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04.06.2025 à 09:55

Les lois sur la négociation collective doivent être au cœur des efforts de formalisation

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La négociation collective doit se trouver au cœur de la prochaine Conférence internationale du Travail (CIT), à l'heure où les pays membres font face à la lenteur des progrès à l'échelle mondiale en matière de formalisation de l'économie informelle, et ce malgré l'adoption, il y a dix ans, d'une Recommandation historique.
La Recommandation (n° 204) sur la transition de l'économie informelle vers l'économie formelle a été adoptée en 2015. Elle définit les principes visant à combler les (…)

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Texte intégral (1916 mots)

La négociation collective doit se trouver au cœur de la prochaine Conférence internationale du Travail (CIT), à l'heure où les pays membres font face à la lenteur des progrès à l'échelle mondiale en matière de formalisation de l'économie informelle, et ce malgré l'adoption, il y a dix ans, d'une Recommandation historique.

La Recommandation (n° 204) sur la transition de l'économie informelle vers l'économie formelle a été adoptée en 2015. Elle définit les principes visant à combler les lacunes en matière de travail décent dans l'économie informelle, par le biais de la formalisation. Dans le rapport qu'elle présentera lors de la 113e session de la CIT, l'OIT met l'accent sur les approches innovantes susceptibles d'accélérer et d'intensifier la mise en œuvre de la R204.

À l'approche de la Conférence internationale du travail, la négociation collective, un domaine clé où l'innovation revêt une importance cruciale, risque de ne pas être suffisamment prise en compte. La R204 affirme que tous les travailleurs de l'économie informelle, quel que soit leur statut professionnel, y compris les travailleurs indépendants ou pour compte propre, ont le droit de négocier collectivement.

Les travailleurs indépendants ne sont employés par personne et n'emploient personne. Ils ont créé leurs propres emplois pour subvenir aux besoins essentiels de leur foyer, soit pour survivre dans une économie qui offre peu de possibilités d'emploi, soit pour faire face à des chocs économiques. Parmi eux, on trouve des vendeurs de rue, des collecteurs de déchets, des cireurs de chaussures, des vendeurs de journaux, des transporteurs et bien d'autres.

Les revenus quotidiens de ces travailleurs dépendent entièrement de la possibilité qu'ils ont de travailler. Or, celle-ci dépend de l'accès qu'ils ont à l'espace (pour commercer, trier les déchets, garer leur véhicule), aux services (tels que les soins de santé, la garde d'enfants) et à l'infrastructure (par exemple, l'assainissement, le stockage des marchandises). Engager le dialogue avec les gouvernements locaux sur ces enjeux est impossible à faire individuellement.

La R204 appelle les États membres à créer un « cadre favorable » pour que les travailleurs puissent faire valoir leur droit à la négociation collective et participer au dialogue social sur le processus de transition. Reste à savoir en quoi consiste exactement ce « cadre favorable ».

Les travailleurs pour compte propre, qui représentent près de 50 % des personnes exerçant dans l'économie informelle, continuent d'être exclus de la législation du travail qui promeut le droit à la négociation collective. Ils sont ainsi exposés au harcèlement et à la violence, exclus des villes et aussi exclus de l'économie.

Pour faire en sorte que la vision énoncée dans la R204 se réalise, la 113e session de la CIT doit aller au-delà des grandes déclarations et traiter la négociation collective non pas comme une réflexion après coup, mais comme la base du processus de transition à l'économie formelle. Nous présentons ci-dessous trois moyens d'y parvenir.

Ne pas confondre négociation collective et dialogue social

Le dialogue social – terme générique qui englobe un large éventail de modalités de consultation et de négociation sur des questions liées à la politique du travail, à la politique économique et à la politique sociale – est fondamental pour la promotion de la démocratie dans le monde du travail. Il facilite les échanges bipartites, tripartites ou multipartites entre travailleurs, gouvernements, entreprises et autres parties prenantes. Le dialogue social est centré, à juste titre, sur le débat sur la formalisation.

Comme le souligne l'OIT, bien trop souvent, les interventions sur la question de la formalisation ont été planifiées et conçues sans une participation adéquate des travailleurs de l'économie informelle. Or, cette participation doit être significative. Il est souvent supposé que les résultats négociés seront bénéfiques pour toutes les parties prenantes. La voix des travailleurs risque de passer au second plan lorsque des intérêts puissants dominent.

La négociation collective obéit à un processus formel, défini par une loi. Elle a pour objectif de parvenir à un accord (pour une durée déterminée). Les dispositions de cet accord peuvent être exécutées devant un tribunal. Les lois qui définissent le processus de négociation collective prévoient généralement une procédure en cas d'impasse entre les parties à la négociation, ainsi qu'une protection légale en cas de recours à des moyens de pression lorsqu'une partie refuse de négocier ou ne négocie pas de bonne foi. Elles prévoient en outre une procédure de règlement des litiges en cas de non-respect des conditions de l'accord par l'une ou l'autre partie.

Les deux modes de négociation sont essentiels au processus de transition de l'économie informelle à l'économie formelle dans la mesure où ils permettent aux travailleurs d'être représentés en tant que groupe dans les processus de prise de décision. Il est toutefois important de reconnaître qu'ils ne sont pas identiques. Si le dialogue social peut donner aux travailleurs une voix dans les décisions politiques, la négociation collective leur permet de participer au processus menant à la définition de leurs conditions de travail par le biais d'une convention exécutoire.

Reconnaître que les travailleurs de l'économie informelle peuvent négocier, et qu'ils le font

Partout dans le monde, les travailleurs de l'économie informelle ont formé des organisations pour négocier collectivement avec les acteurs qui ont un impact sur leur travail. Il y a beaucoup d'enseignements à tirer de ces efforts, même s'ils échappent souvent à l'attention des gouvernements et même des syndicats.

Si ces efforts de syndicalisation reçoivent si peu d'attention, c'est peut-être parce que la négociation collective est différente pour ces travailleurs : les personnes avec lesquelles ils négocient – et les enjeux de ces négociations – n'entrent pas dans le moule des relations industrielles traditionnelles.

En l'absence de législation habilitante, les travailleurs pour compte propre ont recours à la R204 pour amener les collectivités locales à engager des négociations collectives.

Ainsi, la Zimbabwe Chamber of Informal Economy Associations (ZCIEA) a signé des protocoles d'accord avec 19 collectivités locales entre 2019 et 2021. Ces accords ont eu pour effet d'établir des relations collectives entre les autorités locales et la ZCIEA, une organisation qui compte plus de 205.000 membres dans tout le pays. D'autres exemples de travailleurs pour compte propre ayant conclu des conventions collectives avec les municipalités incluent les vendeurs de rue à Monrovia, au Libéria, et les collecteurs de déchets à Pune, en Inde.

Supprimer les principaux obstacles juridiques à la négociation collective pour les travailleurs de l'économie informelle

La législation du travail présuppose l'existence d'une relation de travail. Comme les travailleurs indépendants n'ont pas de relation contractuelle avec un employeur, ils sont exclus de la législation du travail. Ils ne peuvent pas enregistrer leurs organisations en tant que syndicats ; leurs organisations n'ont pas le droit de s'organiser sur le lieu de travail, ni de mener des négociations avec les autorités locales sur les conditions de travail de leurs membres.

Il est indispensable de mettre à jour le droit du travail et de promulguer des lois sectorielles sur la négociation collective, conçues pour tenir compte des réalités du travail informel.

L'innovation en matière de réforme législative est essentielle – et il y a beaucoup à apprendre.

Indépendamment du débat sur la formalisation, il est de plus en plus reconnu que le champ d'application du droit du travail doit être élargi pour inclure les travailleurs de l'économie informelle.

La recherche conceptualise la manière dont le droit du travail peut évoluer pour inclure les travailleurs à compte propre. Plusieurs pays se trouvent à l'avant-garde en matière de lois sur la négociation collective pour les travailleurs indépendants. C'est notamment le cas des artistes au Canada, des acteurs, des musiciens de studio et des journalistes indépendants en Irlande, ainsi que des travailleurs indépendants du « secteur culturel » aux Pays-Bas.

L'innovation au service d'une participation significative

Le droit de négociation collective est bien plus que le droit d'être entendu : il s'agit du droit de s'organiser, de négocier en tant que groupe et, lorsqu'on n'est pas entendu, de participer à des protestations collectives (en retirant son travail ou ses services).

Par exemple, si une municipalité refuse de négocier avec les vendeurs de rue au sujet de leurs conditions de travail, ces derniers pourraient retenir leurs frais de fonctionnement quotidiens, et la municipalité ne serait pas autorisée à confisquer leurs marchandises ou à les harceler. Au lieu de cela, elle serait tenue de négocier jusqu'à ce qu'accord s'ensuive.

Certes, la transition de l'économie informelle vers l'économie formelle est un processus graduel, à plusieurs étapes, et il n'existe pas de solutions toutes faites.

Sans une participation significative des travailleurs de l'économie informelle – en tant que partenaires sociaux – les gouvernements auront du mal à adapter les stratégies aux besoins spécifiques de l'économie et du marché du travail de leur pays.

Une réforme législative reconnaissant les personnes travaillant à compte propre comme des travailleurs à part entière, bénéficiant de droits collectifs, est un élément clé de ce processus.

Cette 113e session de la CIT ne doit pas être une occasion manquée de garantir que le droit à la négociation collective – consacré par la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail – soit également mis en œuvre pour les travailleurs pour compte propre. L'innovation est de mise – et les travailleurs sont organisés et prêts à œuvrer avec leurs gouvernements pour y parvenir.

03.06.2025 à 05:30

Subordonnés à l'algorithme : comment se protéger du joug des plateformes ?

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Une vidéo largement diffusée sur WhatsApp montre un motocycliste équipé d'un sac à haute visibilité orange de la plateforme de livraison à domicile Rappi – créée en Colombie en 2015 – se faire agresser par un groupe d'individus. Le livreur résiste et empêche ses assaillants de lui dérober le cube isotherme, qui symbolise désormais la réalité du travail pour des dizaines de milliers de travailleurs informels en Colombie et dans de nombreux autres pays d'Amérique Latine.
Une boîte (…)

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Texte intégral (2917 mots)

Une vidéo largement diffusée sur WhatsApp montre un motocycliste équipé d'un sac à haute visibilité orange de la plateforme de livraison à domicile Rappi – créée en Colombie en 2015 – se faire agresser par un groupe d'individus. Le livreur résiste et empêche ses assaillants de lui dérober le cube isotherme, qui symbolise désormais la réalité du travail pour des dizaines de milliers de travailleurs informels en Colombie et dans de nombreux autres pays d'Amérique Latine.

Une boîte omniprésente, toujours exposée aux éléments, perpétuellement en mouvement, itinérante et sans nationalité, apparemment sans attaches, mais qui renferme l'ultime entrave pour quiconque l'endosse : un algorithme programmé par les plateformes technologiques dont celles-ci se servent pour suivre à la trace leurs coursiers, ainsi que pour gérer la relation de travail qu'elles entretiennent avec les personnes qui en dépendent.

La vidéo a été prise alors que le livreur se trouvait sur le parking de l'un des points de collecte de la plateforme de livraison à domicile à Bogota, en Colombie. La présence de deux policiers à moto qui s'approchent pour le protéger ne suffit pas à dissuader les assaillants. Ceux-ci s'acharnent sur la moto du coursier à coups de bâtons et de casques, le poussent et tentent de le faire tomber, alors même que deux autres policiers arrivent sur les lieux. La scène illustre à bien des égards les tensions et les conflits qui opposent les différentes factions de livreurs syndiqués – pro-entreprise d'un côté et pro-travailleurs de l'autre – alors que le projet de réforme du code du travail du président Gustavo Petro navigue entre deux eaux : son examen en cours au Congrès de la République et l'appel à un référendum populaire pour en empêcher l'éventuelle abrogation.

Depuis l'entrée en fonction du premier gouvernement de gauche de l'histoire du pays en août 2022, les travailleurs et les organisations syndicales ont été sur le pied de guerre pour faire aboutir des revendications syndicales historiques, dont, notamment, une majoration pour travail de nuit à partir de 18 heures, une majoration de 100 % pour le travail du dimanche et des jours fériés, l'élimination de la sous-traitance par le biais de contrats syndicaux et, dans le cas des plateformes, la possibilité pour les travailleurs de négocier leur type de contrat ainsi que la garantie du paiement des cotisations de sécurité sociale.

Début de l'organisation syndicale des travailleurs des plateformes

En accord avec l'esprit et la volonté populaires de faire des réformes du travail une réalité, le Congrès colombien a adopté ces dernières années de nombreuses initiatives visant à réglementer les relations entre les plateformes et les personnes qui travaillent avec et pour elles. Parmi elles, le projet de loi 406 de 2025, qui « réglemente l'embauche de personnes et les cotisations de sécurité sociale sur les plateformes numériques et met en œuvre la prime supplémentaire pour les travailleurs liée à la croissance économique, entre autres dispositions ». Par ailleurs, le projet atteste qu'actuellement plus de 200.000 personnes fournissent des services par le biais de plateformes numériques en Colombie, « sans que leur statut contractuel, leur affiliation, leurs cotisations et leurs contributions au système de sécurité sociale ne soient clairement définis ou réglementés ».

Suite à l'arrivée d'Uber dans le pays en 2013, Laura Vargas, mère et cheffe de famille, a décidé, pour faire face à ses difficultés économiques et d'emploi, de se procurer un véhicule, de s'inscrire sur la plateforme et de se lancer dans le transport de passagers. « Pas grand monde n'est prêt à se lancer dans une activité à haut risque, à cause de l'insécurité et des vols. Je croulais sous les dettes et c'était soit mourir de faim, soit faire quelque chose pour subvenir aux besoins de ma famille », confie-t-elle dans un café du centre de Bogota, à quelques pâtés de maisons du Congrès.

Elle est invitée à une réunion avec des sénateurs chargés de l'examen de la loi 406 et est accompagnée de Jairo Alonso Vaquén, John Alexander Rico et Angélica Ordoñez, avec qui elle a créé, il y a sept ans, l'Association colombienne des conducteurs de plateformes (ACCAPP), un syndicat reconnu par le ministère du Travail et affilié à la Central Unitaria de Trabajadores (CUT). Depuis 2020, l'ACCAPP a mis ses connaissances du secteur au service de diverses initiatives de réforme de la loi travail et emploi soumises à examen au Congrès.

« Les plateformes refusent de nous reconnaître en tant que travailleurs à part entière. Pour elles, nous ne sommes pas des travailleurs, mais des ‘chauffeurs associés'. C'est là une stratégie pour éviter que l'État ne les considère comme des entreprises de transport et qu'elles ne se voient dès lors obligées de reconnaître l'existence d'une relation », explique Alonso Vaquén. « Ces dernières années, nous nous sommes regroupés au sein d'un syndicat pour faire reconnaître que nous sommes subordonnés à une plateforme, à un algorithme, que nous avons des horaires et un salaire », ajoute M. Vargas.

Au siège de la Confédération des travailleurs de Colombie (Confederación de Trabajadores de Colombia, CTC), dans le quartier de Teusaquillo de la capitale colombienne, se tient une réunion préparatoire en vue des célébrations du 1er mai. Yudi Aya y a été invitée en tant que représentante légale du Sindicato Nacional de Trabajadores de Applicaciones (SINATRAPP). Mme Aya explique à Equal Times avant le début de la session de planification :

« En 2022, nous nous sommes officiellement enregistrés en tant que syndicat au ministère du Travail, c'est le seul moyen de lutter pour les droits des travailleurs ». Son organisation représente les livreurs, les conducteurs de personnes, les travailleurs des centres d'appel et les travailleurs domestiques, « parce que la plateforme numérique engendre une subordination pour tous, sans distinction ; la subordination et l'absence de droits et de garanties en matière de travail vaut pour tout le monde », explique-t-elle.

Depuis deux ans, le syndicat des travailleurs des plateformes SINATRAPP, qui compte 1.200 membres et est présent dans 12 villes, tient une table de dialogue et de négociation à Bogota avec la plateforme numérique Rappi. Son cahier de revendications porte principalement sur la reconnaissance de la relation de travail, ainsi que sur la régulation des décisions de l'algorithme, qui pénalise les utilisateurs par des blocages excluant toute possibilité de recours et encourage les classifications par quantité de livraisons, en vertu desquelles les zones les plus sollicitées sont réservées aux nouveaux travailleurs ou à ceux qui ont moins de temps à consacrer à leur travail. La prétendue liberté de travailler à sa convenance est en pratique supprimée par les décisions algorithmiques de la plateforme. Seuls les travailleurs à temps plein ont accès aux commandes les plus rémunératrices.

Lors de la dernière réunion au ministère du Travail, le 10 avril, ils ont claqué la porte. « Ils nous ont tous menés en bateau, pas seulement nous, mais aussi le ministère, il n'y avait pas de représentant légal de Rappi, ils ont usé de manœuvres dilatoires pour retarder les processus auxquels l'organisation syndicale est partie prenante », a déclaré la représentante syndicale.

L'unité syndicale face aux manœuvres patronales des plateformes

Depuis l'arrivée en Colombie de ce que l'on appelle désormais le « capitalisme de plateforme » ou les « économies collaboratives » il y a plus d'une décennie, les travailleurs mènent leur combat non seulement dans la rue, au Congrès ou aux tables de négociation mises en place par les syndicats, mais aussi dans le langage : un véritable galimatias sémantique dont les entreprises se servent sous couvert de marketing pour éluder ou repousser leurs responsabilités en matière de travail, et pour justifier et promouvoir leur forme d'intermédiation, tout en s'enrichissant et en se développant par le recrutement et l'exploitation flagrante d'une main-d'œuvre précaire aux quatre coins du monde.

Pourtant, les entreprises technologiques aiment à présenter leurs plateformes comme des outils permettant à tout particulier d'offrir des services et de générer des revenus supplémentaires de manière flexible et à sa convenance, sans horaires ni obligations, selon des conditions générales discrétionnaires acceptées de manière autonome et indépendante par les utilisateurs.

Aussi, se voudraient-elles exemptes de « travailleurs » et de toute « relation de travail », tandis que leur engagement se limiterait à la prestation d'un service et à la génération de profits pour leurs propriétaires. Toutefois, comme le signalent depuis plusieurs années une multitude d'organisations et de professionnels, la réalité est beaucoup plus nuancée et préoccupante. Face à la remise en cause de ce modèle économique et dans le souci de défendre ses intérêts, une nouvelle association a vu le jour il y a cinq ans sous le nom d'Alianza In. Celle-ci représente les plateformes et les entreprises technologiques d'Amérique latine et cherche à influencer les réglementations nationales.

Parmi les avancées, José Daniel López, directeur exécutif du syndicat (critique à l'égard des contraintes réglementaires imposées aux entreprises technologiques), cite l'accord conclu avec le ministère du Travail visant à garantir la sécurité sociale à plus de 120.000 coursiers des plateformes de livraison numérique. Dans le cadre de cet accord, qui doit encore être validé par le Congrès dans le cadre de la réforme du travail, les plateformes s'engagent à prendre en charge 60 % des cotisations d'assurance maladie et de retraite et 100 % des cotisations liées aux risques professionnels. Le texte de la réforme laisse à la discrétion des plateformes l'embauche de travailleurs indépendants ou salariés. « Laisser à l'employeur le pouvoir de décider si nous sommes salariés ou indépendants est un acte inacceptable, nous nous sentons instrumentalisés, avec cette réforme, nous allons à l'encontre de la réalité de notre secteur. Il est essentiel que la réforme n'aboutisse pas à favoriser les employeurs. Ce n'est ni équitable ni concerté, c'est une atteinte et une violation », déclare Yudy Aya du SINATRAPP.

Alianza In encourage ou soutient par ailleurs la création de syndicats enclins à conclure des accords unilatéraux, comme par exemple l'Asociación de Domiciliarios Independientes de Aplicaciones (ASDIAPP). Créé en 2023 et comptant environ 300 membres, ce syndicat s'oppose à la réforme du travail, considérant que la priorité accordée aux contrats à durée indéterminée et la réduction de l'externalisation constituent un frein à la flexibilisation de la main-d'œuvre et augmentent le taux de chômage. Le conflit entre ces deux points de vue opposés conduit parfois à des affrontements de rue, comme le montre la vidéo WhatsApp, à un moment où le débat public bat son plein.

Parallèlement, des syndicats comme SINATRAPP, ACCAPP et UNIMEDP (Unión de Trabajadores de Plataformas), membre de la Confederación General de Trabajadores (CGT), s'opposent aux négociations unilatérales avec les syndicats favorables aux entreprises et aux accords bipartites – impliquant exclusivement les syndicats des plateformes et le gouvernement – où ils dénoncent l'ingérence des syndicats des plateformes au profit des entreprises. « Nous étions inclus dans le texte de la réforme du travail, cependant, en un tour de main, il a été procédé à des modifications et deux mots en ont été retirés. Nous étions des conducteurs de mobilité, or il n'était plus question que de ‘conducteurs de livraison' », explique Laura Vargas, pour illustrer les tactiques employées pour limiter le champ d'application de la législation à certaines catégories de travailleurs. Pour sa part, Anderson Quintero, représentant de la section de Bogota du syndicat SINATRAPP, estime que « ce n'est pas tant la question de savoir si nous sommes légaux ou non, si nous sommes régularisés ou non, qui est la plus préjudiciable, mais plutôt le mécontentement face au manque de participation active du gouvernement. Ce qu'il faut, c'est plus d'attention de la part des politiques ».

Grâce au soutien des organisations internationales et régionales de travailleurs, telles que la Confédération syndicale internationale (CSI) et la Confédération syndicale des travailleuses et des travailleurs des Amériques (CSA), les syndicats locaux ont bénéficié de formations et de conseils sur la manière d'unir leurs forces et de faire pression pour garantir des négociations tripartites (gouvernement, employeurs et travailleurs).

C'est ainsi qu'ils ont créé cette année l'Organisation des travailleurs des plateformes de Colombie (Organización de Trabajadores de Aplicaciones por Colombia, OTAC). Celle-ci a pour mission d'intégrer les revendications de tous les travailleurs de plateformes et de promouvoir une consultation populaire pour sauver la réforme du travail. Elle pose au public une question qui résume leur lutte : « Êtes-vous d'accord avec le fait que les travailleurs des plateformes aient la possibilité de négocier leur type de contrat et qu'ils bénéficient d'une couverture sociale ? ».

« L'OTAC a été créée dans le but d'unir les dirigeants, et d'empêcher la fragmentation, car nous pensons que, non seulement en Colombie, mais aussi au niveau international, nous devons former un bloc solide face à cette situation avec les organisations proches du patronat. Au lieu de s'engager dans un processus d'intégration et de résolution des conflits, celles-ci mènent une guerre contre les travailleurs pour le simple fait d'exiger le respect de leurs droits. Le fait même que nous ayons à les exiger est déjà cruel en soi, car après tout si une règle existe, c'est bien pour être respectée », a déclaré Yudy Aya.

Pour tenter de clarifier ce conflit social, qui illustre l'approfondissement des transformations du travail liées à l'expansion du capitalisme des plateformes, lequel redéfinit à son tour les processus de production et favorise le démantèlement des systèmes de protection sociale et des acquis sociaux, l'OTAC a présenté un cahier de revendications global qui comprend la sécurité sociale sur un pied d'égalité avec les travailleurs ordinaires, la rémunération des heures supplémentaires et des jours fériés, reflétée par une augmentation du tarif horaire ; des primes non liées à des critères de performance ; des prestations sociales égales pour tous, non soumises aux statuts d'une plateforme particulière ; des aides à la formation pour les travailleurs et leurs familles ; et la reconnaissance explicite de leur statut de travailleurs.

En mars 2025, le taux de travail informel en Colombie atteignait des niveaux jamais vus depuis la pandémie de Covid-19. Sur 23,7 millions de travailleurs enregistrés par le département administratif national de statistique (DANE), 57,7 %, soit 13,6 millions, occupaient un emploi informel et ne cotisaient pas à la sécurité sociale. La lutte de l'OTAC et des syndicats de travailleurs des plateformes pour une réforme du travail garantissant leur formalisation vise, en définitive, à mettre fin au travail informel qui caractérise le secteur et à interdire les formes d'emploi qui offrent des revenus minimaux, sans garanties légales, et qui privilégient le profit des entreprises technologiques.

L'euphémisme des « économies collaboratives » tient au fait que l'activité qu'elles promeuvent ne vise pas à la « collaboration » ou au « partage », comme le soulignent les sociologues Francisco José Fernández Trujillo et Javier Gil García dans leur texte Mecanismos y dinámicas del trabajo en las plataformas digitales : los casos de Airbnb y de las plataformas de reparto (mécanismes et dynamiques du travail sur les plateformes numériques : les cas d'Airbnb et des plateformes de livraison), mais qu'elle serait plutôt utilisée « comme une stratégie de marketing pour faciliter l'invisibilisation des nouvelles formes d'exploitation du travail et de concentration de la richesse engendrées par ces mêmes plateformes ».

02.06.2025 à 08:00

En Sicile, les travailleurs invisibles attendent encore le ruissellement économique de la florissante activité touristique

Victor Le Boisselier
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Pour prendre le pouls de la fréquentation touristique à Palerme, une balade sur la Via Maqueda, artère principale du centre historique, s'impose. Depuis le début du printemps, les arrivées en Sicile ont explosé et Italiens comme étrangers déambulent dans ce qui est devenu un dédale de cafés, de glaciers, de bars et de restaurants. L'affluence est telle que les promeneurs avancent en piétinant, jouent parfois des coudes pour gagner quelques mètres. Un chanteur de rue entonne au loin Sarà (…)

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Texte intégral (2534 mots)

Pour prendre le pouls de la fréquentation touristique à Palerme, une balade sur la Via Maqueda, artère principale du centre historique, s'impose. Depuis le début du printemps, les arrivées en Sicile ont explosé et Italiens comme étrangers déambulent dans ce qui est devenu un dédale de cafés, de glaciers, de bars et de restaurants. L'affluence est telle que les promeneurs avancent en piétinant, jouent parfois des coudes pour gagner quelques mètres. Un chanteur de rue entonne au loin Sarà perché ti amo, un air traditionnel. En anglais, espagnol, allemand ou français, les rabatteurs invitent les passants à s'attabler dans leur restaurant.

Les transformations liées au tourisme dans la capitale sicilienne sont difficiles à ignorer. Depuis dix ans et le classement de son architecture arabo-normande au patrimoine mondial de l'UNESCO, Palerme est devenue une destination de choix. Elle apparaît régulièrement dans les classements de villes à visiter durant l'année. Entre 2014 et 2023, le nombre d'arrivées est passé de 650.000 à 836.000. Celui des nuitées de 1,420 million à 1,885 million. Si la crise sanitaire du Covid-19 l'a freinée temporairement, elle n'a pas stoppé l'évolution. Rien qu'entre 2022 et 2023, les arrivées à Palerme ont augmenté de 15 %.

Pour absorber ce flux, une masse de travailleurs précaires s'emploie donc à accueillir les voyageurs, changer leur literie, nettoyer les cuisines des restaurants, rabattre les clients, débarrasser les tables… Avec ou sans contrat, pour toute la saison ou seulement en extras, ils et elles sont au cœur d'un paradoxe notable : si l'industrie liée au tourisme est devenue le moteur économique de Palerme et de la Sicile, les travailleurs du secteur sont eux cantonnés à un statut des plus précaires.

Pendant près de trois ans, Ginevra [prénom modifié] a enchaîné les boulots dans les appartements de location à courte durée de type Airbnb. En 2022, alors que la saison commence, elle trouve, grâce à des connaissances, quelques extras : « On m'appelait pour des check-in payés 10 euros (11,36 dollars US) , ou pour faire le ménage pour 5 euros ( 5,68 dollars US) de l'heure ». Elle raccroche une fois l'été passé, faute d'heures suffisantes et d'un salaire décent, malgré les désagréments : « Pour un check-in, on te donne rendez-vous à telle heure. Mais si le client arrive avec trois heures de retard, tu attends et tu es payée le même prix ». Alors qu'elle pense quitter la ville faute d'opportunités, elle se voit confier la conciergerie de huit appartements. Cinq jours par semaine, elle est chargée d'échanger avec les clients, de gérer la logistique du ménage, de l'approvisionnement des produits d'entretien ou de première nécessité… Et même de rénover des appartements lorsque cela est nécessaire. Le tout pour 500 euros (568 dollars US) par mois.

« On m'avait vendu un temps partiel, car chaque petite tâche devait prendre peu de temps. Mais je répondais aux messages dès le réveil et pouvais aider des touristes à entrer dans un appartement à une heure du matin. En plus de gérer toutes les urgences ».

Elle finit par démissionner alors qu'elle n'a aucun plan B. Elle rebondit finalement dans un Bed&Breakfast pour servir les petits-déjeuners : « J'ai envoyé énormément de CV, je me suis déplacée, mais les seuls emplois que j'ai trouvés étaient via des connaissances ». Depuis janvier dernier, elle a quitté le secteur pour un poste à distance dans l'évènementiel.

Pendant les trois dernières années au service des voyageurs, elle n'aura jamais eu de contrat, jamais cotisé. Elle observe amèrement : « Avec l'expérience, tu as surtout envie de pouvoir progresser dans l'entreprise. Or tu ne peux pas ».

La monoculture du tourisme

Dans une région où le taux de chômage dépasse les 30 % chez les jeunes (16,6 % au niveau national), ces derniers sont souvent contraints d'accepter ces conditions de travail ou de quitter l'île. « Aujourd'hui, si tu veux faire autre chose que du tourisme à Palerme, il faut partir », résume le chercheur indépendant en urbanisme Federico Prestileo en grossissant volontairement le trait.

Depuis sept ans, ce Palermitain étudie la « touristification » de sa ville. Au sein de groupes locaux comme internationaux, il participe à un travail de sensibilisation, de réflexion collective et de plaidoyer contre le tourisme de masse. Il recadre le contexte palermitain : « La chose importante à Palerme, contrairement, par exemple, à Barcelone, c'est cette monoculture du tourisme ». Dans la ville, l'industrie a été réduite à peau de chagrin et une nouvelle économie peine à émerger.

Pour le tourisme, elle s'est donc concentrée sur ses atouts : « La ville n'étant pas une station balnéaire, l'offre s'est centrée sur les visites guidées et les monuments historiques. Et donc forcément sur la restauration et la boisson, surtout à l'heure où la street food est devenue virale sur les réseaux sociaux ». Les derniers chiffres publiés par la ConfCommercio, la confédération du commerce, tendent à lui donner raison, du moins pour le centre historique de Palerme. Durant la période 2019-2024, pourtant entrecoupée par la crise sanitaire de 2020-21, le secteur « hôtels-bar-restaurants » a été dopé de 30 % dans cette partie de la ville.

Ibrahima [prénom modifié], d'origine ivoirienne, confirme les propos du chercheur. A Palerme, le trentenaire a connu principalement des expériences dans la restauration. La saison dernière, il était employé légalement pour nettoyer les cuisines d'un restaurant près du port. Avant ça, il travaillait comme commis. Des missions qu'il débute parfois sans contrat, mais qu'il ne poursuit pas s'il n'est pas déclaré après quelques semaines. « Au-delà du fait que le contrat soit nécessaire pour le permis de séjour, travailler au noir n'est pas correct », explique-t-il avant de préciser :

« L'année dernière, je gagnais 50 euros (56.80 dollars US) pour une journée de huit ou neuf heures. Dans les autres boulots, le salaire pouvait être de 30, 35, 40 euros ». Toujours soumis à la temporalité du tourisme, il répète souvent : « L'hiver, c'est chaud, il n'y pas de boulot. »

Combien sont-ils à partager ces conditions ? Dans ce secteur, la grande part de travail informel rend difficile de donner des indicateurs fiables. Selon la fédération hôtelière Federalberghi, il y aurait eu en 2023, selon la saison, entre 14.500 et 22.500 travailleurs dans le tourisme dans la province de Palerme. Mais les travailleurs sans contrat n'apparaissant pas dans cette étude, ce qui rend le tableau incomplet.

Un secteur où l'irrégularité est reine

Car, sur place, beaucoup le savent : les entraves au droit du travail sont quasiment la norme. En 2024, 92,3% des établissements du secteur de l'hébergement et de la restauration contrôlés par l'inspection du travail en Sicile ont présenté des irrégularités. Mais les moyens humains manquent aussi pour endiguer véritablement le phénomène estime la syndicaliste Alessia Gatto : « À Palerme, les inspecteurs du travail sont trop peu nombreux pour effectuer le travail nécessaire ». Depuis 2020, cette dernière est membre de la CGIL, principal syndicat italien en nombre d'adhérents, et s'occupe notamment des questions liées à l'industrie touristique à Palerme.

Elle explique qu'il y a certes le travail au noir, mais aussi, beaucoup de travail « gris », c'est-à-dire une situation où le contrat existe, mais n'est pas respecté. « L'employé a un contrat à temps partiel, mais travaille 10 heures par jour » illustre-t-elle. Souvent, le statut ne correspond pas à son rang, ce qui diminue son salaire, observe Alessia Gatto : « Un chef de salle va par exemple être embauché comme serveur et donc ne pas avoir le salaire correspondant à sa fonction ». Elle remarque également la multiplication des contrats à la journée : « Dans ces situations, tomber malade signifie courir le risque de ne pas être rappelé ».

Même son de cloche, à l'Unione Sindacale di Base (USB), où la branche sociale du syndicat organise des permanences pour accompagner les travailleurs. Marco Militello, un des représentants de l'organisation, dépeint la situation : « Toutes les personnes que j'ai accompagnées ne sont pas embauchées en règle. Souvent, la quantité de travail effectuée n'est pas reconnue dans son entièreté, les cotisations sont donc moindres. Les jours libres ou non-travaillés ne sont quant à eux même pas payés ».

Pour le syndicaliste, ces contrats au rabais et les faibles salaires entraînent la création de travailleurs pauvres, en particulier les jeunes et les exilés, qui doivent parfois cumuler plusieurs emplois pour boucler les fins de mois. Pour ces derniers, souvent cantonnés à des tâches subalternes, Marco Militello remarque qu'ils touchent parfois des salaires moindres que leurs collègues italiens pour des fonctions équivalentes. Une double peine difficile à dénoncer lorsqu'un contrat de travail est essentiel pour obtenir un permis de séjour.

« Depuis 10 ans, on présente le tourisme comme une ressource, mais pourtant d'une certaine manière, il appauvrit le territoire », prend à contre-pied Federico Prestileo. Le chercheur voit également un autre écueil pour les travailleurs : le secteur qui les emploie entraîne l'augmentation des loyers, les chassant du centre historique où ils travaillent.

Par ailleurs, la réalité économique d'un marché aussi concurrentiel fait que certaines entreprises réduisent leurs marges et les dépenses – dont les salaires qui peuvent être nivelés vers le bas. Les Airbnb gérés à la manière d'hôtels, malgré des prix moindres ou les restaurants, proposant des menus dégustation toujours moins chers, doivent réaliser leurs bénéfices sur d'autres dépenses.

Surtout, il devient de plus en plus difficile – même si pas impossible – de survivre avec un comportement vertueux. Dans un bar-restaurant du centre historique, un couple de gérants anonymes raconte avoir un nombre incalculable d'histoires sur le sujet. Après avoir tenu un établissement ne vivant presque que du tourisme, ils se sont installés dans des rues moins passantes et ne peuvent pas se permettre d'employer. Le gérant-barman résume la situation : « Aujourd'hui, la concurrence n'est pas le problème. Le problème, c'est la concurrence de ceux qui ne sont pas en règle ». L'entrepreneur pointe du doigt le grand nombre d'établissements pour qui les amendes affectent moins leurs profits que de rentrer dans les clous. Même si pour lui, ce sont surtout les taxes appliquées lors de l'embauche d'un travailleur qui rendent difficile le respect des règles. Il développe : « Si pour employer quelqu'un, on doit dépenser près de 2.000 euros (2.250 dollars US) afin de le payer 1.200, on préfère trouver un accord avec lui et payer 1.500 euros (1.688 dollars US) qu'il met directement dans sa poche. Ce raisonnement est d'autant plus vrai quand une structure a beaucoup de salariés ». Certains de ses pairs soulignent quant à eux la difficulté de trouver une main d'œuvre qualifiée, celle-ci ayant préféré émigrer en quête d'un meilleur salaire.

Face à ces constats, les actions syndicales tentent de faire bouger les lignes. La CGIL organise depuis quelques étés l'action nationale « Mettiamo il Turismo SottoSopra » (« Mettons le tourisme sens dessus dessous »), suivie notamment à Palerme, où les syndicalistes déambulent dans les rues afin de sensibiliser les travailleurs à leurs droits. Depuis 2022, l'USB organise la fausse campagne de recrutement « Cercasi schiavi » (« Recrute esclaves »). L'annonce satirique explique recruter des esclaves pour les restaurants, hôtels, bars ou Airbnb en échange de « salaires de misère et d'aucun droit ». Une manière d'alerter sur les conditions de travail des saisonniers.

Les consultations avec les syndicats sont cependant souvent effectuées une fois le rapport de travail avec l'employeur terminé. « Créer un contact, notamment sur leur lieu de travail, est difficile », regrette Alessia Gatto. Du côté de l'USB, les dernières distributions de tracts ont entraîné de nombreuses sollicitations affirme Marco Militello : « Nous avons décidé de réunir d'abord les moyens humains nécessaires à une prise en charge correcte et commencerons prochainement notre travail ».

Les syndicats espèrent « stimuler le courage » comme le dit Marco Militello. D'autant plus que certaines réformes nationales ont abîmé les acquis sociaux ces dernières années selon les deux représentants. L'un cite l'assouplissement du recours aux CDD et à leur renouvellement. L'autre la transformation en début d'année du licenciement pour absences injustifiées à répétition en démission volontaire. Le tout alors que le reddito di cittadinanza, le revenu de solidarité de base, a été supprimé en 2024.

Dans ce contexte, un référendum sur le travail et la citoyenneté est organisé les 8 et 9 juin prochains. Il portera notamment sur l'usage des contrats à durée déterminée et sur l'abrogation d'une norme du Jobs Act, loi sur le travail promue par l'ancien Premier ministre Matteo Renzi en 2014. « La diminution des acquis sociaux débute avec cette réforme ayant facilité les licenciements », clame Alessia Gatto. Dans un marché de l'emploi où les perspectives peuvent être limitées comme celui de Palerme, être licencié est « une tragédie », pointe encore la syndicaliste.

Conscients que le tourisme a permis justement de créer des emplois dans la ville, les syndicalistes et militants demandent un respect plus important du droit du travail et une répartition plus équitable des revenus. « Et surtout qu'ils permettent de créer une autre activité, ici à Palerme », conclut le chercheur Federico Prestileo.

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