra bien sûr compte. Relevons que la question de la sécurité de l’Ukraine et de la Russie sont mis à l’agenda sans qu’elle passe pour l’une (l’Ukraine) par l’adhésion à l’Otan et pour l’autre (la Russie) par une neutralité de l’Ukraine poussée jusqu’à interdire son adhésion à l’UE. Le point 3 de la proposition américaine est décisif : « Il est attendu que la Russie n’envahisse pas les pays voisins et que l’Otan ne s’étende pas davantage ».

Bien des points restent en débat. Le texte américain parle d’élections en Ukraine dans les 100 jours et propose une amnistie générale, y compris pour les crimes de guerre dont Poutine est accusé. La levée des sanctions contre la Russie et sa réintégration dans le G8 sont mentionnées. Et surtout, quel avenir pour les territoires ukrainiens revendiqués voire annexés par la Russie ?

On relèvera aussi qu’il n’est nullement fait mention d’autres instances que celles des pays engagés dans cette discussion. L’Onu ou l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ne sont même pas cités. Le point 27 précise même, comme pour Gaza : « Cet accord sera juridiquement contraignant. Sa mise en œuvre sera contrôlée et garantie par le Conseil de paix, présidé par le président Donald J. Trump ». Oulala.

Significativement, il est prévu qu’« un dialogue sera mené entre la Russie et l’Otan, sous la médiation des États-Unis », comme si les États-Unis étaient neutres, ne faisaient plus partie de l’Otan. Ce point est relevé avec inquiétude par François Hollande dans l’entretien qu’il accorde au Monde. Il est vrai qu’il s’agit là d’une substantielle évolution internationale dont il faut tirer les conséquences.

Enfin, le niveau de rapinerie de l’administration Trump laisse sans voix : « Cent milliards de dollars d’actifs russes gelés seront investis dans les projets menés par les États-Unis pour reconstruire et investir en Ukraine, les États-Unis recevant 50% des bénéfices de l’initiative ». C’est du génie validé par les Européens !

Bien des points restent en débat : quelle dimensionnement de l’armée Ukrainienne, limitée à 600 000 ou 800 000 ? Le texte américain parle d’élections générales en Ukraine dans les 100 jours et propose une amnistie générale, y compris pour les crimes de guerre dont Vladimir Poutine est accusé. La levée des sanctions contre la Russie et sa réintégration dans le G8 sont mentionnées. Et surtout, quel avenir pour les territoires ukrainiens revendiqués voire annexés par la Russie ? C’est l’objet du point 22 : « La Crimée, Lougansk et Donetsk seront reconnues comme des régions russes de facto, y compris par les États-Unis. Kherson et Zaporijjia seront gelées le long de la ligne de contact […] La Russie renoncera aux autres territoires qu’elle contrôle en dehors des cinq régions. Les forces ukrainiennes se retireront de la partie de la région de Donetsk qu’elles contrôlent actuellement, qui sera ensuite utilisée pour créer une zone tampon ». Cette « zone tampon démilitarisée » et neutre serait « internationalement reconnue comme territoire appartenant à la Fédération de Russie », mais les forces russes ne pourraient y entrer. C’est évidemment une remise en cause nette des frontières ukrainiennes internationalement reconnues. C’est l’ouverture de la boîte de Pandore et la promesse de futurs conflits de par le monde. Ce sera le point le plus âprement négocié.

La paix n’est peut être pas pour demain. Mais c’est déjà un progrès d’identifier les enjeux de négociations.

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