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24.04.2024 à 09:11

Le pacte européen sur la migration et l'asile : une nouvelle occasion manquée

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Toute personne imaginant que le nouveau pacte sur la migration et l'asile de l'Union européenne renforcera la solidarité entre les États membres, ou avec les personnes fuyant la faim ou les conflits, ne connaît pas le sens du mot. La Confédération européenne des syndicats (CES) s'est toujours opposée à cet ensemble de mesures et continuera à faire campagne pour en limiter les pires impacts.
Ce pacte signifie que davantage de personnes, de familles et d'enfants fuyant la guerre, l'extrême pauvreté et, (...)

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Texte intégral (1886 mots)

Toute personne imaginant que le nouveau pacte sur la migration et l'asile de l'Union européenne renforcera la solidarité entre les États membres, ou avec les personnes fuyant la faim ou les conflits, ne connaît pas le sens du mot. La Confédération européenne des syndicats (CES) s'est toujours opposée à cet ensemble de mesures et continuera à faire campagne pour en limiter les pires impacts.

Ce pacte signifie que davantage de personnes, de familles et d'enfants fuyant la guerre, l'extrême pauvreté et, de plus en plus, les catastrophes climatiques, seront désormais traités comme des prisonniers par les pays européens qui se targuent si souvent d'être les plus respectueux des droits humains et des libertés. Voilà un exemple classique de deux poids, deux mesures, qui trahit l'obligation morale et légale de l'UE de respecter le droit à la protection internationale. Il mènera inévitablement à davantage de violations des droits fondamentaux, à des refoulements illégaux, à des détentions (y compris d'enfants) et à des renvois vers des pays dangereux.

En l'absence de voies d'accès sûres et régulières, les personnes à la recherche de sécurité ou de meilleurs moyens de subsistance sont contraintes d'emprunter des itinéraires de plus en plus dangereux, ce qui a fait de 2023 l'année la plus meurtrière jamais enregistrée depuis 2015. Rien qu'en Méditerranée, plus de 2.500 personnes sont mortes ou ont disparu l'année dernière, un chiffre qui ne représente que la partie émergée de l'iceberg. Le pacte n'aborde pas cette question et continue au contraire à renforcer la « forteresse Europe ».

Il n'aidera certainement pas les travailleurs. Encore plus d'argent sera gaspillé pour construire la forteresse Europe à un moment où l'UE s'apprête à introduire de nouvelles règles fiscales qui imposeraient des réductions des dépenses sociales et climatiques dans le cadre de l'austérité 2.0.

La régularisation du statut de l'immigration aiderait plus que toute autre mesure les travailleurs, tant migrants que locaux, en empêchant les employeurs d'exploiter les travailleurs migrants en situation irrégulière pour réduire les salaires.

Le fait de priver les travailleurs migrants sans papiers et les demandeurs de protection de leurs droits humains ne profite qu'aux employeurs qui les utilisent comme main-d'œuvre bon marché, parfois dans des conditions choquantes, créant ainsi des divisions entre les travailleurs et faisant baisser les salaires et les normes pour tous.

Tous les travailleurs doivent être traités sur un pied d'égalité

La CES demande que les demandeurs d'asile aient le droit de travailler dans tous les États membres. Les syndicats et les employeurs doivent travailler ensemble pour garantir des conditions d'emploi décentes, élément essentiel pour renforcer la solidarité entre les travailleurs et l'égalité des chances et de traitement pour tous.

La CES a démontré que l'accès au travail dans des conditions égales et la capacité à faire valoir ses droits en matière d'emploi sont essentiels à l'obtention des droits fondamentaux, y compris la citoyenneté. La CES soutient ses membres pour organiser tous les travailleurs migrants, y compris les demandeurs d'asile, les réfugiés et les personnes sans papiers, et leur permettre, à travers l'adhésion à un syndicat, de participer à la négociation collective et à l'action commune. Tous les travailleurs, quel que soit leur statut d'immigration ou leur nationalité, doivent être traités sur un pied d'égalité, dans le respect de leurs droits humains universels.

Dans le cadre de son partenariat européen pour l'intégration, la Commission européenne a reconnu le rôle clé que jouent les syndicats dans l'intégration du marché du travail. La CES s'est engagée à continuer à faire campagne pour que tous les migrants et réfugiés aient le droit de travailler, de participer aux négociations collectives, d'intégrer le marché du travail sur la base du principe de l'égalité de traitement et d'accéder aux services et à la protection sociale.

Au lieu d'ériger des murs dans une vaine tentative de dissuader des personnes désespérées, l'UE devrait proposer des canaux réguliers pour la migration de la main-d'œuvre afin de permettre aux migrants de vivre et de travailler, avec un système commun et bien financé pour les accueillir et les intégrer dans les sociétés d'accueil.

La Commission l'a reconnu, la migration est — et a été tout au long de l'histoire de l'humanité — une réalité, et avec la multiplication des conflits et des phénomènes météorologiques extrêmes, le nombre de personnes cherchant refuge en Europe ne fera qu'augmenter.

En 2022, la Commission européenne a fait état de quelque 1,08 million de citoyens non européens en situation irrégulière dans l'UE, soit une augmentation de 59 % par rapport à 2021. Mais ce chiffre est sans aucun doute sous-estimé, les chiffres réels atteignant plusieurs millions. Les femmes sans papiers, en particulier, n'ont aucun droit à la protection contre la violence de genre en vertu de la législation européenne et risquent d'être expulsées si elles cherchent à obtenir justice. Selon la Plateforme de coopération internationale sur les migrants sans papiers (PICUM), des dizaines de milliers de femmes en Europe voient leur statut d'immigrée passer avant leurs besoins en tant que victimes.

L'UE a « externalisé » ses responsabilités vers des pays tiers où les migrants n'ont aucune garantie que leurs droits seront respectés. La CES a condamné cette politique. Elle a protesté, par exemple, auprès de la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, contre le récent partenariat UE-Tunisie conclu avec un gouvernement qui a réprimé les syndicats, les migrants et la société civile. Pourtant, des accords similaires avec la Mauritanie et l'Égypte devraient bientôt être conclus avec le Maroc et la Libye.

Loin de garantir la solidarité européenne, les gouvernements seront libres de choisir les mesures à appliquer, et des États comme la Hongrie et la Pologne ont déjà exprimé leur réticence en la matière. Les États membres pourront se soustraire à des garanties essentielles s'ils affirment qu'un pays tiers pousse des gens vers leurs frontières (ce que l'on a appelé « l'instrumentalisation de la migration »). Même le cadre de l'UE pour la réinstallation, annoncé en grande pompe, est volontaire et ne contribuera guère à alléger la pression qui pèse sur les pays en première ligne d'arrivée des réfugiés. Et les États membres auront une excuse pour négliger leurs obligations légales en vertu d'accords internationaux tels que la Convention de Genève de 1951.

Le pacte a pour objectif de consolider la forteresse Europe en renforçant massivement les capacités de Frontex, l'agence des frontières et des garde-côtes européens, en refoulant ou en détenant les arrivants sans tenir compte de leurs demandes de résidence valables (par exemple pour des raisons médicales ou de regroupement familial). Les personnes qui font appel peuvent être expulsées dans l'attente d'une décision. Il encouragera les refoulements cruels et illégaux qui se produisent déjà. Il menace les opérations humanitaires de recherche et de sauvetage qui permettent de sauver des vies en mer, ce qui va à l'encontre du droit maritime international. La surveillance sera renforcée, par la collecte forcée des données biométriques et des empreintes digitales des migrants, sans grand respect pour les droits humains.

Un appel en faveur d'une approche politique qui promeut les droits humains universels

La CES condamne les politiciens et les partis populistes qui, pour leurs propres intérêts, attisent le racisme, la haine et la xénophobie, en rejetant sur les migrants et les demandeurs d'asile la responsabilité des problèmes que leurs politiques sont incapables de résoudre. Ce sont ces attitudes qui ont formé le cadre permettant au pacte d'obtenir un soutien, et les mesures proposées peuvent exacerber la discrimination et la suspicion à l'égard des migrants, renforçant potentiellement l'extrême droite en Europe.

Au début du mois, la veille du vote d'approbation du Parlement européen, 161 organisations de défense des droits humains, dont Human Rights Watch, Amnesty International, Oxfam et PICUM, ont mis en garde contre l'adoption de ce pacte « honteux ». Selon Save the Children, il aboutira à la détention et à la criminalisation de familles et d'enfants, qui pourront être expulsés sans représentation légale ni recours.

La migration vers l'Europe pourrait faire l'objet d'une gestion empreinte de compassion et de respect des droits humains universels. La « crise des migrants » ne devrait pas du tout en être une. Mais ce pacte n'apporte pas le leadership courageux qui s'avère nécessaire. La CES réitère son appel en faveur d'une approche politique qui promeut les droits humains universels, prévient la souffrance et l'exploitation tout en favorisant une véritable solidarité et une responsabilité partagée.

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