28.06.2025 à 00:05
Thelma Susbielle
Une ado non binaire, radicale et solitaire, fuit sa famille et la société dans les terrils du nord de la France. Avec Colline, Fanny Chiarello signe un roman incandescent, où l'écologie, la classe et la fiction dessinent une contre-mythologie du présent. « La solitude, ce n'est pas forcément être seule. » Coline, 17 ans, lycéenne du nord de la France, vit avec son chien dans une ancienne ville minière. Végan, non binaire, lesbienne, écolo, anticapitaliste : elle coche toutes les cases, et (…)
- CQFD n°242 (juin 2025) / BouquinUne ado non binaire, radicale et solitaire, fuit sa famille et la société dans les terrils du nord de la France. Avec Colline, Fanny Chiarello signe un roman incandescent, où l'écologie, la classe et la fiction dessinent une contre-mythologie du présent.
« La solitude, ce n'est pas forcément être seule. » Coline, 17 ans, lycéenne du nord de la France, vit avec son chien dans une ancienne ville minière. Végan, non binaire, lesbienne, écolo, anticapitaliste : elle coche toutes les cases, et le revendique. Coincée pour les vacances avec sa mère, sa tante et ses cousins, elle décide de fuir dans les collines noires des terrils, à la recherche d'un territoire à elle. Le récit de Colline (Cambourakis, 2025) s'ouvre sur une « genèse homofuturiste », puis changement de style : un monologue intérieur nerveux et une course-poursuite effrénée commencent. « J'étais un animal sauvage acculé par l'avancée des tronçonneuses... » Coline, traquée par une société coincée dans les stéréotypes, se réfugie dans les marges. Le récit haletant alterne avec un autre fil, fait de souvenirs récents, plus calmes, plus doux. Les deux trames narratives finissent par se rejoindre, comme une forme de réconciliation de Coline avec sa classe, son histoire, ses contradictions. L'ado est tout sauf lisse. Elle méprise les goûts trop « populaires », mais refuse de critiquer la salade de riz faite avec amour par ses tantes. Elle revendique son élitisme, tout en laissant percer une sensibilité désarmante : « Je serais toujours de celles qui préfèrent les trucs touchants à ceux qui déchirent... » Coline juge, doute, souffre, rêve, aime. Et c'est dans cette tension que réside sa beauté. Figure générationnelle, elle incarne une jeunesse ultra-consciente, ultra-lucide, mais pas cynique pour autant. Dans ces paysages ravagés par l'extraction du charbon, puis abandonnés et réensauvagés par le vivant, la jeune fille invente un monde parallèle où elle dialogue avec Jamila Woods, chanteuse qu'elle vénère. Le pouvoir de l'imaginaire est ici vital, politique, tandis que la langue devient une arme de résistance. « Je laisse le phatique à la masse et je prends le magique. » Dans Colline se dessine un paysage intérieur autant qu'extérieur, une chambre d'échos où se mêlent solitude, désir, écologie et lutte. Fanny Chiarello écrit avec une précision musicale. Son style, à la fois nerveux et poétique donne une langue singulière à cette héroïne hors norme. Rédigés lors d'ateliers d'écriture avec des lycéens, les dialogues, empreints d'humour noir et de lucidité adolescente, capturent une génération sans moquerie ni condescendance. Pas d'imaginaire de vainqueurs ici, mais une ode à celles et ceux qui s'inventent des mondes pour survivre et se battre.
28.06.2025 à 00:03
Étienne Jallot
Dans Brève histoire des socialismes en France, l'historien Julien Chuzeville revient sur les mutations du mouvement socialiste. À la fois réformiste et révolutionnaire, il parvient à s'unifier autour de la SFIO en 1905 avant que le parti trahisse ses principes et s'engouffre dans la guerre… Au commencement : le socialisme. Un projet révolutionnaire, dont l'objectif est le renversement du capitalisme et son remplacement par une société sans classes, oppressions, ni exploitations. Né dans (…)
- CQFD n°242 (juin 2025) / Caroline SuryDans Brève histoire des socialismes en France, l'historien Julien Chuzeville revient sur les mutations du mouvement socialiste. À la fois réformiste et révolutionnaire, il parvient à s'unifier autour de la SFIO en 1905 avant que le parti trahisse ses principes et s'engouffre dans la guerre…
Au commencement : le socialisme. Un projet révolutionnaire, dont l'objectif est le renversement du capitalisme et son remplacement par une société sans classes, oppressions, ni exploitations. Né dans l'Europe capitaliste du XXe siècle, ce mouvement internationaliste « sans patrie ni frontières » se structure en France autour de la SFIO (Section française de l'internationale ouvrière). Parti de masse, elle cherche à amorcer des réformes sociales tout en conservant son objectif révolutionnaire et internationaliste. Mais quand la Première Guerre mondiale éclate, la SFIO se range du côté des belliqueux, au mépris des principes du mouvement... Une leçon historique très actuelle, que nous rappelle Julien Chuzeville dans Brève histoire des socialismes en France (Libertalia, 2025).
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Dans les débats, réformes et révolution ne s'opposent pas toujours
Dans les années 1880-90, lorsque les premiers partis ouvriers se constituent, ils appellent indifféremment « socialisme » ou « communisme » le projet d'abolition de l'État et du capitalisme qu'ils souhaitent voir advenir. Ils se divisent cependant sur la marche à suivre : la prise du pouvoir d'État par le prolétariat, comme le défendent Jules Guesde et le Parti ouvrier (PO) ? Le socialisme réforme par réforme (Fédération des travailleurs socialistes de France) ou la grève générale portée par les syndicats (Parti ouvrier socialiste révolutionnaire) ? Dans les débats, réformes et révolution ne s'opposent pas toujours. Les plus révolutionnaires reconnaissent l'intérêt de réformes sociales – notamment la baisse du temps de travail quotidien – et les plus réformistes ne s'opposent pas « en principe » à la révolution. Certains partis socialistes parviennent à faire élire des militants – parfois ouvriers – dans des mairies et à l'Assemblée. Leur stratégie, c'est d'abord de « faire connaître les idées socialistes ». Mais progressivement, le moyen devient une fin en soi : il s'agit de « faire campagne essentiellement afin d'avoir le plus d'élus possible ». Les candidats atténuent leur propos, parlent moins d'internationalisme, et plus de patriotisme et les résultats électoraux s'améliorent. Entre 1899 et 1903, l'entrée au gouvernement Waldeck-Rousseau du socialiste indépendant1 Alexandre Millerand divise les socialistes. Certains espèrent des réformes sociales. D'autres se méfient de l'enrôlement d'un socialiste dans un gouvernement bourgeois. Le bilan de Millerand leur donnera raison. Le ministre socialiste n'arrive à aucune avancée sociale et participe à un gouvernement qui réprime dans le sang des grévistes à Chalon-Sur-Saône et en Martinique.
Aujourd'hui, alors que la guerre rôde en Europe, aucun parti de « gauche » auParlement ne se fonde sur l'internationalisme pour s'opposer à la guerre
Après l'échec de Millerand, les différents partis socialistes décident de former ensemble la SFIO en 1905, et reviennent aux principes du socialisme. Ils déclarent dans leur texte fondateur : « Tout en poursuivant la réalisation des réformes immédiates revendiquées [le parti] n'est pas un parti de réforme, mais un parti de lutte des classes et de révolution ». Le parti n'abandonne pas la participation aux élections, municipales et parlementaires, et dirige alors de nombreuses mairies, où il met en place des politiques sociales. À l'Assemblée, les députés, emmenés par Jean Jaurès, constituent un groupe d'opposition qui refuse toute alliance ou participation à un gouvernement bourgeois2. Minoritaires, leurs projets de réformes – salaire minimum, assurance sociale ou abolition de la peine de mort – n'aboutissent pas. Mais les socialistes jouissent d'une tribune où ils clament des discours socialistes, et perturbe l'Assemblée en y chantant l'Internationale. Et le parti ne se limite pas à son groupe « politique ». Il est composé de dizaines de milliers d'adhérents. Ses militants – artisans, ouvriers, enseignants, employés – montent des sections locales où ils débattent, échangent et organisent le parti. Ils créent également des journaux dans lesquels ils se font le relais des luttes locales et expriment leurs opinions. Malgré tout, une petite élite politicienne se dégage : « Le groupe parlementaire n'est pas choisi par les militants [...] et ses délibérations ne font l'objet que de comptes-rendus brefs. » Progressivement, certains membres, comme le député Albert Thomas, révisent les positions anticapitalistes du parti et soutiennent la mise en place d'un capitalisme d'État par la gestion d'une élite d'« experts » socialistes. C'est l'action des masses qu'on cherche alors à mettre de côté : « L'émancipation de la classe travailleuse ne doit plus être l'œuvre de la classe travailleuse elle-même, mais l'œuvre de spécialistes », résume Julien Chuzeville.
Les socialistes entrent dans le gouvernement d'« Union sacrée » du présidentRaymond Poincarré, qui suspend illico la liberté d'expression et d'opinion
En 1912, face à la crainte d'un embrasement mondial, les socialistes européens réunis à Bâle proclament l'unité du prolétariat européen et préconisent la grève générale mondiale pour empêcher la guerre. Mais quelques mois avant le conflit, rien ne semble pouvoir empêcher les États de s'affronter. Pas même Jean Jaurès, partisan de la paix, assassiné par un nationaliste en 1914. Emmené par les guesdistes, pourtant révolutionnaires, le parti cède alors aux injonctions guerrières, et vote les crédits de guerre.
Les socialistes entrent dans le gouvernement d'« Union sacrée » du président Raymond Poincarré, qui suspend illico la liberté d'expression et d'opinion. À l'intérieur du parti, ils refusent la participation d'étrangers et coupent toute relation avec le SPD (Parti social-démocrate d'Allemagne). Les deux partis ont pleinement intégré le nationalisme. « Ils se vivent désormais avant tout comme des Allemands et des Français, ennemis dans la guerre avant d'être des socialistes. » Mais à l'intérieur de la SFIO, certains résistent. Les Zimmerwaldiens – qui fonde leur tendance en 1915 à Zimmerwald (Suisse) – s'opposent à cette trahison et signent un manifeste internationaliste et antiguerre qui circule clandestinement. En 1917, la SFIO quitte finalement le gouvernement après n'avoir obtenu aucune avancée sociale pour la classe ouvrière et avoir participé à une économie de guerre mortifère, dont le patronat a largement profité. Au XXe siècle, la SFIO, qui deviendra en 1969 le Parti socialiste (PS), continue la lente révision de ses principes. Concentré sur la conquête du pouvoir, le parti est bureaucratique et coupé de sa base ouvrière. Celle-ci s'incarne alors davantage dans les syndicats, certains partis trotskystes ou mouvements libertaires. Aujourd'hui, alors que la guerre rôde en Europe, aucun parti de « gauche » au Parlement ne se fonde sur l'internationalisme pour s'opposer à la guerre. Jean-Luc Mélenchon, qui se réclame souvent du socialisme historique de Jaurès, souhaite assurer « une industrie de défense souveraine et performante » et s'inquiète du déclin de la France sur les cinq continents3. Socialistes, vous avez dit ?
1 Car il refuse comme d'autres d'être membre d'un parti socialiste qu'il juge trop révolutionnaire.
2 Des mots de Jean Jaurès lui-même, pourtant ancien soutien d'Alexandre Millerand « ne jamais sacrifier à une convenance gouvernementale, à une combinaison parlementaire, les intérêts mêmes du prolétariat et l'autonomie de la classe ouvrière ».
3 « L'intérêt de la France, c'est d'être indépendante, non alignée et altermondialiste. La paix des Français est à ce prix ! », Jean-Luc Mélenchon, Revue de Défense nationale, n° 880 (mai 2025).
28.06.2025 à 00:02
Eliott Dognon
En février et mars dernier, un mouvement de protestation a secoué l'Indonésie. La population d'un des pays les plus inégalitaires du monde dénonce l'autoritarisme du président Prabowo Subianto. Interview de l'historien Rémy Madinier. Le 17 février dernier, le président indonésien Prabowo Subianto annonce des coupes budgétaires drastiques (environ 40 milliards d'euros) pour lutter contre la malnutrition infantile et financer un nouveau fonds souverain pour des projets dans les énergies (…)
- CQFD n°242 (juin 2025) / Irène BeausejourEn février et mars dernier, un mouvement de protestation a secoué l'Indonésie. La population d'un des pays les plus inégalitaires du monde dénonce l'autoritarisme du président Prabowo Subianto. Interview de l'historien Rémy Madinier.
Le 17 février dernier, le président indonésien Prabowo Subianto annonce des coupes budgétaires drastiques (environ 40 milliards d'euros) pour lutter contre la malnutrition infantile et financer un nouveau fonds souverain pour des projets dans les énergies renouvelables, la sécurité alimentaire et les nouvelles technologies. Les étudiants montent alors au créneau : ces réductions pourraient affecter les bourses et le prix de la scolarité. Ils n'ont par ailleurs aucune confiance dans leurs élites corrompues. Au mois de mars, l'adoption d'une loi permettant aux militaires d'occuper à nouveau des postes à responsabilités au sein des institutions met le feu aux poudres. La jeunesse craint un retour de la dictature. Entretien avec Rémy Madinier, historien spécialiste de l'Indonésie et directeur de recherche au CNRS.
Il y a régulièrement des mouvements de protestation en Indonésie depuis 1998. En quoi celui-ci est-il différent ?
« Prabowo a fondé toute sa carrière militaire sur la violence »
« Ces manifestations témoignent de fortes inquiétudes quant à une sorte de restauration de l'“Ordre nouveau”, ce régime autoritaire [de 1966 à 1998] présidé par le général Suharto qui a été pendant un temps le beau-père de l'actuel président Prabowo Subianto. Ce dernier a été élu en février 2024 face au président sortant, Joko Widodo (surnommé Jokowi), un homme respecté qui n'appartenait pas à l'oligarchie indonésienne. Prabowo a par deux fois tenté de briguer la présidence avec un registre militaro-nationaliste tout en promouvant l'islam radical. Cette fois-ci, il a réussi non pas face à Jokowi, mais grâce à Jokowi, qui l'a désigné comme son successeur en acceptant que son fils devienne colistier puis vice-président de Prabowo. Ensuite, il y a eu l'annonce de la création d'un fonds souverain et de distributions de repas gratuits dans les écoles. Beaucoup ont alors commencé à craindre un retour de l'“Ordre nouveau” et avec lui, le retour de la corruption et la restriction de la liberté d'expression. »
En quoi la création d'un fonds souverain et les distributions de repas gratuits sont-e les le signal d'un retour à un régime de corruption ?
« Grosso modo, on soupçonne que l'argent disparaisse entre le ministère et les prestataires de services, d'autant plus que les militaires sont désormais autorisés à travailler dans des entreprises sans même démissionner de l'armée. Ils peuvent donc avoir une “double fonction”, et donc un pouvoir politico-économique accru, comme à l'époque de l'“Ordre nouveau”. Et à cette époque, la presse avait dénoncé des cas de repas gratuits avariés et distribués… Et ce n'est qu'un des nombreux exemples de la corruption qui a toujours existé en Indonésie. À ce titre, il faut nuancer la rupture entre Prabowo et le président sortant : Jokowi avait lui-même laissé le Parlement affaiblir la KPK (la Commission d'éradication de la corruption). Il a ensuite utilisé les moyens de l'État pour favoriser les ambitions politiques de son fils. La presse a aussi été largement affaiblie par différentes lois en 2018, 2022 et mars 2025, élargissant notamment la notion de blasphème dans le Code pénal ou restreignant la diffusion d'investigations. De son côté, le président Prabowo s'est déjà prononcé : la presse doit être fidèle et loyale à l'Indonésie… »
Qui est Prabowo Subianto ?
« La société indonésienne est assez peu politisée et il n'y a pas beaucoup de corpsintermédiaires pour absorber le mécontentement »
« Il est fils d'une grande famille indonésienne : son grand-père a fondé la banque d'Indonésie et son père a été ministre des Finances. Ce dernier l'a poussé à faire une carrière militaire pour que Prabowo approche le pouvoir. Il a fondé toute sa carrière militaire sur la violence. Il est notamment accusé de crimes de guerre, en particulier dans la province d'Aceh, au nord de l'île de Sumatra et au Timor oriental. En 1975, le Timor oriental se libère du joug colonial portugais et obtient son indépendance, mais est rapidement envahi par l'armée indonésienne. L'Indonésie possède déjà une partie de l'île de Timor, mais veut s'étendre pour satisfaire ses velléités nationalistes. Et pour ce faire, l'armée assassine entre 100 000 et 200 000 personnes, dont de nombreux civils. L'ensemble des exactions commises a été mis sous le boisseau comme tous les crimes commis sous le régime de Suharto. En 1998, suite à un mouvement de protestation qui dégénère en émeutes et qui fait 1 200 morts, Suharto démissionne. La même année, Prabowo rate un coup d'État face au nouveau président Jusuf Habibie et quitte le pays. Mais après un court et confortable exil en Jordanie, il revient au début des années 2000 pour reprendre une carrière politique. Idéologiquement, c'est un pragmatique de l'autoritarisme, comme l'était Suharto. Il pratique un capitalisme d'État, qui favorise les intérêts de sa famille et de ses proches, dans une économie de conglomérats qui repose encore beaucoup sur les ressources naturelles. »
Y a-t-il une continuité entre le régime de l'« Ordre nouveau » et celui de Prabowo ?
« Sous l'“Ordre nouveau”, la liberté de la presse était extrêmement limitée et les fonctionnaires étaient obligés de voter. On les emmenait en bus pour être sûr qu'ils glissent le bon bulletin dans l'urne. Même chose dans les campagnes où on menaçait de ne pas réparer les routes si tel village ne votait pas à 90 % pour le parti au pouvoir… Depuis 1998, l'Indonésie est une démocratie (ou du moins, l'était jusqu'à ces derniers temps) dans la mesure où les élections sont libres, la liberté d'expression existe, la liberté de la presse également. Les choses ont néanmoins déjà dérapé sous le deuxième mandat de Jokowi. Le président sortant avait un côté développementaliste autoritaire : son projet de nouvelle capitale construite au milieu de nulle part à Kalimantan, dans la partie indonésienne de Bornéo, incarne bien cette ambition de démesure. Et sur ce point, Prabowo accélère le mouvement. »
Y a-t-il une opposition de gauche à Prabowo ?
« Pour l'instant, c'est surtout la presse qui est visée »
« Oui, mais elle reste très limitée à l'échelle nationale, notamment parce que l'“Ordre nouveau” et les régimes qui lui ont succédé ont falsifié la mémoire du pays en imposant un puissant récit anticommuniste [voir encadré]. Aujourd'hui, la société indonésienne est assez peu politisée et il n'y a pas beaucoup de corps intermédiaires pour absorber le mécontentement. Des structures syndicales existent, mais l'économie informelle emploie près de 50 % des travailleurs. Il est donc difficile pour les gens de se mobiliser. Les manifestations qu'on observe aujourd'hui ont surtout lieu dans quelques grandes villes étudiantes. Avec l'inflation qui repart et toute l'incertitude autour des droits de douane américains, l'économie indonésienne risque de flancher. La situation peut devenir explosive pour Prabowo et le gouvernement si les gens qui manifestent pour le respect de l'État de droit sont rejoints par des gens inquiets pour des raisons socio-économiques. »
Que peut-on espérer pour la suite de ce mouvement ?
« Déjà, on peut souhaiter qu'il continue et qu'il n'y ait pas de répression trop féroce. Celle-ci n'a pas encore atteint le même niveau que sous Suharto, mais pourrait en prendre le chemin. Pour l'instant, c'est surtout la presse qui est visée. La jeunesse mobilisée compte parmi elle des enfants des élites indonésiennes, donc on peut tabler sur une retenue de la part des forces de l'ordre, voire même un relai des revendications au plus haut niveau du pouvoir. On peut au mieux espérer que la restauration de l'“Ordre nouveau” ne soit pas trop rapide. Mais est-ce qu'on n'y est pas déjà ? »
« En 1966, après une période de très fortes tensions entre un communisme extrêmement puissant et l'armée, avec Sukarno (premier président de l'Indonésie au pouvoir de 1945 à 1967) qui arbitrait au milieu, il y a eu une tentative de putsch durant laquelle les sept principaux membres de l'état-major ont été tués. Le général Suharto fut le seul épargné. Il a réagi extrêmement vite et s'est emparé du pouvoir en quelques mois en lançant une effroyable répression anticommuniste. Il y a eu entre 500 000 et trois millions de morts, avec un génocide de proximité encouragé par l'armée. Tout un tas de gens massacrait leurs voisins sous prétexte qu'ils étaient peut-être communistes. Le régime de l'“Ordre nouveau” a ensuite déversé sa propagande sur l'Indonésie pendant 30 ans, en expliquant que les communistes avaient eux-mêmes tué ces gens et qu'ils représentaient toujours un danger latent. Cette inversion de la mémoire a profondément marqué la scène politique indonésienne qui est désormais amputée de quasiment tout son flanc gauche. »
21.06.2025 à 00:07
Émilien Bernard
Dans la BD La Nuit sera longue, l'auteur italien Zérocalcare décrit le calvaire de militants européens antifascistes arrêtés en Hongrie et en Europe après avoir manifesté contre un rassemblement néonazi. Les images ont fait le tour des médias : une jeune femme traînée par une laisse, menottes aux poignets, chaînes aux pieds, exhibée devant un tribunal hongrois. Le tort de cette instit' italienne de 39 ans prénommée Ilaria ? Avoir manifesté contre des néonazis à Budapest, le 11 février (…)
- CQFD n°242 (juin 2025) / BouquinDans la BD La Nuit sera longue, l'auteur italien Zérocalcare décrit le calvaire de militants européens antifascistes arrêtés en Hongrie et en Europe après avoir manifesté contre un rassemblement néonazi.
Les images ont fait le tour des médias : une jeune femme traînée par une laisse, menottes aux poignets, chaînes aux pieds, exhibée devant un tribunal hongrois. Le tort de cette instit' italienne de 39 ans prénommée Ilaria ? Avoir manifesté contre des néonazis à Budapest, le 11 février 2023, « le jour de l'honneur » des bas du front venus de toute l'Europe1. Pour l'occasion, deux fascistes ont été bousculés, récoltant cinq et huit jours d'ITT, ouin ouin. Sans que rien ne la relie directement à ces faits, Ilaria risquait 20 ans de prison.
Camarade à tendance punk, Zerocalcare a signé pléthore de super bandes dessinées, dont Kobané Calling (Cambourakis, 2019), reportage auprès des combattants kurdes et internationalistes luttant contre les dangereux tarés de Daech. Dans La Nuit sera longue (Nada, 2025), il s'attaque à la vague de répression frappant les militants antifascistes en Hongrie, mais aussi dans toute l'Europe. C'est à la fois drôle et glaçant. Certaines cases font rire (jaune) : « Vous allez me dire que [ces néonazis] sont cons comme des sacs de gravier. Mais ces graviers, ils prennent 18 000 euros de financements publics. Pour faire les cosplayers de nazis. » D'autres accablent, à l'image de celles qui décrivent le traitement inique d'Ilaria au tribunal : « Quelque chose qui a à voir avec l'exposition du corps de l'ennemi, amené fers aux pieds, pour être vu par tout le monde, comme un trophée de chasse. »
La position de Zerocalcare est claire :« Un principe éternel. Dix mots. On ne lâche pas les gens qui finissent en taule. » Militant anticarcéral, il s'est lui-même fait défoncer la gueule par des fascistes italiens (dents, mâchoire et nez cassés) mais refusé de porter plainte contre ses agresseurs arrêtés. Raison de plus pour s'indigner du sort réservé aux ennemis de l'hydre brune. Car il ne s'agit pas seulement d'Ilaria, mais aussi de Tobias (arrêté avec elle), Macha ou Gino. Si les trois premiers ont été libérés, le dernier a été arrêté en France où il risque l'extradition en Hongrie. Une réalité que Zerocalcare interroge en décrivant « les lieux où tous les discours abstraits et les déclarations romantiques se prennent la réalité en pleine face. Comme à Fresnes, aux portes de Paris, où un antifasciste [Gino] attend dans une cellule de savoir si la France va ou non le livrer à un pays qui veut l'enterrer en prison ». En postface de l'ouvrage, des « antifascistes indomptables » rappellent la gravité de cette situation documentée par Zerocalcare : « L'affaire de Budapest illustre de manière alarmante la façon dont l'engagement antifasciste est aujourd'hui criminalisé et réprimé avec une extrême sévérité, tandis que les réseaux d'extrême droite continuent d'opérer en toute impunité. » Un cri d'alarme2.
1 Ces pelles à merde célèbrent la date anniversaire d'une contre-attaque en 1945 par des soldats allemands et hongrois contre le siège de l'Armée rouge sur Budapest.
2 Signalons qu'une partie des bénéfices de l'ouvrage seront versés à une caisse de solidarité « en soutien aux antifascistes victimes de la répression ».
21.06.2025 à 00:03
Étienne Jallot
Dans le rap, l'univers conspi ne date pas d'hier. Certains s'attellent à le combattre, phrase par phrase, persuadés qu'il mène à l'extrême droite. Mais n'est-ce pas aussi, dans ses aspects les moins délirants et les plus « anti-système », l'expression artistique d'une révolte ? « Les Illuminatis veulent mon esprit, mon âme et mon corps/Les sociétés secrètes gardent toujours un œil sur moi » rappait déjà Prodigy, du groupe Mopp Deep, dans son morceau « Illimunati » en 1995. Autre (…)
- CQFD n°242 (juin 2025) / Pirikk, Le dossierDans le rap, l'univers conspi ne date pas d'hier. Certains s'attellent à le combattre, phrase par phrase, persuadés qu'il mène à l'extrême droite. Mais n'est-ce pas aussi, dans ses aspects les moins délirants et les plus « anti-système », l'expression artistique d'une révolte ?
« Les Illuminatis veulent mon esprit, mon âme et mon corps/Les sociétés secrètes gardent toujours un œil sur moi » rappait déjà Prodigy, du groupe Mopp Deep, dans son morceau « Illimunati » en 1995. Autre exemple, Rockin' Squat, rappeur du groupe Assassin, qui sort en 2007 un son intitulé « Illuminazi 666 ». Plus récemment, Booba assurait que le vaccin contre le Covid était un « génocide planétaire » et Maître Gims que les Égyptiens antiques avaient inventé l'électricité ! Moins marrant, Freeze Corleone se la joue, depuis quelques années, conspi-nazi et antisémite, avec des punchlines franchement abjectes du style « J'arrive déterminé comme Adolf dans les années 30 ». Signes d'un danger de fascisation imminent ? Inquiets, les libéraux-laïcards veillent au grain, tel Rudy Reichstadt, directeur de Conspiracy Watch1. Sur son site, des articles décortiquent régulièrement les paroles complotistes de certains rappeurs. L'un deux s'attaque à la rappeuse marseillaise Keny Arkana, sa vision occulte du pouvoir, sa rhétorique antivax, mais aussi sa critique des médias ou de l'armement – « Des petites bombes par-ci par-là, ça relance l'économie pour reconstruire, les investisseurs sont déjà là ». Interviewé chez ses amis du Point, Reichstadt dénonce le danger des théories conspis : « Elles encouragent la désaffection à l'égard de la démocratie, qu'elles envisagent comme une imposture sous prétexte qu'elle n'est pas parfaite. » N'est-ce pas plutôt la preuve que certains rappeurs pressentent que nos démocraties sont en effet des impostures, notamment lorsqu'elles prennent des tournants sécuritaires et autoritaires ?
Le rap est aussi un art qui appelle à mobiliser des imaginaires variés
Lors des législatives 2024, une vingtaine de rappeurs signent le morceau « No Passaran », où ils clament leur opposition à l'extrême droite. Entre les paroles anti-Rassemblement national, des références complotistes aux francs-maçons. Signe qu'ils partagent la vision du monde de ceux qu'ils disent combattre ? Pour le philosophe Norman Ajari2, ce serait oublier que le rap est aussi un art qui appelle à mobiliser des imaginaires variés, et que « le complot possède lui aussi son esthétique, qui est hautement efficace ». Il rappelle que « les Africains de l'Ouest ont assimilé les esclavagistes européens à des moissonneurs d'âmes, de corps et de sang » – des mythes pour représenter leurs oppressions, et les combattre. Mêlée à la bataille contre l'extrême droite, l'utilisation du logiciel complotiste dans le rap n'aurait-il pas un potentiel explosif qu'on devrait lui reconnaître, plutôt que dénoncer avec mépris ceux qui le mobilisent dans les mêmes combats que nous ?
Cet article a été publié sur papier sous le titre original « Illumi-pas-nazis ? ».
21.06.2025 à 00:02
Lluno
Interdiction des activités ludiques, régime de détention spécial, construction express de places supplémentaires en Algeco… À deux ans de la présidentielle, Darmanin fait son beurre (rance) sur le dos des prisonniers. Retour sur six mois d'escalade démagogique. Il ne manquait plus que lui ! Mardi 13 mai, en direct à la téloche, Emmanuel Macron s'est, à son tour, lâché sur les prisons. Coupant l'herbe sous le pied de ses omniprésents ministres de la Justice et de l'Intérieur, il s'est (…)
- CQFD n°242 (juin 2025) / Audrey EsnaultInterdiction des activités ludiques, régime de détention spécial, construction express de places supplémentaires en Algeco… À deux ans de la présidentielle, Darmanin fait son beurre (rance) sur le dos des prisonniers. Retour sur six mois d'escalade démagogique.
Il ne manquait plus que lui ! Mardi 13 mai, en direct à la téloche, Emmanuel Macron s'est, à son tour, lâché sur les prisons. Coupant l'herbe sous le pied de ses omniprésents ministres de la Justice et de l'Intérieur, il s'est déclaré favorable à la location de places en établissement pénitentiaire à l'étranger. Tout feu tout flamme, Gérald Darmanin lui a emboîté le pas quelques jours plus tard en proposant, sans concertation, la construction d'une taule de haute sécurité à Saint Laurent-du-Maroni. Une prison spéciale au cœur de la jungle guyanaise… Ça vous rappelle quelque chose ? Mais comment en est-on arrivé à une telle surenchère ? Pour comprendre, il faut revenir un an plus tôt, un jour de mai 2024, en Normandie. Lourdement armé, un commando attaque un convoi pénitentiaire au péage d'Incarville, faisant deux morts et trois blessés parmi les surveillants présents. Le détenu transporté, jusqu'alors considéré comme peu dangereux, aurait lui même coordonné l'évasion depuis sa cellule. L'événement remet alors immédiatement une pièce dans la machine à fantasmes des médias et des politiques : que se passe-t-il vraiment derrière les murs d'enceinte et les miradors des presque 190 établissements pénitentiaires français ?
Il faut souligner une réalité carcérale : en prison, on meurt– et beaucoup plus qu'àl'extérieur
Il se passe qu'en prison, on vit dans des conditions indignes. D'abord, la promiscuité : au total « il y a 5 500 matelas par terre » dans les prisons françaises, explique Dominique Simonnot, la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), dont le dernier rapport annuel paru fin mai dénonce « une croissance inquiétante et nocive de la surpopulation carcérale ». Ensuite, l'ennui. Le travail – peu intéressant et rémunéré entre 20 et 45 % du SMIC – continue d'être vu comme un privilège ou une récompense et ne concerne qu'un tiers des détenus selon l'Observatoire international des prisons (OIP). Les autres activités – ateliers d'écriture, projections, activités sportives, sorties encadrées, etc. – n'ont quant à elles jamais retrouvé leur niveau d'avant Covid. Or, rappelle encore le rapport du CGLPL : « L'absence d'activités constitue un facteur évident d'accroissement des tensions […] Il relève du bon sens le plus élémentaire que le fait de maintenir trois personnes enfermées 22 heures sur 24 dans 9 m2, sans autre horizon que télévisuel, ne peut qu'impacter négativement leur santé mentale. » Enfin, il faut souligner une autre réalité carcérale, conséquence tragique des précédentes : en prison, on meurt – et beaucoup plus qu'à l'extérieur. Selon l'OIP, « on compte en moyenne un décès tous les deux ou trois jours. La plupart du temps par suicide ».
Mais après Incarville, ces voix sont rendues inaudibles au profit de celles qui affirment avec véhémence qu'en prison, on se prélasse, on téléphone, on corrompt, on se fait livrer des kebabs par drone, on trafique et surtout, on organise la criminalité. Cette conception du prisonnier comme agent criminel fomentant de l'intérieur le chaos du dehors apparaît en même temps que l'importation dans le débat français du terme « narcotrafic » en remplacement de « trafic de drogue », ringardisé. Ce qui se joue ici, c'est la fabrication d'un ennemi intérieur supplémentaire, un énième barbare. Le prisonnier n'est plus un citoyen ayant commis une faute et devant travailler à sa réhabilitation, mais un criminel en exercice qu'il faut – à tout prix – couper de l'extérieur. Punir, de plus en plus brutalement, sans discernement et « sans commisération » comme le disait Bruno Retailleau en mai sur CNEWS. Le sujet est une aubaine pour ces figures de droite en campagne permanente cherchant à rejeter les accusations de laxisme formulées à leur encontre par leurs petits camarades du Rassemblement national (RN).
C'est dans cette ambiance répressive que Gérald Darmanin, fraîchement déplacé à la Justice, fait un tabac en janvier dernier en annonçant un nouveau régime de détention ultra restrictif. Son idée : prendre une prison, la vider, la sécuriser davantage et y placer les 100 plus gros trafiquants de drogue à l'isolement quasi total. La proposition est si bien reçue que, dans les mois qui suivent, on parle finalement de 200, puis de 1 000 détenus, de deux, puis de quatre établissements sélectionnés.
« Aucune étude n'a démontré d'effet dissuasif de l'emprisonnement sur la délinquance ni d'efficacité à prévenir la récidive »
En février, le « ministre des prisons » profite d'une polémique autour de supposés soins esthétiques1 à la maison d'arrêt de Toulouse-Seysses pour interdire l'ensemble des activités « ludiques et provocantes » en détention, dès lors qu'elles n'ont trait ni à la langue française ni au sport. « Personne ne comprend pourquoi ces activités existent », tonne le ministre qui assure que 95 % (au doigt mouillé ?) des Français sont d'accord avec lui. « Tout était faux d'un bout à l'autre dans cette histoire », s'agace la contrôleuse générale dans les pages du Monde, alors que le Conseil d'État vient d'interdire l'interdiction. Mais qu'importe : on a montré les muscles, la polémique a pris, c'est bien ça qui compte. En mars, Darmanin affirme que les détenus paieront bientôt pour les coûts engendrés par leur incarcération (ça s'appelait les « frais d'entretien » et ça a été supprimé en 2003). En mars toujours, Gérald se souvient du ministre de l'Intérieur qu'il était et recommence à s'en prendre aux étrangers : puisqu'ils représentent 25 % de la population carcérale, explique-t-il en substance, il suffirait de les envoyer purger leurs peines dans « leurs pays d'origine » pour régler le problème de la suroccupation.
L'hypothèse serait en travail. Dans la foulée, il rédige une circulaire pour inciter les procureurs à requérir aux Obligations de quitter le territoire français (OQTF) contre tous les détenus étrangers, dès que c'est possible. Avril enfin : annonce de la construction rapide de 3 000 nouvelles places de prison grâce à des modules en béton armé, préfabriqués puis assemblés à l'ombre des bâtiments actuels. Le prisonnier, pris comme objet d'attention politique, fait recette comme jamais. Toutes ces annonces, aussi spectaculaires soient-elles, ne régleront pourtant rien ni aux problèmes de la violence ni à ceux de la taule. Augmenter le nombre de places de prison ne fait pas baisser la surpopulation carcérale, cela augmente juste le nombre de personnes détenues. Et bien sûr, il est peu probable que ça fasse baisser la criminalité. Comme le souligne l'OIP : « Aucune étude n'a démontré d'effet dissuasif de l'emprisonnement sur la délinquance ni d'efficacité à prévenir la récidive. » Et si tant est que l'on croie qu'enfermer des personnes permet de les réhabiliter, c'est plutôt l'incapacité de l'administration à recruter les agents nécessaires à ces missions qui devrait alerter au ministère. Actuellement, il y aurait 7 000 postes vacants de matons et de conseillers d'insertion pénitentiaire. Ça tente quelqu'un ?
Au beau milieu de ce festival d'annonces, on a assisté à l'irruption d'un éphémère et mystérieux groupe de « Défense des droits des prisonniers français » (DDPF). Tout au long du mois d'avril, des prisons ont été attaquées, des véhicules incendiés, des logements de surveillants pris pour cibles et bombés de l'énigmatique sigle. L'affaire a d'abord mis les renseignements en PLS. Constatant des tags en écriture inclusive, ils pensent à l'« ultra gauche », mais les tirs à l'arme automatique ne collent pas. Le crime organisé en mode revanche après les récents coups de filet et le vote de la loi dite « pour sortir la France du piège du narcotrafic » ? Darmanin se frotte les mains : pour lui cette vague d'actions constitue bien la preuve que les trafiquants ont franchi un cap et qu'il faut de toute urgence les boucler et « les couper du monde ». À l'en croire, la République serait définitivement en péril et la prison son dernier rempart. Depuis, une vingtaine de personnes ont été mises en examen sans grand lien les unes avec les autres. Le groupe, qui n'existait pas ailleurs que sur Telegram, s'est évaporé dans la nature.
1 Dans un communiqué du 12 février dernier, le syndicat Force ouvrière justice du centre pénitentiaire s'insurgeait de voir des « soins du visage » proposés aux détenus à l'occasion de la Saint Valentin. Il s'agissait en réalité de donner gratuitement des conseils de soins de la peau à des détenus ayant parfois une piètre estime d'eux-mêmes, dans le but d'aider à leur réinsertion