20.08.2025 à 06:00
(Nairobi) – Le groupe armé M23, contrôlé par le Rwanda, a exécuté sommairement plus de 140 civils, majoritairement hutus, dans au moins 14 villages et petites communautés agricoles en juillet 2025 près du parc national des Virunga, dans l’est de la République démocratique du Congo, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. D’après des informations crédibles, le nombre de personnes tuées sur le territoire de Rutshuru depuis juillet pourrait dépasser les 300 victimes, représentant une des pires atrocités commises par le M23 depuis sa résurgence fin 2021.
Entre le 10 et le 30 juillet, des combattants du M23 ont sommairement exécuté des habitants et des agriculteurs locaux, y compris des femmes et des enfants, dans leurs villages, leurs champs et près de la rivière Rutshuru dans le groupement de Binza au sein du territoire de Rutshuru, dans la province du Nord-Kivu. Des témoignages, des sources militaires et l’ONU indiquent que l’armée rwandaise – les Forces rwandaises de défense (Rwanda Defence Force, RDF) – étaient aussi impliquées dans les opérations du M23.
« Le groupe armé M23, qui bénéficie de l’appui du gouvernement rwandais, a attaqué plus d’une dizaine de villages et de zones agricoles en juillet et a perpétré des dizaines d’exécutions sommaires de civils principalement hutus », a déclaré Clémentine de Montjoye, chercheuse senior sur la région des Grands Lacs à Human Rights Watch. « À moins que les responsables de ces crimes de guerre, y compris aux plus hauts niveaux, ne fassent l’objet d’enquêtes appropriées et soient sanctionnés, ces atrocités ne feront que s’intensifier. »
Entre la mi-juillet et la mi-août, Human Rights Watch a mené des entretiens téléphoniques avec 36 personnes, dont 25 témoins, ainsi que des activistes locaux, des travailleurs médicaux, des sources militaires, du personnel des Nations Unies et d’autres sources informées. Human Rights Watch a analysé des vidéos et des photographies pertinentes, consulté des médecins légistes et corroboré les témoignages à l’aide de cartes et d’images satellite.
Human Rights Watch a établi une liste de 141 personnes qui ont été tuées ou qui sont portées disparues et dont il est à craindre qu’elles ne soient mortes. Le 6 août, le Bureau du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU a rapporté qu’« au moins 319 civils ont été tués par le M23, soutenu par des membres des [Forces rwandaises de défense], entre le 9 et le 21 juillet dans quatre villages de Rutshuru ». Ce chiffre confirme les informations que Human Rights Watch a reçues d’autres sources. Human Rights Watch a également reçu des informations selon lesquelles le M23 a exécuté 41 autres civils entre le 30 juillet et le 8 août dans le groupement de Binza, mais cela n’a pas pu être vérifié de manière indépendante.
Human Rights Watch a écrit aux autorités rwandaises le 7 août et à Bertrand Bisimwa, le chef du M23, le 8 août pour demander des informations sur les meurtres, mais n’a reçu aucune réponse. L’Alliance Fleuve Congo (AFC), une coalition politico-militaire qui inclut le M23, a rejeté le 7 août les allégations de l’ONU. Le 11 août, le gouvernement rwandais a nié les allégations de l’ONU selon lesquelles l’armée rwandaise était impliquée dans les opérations et a affirmé qu’un groupe armé rival du M23 avait perpétré les meurtres.
Human Rights Watch a documenté ou obtenu des informations crédibles sur des meurtres survenus en juillet dans les localités de Busesa, Kakoro, Kafuru, Kasave, Katanga, Katemba, Katwiguru, Kihito, Kiseguru, Kongo, Lubumbashi, Nyamilima, Nyabanira et Rubare. Ces zones étaient alors sous le contrôle du M23, et plusieurs commandants du M23 ont été identifiés dans certains lieux.
Click to expand Image Carte de la zone du territoire de Rutshuru, dans l’est de la République démocratique du Congo, où les massacres ont eu lieu. Graphique © 2025 Human Rights WatchDes témoins d’attaques ont expliqué que les combattants du M23 leur ont ordonné d’enterrer immédiatement les corps dans les champs ou de les laisser sans sépulture, privant les familles de la possibilité d’organiser des funérailles. Les combattants du M23 ont également jeté des corps, y compris de femmes et d’enfants, dans la rivière Rutshuru.
Ces massacres semblent faire partie d’une campagne militaire contre des groupes armés rivaux, en particulier les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé rwandais à majorité hutue, créé par des personnes ayant pris part au génocide de 1994 au Rwanda.
Dans les cas de meurtres signalés à Human Rights Watch, la plupart des victimes appartenaient à l’ethnie hutue et, dans une moindre mesure, à l’ethnie nande. Le fait que le M23 cible des civils hutus vivant à proximité des bastions des FDLR soulève de graves préoccupations de nettoyage ethnique dans le territoire de Rutshuru, a indiqué Human Rights Watch.
Les recherches de Human Rights Watch indiquent que les opérations militaires du M23 ont été menées par le 1er Bataillon de la 1re Brigade, commandé par le colonel Samuel Mushagara et le général de brigade Baudoin Ngaruye, respectivement. Le général Baudoin Ngaruye fait l’objet de sanctions de l’ONU pour son rôle dans les crimes de guerre commis par le M23. Les habitants ont également décrit la participation des forces militaires rwandaises dans l’opération du M23, identifiant les soldats rwandais grâce à leurs uniformes et leurs accents. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et des sources militaires ont confirmé l’implication de l’armée rwandaise dans les opérations.
Le gouvernement rwandais, qui contrôle de facto le territoire occupé par le M23, devrait permettre aux experts médico-légaux internationaux indépendants et de l’ONU de préserver et d’analyser les preuves de crimes de guerre, y compris le Haut-Commissariat aux droits de l'homme et la Commission d’enquête indépendente sur la RD Congo, une fois que celle-ci sera opérationnelle.
Le Conseil de sécurité de l’ONU, l’Union européenne et les gouvernements devraient condamner ces abus graves, imposer de nouvelles sanctions aux responsables d’abus et faire pression pour que les commandants impliqués dans des crimes de guerre soient arrêtés et traduits en justice. Les gouvernements bailleurs de fonds qui fournissent une assistance militaire au Rwanda devraient revoir de toute urgence leurs programmes pour s’assurer que leur aide ne soutient pas les violations.
Les meurtres dans le territoire de Rutshuru ont été commis quelques semaines après un accord préliminaire dans le cadre de l’accord de paix négocié par les États-Unis et signé le 27 juin entre la RD Congo et le Rwanda, qui exige que la RD Congo mette en œuvre un plan pour « neutraliser » les FDLR pendant que le Rwanda se retire du territoire congolais. Cet accord exige aussi des parties au conflit de protéger les civils, y compris en facilitant la liberté de mouvement de la mission de maintien de la paix de l’ONU, autrement connue sous le nom de MONUSCO. Le mécanisme conjoint de coordination de la sécurité de l’accord devrait veiller à ce que les crimes commis lors de toute opération menée contre les FDLR fassent l’objet d’enquêtes crédibles, a déclaré Human Rights Watch.
« Les massacres perpétrés par le M23, soutenu par le Rwanda, mettent en lumière les écarts qui existent entre la rhétorique sur la scène internationale et la réalité pour les civils dans l’est de la RD Congo », a conclu Clémentine de Montjoye. « Les gouvernements qui concluent des accords de paix restent soumis au droit de la guerre, et les personnes responsables de crimes de guerre devraient encore faire l’objet d’enquêtes approfondies et être traduites en justice. »
Pour de plus amples détails, des précisions sur le droit international et des témoignages, veuillez lire la suite.
Allégations de massacres perpétrés par le M23
Les meurtres commis par le M23 qui ont débuté autour du 10 juillet auraient commencé dans des champs au nord et au sud de la route qui traverse Kiseguru et Katwiguru dans le territoire de Rutshuru. Des témoins et des habitants ont déclaré que des combattants du M23 ont encerclé et bloqué toutes les routes dans le secteur pour empêcher les personnes de partir. Après le 14 juillet, des témoins ont raconté que le M23 a exécuté sommairement des personnes à Nyamilima, à 25 kilomètres de Kiseguru. Human Rights Watch a documenté des exécutions perpétrées par le M23 jusqu’au 30 juillet à Nyabanira, ciblant notamment des personnes venues chercher ou enterrer leurs proches ou chercher de la nourriture dans leurs champs.
Human Rights Watch a analysé 21 photographies et vidéos envoyées directement aux chercheurs qui montraient les corps des victimes. En raison du manque de métadonnées dans les fichiers, Human Rights Watch n’a pas été en mesure de confirmer avec exactitude les lieux, dates ou heures d’enregistrement de ces images. L’identité de certaines victimes a cependant été confirmée par les récits de témoins.
Les images correspondent fortement à des exécutions à la machette et par balles, d’après le Groupe d’experts médico-légaux indépendants (Independent Forensic Expert Group, IFEG) du Conseil international de réhabilitation des victimes de torture (International Rehabilitation Council for Torture Victims).
Dans sa déclaration du 7 août, l’AFC/M23 a affirmé que certaines des localités où l’ONU a signalé des meurtres – certains corroborés par les recherches de Human Rights Watch – se trouvent principalement dans le parc national des Virunga où les terres agricoles « n’existent pas ». Cette tentative de discréditer les allégations de l’ONU concernant les meurtres d’agriculteurs par le M23 dans ces zones ne reflète pas les faits : les images satellite et les témoignages indiquent que ces zones sont utilisées comme terres agricoles depuis des années.
Click to expand Image Dans sa déclaration du 7 août 2025, l’AFC/M23 a affirmé que « Kanyakiri, Kigaligali, Dubai, Katanga, Lubumbashi, Kasave, Kakoro et Busesa se situent majoritairement à l’intérieur du parc national des Virunga, une aire protégée où toute activité agricole est strictement interdite. Comment des agriculteurs auraient-ils pu être massacrés dans des champs qui n’existent pas ? » Même si la plupart des villages se trouvent à l’intérieur du périmètre du parc, les images satellites du 2 juillet 2025 montrent que ces zones étaient cultivées à l’époque, la zone protégée et boisée ne commençant effectivement qu’à l’ouest de la rivière Rutshuru. Des images antérieures attestent la présence de champs depuis au moins 2015. Image © 2025 Planet Labs PBC.Récits de témoins
Trois agriculteurs ont indiqué que les attaques sur leurs champs et la forêt voisine ont commencé le 10 ou le 11 juillet. « Je suis parti pour cacher des outils, mais quand je suis revenu chercher ma famille, j’ai vu que le M23 était avec eux », a raconté un agriculteur qui vivait dans un champ près de Kiseguru. « Je pouvais les voir [les membres de sa famille] de loin … ils ont tous été abattus. » Sa femme et leurs trois enfants – âgés de 9 mois à 10 ans – ont été tués devant lui.
Un autre homme a raconté que cinq membres de sa famille ont été tués à Katanga, à environ 12 kilomètres au nord-ouest de Kiseguru. « Nous nous sommes réveillés le 11 juillet et [le M23] était là en grand nombre.... [I]ls étaient déjà à notre porte.… [I]ls ont tué des gens avec des fusils et des machettes. »
Des villageois ont décrit avoir retrouvé les corps d’un homme de 47 ans et de ses quatre enfants, âgés de 11 à 17 ans, dans un champ à environ 18 kilomètres de Kiseguru le 11 juillet. « Nous l’avons trouvé dans son champ avec la tête coupée », a déclaré un homme qui a découvert et enterré les corps. « Ils ont tous été tués avec des machettes. Ils avaient la gorge tranchée. »
Un homme dont la femme et les deux enfants, âgés de 14 et 21 ans, ont été tués a déclaré avoir vu le M23 emmener sa famille depuis leur champ à Katanga le 10 juillet avec deux autres femmes et un enfant. Un témoin lui a dit plus tard qu’il avait vu le M23 les exécuter au confluent des rivières Rutshuru (également appelée Kitchuru) et Ivi (également appelée Rive), à environ 10 kilomètres au nord.
Une femme qui a vu des combattants du M23 tuer son mari à la machette le 11 juillet a décrit que, ce jour-là, le M23 avait rassemblé les femmes et les enfants. « Vers 10 heures du matin, nous avons été forcés de marcher vers l’endroit où nos vies allaient se terminer », a-t-elle raconté. « Nous marchions en silence. Si un enfant se mettait à pleurer, ils menaçaient de le tuer. Ils tuaient avec des couteaux. » Elle a précisé que le groupe comptait environ 70 personnes, y compris des femmes et des filles : « Nous avons marché toute la journée jusqu’à ce que nous atteignions le confluent des rivières Kitchuru [Rutshuru] et Rive [Ivi] le soir.… Ils nous ont ordonné de nous asseoir au bord de la rivière, et ils ont commencé à nous tirer dessus. » Elle a indiqué que les exécutions ont eu lieu près de Kafuru, et a identifié 47 personnes, dont des enfants, qui ont été tués. Elle a pu s’échapper parce qu’elle est tombée dans la rivière sans être touchée par une balle. Human Rights Watch a reçu des informations indiquant que le M23 avait commis des massacres à proximité de la rivière Rutshuru pendant plusieurs jours.
Des habitants et des témoins ont déclaré que le M23 avait continué à exécuter des personnes au moins jusqu’au 30 juillet.
Une femme a affirmé qu’un de ses proches figurait parmi les morts sur une photographie, analysée par Human Rights Watch, qui montrait six cadavres :
« Il était de Nyabanira et a fui jusqu’ici à Kiwanja, mais comme la vie est difficile ici, nous devons retourner dans nos champs à Nyabanira pour trouver de la nourriture. Lorsqu’on a de la chance, on en revient, lorsqu’on n’a pas de chance, on tombe sur le M23 et c’est la fin, c’est la mort. Mon [proche] est allé chercher de la nourriture le 30 juillet et n’est jamais revenu.… Une personne qui a vu son corps est venue nous le dire et nous a donné son chapeau. Nous l’avons reconnu sur la photo avec cinq autres hommes. »
Human Rights Watch a confirmé de manière indépendante les identités de quatre hommes sur la photo. Le Groupe d’experts médico-légaux indépendants ont analysé la photo et a conclu que des liens visibles aux mains ont été utilisés sur trois des hommes, tandis qu’un quatrième avait très probablement les mains liées dans le dos. Le groupe a confirmé que tous avaient des blessures compatibles avec des plaies par balles.
Plusieurs civils, dont le nombre exact est indéterminé, ont également été blessés dans les attaques. Trois sources médicales ont indiqué que des blessés, dont un enfant de 22 mois, ont été emmenés dans des établissements médicaux à proximité pour y être soignés. Ils présentaient des blessures par balles ou par machette.
Opérations anti-FDLR
Le secteur où les opérations militaires du M23 ont eu lieu jouxte le parc national des Virunga et les zones où les FDLR opèrent depuis des décennies. Depuis des années, les civils sont pris entre au milieu du conflit du fait des combats entre les forces gouvernementales congolaises et des groupes armés tels que les FDLR.
De nombreux agriculteurs tués dans les opérations de juillet étaient soit des habitants locaux, soit des travailleurs migrants qui avaient quitté des villages et des villes plus éloignés, tels que Tongo et Kanyabayonga, pour travailler dans la vallée fertile en bordure du parc. Certains vivaient dans les champs, où ils travaillaient avec toute leur famille.
Human Rights Watch a été informé par des habitants et par une source indépendante que le M23 avait interdit par intermittence l’accès aux terres agricoles parce qu’ils y menaient des opérations anti-FDLR, y compris le 10 juillet, et avait ordonné à la population de se rendre dans des centres urbains. Trois habitants ont expliqué qu’en juin, un commandant du M23, le colonel Claude Imani, avait donné aux agriculteurs l’autorisation de travailler à nouveau dans les champs.
Les images satellite confirment que la zone était à nouveau cultivée après le début du mois de juin, car de nombreux nouveaux défrichements sont visibles dans des champs précédemment envahis par la végétation. Les agriculteurs interviewés ont affirmé qu’ils ont dû payer chacun une taxe unique de 10 USD au M23 pour être autorisés à travailler à nouveau dans les champs.
« Ils sont toujours dans nos champs, ils disent qu’ils poursuivent les FDLR », a raconté un homme dont la femme et les deux enfants ont été tués le 11 juillet. « C’est pourquoi ils ont laissé les corps des hommes dans les champs, mais ils ont emmené les femmes et les enfants pour les tuer près de la rivière. »
Human Rights Watch a reçu des informations crédibles indiquant qu’il y a eu des combats entre le M23, les FDLR et d’autres groupes armés dans le secteur avant et au moment des exécutions sommaires. Une faction dissidente des FDLR, le RUD-Urunana rwandais (Rassemblement pour l’Unité et la Démocratie), contrôle certaines zones limitrophes du parc national des Virunga, y compris au sein de la chefferie de Bwisha, qui inclue le groupement de Binza, et possède une base près du confluent des rivières Ivi et Rutshuru.
Le 11 août, le ministre rwandais des Affaires étrangères, dans un message publié sur X, a imputé les meurtres aux combattants du Collectif des mouvements pour le changement (CMC)-Nyatura, un groupe armé hutu opposé au M23. Cependant, des témoins et des habitants ont raconté à Human Rights Watch que les combattants des FDLR et du CMC-Nyatura étaient rarement vus dans les villages depuis que le M23 a pris le contrôle de la zone en août 2024, et toutes les personnes interviewées ont attribué les meurtres au M23.
Le 30 juillet, des responsables du M23 ont annoncé par haut-parleurs à Ishasha que ceux qui étaient récemment arrivés devaient se présenter à l’administration. Cela incluait les personnes qui avaient fui les massacres dans les zones voisines, selon deux sources locales. Des hommes de moins de 45 ans ont été arrêtés et transférés vers un bâtiment près de la frontière avec l’Ouganda, où ils auraient été battus, et, le lendemain, ont été chargés dans des camions. Une source faisant partie du groupe a déclaré que le M23 leur a dit qu’ils ne voulaient pas qu’ils fuient leurs villages pour venir à Ishasha et les accusait de soutenir les FDLR, l’armée congolaise ou la coalition de groupes armés Wazalendo soutenue par le gouvernement congolais.
Une vidéo publiée sur les réseaux sociaux le 1er août, que Human Rights Watch a géolocalisée et vérifiée, montre des dizaines d’hommes contraints de marcher le long de la route principale à Ishasha en direction de la partie nord de la ville où se trouve le poste frontalier. Quelques-uns de ces hommes au moins ont été libérés par la suite.
Le M23 accuse régulièrement des opposants présumés, souvent sans preuve, de collaborer avec les FDLR, d’autres groupes armés ou l’armée congolaise. Human Rights Watch a documenté l’exécution le 7 juillet à Katwiguru d’un pasteur par le M23, qui l’accusait de collaborer avec les Wazalendo.
En mai, le M23 a rassemblé et arrêté des personnes à Goma, la capitale de la province du Nord-Kivu, et dans les zones environnantes, les accusant de soutenir les forces rivales. Le M23 a conduit certaines de ces personnes vers des lieux inconnus. Certaines des personnes arrêtées étaient originaires de Karenga, dans le territoire de Masisi, qui est également considéré comme un bastion des FDLR.
Droit international
Toutes les parties au conflit armé dans l’est de la RD Congo, y compris les groupes armés non étatiques, sont soumises au droit international humanitaire, qui interdit les attaques contre les civils, les exécutions sommaires, la torture, les déplacements forcés, le pillage et autres exactions.
Bien que le « nettoyage ethnique » ne soit pas formellement défini par le droit international, une commission d’experts des Nations Unies a défini le terme comme une « politique délibérée conçue par un groupe ethnique ou religieux visant à faire disparaître, par le recours à la violence et à la terreur, des populations civiles appartenant à une communauté ethnique ou religieuse distincte de certaines zones géographiques ».
Les individus qui commettent des violations graves du droit de la guerre avec une intention criminelle se rendent coupables de crimes de guerre. Les commandants qui avaient connaissance ou auraient dû avoir connaissance de violations graves commises par leurs forces et qui n’ont pas pris les mesures appropriées peuvent être poursuivis au titre de la responsabilité de commandement.
Les crimes de guerre et autres crimes d’atrocité relèvent de la compétence universelle, qui permet à d’autres pays de les juger indépendamment du lieu où les crimes ont été commis ou de la nationalité des victimes et des auteurs.
En octobre 2024, le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé que son bureau allait réactiver ses enquêtes en RD Congo en accordant la priorité aux crimes commis dans la province du Nord-Kivu depuis janvier 2022. L’enquête de la CPI devrait inclure les exécutions sommaires de civils par le M23 et les autres abus graves commis dans l’est de la RD Congo, a déclaré Human Rights Watch.
………………
Articles
France24 BBC Afrique RFI
Actualité CD
Vidéo
AfricaNews
Radio
RadioFrance
18.08.2025 à 09:00
(Los Angeles, 18 août 2025) – Les forces de l’ordre ont répondu aux manifestations qui se sont déroulées entre le 6 et le 14 juin 2025 contre les raids d’immigrants en Californie, à Los Angeles et dans ses environs, en faisant usage d’une force excessive et en faisant preuve d’une brutalité délibérée, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui.
Les policiers ont tiré des gaz lacrymogènes, des billes au poivre, des balles en mousse dure et des grenades assourdissantes directement sur des manifestants, journalistes et d’autres observateurs, souvent à bout portant et fréquemment sans avoir été provoqués, et sans donner d’avertissement suffisant. Des dizaines de personnes ont été blessées et souffrent de contusions et graves lacérations, de fractures, de commotions cérébrales, d’une amputation du doigt et de lésions oculaires graves.
« Les raids généralisés contre les immigrants ont terrorisé les communautés de Los Angeles et poussé des milliers de personnes à descendre dans les rues pour manifester », a déclaré Ida Sawyer, directrice de la division Crises, conflits et armes à Human Rights Watch. « La réponse agressive des forces de l’ordre aux niveaux local, étatique et fédéral à ces manifestations a été de violemment réprimer le droit du public à exprimer son indignation et celui des médias à informer en toute sécurité. »
Les manifestations ont été déclenchées par une escalade spectaculaire du nombre de raids contre les immigrants à Los Angeles et dans ses environs, après que l’administration Trump a ordonné à l’agence chargée de l’immigration et des douanes (Immigration and Customs Enforcement, ICE) d’augmenter le nombre d’arrestations quotidiennes d’immigrants sans papiers. Des agents fédéraux lourdement armés ont fait irruption dans des magasins, des entrepôts, des hôtels, des restaurants, des fermes, des stations de lavage de voitures, des stands de tacos et d’autres lieux de travail, et ont arrêté ceux qu’ils soupçonnaient d’être sans papiers dans le but de les expulser.
Human Rights Watch a observé les manifestations, s’est rendu sur les lieux des raids menés par l’ICE à Los Angeles et dans ses environs du 10 au 14 juin et a interrogé 39 personnes, parmi lesquels des manifestants, des journalistes, des observateurs spécialistes des questions juridiques, des secouristes bénévoles, des défenseurs des droits des immigrants et des organisateurs, ainsi que d’autres personnes touchées par ces raids. Les chercheurs ont analysé plusieurs poursuites judiciaires, des documents de la Los Angeles Press Club, des informations publiées dans les médias, ainsi que des photos et vidéos enregistrées pendant les manifestations et publiées sur les réseaux sociaux ou partagées directement avec les chercheurs.
Human Rights Watch a recensé 65 cas dans lesquels les agents des forces de l’ordre de diverses unités locales, étatiques et fédérales ont blessé des manifestants, des journalistes et d’autres observateurs, bien que leur nombre réel soit probablement beaucoup plus élevé. Au cours des trois semaines qui ont suivi le 6 juin, plus de 280 personnes ont contacté l’American Civil Liberties Union (ACLU) de Californie du Sud, et ont pour la plupart signalé avoir été blessées par des agents des forces de l’ordre alors qu’elles participaient à des manifestations.
Les premières manifestations importantes ont commencé le 6 juin, quand des agents de l’ICE ont fait des descentes dans plusieurs endroits, dont deux usines d’Ambiance Apparel dans le Fashion District à Los Angeles. Le 7 juin, une altercation entre un groupe de manifestants et des agents fédéraux armés et des adjoints du département du shérif de Los Angeles (LASD) a eu lieu dans la banlieue de Paramount, en face d’un magasin Home Depot juste à côté d’un complexe de bureaux où une descente était prévue.
Dans une directive publiée le 7 juin, le président américain Donald Trump a déclaré que les manifestations de Los Angeles « constituaient une forme de rébellion contre l’autorité du gouvernement des États-Unis », a fait appel à la Garde nationale et a autorisé le déploiement de « tout autre membre des forces armées régulières si nécessaire ». Le 9 juin, l’administration a mobilisé 700 marines en service actif qui ont rejoint plusieurs milliers de soldats de la Garde nationale, dont la mission principale est de garder les bâtiments fédéraux. Des responsables locaux et étatiques se sont opposés aux mesures prises par Trump, alors même que la police locale avait agi de manière agressive pour mettre fin aux manifestations.
À partir du 6 juin et jusqu’au 14 juin au moins, les manifestants se sont rassemblés tous les jours devant le Metropolitan Detention Center, où des agents détenaient de nombreuses personnes sans papiers. Les manifestants ont également défilé devant d’autres bâtiments du gouvernement dans les environs du centre-ville de Los Angeles.
Human Rights Watch a maintes fois été témoin et documenté des cas où des agents des forces de l’ordre ont obligé des manifestants à quitter certaines zones, souvent sans justification apparente et sans donner d’ordres ou d’avertissements clairs et audibles. Des policiers ont fréquemment pointé et fait usage de dispositifs de lancement de projectiles « moins létaux » directement contre des manifestants, parfois à bout portant, notamment en tirant des gaz lacrymogènes, des billes au poivre, des balles en mousse dure et des grenades assourdissantes. Ces armes, bien que moins mortelles que les balles, peuvent causer des blessures graves et être parfois mortelles.
Human Rights Watch a documenté 39 cas de journalistes blessés par les forces de l’ordre, dont la plupart tenaient des caméras et portaient des badges identifiant clairement leur appartenance à la presse. Plusieurs d’entre eux semblent avoir été délibérément pris pour cible. Le 8 juin, un policier a tiré un projectile à impact cinétique directement sur Lauren Tomasi, une journaliste australienne de 9News, alors qu'elle faisait un reportage en direct à la télévision depuis le centre-ville de Los Angeles, lui laissant une contusion à la jambe.
Nick Stern Click to expand Image Photojournalist Nick Stern’s wound and the canister that was lodged in his leg. © 2025 Nick SternA deputy from the Los Angeles Sheriff’s Department fired a flash-bang device directly at British photojournalist Nick Stern, as he was covering the protest in Paramount and neighboring Compton, on June 7, 2025. Doctors later performed surgery to remove a three-inch canister from Stern’s leg, which had left a gaping hole that exposed muscle tissue.
Ryanne Mena Click to expand Image © 2025 Ryanne MenaLos Angeles Daily News reporter Ryanne Mena was hit with kinetic impact projectiles fired by Department of Homeland Security officers twice, first in her leg on June 6 in downtown Los Angeles, and then to her head in Paramount on June 7, giving her a concussion.
Jeremy Cuenca Click to expand Image © 2025 Jeremy CuencaPolice officers fired kinetic impact projectiles at journalist Jeremy Cuenca in downtown Los Angeles in the early afternoon on June 8, at close range, nearly severing the top of his little finger, damaging his camera, and leaving a large bruise on his inner thigh. Cuenca was in surgery for four hours later that day, as doctors worked to reattach his finger
Marshall Woodruff Click to expand Image © 2025 Marshall WoodruffOn June 14 in downtown Los Angeles, police officers fired less lethal projectiles at Marshall Woodruff, a filmmaker and photographer documenting police conduct during the protests, hitting him in the face and arm. The injuries caused a fracture to his face, serious bruising on his arm, and severe eye damage. Two months later, Woodruff remains unable to see out of his right eye.
Lauren TomasiOn June 8, a police officer fired a kinetic impact projectile directly at Lauren Tomasi, an Australian journalist from 9News, while she was reporting live on television from downtown Los Angeles, leaving a bruise on her leg.
Le 9 juin, un policier du Département de la police de Los Angeles (LAPD) a tiré à bout portant sur trois personnes, toutes connues pour leur engagement dans la lutte contre l’impunité policière, à l’aide de projectiles à impact cinétique (en mousse dure), causant à chacune d’entre elles de graves douleurs pendant plusieurs jours, selon deux de ces activistes et des vidéos examinées par Human Rights Watch. Avant de tirer sur l’un d’entre eux à l’aine, le policier a déclaré : « Je vais te tirer dessus parce que tu m’empêches de me concentrer. »
Un secouriste bénévole, qui a lui-même été hospitalisé après avoir été blessé par un projectile en mousse dure qui lui a causé une blessure profonde et béante, a déclaré avoir passé plusieurs heures dans le centre-ville de Los Angeles le 14 juin pour venir en aide à des personnes qui demandaient de l’aide. Parmi elles se trouvaient des manifestants touchés par des projectiles et saignant au niveau de la tête ou du visage, l’un d’entre eux avec une jambe cassée, et d’autres ayant des difficultés à voir ou à entendre à cause des grenades assourdissantes et des gaz lacrymogènes.
Quelques actes de violence contre la police, ainsi que des destructions de biens, ont été commis par des manifestants, principalement au début des manifestations. Human Rights Watch a constaté que la plupart des actes de violence perpétrés par des manifestants ont eu lieu à la suite d’actes de violence des forces de l’ordre, et que seule une minorité de manifestants s’était livrée à des actes de destruction. Dans la mesure où certains individus se sont livrés à des actes violents ou destructeurs, les forces de l’ordre n’ont pas limité leurs ripostes agressives à ces individus.
Human Rights Watch a établi que les forces de l’ordre avaient clairement violé le droit international relatif aux droits humains. Ces conclusions ont aussi des implications quant à la protection des droits civils garantie par la Constitution des États-Unis, ainsi qu’à deux lois récemment amendées de l’État de Californie, qui imposent des limites sévères quant aux circonstances et aux modalités dans lesquelles les forces de l’ordre peuvent recourir à la force pour disperser des manifestations et qui prévoient des mesures de protection pour les journalistes qui couvrent ces manifestations.
Le 31 juillet, Human Rights Watch a écrit au département de la Sécurité intérieure (Department of Homeland Security, DHS), au LAPD et au LASD, mais n’a pas reçu de réponse.
Dans une déclaration du 23 juin, le chef de la police de Los Angeles, Jim McDonnell, a déclaré que le LAPD procéderait à une « évaluation complète de chaque incident impliquant l’usage de la force » et prendrait des mesures à l’encontre de tout policier « qui n’aurait pas respecté » les normes établies du LAPD. Bien qu’il ait déclaré que les manifestations avaient « le plus souvent été marquées par des formes d’expression pacifiques », il a ajouté qu’elles avaient parfois été « détournées par des actes de violence, de vandalisme et d’agression criminelle » et que « les policiers étaient en droit de prendre des mesures rapides et mesurées pour prévenir d’autres dommages et rétablir la sécurité publique ».
Des journalistes, des manifestants et des observateurs spécialisés dans les question juridiques ont introduit plusieurs actions en justice contre la ville et le comté de Los Angeles et contre le DHS pour les dommages causés pendant ces manifestations. Plusieurs poursuites pour des abus commis par le passé par les forces de l’ordre lors de manifestations à Los Angeles ont coûté des millions de dollars de dommages et intérêts aux contribuables, mais n’ont abouti qu’à un nombre limité, voire à aucune condamnation établissant les responsabilités des agences et hauts responsables impliqués dans ces abus, pas plus qu’à des changements dans les méthodes utilisées par les forces de l’ordre.
« Les forces de l’ordre de Los Angeles ont fait usage d’une force brutale, excessive et inutile contre des personnes qui défendaient les droits humains et celles qui couvraient les manifestations pour les médias », a conclu Ida Sawyer. « Toutes les agences chargées du maintien de l’ordre impliquées dans ces événements devraient respecter le droit à la liberté d’expression et de manifestation, protéger les journalistes et veiller à ce que les responsables des abus rendent des comptes. »
Suite détaillée en anglais : en ligne ici.
………..
Articles
Le Figaro L’Humanité Mediapart/AFP
18.08.2025 à 06:00
(Johannesbourg, le 18 août 2025) – Des Sénégalais déplacés par les raz-de-marée que le changement climatique aggrave et rend plus fréquents subissent des violations continues de leurs droits humains, sans aucune solution durable en vue, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.
Ce rapport de 72 pages, intitulé « “Waiting for God”: Flood Displacement and Planned Relocation of Fisherfolk in Saint-Louis, Senegal,” » (« ‘En attendant Dieu’ : Déplacements dus aux inondations et réinstallation planifiée de pêcheurs à Saint-Louis, au Sénégal » - résumé et recommandations en français), concerne des familles qui ont tout perdu lorsque les inondations côtières ont frappé leurs communautés historiques de pêcheurs de la péninsule de la Langue de Barbarie en 2015 et 2016. Elles ont été déplacées vers un site appelé Khar Yalla, que les autorités sénégalaises reconnaissent comme impropre à l'habitation permanente. Par leur inaction, les autorités ont violé leurs droits économiques, sociaux et culturels, et les ont exclues d'une réinstallation planifiée liée au climat, qui a bénéficié à d'autres membres de leurs communautés.
« L'expérience de Khar Yalla montre qu'une planification inadéquate des réinstallations liées au climat peut entraîner des déplacements prolongés, au lieu de solutions durables », a déclaré Erica Bower, chercheuse sur les déplacements liés au changement climatique à Human Rights Watch. « Le Sénégal devrait remédier de toute urgence aux violations des droits à Khar Yalla et élaborer une politique qui garantisse que les futures communautés déplacées par le climat reçoivent un soutien adéquat, notamment une réinstallation planifiée respectueuse des droits. »
Human Rights Watch a mené des entretiens auprès de plus de 100 personnes, dont des personnes déplacées, des responsables gouvernementaux et des experts, et a analysé des images satellite, des publications universitaires ainsi que des documents du gouvernement sénégalais, de la Banque mondiale, d'agences des Nations Unies et d'organisations non gouvernementales.
Les quelque 1 000 personnes qui vivent à Khar Yalla, à l'extérieur du centre-ville de Saint-Louis, sont issues de communautés centenaires de pêcheurs de la Langue de Barbarie, une zone fortement exposée aux conséquences de la crise climatique. Après avoir perdu leurs maisons lors des inondations côtières et avoir vécu plusieurs mois sous des tentes, les familles ont accepté le projet des autorités locales de les reloger temporairement à Khar Yalla, fin 2016.
Les autorités leur avaient assuré que ce serait une solution de courte durée et leur ont accordé des permis temporaires pour occuper des maisons construites pour un autre projet de relogement destiné à d'autres ménages exposés aux inondations, qui n’avait pas abouti.
Cependant, les familles déplacées sont toujours à Khar Yalla, privées de services essentiels et vivant dans des conditions qui violent leur droit à un logement convenable. Il y a une promiscuité extrême, pas d’électricité et pas de système de traitement des déchets. Le site est situé en zone inondable ; pendant la saison des pluies, les eaux usées pénètrent dans les maisons et contaminent l'approvisionnement en eau.
L'incapacité du gouvernement à fournir les services essentiels à Khar Yalla ou à le connecter aux services d'autres régions a violé les droits des populations à l'éducation et à la santé. On estime qu'un tiers des enfants ne sont pas scolarisés ; un grand nombre de personnes ont dû renoncer aux soins de santé.
Les familles y sont également confrontées à des violations constantes de leur droits à un niveau de vie suffisant et de prendre part librement à la vie culturelle. Les revenus de la plupart des ménages ont été réduits à des niveaux inférieurs au seuil de pauvreté international pour un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure comme le Sénégal, et les gens ont du mal à nourrir leur famille. Les autorités ont échoué à combler ces lacunes.
Les membres de la communauté peinent à maintenir leurs moyens de subsistance liés à la pêche dans la Langue de Barbarie, à cinq kilomètres de là, compte tenu de la distance et du coût élevé des taxis et des bus privés. La perte des moyens de subsistance liés à la pêche a également des conséquences culturelles négatives. La pêche « c'est toute notre vie », a déclaré un homme âgé de Khar Yalla.
Les autorités ont également contrecarré les tentatives des dirigeants de Khar Yalla de reconvertir les personnes dans de nouvelles professions. « Nous n’avons aucun soutien de la part des autorités, et lorsque nous avons essayé de trouver notre propre solution, ils nous ont empêché de le faire », a déclaré une femme à Khar Yalla.
De plus, le gouvernement n'a pas inclus les familles de Khar Yalla dans le projet de relocalisation permanente, lié au climat, de 15 000 pêcheurs de la Langue de Barbarie vers un site à l'intérieur des terres appelé Djougop, mis en œuvre dans le cadre du Projet de Relèvement d’urgence et de Résilience de Saint-Louis, financé par la Banque mondiale.
Parmi les bénéficiaires figurent plus de 200 familles qui ont également été déplacées de la Langue de Barbarie par les inondations côtières, en 2017 et 2018, puis hébergées temporairement dans des tentes à Khar Yalla. La Banque mondiale et le gouvernement ont réinstallé ces familles à Djougop, après avoir déterminé que Khar Yalla n'était pas un site de réinstallation permanent approprié. Mais les familles déplacées en 2015 et 2016 ont été laissées pour compte.
Une réinstallation planifiée peut faciliter la mise en place d’une solution durable pour les personnes déplacées par les catastrophes climatiques, à condition qu'elle inclue les personnes en situation de déplacement prolongé et que le processus de planification respecte les normes relatives aux droits humains, notamment une consultation significative des personnes affectées. Aucun processus de ce type n'a été mis en place pour les familles qui ont été déplacées en 2015 et 2016.
« Nous nous demandons parfois si les autorités nous considèrent comme des êtres humains », a déclaré Khady Gueye, une dirigeante de la communauté de Khar Yalla. Les responsables gouvernementaux interrogés ont fait preuve d'une méconnaissance de Khar Yalla. Certains ont même nié que les familles aient été déplacées par les inondations.
Le gouvernement sénégalais est tenu, en vertu du droit national et international, de respecter et de réaliser les droits économiques, sociaux et culturels des personnes et de les protéger des risques raisonnablement prévisibles pour leurs droits, notamment les impacts du changement climatique tels que l'élévation du niveau de la mer.
Le Sénégal a investi davantage que de nombreux pays pour soutenir les communautés déplacées par le climat, mais a injustement laissé les familles de Khar Yalla à l'écart de ces mesures. « Pour atteindre son objectif de devenir un leader mondial en matière d'adaptation au changement climatique, le Sénégal doit mettre fin aux violations des droits humains à Khar Yalla et planifier l'avenir », a déclaré Fatoumata Kine Mbodji de Lumière Synergie pour le Développement.
Le Sénégal devrait ratifier la Convention de Kampala pour protéger les droits des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays. Il devrait également élaborer une politique sur la réinstallation planifiée liée au climat, qui prévoie des mécanismes permettant aux communautés déplacées par le climat de demander un soutien, privilégie une consultation significative et établit des critères de sélection des sites de réinstallation afin de garantir le respect des droits des bénéficiaires tout au long de la réinstallation.
La Banque mondiale devrait également réformer ses politiques. Les politiques actuelles ont été conçues pour les réinstallations effectuées dans le cadre de projets de développement, qui sont fondamentalement différentes des réinstallations planifiées liées au climat. Les nouvelles politiques devraient exiger des pays bénéficiaires de ces projets qu'ils identifient les personnes déplacées pour les périodes les plus longues et qui ont besoin d'une solution durable.
« Il est urgent que le Sénégal et la Banque mondiale changent de politique car les réinstallations planifiées ne feront que se multiplier à mesure que la crise climatique s'intensifie », a conclu Erica Bower. « Les politiques devraient être axées sur les droits des personnes déplacées par la crise climatique, comme les familles de Khar Yalla. »
………….
Médias
France Info France Inter
Afrik.com
14.08.2025 à 06:00
(Beyrouth) – Les autorités iraniennes ont maltraité et fait disparaître de force des détenus de la prison d’Evin qui avaient survécu à l’attaque menée par les forces israéliennes le 23 juin 2025, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Human Rights Watch a également conclu que les frappes israéliennes contre la prison constituaient un crime de guerre manifeste.
Malgré les appels et les demandes répétées des prisonniers et de leurs familles, les autorités iraniennes n’ont pris aucune mesure pour protéger la vie et la sécurité des détenus avant l’attaque. Après l’attaque, les autorités ont maltraité les survivants pendant leur transfert vers d’autres prisons, et lors de leur retour à Evin, et les ont détenus dans des conditions cruelles et dangereuses. Le traitement réservé aux prisonniers après l’attaque porte toutes les marques de la répression généralisée menée par les autorités iraniennes, en particulier en période de crise.
« La réponse des autorités iraniennes vis-à-vis des prisonniers traumatisés d’Evin qui venaient d’assister à la mort et aux blessures de certains de leurs codétenus lors de l’attaque israélienne du 23 juin a été de les maltraiter », a déclaré Michael Page, Directeur adjoint de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch. « Les autorités iraniennes ont commis toute une série d’abus à l’encontre des prisonniers suite à cette attaque, notamment des passages à tabac, des insultes et des menaces lors des transferts, et ont détenu les prisonniers dans des conditions épouvantables qui ont mis en danger leur vie et leur santé. Les condamnés à mort et les personnes victimes de disparitions forcées courent désormais un risque accru d’être torturés ou exécutés. »
Entre le 24 juin et le 29 juillet, Human Rights Watch a interrogé et s’est entretenu avec 23 membres des familles de prisonniers, avec d’anciens défenseurs des droits humains ayant été détenus et avec d’autres sources bien informées au sujet de l’attaque israélienne du 23 juin contre la prison d’Evin et du traitement réservé aux prisonniers par les autorités iraniennes à la suite de cette attaque. Les chercheurs ont également passé en revue plusieurs témoignages sur le traitement des prisonniers, obtenus par le biais d’autres organisations de défense des droits humains et communiqués à Human Rights Watch, ainsi que des témoignages publics provenant de prisonniers et de leurs familles.
Human Rights Watch a écrit aux autorités iraniennes pour obtenir des informations sur le sort et le lieu de détention des prisonniers, en particulier ceux qui sont détenus dans des centres de détention gérés par le ministère du Renseignement et l’Organisation du renseignement du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI). Les autorités n’ont pas répondu à ces requêtes.
Selon les témoignages de plusieurs prisonniers, les forces de sécurité ont été déployées peu après l’attaque dans les quartiers de la prison d’Evin, notamment les quartiers 4 et 8, où sont détenus de nombreux prisonniers politiques de sexe masculin. Elles ont ordonné aux prisonniers de quitter les lieux en les menaçant avec des armes à feu et en leur laissant très peu de temps – voire pas du tout - pour rassembler leurs effets personnels. Les forces de sécurité ont menotté les prisonniers de sexe masculin deux par deux et les ont fait monter dans des bus pour leur faire faire un trajet de plusieurs heures, tout en les insultant et en les menaçant avec leurs armes.
Le transfert de centaines de prisonniers de sexe masculin vers la prison d’Evin aux premières heures de la journée du 8 août, 46 jours après l’attaque, a également été marqué par des violences. D’après les informations obtenues par Human Rights Watch, les forces de sécurité ont utilisé des matraques et des armes à décharge électrique pour passer à tabac plusieurs prisonniers politiques qui protestaient contre le fait d’être menottés et contre le transfert de condamnés à mort vers des centres de détention séparés.
Après l’attaque, les autorités ont transféré les prisonniers vers deux grands centres de détention de la province de Téhéran : la prison de Shahr-e Rey, connue sous le nom de prison de Qarchak, pour les femmes, et la grande prison centrale de Téhéran, connue sous le nom de prison de Fashafouyeh, pour les hommes. Les autorités n’ont pas donné d’informations sur le sort et le lieu de détention de certains prisonniers détenus par les services de sécurité et de renseignement, notamment des dissidents, des activistes des droits humains et des personnes possédant la double nationalité ou de nationalité étrangère. Pour certains d’entre eux, les autorités se sont contentées de les autoriser à passer un bref appel téléphonique à leur famille pour les informer qu’ils étaient détenus dans des cellules à l’isolement, parfois dans des lieux inconnus.
Le 23 juin, les autorités ont transféré Ahmadreza Djalali, un médecin de nationalité suédoise et iranienne détenu arbitrairement et qui risque d’être exécuté à tout moment, vers une destination inconnue. Au 9 août, les autorités avaient refusé, malgré les demandes qui leur avaient été adressées, de donner la moindre information sur son sort et le lieu où il se trouve, ce qui équivaut à une disparition forcée.
Les disparitions forcées constituent des crimes graves au regard du droit international et sont considérées comme étant toujours en cours tant que le sort des personnes disparues et leur lieu de détention restent inconnus.
Le refus des autorités de révéler le sort et le lieu de détention des détenus et de certains prisonniers a aussi renforcé les craintes concernant les prisonniers transgenres détenus dans la zone de quarantaine de la prison d’Evin. Une femme transgenre qui a été détenue en quarantaine à Evin par le passé a déclaré à Human Rights Watch que de nombreux prisonniers transgenres « n’ont personne » et qu’ils sont coupés de leur famille « qui les rejette ». Elle a fait part de ses inquiétudes dans ces termes : « même s’ils étaient blessés ou morts, personne ne le saurait, car leurs familles ne sauraient peut-être même pas qu’ils se trouvaient là-bas ».
Les craintes concernant l’imminence de certaines exécutions se sont par ailleurs accrues pour six autres condamnés à mort. Vahid Bani Amerian, Pouya Ghobadi, Akbar « Shahrokh » Daneshvarkar, Babak Alipour et Mohammad Taghavi Sangdehi ont été séparés des autres prisonniers lors du transfert du 8 août et auraient été emmenés à la prison de Ghezel Hesar, dans la province d’Alborz, où sont systématiquement transférés les condamnés à mort avant leur exécution. Un autre homme, Babak Shahbazi, a quant à lui été transféré à la prison de Ghezel Hesar plus tôt dans la semaine.
Les familles des prisonniers des prisons de Qarchak et de Fashafouyeh ont décrit à Human Rights Watch des conditions de détention épouvantables, caractérisées par des cellules mal ventilées, sales et surpeuplées, où de nombreux prisonniers sont contraints de dormir à même le sol, ainsi que par un manque d’accès à l’eau potable et à des installations adéquates pour le maintien d’une hygiène personnelle. Ces conditions mettent en danger la vie et la santé des détenus.
Les prisonniers politiques de la prison de Qarchak sont détenus dans la zone de quarantaine, où on leur a signifié qu’ils resteraient indéfiniment. Un défenseur des droits humains qui y a été détenu a déclaré à Human Rights Watch que la zone de quarantaine était le pire endroit de la prison, conçu pour la détention temporaire de nouveaux détenus, avec des murs maculés de vomi et d’excréments. Un autre défenseur des droits humains qui a été détenu dans cette prison a déclaré que les conditions y étaient « impropres, même pour des animaux ».
Un proche d’un défenseur des droits humains emprisonné a déclaré à Human Rights Watch que la prison de Fashafouyeh était infestée d’insectes et que son proche emprisonné avait attrapé six ou sept punaises de lit dans ses draps en une seule matinée. Un membre de la famille d’un autre prisonnier politique a déclaré que les prisonniers était couverts de piqûres d’insectes.
D’après les informations obtenues par Human Rights Watch, les autorités de la prison de Fashafouyeh ont également infligé aux familles des prisonniers des traitements inhumains, cruels et dégradants en procédant à des fouilles corporelles intrusives et humiliantes avant les visites. Une source bien informée a déclaré que dans certains cas, les proches des prisonniers, y compris des enfants, avaient été contraints de se déshabiller complètement pendant les fouilles, leur causant une détresse extrême.
Human Rights Watch est également profondément préoccupé par la situation des prisonniers qui ont été renvoyés dans les quartiers 7 et 8 de la prison d’Evin le 8 août, compte tenu des dommages importants subis par plusieurs installations pénitentiaires essentielles à la santé et au bien-être des prisonniers, notamment le dispensaire et la salle des visites. Ces préoccupations sont d’autant plus vives que les autorités ont depuis longtemps pour habitude de priver les prisonniers, en particulier les prisonniers politiques arbitrairement détenus, de soins médicaux adéquats.
L’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus, également connues sous le nom de Règles Nelson Mandela, fixent des normes minimales pour le traitement des détenus en matière de santé et la surface minimale au sol, et stipulent que chaque détenu doit disposer de ventilation et d’eau potable.
Les États membres de l’ONU devraient exhorter les autorités à libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement et à révéler le sort et le lieu de détention des prisonniers qu’elles ont fait disparaître de force.
« Les autorités iraniennes ne devraient pas profiter des frappes israéliennes contre la prison d’Evin pour infliger davantage de mauvais traitements aux prisonniers, en particulier à ceux qui n’auraient jamais dû être incarcérés », a déclaré Michael Page. « Les États membres de l’ONU devraient faire pression sur le gouvernement iranien pour qu’il suspende immédiatement toute exécution programmée, libère toutes les personnes détenues arbitrairement, garantisse des conditions de détention humaines et sûres, et mette fin à l’angoisse des familles des personnes disparues de force en révélant leur sort et leur lieu de détention. »
Lire l'enquête complète en anglais ici.
14.08.2025 à 06:00
(Beyrouth) – Les frappes aériennes israéliennes sur la prison iranienne d’Evin à Téhéran, le 23 juin 2025, étaient illégalement indiscriminées et constituent un crime de guerre manifeste, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Les frappes ont touché plusieurs bâtiments du complexe et tué au moins 80 personnes, selon les déclarations officielles iraniennes, dont des prisonniers, des membres de leurs familles et du personnel pénitentiaire, en l'absence de toute cible militaire évidente.
Plus de 1 500 prisonniers auraient été détenus à la prison d'Evin au moment de l'attaque, dont de nombreux activistes et dissidents détenus par le gouvernement iranien en violation de leurs droits. Les frappes, menées pendant les heures de visite, ont considérablement endommagé le parloir, la cuisine centrale, la clinique médicale et les sections où étaient détenus des prisonniers, y compris des prisonniers politiques.
« Les frappes israéliennes sur la prison d'Evin le 23 juin ont tué et blessé des dizaines de civils sans aucune cible militaire évidente, en violation des lois de la guerre et elles constituent un crime de guerre manifeste », a déclaré Michael Page, directeur adjoint de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch. « L'attaque israélienne a mis en grave danger la vie déjà précaire des prisonniers d'Evin, dont beaucoup sont des dissidents et des activistes détenus à tort. »
Entre le 24 juin et le 29 juillet, Human Rights Watch a mené des entretiens auprès de 22 personnes au sujet de l'attaque, dont des proches de victimes et de prisonniers, d'anciens prisonniers d'Evin et d'autres personnes ayant une connaissance approfondie de la prison. Human Rights Watch a écrit aux autorités iraniennes et israéliennes les 2 et 7 juillet respectivement, pour demander des informations, mais n'a pas reçu de réponse.
Human Rights Watch a également analysé et vérifié des vidéos et des photographies des frappes israéliennes publiées par les médias et sur les réseaux sociaux, ainsi que des documents partagés directement avec les chercheurs, et des images satellite prises avant et après les frappes. Human Rights Watch n'a pas pu se rendre sur place, l'Iran n'autorisant pas l'accès aux organisations indépendantes de défense des droits humains.
L'enquête sur l'attaque du 23 juin contre la prison d'Evin fait partie d'une enquête plus large de Human Rights Watch sur les hostilités du 13 au 25 juin entre Israël et l'Iran, y compris les attaques de missiles balistiques iraniens sur des zones peuplées en Israël.
Les forces israéliennes ont mené des frappes sur la prison d'Evin, un complexe de 43 hectares dans le district 1 de Téhéran, entre 11h17 et 12h18 le 23 juin. Aucun avertissement préalable ne semble avoir été donné. Des images satellite, des vidéos et des témoignages montrent des impacts de frappes endommageant des bâtiments distants de plusieurs centaines de mètres.
Les frappes ont détruit l'entrée principale sud de la prison et une autre entrée au nord. Le bâtiment d'information des visiteurs, adjacent à l'entrée principale, a été entièrement détruit. Des proches de détenus et d'anciens détenus ont indiqué que de nombreuses familles fréquentent le bâtiment des visiteurs, notamment pour livrer des vêtements et des médicaments. Les frappes ont également touché le parloir, un complexe judiciaire abritant des procureurs adjoints, et ont gravement endommagé ou détruit plusieurs bâtiments du centre pénitentiaire, où se trouvent la clinique médicale et plusieurs services pénitentiaires.
Deux prisonniers politiques dans le quartier central 4 de la prison, Abolfazl Ghadiani et Mehdi Mahmoudian, ont décrit dans un compte rendu accessible au public les « bruits d'explosions répétées » à midi près de leur quartier. Ils ont vu la clinique brûler et l'entrepôt de nourriture et d'hygiène détruit. À 14 heures, ont-ils déclaré, les prisonniers avaient exhumé 15 à 20 corps des décombres, dont ceux d'autres prisonniers, du personnel de la clinique, des employés de l'entrepôt, ainsi que des gardes et des responsables de la Section 209, un centre de détention géré par le ministère du Renseignement où les dissidents sont régulièrement détenus.
Le Dr Saeedeh Makaremi, bénévole à la clinique, a publié sur Instagram qu'après les frappes, des prisonniers l'avaient sauvée des décombres. Elle a ensuite subi une intervention chirurgicale majeure, notamment une réimplantation de la main. Des médias d’État ont rapporté qu'un médecin a également été tué dans la clinique.
Les frappes ont endommagé des bâtiments et des véhicules à l'extérieur des parties nord du complexe pénitentiaire, tuant et blessant des résidents, dont Mehrangiz Imenpour, un artiste de 61 ans. Des médias nationaux ont signalé qu'Ali Asghar Pazouki, un homme d'affaires de 69 ans, a été tué à l'extérieur du complexe.
Human Rights Watch a constaté des dommages dans, ou à proximité, des sections de la prison utilisées pour détenir des personnes accusées d'atteintes à la sécurité nationale, notamment des activistes et des dissidents. Il s'agit des quartiers 4 et 8, des sections 209, 240, 241 et 2A, ainsi que du quartier des femmes. La principale section de quarantaine, où étaient détenues des personnes transgenres, a également été endommagée. Les autorités iraniennes n'ont pas communiqué sur l'état de santé ni sur le lieu de détention de nombreux prisonniers de ces sections, ce qui constitue des disparitions forcées en violation du droit international des droits humains.
En vertu du droit international humanitaire, également appelé lois de la guerre, les prisons sont présumées être des biens civils. L'enquête de Human Rights Watch n'a trouvé aucune preuve de la présence de cibles militaires dans le complexe pénitentiaire d'Evin au moment des frappes israéliennes. Aucune des sources interrogées, dont les prisonniers récemment libérés, les membres de leurs familles et les avocats qui se sont rendus à plusieurs reprises à la prison, n'a déclaré avoir connaissance de la présence de personnel, d'armes ou de matériel militaires iraniens dans l'enceinte de la prison.
Les déclarations des ministres israéliens immédiatement après l'attaque n'ont fait aucune mention de cibles militaires dans l'enceinte de la prison, mais ont présenté les frappes comme faisant partie des attaques d'Israël contre les institutions répressives de l'Iran. Le ministre israélien de la Défense, Israël Katz, a écrit immédiatement après l'attaque qu'Israël avait frappé la prison d'Evin en raison de ses fonctions comme « agence de répression gouvernementale ». Une publication du ministre des Affaires étrangères Gideon Sa’ar sur X indiquait que la prison d’Evin avait été frappée en représailles aux attaques de l'Iran contre des civils en Israël.
Plusieurs heures après les frappes, l'armée israélienne a confirmé l'attaque, et un porte-parole militaire a affirmé, sans donner de preuves ni de détails, que l'Iran avait mené des « opérations de renseignement contre l'État d'Israël, y compris du contre-espionnage » dans la prison. Un porte-parole de l'armée israélienne a répété les mêmes allégations ce jour-là lors d'une interview avec les médias. La déclaration des Forces de défense israéliennes réitérait les déclarations précédentes du gouvernement selon lesquelles la prison d'Evin était un « symbole d'oppression pour le peuple iranien ».
Les lois de la guerre applicables au conflit armé international entre Israël et l'Iran interdisent les attaques visant des civils et des biens civils, qui ne font pas de distinction entre civils et combattants, ou qui sont susceptibles de causer aux civils ou aux biens civils des dommages disproportionnés par rapport à l'avantage militaire attendu. Les attaques indiscriminées incluent celles qui ne visent pas une cible militaire spécifique. Même si certains individus de la prison d’Evin étaient des militaires iraniens, l’attaque à grande échelle aurait été illégalement disproportionnée.
Les violations graves des lois de la guerre commises par des individus avec une intention criminelle – c’est-à-dire délibérément ou par négligence – constituent des crimes de guerre. Les gouvernements sont tenus d'enquêter sur les crimes de guerre présumés commis par leurs forces ou sur leur territoire, et de poursuivre les responsables comme il se doit. Israël et l'Iran ont tous deux un historique d'impunité et de réticence à enquêter conformément au droit international, et encore moins à poursuivre les auteurs d'éventuels crimes de guerre commis par leurs forces. Tous les gouvernements ont l'obligation de coopérer, dans la mesure du possible, afin de faciliter les enquêtes et les poursuites appropriées sur les crimes de guerre présumés.
« L’attaque israélienne illégale contre la prison d’Evin met en évidence les conséquences de l'impunité dont jouissent depuis longtemps les auteurs de graves violations du droit de la guerre», a conclu Michael Page. « Pour aggraver les choses, les forces israéliennes ont mis en grand danger des prisonniers qui étaient déjà victimes de la répression brutale des autorités iraniennes. »
Lire l'enquête complète en anglais ici.
13.08.2025 à 20:11
(Washington, 13 août 2025) – La présidente du Pérou, Dina Boluarte, a promulgué une loi d'amnistie garantissant l'impunité pour les crimes graves commis pendant le conflit armé interne qu’a connu ce pays, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.
Le Congrès péruvien a adopté cette loi le 9 juillet, et la présidente Boluarte l'a promulguée le 13 août. Cette loi accorde une amnistie générale aux membres des forces armées, de la police et des comités d'autodéfense accusés ou faisant l'objet d'une enquête pour des crimes présumés commis pendant le conflit armé interne qui a touché le Pérou entre 1980 et 2000. La loi prévoit également la remise en liberté des personnes précédemment condamnées pour des crimes commis lors de ce conflit armé, et actuellement âgées de plus de 70 ans.
« Cette loi est tout simplement une trahison envers les victimes péruviennes », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « La loi sape des décennies d'efforts pour garantir l'obligation de rendre des comptes pour les atrocités commises, et affaiblit davantage encore l'état de droit dans le pays. »
Le 24 juillet, la Cour interaméricaine des droits de l'homme avait enjoint au Pérou de s'abstenir d'appliquer le projet de loi jusqu'à ce qu'elle analyse la compatibilité de l'amnistie avec ses précédentes décisions concernant les abus commis pendant le conflit armé.
Le 31 juillet, cependant, lors d'une cérémonie de la police nationale à Lima, la présidente Boluarte avait déclaré que son gouvernement ferait avancer le projet de loi, quelle que soit la position de la Cour.
Pendant le conflit armé, les forces de sécurité péruviennes ont commis de graves abus, dont plusieurs crimes de guerre, tels que des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées, des actes de torture, des violences sexuelles et d'autres violations graves des droits humains. Selon la Commission nationale pour la vérité et la réconciliation, environ 70 000 personnes ont été tuées et plus de 20 000 ont disparu entre 1980 et 2000. Les tribunaux péruviens ont prononcé des condamnations définitives dans plus de 150 affaires, et plus de 600 autres sont toujours en instance, selon le Coordonnateur national des droits humains.
En vertu de la Convention américaine relative aux droits de l'homme, ainsi que du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), le Pérou a l'obligation légale d'enquêter sur les violations graves des droits humains, d’engager des poursuites et de sanctionner les auteurs de tels abus. Les lois d'amnistie qui empêchent l'obligation de rendre des comptes pour des crimes tels que les exécutions extrajudiciaires, les disparitions forcées et la torture violent cette obligation, et privent les victimes de leur droit à la justice.
Ces dernières années, l'administration Boluarte, le Congrès et d'autres autorités ont défié à plusieurs reprises les ordonnances de la Cour interaméricaine des droits de l'homme. En décembre 2023, le Tribunal constitutionnel péruvien, en violation des obligations de ce pays en tant qu’État partie à la Convention américaine relative aux droits de l'homme, a ordonné la libération de l'ancien président Alberto Fujimori, au pouvoir de 1990 à 2000, qui purgeait une peine de 25 ans de prison pour violations graves des droits humains. Malgré l'ordre de la Cour qui enjoignait au Pérou de ne pas libérer Fujimori dans l'attente de son évaluation des faits, le gouvernement Boluarte a procédé à sa libération.
Le 6 juin 2024, le Congrès péruvien avait déjà approuvé un précédent projet de loi établissant un délai de prescription pour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis avant 2003. Le 1er juillet 2024, la Cour interaméricaine des droits de l'homme avait émis une ordonnance qui enjoignait à l’État péruvien de ne pas faire avancer ce projet de loi, en raison de son incompatibilité apparente avec le droit international des droits humains. Toutefois, la présidente Boluarte n'avait pas opposé son veto à ce projet de loi, qu’elle avait promulguée en tant que loi en août 2024.
« Le Pérou rejoint les rangs du Nicaragua, du Venezuela et d'autres pays qui défient la Cour interaméricaine des droits de l'homme et, ce faisant, bafouent les droits des victimes », a conclu Juanita Goebertus. « La loi d'amnistie n'aurait jamais dû être adoptée, et devrait être abrogée. »
………….
Articles
LaPresse.ca
12.08.2025 à 06:00
(Nairobi) – La condamnation et la peine de 20 ans d'emprisonnement prononcés le 9 août 2025 à l'encontre de Succès Masra, dirigeant du principal parti d'opposition tchadien, sont l'aboutissement d'un procès fondé sur des accusations à caractère politique, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch.
Succès Masra, l’ancien Premier ministre, est un fervent détracteur du président Mahamat Idriss Déby. Le tribunal pénal de N'Djamena l’a reconnu coupable de « diffusion de message[s] à caractère haineux et xénophobe » et de « complicité de meurtre » lié à un conflit intercommunautaire.
« La peine infligée à Succès Masra envoie un message effrayant aux détracteurs du gouvernement et illustre l'intolérance du gouvernement tchadien à l'égard des critiques et des partis politiques d'opposition », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. « Les tribunaux ne devraient pas être utilisés à de telles fins politiques. »
Succès Masra a été arrêté le 16 mai et accusé d'incitation à la haine et à la révolte à travers des publications sur les réseaux sociaux après que des affrontements intercommunautaires ont fait 42 morts le 14 mai à Mandakao, dans la province du Logone Occidental, située dans le sud-ouest du pays.
Human Rights Watch n'a pas encore pu voir le jugement du tribunal, mais s'est entretenu avec des personnes qui ont assisté au procès, notamment certains des avocats de l’opposant politique. Si les affrontements entre éleveurs et agriculteurs sont fréquents dans le sud du Tchad, les violences intercommunautaires se sont intensifiées ces dernières années, faisant de nombreux morts.
Succès Masra, qui a plaidé non coupable, a été jugé aux côtés de 74 autres personnes, tous accusés de collaboration dans les tueries de Mandakao. Au moins neuf des coaccusés ont été libérés, mais les autres ont également été condamnés à 20 ans de prison. Le tribunal a également infligé une amende d'un milliard de francs CFA (environ 1,8 million de dollars américains) à l’opposant politique et à ses coaccusés. Les avocats de Succès Masra et des autres accusés ont annoncé leur intention de faire appel devant la Cour suprême.
La condamnation de Succès Masra intervient dans un contexte de rétrécissement de l'espace politique au Tchad. Lui et les partisans de son parti d'opposition, Les Transformateurs, ont été victimes de menaces avant les élections présidentielles de mai 2024, lors desquelles il s'était présenté contre Mahamat Idriss Déby, alors président de la transition. La période précédant les élections a été marquée par des violences.
Le 28 février 2024, les forces de sécurité gouvernementales ont tué Yaya Dillo, le président du Parti socialiste sans frontières (PSF), lors d'une attaque contre le siège du parti à N'Djamena. Plus d'un an après, les autorités n'ont toujours pas clarifié les circonstances de sa mort.
La violence politique est en hausse depuis 2021, lorsque les forces de sécurité ont fait un usage excessif de la force, y compris en utilisant des balles réelles, et ont tiré sans discernement pour disperser les manifestations organisées par l'opposition dans tout le pays. Plusieurs manifestants ont été tués. Les autorités ont arrêté des activistes et des membres de partis d'opposition, et les forces de sécurité ont frappé des journalistes qui couvraient les manifestations. La violence a atteint son paroxysme le 20 octobre 2022, lorsque les forces de sécurité ont tiré à balles réelles sur les manifestants, tuant et blessant des dizaines d'entre eux, et ont frappé et pourchassé des personnes jusque dans leurs maisons.
Les manifestations avaient été organisées pour marquer la date à laquelle l'administration militaire, au pouvoir depuis la mort du président Idriss Déby Itno – père de l’actuel président – le 20 avril 2021, avait initialement promis de restituer le pouvoir à un gouvernement civil. Des centaines d'hommes et de garçons ont été arrêtés, et beaucoup ont été emmenés à Koro Toro, une prison de haute sécurité située à 600 kilomètres de N'Djamena. Plusieurs détenus sont morts en route pour Koro Toro, où les manifestants ont subi d'autres abus.
Succès Masra a fui le pays après les violences d'octobre 2022, mais il est revenu après les efforts de paix régionaux déployés par le président de la République démocratique du Congo Félix Tshisekedi, en sa qualité de facilitateur du processus de transition politique au Tchad pour la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC).
L'accord de Kinshasa qui en a résulté a suspendu le mandat d'arrêt contre Succès Masra et lui a garanti, ainsi qu'à ses partisans, un retour d’exil en toute sécurité. Il a également fourni des garanties juridiques au parti des Transformateurs pour mener librement leurs activités politiques. À son retour en janvier 2024, l’opposant politique a accepté le poste de premier ministre, mais a démissionné en mai 2024, affirmant que l'élection présidentielle avait été truquée.
Le président Félix Tshisekedi et la CEEAC devraient appeler au rétablissement des droits et garanties politiques et au respect intégral de l'accord de Kinshasa, a déclaré Human Rights Watch.
« La condamnation de Succès Masra a anéanti les espoirs d'une véritable opposition politique et d'un système judiciaire indépendant au Tchad », a déclaré Lewis Mudge. « Les partisans régionaux et internationaux du Tchad devraient dénoncer ce jugement motivé par des considérations politiques et exhorter les dirigeants du pays à tenir leur promesse de réforme démocratique. »
11.08.2025 à 23:59
Le 7 août, la junte militaire nigérienne a annoncé la dissolution de quatre principaux syndicats du secteur de la justice. Cette décision porte atteinte aux droits des travailleurs à la liberté d'association et à l'indépendance du système judiciaire.
Cette dissolution s'inscrit dans un schéma de répression de la junte militaire qui, depuis sa prise de pouvoir en juillet 2023, a intensifié ses attaques contre l'opposition politique, les médias, les syndicats et les groupes de la société civile, réduisant ainsi l'espace civique et politique du pays.
Le 7 août, le général Mohamed Toumba, ministre de l'Intérieur, a signé quatre décrets décrétant la dissolution du Syndicat autonome des magistrats (SANAM), de l'Union des magistrats du Niger (UNAM), du Syndicat national des agents de justice (SNAJ) et du Syndicat des cadres et des agents techniques du ministère de la Justice (SYNCAT).
Bien que les décrets n'aient fourni aucune explication pour les dissolutions, le 8 août, le ministre de la Justice, Alio Daouda, a déclaré que les syndicats avaient « dévié » de leurs rôles et privilégié des « intérêts personnels ». La dissolution des syndicats du secteur de la justice soulève aussi des inquiétudes concernant l'indépendance judiciaire dans le pays.
En réponse, l’Intersyndicale des travailleurs du Niger a décrit cette décision comme « une atteinte grave aux libertés fondamentales », et a appelé le gouvernement à revenir sur sa décision.
Les autorités militaires avaient déjà attaqué les syndicats dans le passé. En avril, la junte avait dissous trois syndicats représentant les forces paramilitaires du pays, qui participent aux opérations de contre-insurrection aux côtés de l'armée contre des groupes armés islamistes.
Les autorités militaires du Niger continuent également de détenir de manière arbitraire l'ancien président Mohamed Bazoum et sa femme à Niamey, la capitale, malgré une décision d'un tribunal régional ordonnant leur libération. Ils continuent également de détenir de manière arbitraire Moussa Tiangari, éminent activiste des droits humains et détracteur du gouvernement, depuis décembre 2024.
En février, le dirigeant de la junte, le général de brigade Abdourahmane Tiani, a prolongé le règne de la junte en repoussant les élections.
Les syndicats ont joué un rôle essentiel dans le renforcement de la démocratie au Niger. Le SANAM avait mis en garde plusieurs gouvernements au fil des années de ne pas s'ingérer dans les affaires judiciaires.
Les autorités nigériennes devraient permettre aux travailleurs de s'associer et de s'organiser librement, conformément à leurs obligations internationales, et non de fermer des organisations syndicales importantes. Elles devraient révoquer leur décision de dissoudre les quatre syndicats et protéger la liberté d'association ainsi que l'indépendance des tribunaux.
07.08.2025 à 06:00
(Jérusalem, 7 août 2025) – Les attaques meurtrières menées par les forces israéliennes contre des écoles qui abritent des civils palestiniens mettent en évidence l’absence de lieux sûrs pour les personnes déplacées de Gaza, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Depuis octobre 2023, les autorités israéliennes ont mené des centaines de frappes contre des écoles qui abritaient des Palestiniens déplacés, notamment des attaques illégales et indiscriminées utilisant des munitions américaines qui ont tué des centaines de civils et endommagé ou détruit la quasi-totalité des écoles de Gaza.
Les récentes frappes israéliennes contre des écoles transformées en abris s’inscrivent dans le cadre de l’offensive militaire actuelle des forces israéliennes qui a détruit la plus grande partie des infrastructures civiles restantes à Gaza et a de nouveau déplacé des centaines de milliers de Palestiniens en aggravant une situation humanitaire déjà désastreuse. Les gouvernements, notamment celui des États-Unis qui a fourni des armes utilisées dans certaines attaques illégales, devraient imposer un embargo sur les armes au gouvernement israélien et prendre d’autres mesures urgentes pour faire respecter la Convention des Nations Unies pour la prévention et la répression du crime de génocide (Convention sur le génocide).
« Les frappes israéliennes contre des écoles abritant des familles déplacées donnent un aperçu du carnage à grande échelle perpétré par les forces israéliennes à Gaza », a déclaré Gerry Simpson, Directeur adjoint à la division Crises, conflits et armement à Human Rights Watch. « Les gouvernements ne devraient pas tolérer cet horrible massacre de civils palestiniens qui ne cherchent qu’à se mettre à l’abri. »
Human Rights Watch a enquêté sur les attaques israéliennes qui ont frappé l’école pour filles Khadija à Deir al-Balah le 27 juillet 2024 et tué au moins 15 personnes, et l’école al-Zeitoun C dans le quartier al-Zeitoun de la ville de Gaza le 21 septembre 2024, qui a fait au moins 34 morts. Human Rights Watch n’a trouvé aucune preuve de la présence de cibles militaires dans l’une ou l’autre de ces écoles.
Click to expand Image Un garçon debout dans les décombres de l'école Khadija à Deir al-Balah, dans le centre de Gaza, touchée par une frappe aérienne israélienne le 27 juillet 2024. Au moins 15 Palestiniens déplacés ont été tués dans cette attaque. © 2024 Rizek Abdeljawad/Xinhua via Getty ImagesCes conclusions s’appuient sur l’analyse d’images satellites, de photos et de vidéos des attaques et de leurs conséquences, sur des contenus publiés sur les réseaux sociaux concernant des hommes dont on sait qu’ils ont péri lors des deux frappes, ainsi que sur des entretiens téléphoniques avec deux personnes qui ont été témoins des conséquences de la frappe contre l’école Khadija et une autre qui était présente au moment de l’attaque contre l’école al-Zeitoun C.
Les autorités israéliennes n’ont pas rendu publiques les informations relatives aux attaques documentées par Human Rights Watch, notamment les détails concernant la cible visée ou les précautions prises lors de ces attaques pour minimiser les dommages causés aux civils. Elles n’ont pas répondu à une lettre datée du 15 juillet qui résume les conclusions de Human Rights Watch concernant ces frappes et demande des informations spécifiques les concernant.
L’absence de cible militaire dans les frappes contre les écoles Khadija et al-Zeitoun rendrait ces attaques illégales et indiscriminées et constituerait une violation du droit international humanitaire. Les écoles et autres établissements d’enseignement sont des biens civils protégés contre les attaques. Ils perdent cette protection lorsqu’ils sont utilisés à des fins militaires ou occupés par des forces militaires. L’utilisation d’écoles pour héberger des civils ne modifie pas leur statut juridique.
Entre le 1er et le 10 juillet 2025, les forces israéliennes ont frappé au moins 10 écoles transformées en abris, dont certaines avaient déjà été endommagées, tuant 59 personnes et déplaçant de nouveau des dizaines de familles, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA). L’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) a indiqué qu’environ un million de personnes déplacées à Gaza s’étaient réfugiées dans des écoles pendant les hostilités et qu’au 18 juillet, au moins 836 personnes réfugiées dans des écoles avaient été tuées et qu’au moins 2 527 autres avaient été blessées.
La dernière évaluation en date du cluster Éducation dans les territoires palestiniens occupés d’OCHA a révélé que 97 % des établissements scolaires de Gaza (547 sur 564) ont subi des dégâts plus ou moins importants, y compris 462 (76%) qui ont été « directement touchés » et 518 (92%) qui nécessitent « une reconstruction complète ou d’importants travaux de réhabilitation pour redevenir fonctionnels ».
Les attaques israéliennes ont privé les civils d’un accès sûr à des abris et contribueront à perturber l’accès à l’éducation pendant de nombreuses années, dans la mesure où la réparation et la reconstruction des écoles peuvent nécessiter beaucoup de temps et la mobilisation de ressources importantes, avec un impact négatif significatif sur les enfants, les parents et les enseignants.
Une enquête publiée le 24 juillet par les médias israéliens +972Magazine et Local Call a fait état de la mise en place par l’armée israélienne d’« une cellule spéciale chargée d’identifier systématiquement les écoles, qualifiées de “centres de gravité” afin de les bombarder, affirmant que des membres du Hamas s’y cachaient parmi des centaines de civils ». Le rapport note que les double-frappes (« double tap » en anglais, qui désigne une deuxième frappe contre un même site dans le but de cibler les survivants de la première frappe, mais aussi les premiers secours) « sont devenues particulièrement courantes ces derniers mois dans les situations où Israël bombarde des écoles à Gaza ».
L’armée israélienne a affirmé, à propos de dizaines d’attaques contre des écoles, que le Hamas ou d’autres combattants palestiniens ou encore des centres de « commandement et de contrôle » étaient déployés dans ces écoles, sans toutefois fournir d’informations plus précises. Human Rights Watch n’a connaissance que de sept cas dans lesquels l’armée israélienne a publié les noms et photos de membres présumés de groupes armés palestiniens qui, selon elle, se trouvaient dans une école au moment de l’attaque.
Après l’attaque du 6 juin 2024 contre l’école al-Sardi, l’armée israélienne a révélé les noms de 17 combattants présumés. Cependant, après avoir examiné ces noms, Human Rights Watch a constaté que trois d’entre eux semblaient avoir été tués lors d’attaques précédentes.
La présence de groupes armés palestiniens dans l’une des écoles attaquées ne rendrait pas nécessairement les attaques légales. Les lois de la guerre interdisent les attaques contre des objectifs militaires si les dommages prévisibles pour les civils et biens civils sont disproportionnés par rapport au gain militaire escompté de l’attaque.
Les lois de la guerre imposent également aux parties belligérantes, sauf si les circonstances ne le permettent pas, de donner un « avertissement en temps utile et par des moyens efficaces » avant toute attaque susceptible d’affecter la population civile.
Le déploiement de groupes armés dans des écoles transformées en abris exposerait les civils à des risques inutiles. Les lois de la guerre obligent les parties belligérantes à prendre toutes les précautions possibles contre les effets de telles attaques et à éviter de placer des cibles militaires à proximité de zones densément peuplées.
Les violations graves des lois de la guerre commises par des individus ayant une intention criminelle, c’est-à-dire de manière délibérée ou par négligence, constituent des crimes de guerre. Les individus peuvent également être tenus pénalement responsables s’ils ont aidé, facilité, soutenu ou encouragé un crime de guerre. Tous les états parties à un conflit armé sont tenus d’enquêter sur les crimes de guerre présumés commis par les membres de leurs forces armées.
La Déclaration sur la sécurité dans les écoles, une déclaration politique internationale approuvée par 121 pays, vise à protéger l’éducation en temps de guerre en renforçant la prévention et la réponse aux attaques contre les élèves, les enseignants, les écoles et les universités, notamment en évitant l’utilisation des établissements scolaires à des fins militaires. Si Israël n’a pas signé cette déclaration, la Palestine y a adhéré en 2015.
Les gouvernements devraient suspendre les transferts d’armes vers Israël, compte tenu du risque évident que ces armes puissent être utilisées pour commettre ou faciliter des violations graves du droit international humanitaire. La fourniture par le gouvernement des États-Unis d’armes à Israël, qui ont été utilisées à plusieurs reprises pour frapper des écoles transformées en abris et commettre des crimes de guerre manifestes, rend les États-Unis complices de leur utilisation illégale.
Le 10 juin, la Commission d’enquête des Nations Unies sur le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et Israël a déclaré que les autorités israéliennes avaient « détruit le système éducatif de Gaza » et que ses attaques contre des sites éducatifs, religieux et culturels dans le territoire palestinien occupé faisaient « partie d’une offensive généralisée et implacable contre le peuple palestinien, dans le cadre de laquelle les forces israéliennes ont commis des crimes de guerre et le crime contre l’humanité d’extermination ».
« Après presque deux ans d’attaques répétées menées par Israël, tuant des civils dans des écoles et d’autres lieux protégés, les gouvernements qui fournissent un soutien militaire à Israël ne peuvent pas prétendre qu’ils n’étaient pas conscients des conséquences de leurs actes », a déclaré Gerry Simpson. « Les gouvernements devraient suspendre tous les transferts d’armes vers Israël et prendre d’autres mesures pour empêcher de nouvelles atrocités de masse. »
............
+ Liban : Le Monde OLJ
06.08.2025 à 22:55
(Nairobi) – Le groupe armé Forces démocratiques alliées (Allied Democratic Forces, ou ADF) a tué plus de 40 personnes, dont plusieurs enfants, à l'aide d'armes à feu et de machettes lors d'un rassemblement de nuit dans l’enceinte d’une paroisse les 26 et 27 juillet 2025, dans l'est de la République démocratique du Congo, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Plusieurs autres enfants ont été enlevés et sont toujours portés disparus.
Les ADF, dirigées par des Ougandais, ont prêté allégeance à l'État islamique (EI) en 2019, mais les liens actuels entre les deux groupes armés ne sont pas clairs. L'EI a revendiqué l'attaque de la ville de Komanda, dans la province de l'Ituri, sur sa chaîne Telegram, indiquant que 45 personnes avaient été tuées. Ce massacre accentue les inquiétudes quant à la capacité de l'armée nationale congolaise, stationnée à proximité, et de la force de maintien de la paix de l'ONU à protéger les civils.
« Les meurtres de civils commis par les Forces démocratiques alliées, y compris de fidèles se trouvant dans une église, sont d'une incompréhensible brutalité », a déclaré Clémentine de Montjoye, chercheuse senior sur les Grands Lacs à Human Rights Watch. « Le massacre de Komanda et les autres tueries de masse perpétrées cette année mettent en évidence l'insécurité dans l'est de la RD Congo et la nécessité pour le gouvernement congolais de renforcer d'urgence ses mesures pour protéger les civils et traduire les responsables en justice. »
Des habitants de Komanda et des témoins ont rapporté à Human Rights Watch que des fidèles s'étaient rassemblés à l'église catholique le 26 juillet dans le cadre d'une célébration religieuse et que beaucoup d'entre eux avaient passé la nuit dans la paroisse avant la messe du dimanche. Les combattants des ADF ont pénétré dans l'enceinte de la paroisse vers 1 heure du matin le 27 juillet et ont commencé leur attaque sur un bâtiment où des personnes dormaient, selon des témoins. Des survivants et un témoin ont déclaré que les combattants avaient attaqué des personnes en leur assénant des coups à la tête avec des instruments contondants ainsi qu'avec des machettes et des armes à feu. Selon la paroisse, au moins 33 personnes sont mortes sur le coup ou des suites de leurs blessures.
« Ils nous ont dit de nous asseoir, puis ils ont commencé à frapper les gens [avec des objets contondants] à l'arrière du cou. Ils ont tué deux personnes que je ne connaissais pas, et c'est là que j'ai décidé de m'enfuir avec quatre autres personnes », a déclaré un rescapé à Human Rights Watch. « Nous avons réussi à nous enfuir – ils ont tiré sur nous, mais ils ne nous ont pas touchés. »
Les combattants des ADF ont tué au moins cinq autres personnes dans la ville et incendié des maisons et des kiosks, selon un responsable local de la société civile et des médias. Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux et géolocalisées par Human Rights Watch montrent des bâtiments incendiés sur la route principale de la ville, près de l'église.
Human Rights Watch a reçu les noms de 39 personnes tuées, 9 blessées et de 9 enfants âgés de 7 à 14 ans qui ont été enlevés. Selon une liste fournie par la paroisse le 2 août, plus de 30 personnes ont été enlevées et 7 blessées lors de l'attaque sur le bâtiment à côté de l'église. Le 27 juillet, la mission de maintien de la paix des Nations Unies en RD Congo (MONUSCO) a fait état d'au moins 43 morts, dont 9 enfants, ainsi que de personnes tuées dans les zones environnantes. Selon deux sources, des personnes kidnappées se sont échappées.
L'armée congolaise était déployée à environ 3 kilomètres au sud de l'église, tandis que la MONUSCO se trouvait à environ un kilomètre au sud. Human Rights Watch a reçu des informations selon lesquelles des problèmes de réseau au moment de l'attaque ont entravé les capacités à donner l'alerte.
« Pendant tout ce temps, ni les FARDC [armée congolaise] ni la MONUSCO ne sont intervenues », a déclaré un leader de la société civile. « La police n'est pas venue non plus. Ils sont tous finalement arrivés, mais il était trop tard. Ils n'ont pu que constater les dégâts. »
Le gouvernement a imposé l'état de siège dans le Nord-Kivu et en Ituri en avril 2021 afin de mettre fin à l'insécurité dans ces deux provinces. Cependant, l'état de siège n'a pas mis un terme aux abus commis contre les civils. Il a permis à l'armée et à la police de restreindre la liberté d'expression et de réprimer les manifestations pacifiques en recourant à la force létale ainsi que d’arrêter arbitrairement et de poursuivre en justice des militants, des journalistes et des membres de l'opposition politique.
L'influente Conférence épiscopale nationale du Congo a déclaré le 29 juillet que « [n]otre indignation est d’autant plus grande parce que ce énième massacre survient dans l’une des Provinces placées sous l’état de siège depuis plusieurs années, appuyé par la mutualisation des forces armées de la RD Congo (FARDC) et celles de l’Ouganda (UPDF), avec la présence pluri décennale de la Mission des Nations Unies pour le Maintien de la Paix (MONUSCO). »
Le gouvernement congolais a condamné ces meurtres, les qualifiant d'« horribles », et des responsables militaires les ont décrits comme un « massacre à grande échelle » en réponse aux récentes opérations militaires menées contre les ADF. La MONUSCO a condamné ces meurtres et averti que ces attaques aggraveraient « une situation humanitaire déjà extrêmement préoccupante dans la province. »
En réponse aux questions écrites de Human Rights Watch, une responsable de l’information du bataillon d’intervention rapide de la base de la MONUSCO à Komanda a déclaré que « les ADF sont connus pour employer des tactiques meurtrières silencieuses, frappant rapidement, de manière organisée et imprévisible. Dans ce cas précis, l'attaque a eu lieu aux premières heures du matin, visant un rassemblement religieux auquel participaient un grand nombre de civils » et que la MONUSCO avait pris des mesures pour « intensifier les efforts de protection dans la région ».
Une source militaire congolaise a déclaré à Human Rights Watch qu'une enquête de la justice militaire avait été ouverte et que des troupes supplémentaires avaient été déployées dans la région afin d'assurer la protection des civils. Le gouvernement congolais et la MONUSCO devraient compléter l’enquête sur l'attaque de juillet et sur la réponse des forces armées et de la MONUSCO de toute urgence et rendre ses conclusions publiques.
Les autorités congolaises, avec l'aide de la MONUSCO, devraient adopter des mesures pour rétablir la confiance avec les civils, notamment en renforçant les réseaux d'alerte précoce et en consultant les communautés et les groupes civiques sur les besoins en matière de protection. Les autorités devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les civils, notamment en réagissant rapidement aux informations faisant état d'activités et de mouvements de groupes armés. En outre, des efforts devraient être déployés pour traduire en justice les auteurs de ces meurtres, qui pourraient constituer des crimes de guerre, a déclaré Human Rights Watch.
Ces dernières années, le groupe armé ADF a été impliqué dans de nombreux meurtres et enlèvements dans les territoires de Beni et Lubero, situés dans la province du Nord-Kivu, et de plus en plus dans le territoire voisin d'Irumu, dans la province de l’Ituri. Selon l'ONU, les attaques des ADF au début du mois de juillet ont tué 82 civils en Ituri et au Nord-Kivu. Le Groupe d'experts des Nations Unies sur la RD Congo a indiqué que « janvier 2025 a marqué la deuxième fois où les ADF ont fait plus de 200 morts en un seul mois – principalement dans la région de Beni et le territoire de Lubero ». En 2024, les ADF étaient le groupe armé responsable du plus grand nombre de meurtres en RD Congo, principalement des civils.
Au début de l'année 2025, les forces armées ougandaises ont accru une opération militaire conjointe, baptisée « Opération Shujaa », qui avait débuté fin 2021. L'ONU a toutefois signalé que cette opération « n’a pas réduit la violence des ADF contre les civils dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri ». Certains experts en matière de sécurité estiment que le déploiement conjoint a repoussé les ADF de certains de leurs bastions situés près de la frontière ougandaise pour s’enfoncer davantage dans les provinces de l'Ituri et du Nord-Kivu.
L'Union africaine et le Conseil de sécurité des Nations Unies devraient faire pression pour qu'une stratégie crédible soit mise en place afin de remédier à la crise sécuritaire qui s'aggrave et aux graves violations des droits humains dans toutes les régions de l'est de la RD Congo, a déclaré Human Rights Watch.
« Le président Félix Tshisekedi, avec un soutien international, devrait se concentrer sur la protection des civils et renforcer la surveillance militaire dans l'est de la RD Congo afin de protéger les communautés qui souffrent depuis longtemps contre de nouvelles atrocités », a conclu Clémentine de Montjoye. « Le gouvernement a le devoir de protéger les civils et de garantir que justice soit rendue aux victimes de ces atrocités répétées. »
06.08.2025 à 22:07
Le 5 août, le Conseil constitutionnel du Cameroun a appuyé la décision de la commission électorale d'exclure Maurice Kamto, opposant politique de premier plan et adversaire du président sortant Paul Biya, des prochaines élections présidentielles du pays. Cette décision menace la crédibilité du processus électoral et a déclenché une nouvelle vague de répression contre l'opposition politique.
La commission électorale camerounaise avait rejeté la candidature de Maurice Kamto le mois dernier, affirmant que le parti Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (MANIDEM), qui le soutenait, avait également parrainé un deuxième candidat. Cependant, le président du MANIDEM a déclaré que son parti ne soutenait que Maurice Kamto et que la décision de la commission électorale était arbitraire.
Maurice Kamto avait fait appel de cette décision devant le Conseil constitutionnel, qui a rejeté son recours, le considérant comme « non fondé ». Il a également rejeté 34 requêtes d'autres candidats potentiels et ses décisions ne peuvent faire l'objet d'aucun recours.
« La décision du Conseil constitutionnel repose sur des motifs politiques plutôt que juridiques », a déclaré Hyppolite Meli Tiakouang, membre de l'équipe juridique de Maurice Kamto, à Human Rights Watch. « Maurice Kamto est victime de manœuvres frauduleuses qui visent à étouffer toute opposition, préparant ainsi le terrain pour des élections inéquitables. »
L’exclusion de l’opposant politique a suscité des critiques parmi ses partisans et les membres de son parti, qui ont organisé des marches et des manifestations pacifiques dans la capitale, Yaoundé, depuis le 26 juillet. Les forces de sécurité ont utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser la foule, notamment des dizaines de partisans de Maurice Kamto, qui s'étaient rassemblés devant le Conseil constitutionnel le 4 août. Elles ont arrêté au moins 35 de ses partisans depuis le 26 juillet.
Les personnes arrêtées, dont sept femmes, sont détenues dans différents commissariats de police et brigades de la gendarmerie à Yaoundé pour des chefs d'accusation tels que trouble à l'ordre public et rébellion. Leurs avocats ont qualifié ces accusations de motivées par des raisons politiques.
La décision d'exclure Maurice Kamto de la course à la présidence reflète la persistante intolérance du gouvernement à l'égard de toute opposition et dissidence et intervient dans un contexte de répression accrue à l'encontre d’opposants, d’activistes et d’avocats à l'approche des élections, prévues plus tard cette année.
L'exclusion de Maurice Kamto porte atteinte au droit des Camerounais de participer à des élections libres et équitables. Maurice Kamto devrait être autorisé à se présenter aux élections et les citoyens Camerounais devraient pouvoir choisir librement leur candidat. Les autorités devraient mettre fin à la répression de l'opposition et libérer immédiatement toutes les personnes arrêtées pour des raisons politiques, afin que les élections ne soient pas considérées comme inéquitables avant même le début de la campagne électorale.
06.08.2025 à 20:58
(Beyrouth, 6 août 2025) – Les forces terrestres israéliennes ont occupé des écoles dans le sud du Liban lors des hostilités avec le Hezbollah entre septembre et novembre 2024 et dans les semaines qui ont suivi. Dans au moins deux écoles, elles semblent avoir intentionnellement vandalisé, pillé et détruit des équipements scolaires, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui. Plusieurs actes de ce type ont constitué des crimes de guerre.
Alors que les enfants libanais subissent depuis plus de six ans d'importantes perturbations dans leur scolarité depuis la crise économique de 2019, le Liban et les gouvernements donateurs devraient donner la priorité à la reconstruction des infrastructures essentielles, notamment des écoles, de manière transparente, responsable et exempte de corruption.
« De nombreux villages situés près de la frontière dans le sud du Liban ont été rasés ; parmi les écoles qui s’y trouvent encore, plusieurs ont été vandalisées et au moins deux ont été saccagées par les forces israéliennes », a déclaré Ramzi Kaiss, chercheur sur le Liban à Human Rights Watch. « En pillant des écoles, les forces israéliennes ont manifestement commis des crimes de guerre, et ont compromis l'éducation des élèves libanais. »
Plus de 100 écoles dans le sud du Liban ont été détruites ou « gravement endommagées » depuis le début des hostilités en octobre 2023, selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF).
Entre janvier et mars 2025, des chercheurs de Human Rights Watch se sont rendus sur les sites de sept écoles dans le sud du Liban, près de la frontière avec Israel, situées dans sept villes et villages : Aita al-Shaab, Tayr Harfa, Naqoura, Yarine, Ramieh, Aitaroun et Bani Hayyan. Les chercheurs y ont documenté les dégâts et les destructions subis par ces écoles, ainsi que dans des villages environnants.
Dans cinq des sept écoles, Human Rights Watch a recueilli des preuves – notamment des produits alimentaires israéliens, d'autres déchets portant des inscriptions en hébreu et des graffitis en hébreu sur les murs et les tableaux des écoles – indiquant que les forces israéliennes avaient occupé les lieux ; de telles preuve d’occupation n’ont pas été trouvées dans les écoles d'Aitaroun et de Bani Hayyan, qui ont toutefois été endommagées, comme les cinq autres établissements.
Sites d'écoles au Sud-Liban occupées par les forces israéliennes Click to expand Image Sites d'écoles au Sud-Liban qui ont été occupées par les forces israéliennes, selon les éléments de preuve recueillis par HRW. © 2025 Human Rights WatchHuman Rights Watch a mené des entretiens avec des directeurs et des administrateurs d’écoles, qui ont souhaité conserver l'anonymat, au sujet des conséquences sur l'accès des enfants à l'éducation. Human Rights Watch a également mené des entretiens avec des représentants de deux organisations humanitaires internationales qui ont également documenté des dégâts et des destructions d'écoles au Liban, ainsi que d'autres impacts sur l'éducation.
Les cinq écoles occupées ont subi des dégâts causés par des tirs d'armes légères et explosives. Dans chacune de ces cinq écoles, des graffitis et des inscriptions en hébreu et en anglais étaient encore visibles sur les murs et les tableaux des salles de classe. À Yarine et Naqoura, les éléments de preuve suggèrent que les forces israéliennes ont délibérément détruit et pillé les écoles, ce qui constitue des crimes de guerre. Suite au retrait des forces israéliennes, les salles de classe et les bureaux administratifs étaient endommagés, et avaient manifestement été saccagés. Les équipements scolaires qui s’y trouvaient encore, notamment des ordinateurs et du matériel pédagogique, étaient en grande partie détruits ou endommagés.
Les écoles d'Aita al-Shaab, de Tayr Harfa et de Ramieh ont subi d'importants dégâts, probablement dus à des combats terrestres. L'armée israélienne a déclaré avoir frappé l'école de Tayr Harfa parce que des membres du Hezbollah utilisaient le bâtiment scolaire. Les forces israéliennes l'ont ensuite occupé. Les directeurs d'école ont déclaré à Human Rights Watch que des biens scolaires avaient disparu. Toutefois, les chercheurs n’ont pas pu attribuer la responsabilité de la disparition des biens scolaires à la lumière des combats qui ont eu lieu dans ou autour des écoles, en plus du fait que ces villages et villes avaient été en grande partie vidés de leurs habitants depuis le début des hostilités le 8 octobre 2023.
Des graffitis en hébreu aperçus à l'école publique intermédiaire de Naqoura suggèrent que l'armée israélienne a continué d'occuper certaines écoles plusieurs semaines après le cessez-le-feu de novembre 2024.
Le 16 mai, Human Rights Watch a envoyé à l'armée israélienne, Tsahal – aussi appelée Israel Defense Forces (IDF), soit Forces de défense israéliennes (FDI) – une lettre présentant ses conclusions et comprenant plusieurs questions. Un porte-parole des FDI a répondu que l'armée israélienne « est parfois amenée à opérer depuis des bâtiments civils pendant des périodes variables, en fonction des besoins opérationnels et des circonstances sur le terrain ». Il a ajouté que « le vandalisme contre des biens civils est contraire aux valeurs de Tsahal, et constitue une violation de ses règlements » et que « les incidents exceptionnels soulevant des inquiétudes quant à un écart par rapport aux ordres et à la conduite attendue de Tsahal seront traités en conséquence ».
Le 4 juin, Human Rights Watch a en outre transmis une lettre au Hezbollah, demandant notamment si ce groupe armé avait occupé des écoles ou engagé des combats terrestres sur des sites d’écoles ou à proximité, mais n'a pas reçu de réponse.
Les violations graves des lois de la guerre commises par des individus avec une intention criminelle – c'est-à-dire délibérément ou par imprudence – constituent des crimes de guerre. Les crimes de guerre comprennent un large éventail d'infractions, telles que les attaques délibérées, indiscriminées et disproportionnées contre des biens civils, et le pillage. Les écoles et autres biens culturels, y compris certains biens publics, doivent être protégés : « Toute saisie, destruction ou dégradation intentionnelle de semblables établissements […] est interdite et doit être poursuivie. »
En 2015, le Liban a adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, un engagement politique international visant à protéger l'éducation en temps de guerre en renforçant la prévention et la réponse aux attaques contre les élèves, les enseignants, les écoles et les universités. Aux termes de cette déclaration, les gouvernements s'engagent à ce que leurs armées s'abstiennent d'utiliser les écoles et les universités à des fins militaires.
Israël n'a pas adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles. Les alliés d'Israël devraient faire pression sur le gouvernement israélien pour qu'il cesse immédiatement les attaques délibérées, indiscriminées et disproportionnées contre les civils et les biens civils, y compris les écoles, et qu'il évite d'utiliser les établissements scolaires à des fins militaires.
Les donateurs internationaux et les agences humanitaires devraient soutenir le gouvernement libanais en vue d'assurer la reconstruction rapide des écoles et des autres infrastructures civiles essentielles. Afin de garantir l'obligation de rendre des comptes et la justice pour les graves abus commis, le gouvernement libanais devrait conférer à la Cour pénale internationale (CPI) la compétence pour enquêter sur les crimes internationaux commis sur le territoire libanais depuis octobre 2023, et engager des poursuites a cet égard.
« Des mesures urgentes de reconstruction sont nécessaires, afin que les dizaines de milliers de personnes déplacées puissent commencer à retourner dans leurs villages, et que les enfants puissent bénéficier pleinement de leur droit à l'éducation », a conclu Ramzi Kaiss. « Il est aussi important que le gouvernement libanais garantisse que justice soit rendue pour les abus et les crimes commis, notamment en conférant à la CPI la compétence pour enquêter sur de tels actes commis au Liban. »
Suite détaillée en anglais.
……………
Articles
Le Monde OLJ
05.08.2025 à 06:00
(New York) – Les talibans ont intensifié leur répression depuis leur retour au pouvoir en Afghanistan le 15 août 2021, en renforçant les restrictions sur les droits des femmes et des filles, en détenant des journalistes et en réduisant au silence toute dissidence, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. Le pays est aujourd’hui confronté à l’une des pires crises humanitaires au monde, exacerbée par la réduction de l’aide des gouvernements donateurs et le retour de 1,9 million de réfugiés afghans expulsés d’Iran et du Pakistan.
Les talibans ont continué à interdire aux filles de poursuivre leurs études au-delà de la sixième année et aux femmes d’accéder à l’université. Les femmes sont également soumises à des restrictions sévères en matière d’emploi, de liberté de mouvement et d’accès aux espaces et services publics. Ces violations de leurs droits ont limité leur accès à l’aide humanitaire et aux soins de santé. Le 8 juillet 2025, la Cour pénale internationale a émis des mandats d’arrêt contre le chef des talibans, Haibatullah Akhundzada, et le président de la Cour suprême afghane, Abdul Hakim Haqqani, pour crime contre l’humanité de persécution pour des motifs liés au genre.
« Le quatrième anniversaire du retour au pouvoir des talibans nous rappelle cruellement la gravité de leurs exactions, en particulier contre les femmes et les filles », a déclaré Fereshta Abbasi, chercheuse sur l’Afghanistan à Human Rights Watch. « Les actes odieux des talibans devraient inciter les gouvernements à soutenir les efforts visant à traduire en justice les dirigeants talibans, et tous les autres individus responsables de crimes graves en Afghanistan. »
Les talibans ont appliqué avec rigueur une loi draconienne de 2024 sur la « propagation de la vertu et la prévention du vice », qui impose des règles en matière vestimentaire et de comportement. Des comités chargés de faire respecter la loi au niveau local ont mené des opérations de contrôle sur les lieux de travail, surveillé les espaces publics et mis en place des barrages dans les rues pour inspecter les téléphones portables et interroger les occupants des véhicules ainsi que les piétons.
Les responsables talibans ont arrêté des personnes pour de prétendues infractions à la loi, comme le fait d’écouter de la musique, de porter des hijabs jugés inappropriés ou de ne pas respecter la séparation entre femmes et hommes sur le lieu de travail. L’application stricte de l’obligation pour les femmes d’être accompagnées d’un parent de sexe masculin a accru les difficultés et les restrictions quotidiennes auxquelles elles sont confrontées, tout en rendant plus difficile encore leur accès à l’aide humanitaire et aux services publics tels que les soins de santé.
Une coalition d’organisations afghanes et internationales de défense des droits humains a renouvelé son appel à des mesures, en septembre 2024. Elle a exhorté le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à mettre en place un mécanisme international indépendant de mise en œuvre de l’obligation de rendre des comptes pour l’Afghanistan qui serait chargé d’enquêter, de collecter, de conserver et d’analyser les preuves des graves violations et abus commis dans ce pays.
Ces quatre dernières années, les pays membres de l’ONU n’ont pas pris de mesures efficaces pour mettre fin aux violations flagrantes des droits humains commises en Afghanistan, a déclaré Human Rights Watch. L’Union européenne devrait proposer la création d’un mécanisme complet d’obligation de rendre des comptes pour l’Afghanistan dans le cadre de la résolution annuelle qu’elle présentera au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies pour adoption en septembre.
L’Iran et le Pakistan ont expulsé près de deux millions d’Afghans dans le cadre de la répression menée par ces gouvernements contre les immigrants et les réfugiés. Parmi les personnes renvoyées de force figurent des Afghans qui ont fui en Iran et au Pakistan par crainte de persécutions après la prise du pouvoir par les talibans. Bon nombre de ceux qui ont été expulsés ou contraints de partir vivaient hors d’Afghanistan depuis des décennies, voire depuis toujours dans certains cas. Ces chiffres s’ajoutent aux millions de personnes déplacées à l’intérieur de l’Afghanistan, une situation qui met la délivrance d’aide humanitaire à rude épreuve.
Le 18 juillet dernier, l’Allemagne a en outre expulsé 81 Afghans vers Kaboul, une première sous le gouvernement du chancelier Friedrich Merz, qui a annoncé que ces expulsions se poursuivraient. Aux États-Unis, l’administration Trump a mis fin au statut de protection temporaire accordé aux ressortissants afghans, a sévèrement limité le programme de libération conditionnelle pour raisons humanitaires pour les Afghans, a suspendu indéfiniment toutes les admissions de réfugiés et a inscrit l’Afghanistan sur la liste des pays soumis à une interdiction de voyager, rendant ainsi des milliers de ressortissants afghans passibles d’expulsion, notamment vers des pays tiers.
Les médias afghans ont dû se conformer à des réglementations strictes qui limitent le contenu de ce qu’ils diffusent, notamment en interdisant la publication d’images de certaines personnes et en imposant des exigences vagues visant à empêcher la publication de tout contenu contraire à l’islam. Les journalistes ont déclaré qu’ils s’autocensuraient de plus en plus pour éviter les représailles des autorités.
Les coupes budgétaires de l’administration Trump dans les programmes d’aide des États-Unis – qui représentaient plus de 40 % de l’aide humanitaire à l’Afghanistan jusqu’en janvier 2025 – ont porté un coup sévère aux efforts d’aide alimentaire qui étaient essentiels pour garantir l’accès à la nourriture, pénalisant de manière disproportionnée les femmes et les filles. La moitié de la population afghane, soit environ 23 millions d’habitants, a besoin de l’aide alimentaire. En juillet, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) a rapporté que plus de 400 établissements de santé avaient fermé leurs portes en raison d’un manque de fonds, dont une grande partie provenait de l’aide publique au développement des pays donateurs.
La suppression de l’aide étrangère a aggravé la malnutrition, en particulier chez les enfants. Ces coupes ont également remis en cause des programmes éducatifs en ligne essentiels destinés aux filles et aux femmes.
« Les répercussions globales du retour au pouvoir des talibans sont devenues de plus en plus évidentes ces quatre dernières années », a conclu Fereshta Abbasi. « Les autres gouvernements devraient trouver un équilibre subtil entre la nécessité de faire pression sur les talibans pour qu’ils mettent fin à leurs abus, et le besoin d’atténuer la crise humanitaire en Afghanistan. Aucun gouvernement ne devrait renvoyer des Afghans de force dans leur pays. »
01.08.2025 à 06:00
(Jérusalem, 1er août 2025) – Les forces israéliennes présentes sur les sites d'un nouveau système de distribution d'aide humanitaire soutenu par les États-Unis à Gaza ont régulièrement ouvert le feu sur des civils palestiniens affamés, commettant de graves violations du droit international qui constituent des crimes de guerre, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.
Des incidents ayant fait de nombreuses victimes se sont produits quasi quotidiennement sur les quatre sites gérés par la Fondation humanitaire pour Gaza (Gaza Humanitarian Foundation, GHF), qui agit en coordination avec l'armée israélienne, ou à proximité de ces sites. Au moins 859 Palestiniens ont été tués alors qu'ils tentaient d'obtenir de la nourriture sur les sites de la GHF entre le 27 mai et le 31 juillet, la plupart par l'armée israélienne, selon les Nations Unies. La situation humanitaire désastreuse est la conséquence directe de l'utilisation par Israël de la famine comme arme de guerre – ce qui constitue un crime de guerre – ainsi que de son blocage intentionnel et continuel de l’aide humanitaire et des services de base ; ces actions qui se poursuivent constituent le crime contre l'humanité d'extermination, et des actes de génocide.
« Non seulement les forces israéliennes affament délibérément des civils palestiniens à Gaza, mais elles tirent presque quotidiennement sur ceux qui cherchent désespérément de la nourriture pour leurs familles », a déclaré Belkis Wille, directrice adjointe de la division Crises et conflits à Human Rights Watch. « Les forces israéliennes, soutenues par les États-Unis et des entrepreneurs privés, ont mis en place un système de distribution d'aide humanitaire défaillant et militarisé, qui a transformé les opérations de distribution d'aide en véritables bains de sang. »
Les autres États devraient faire pression sur les autorités israéliennes pour qu’elles cessent immédiatement de recourir à la force létale comme méthode de contrôle des foules contre les civils palestiniens, qu’elles lèvent les nombreuses restrictions illégales sur l’entrée de l’aide humanitaire, et qu’elles suspendent ce système de distribution défectueux, a déclaré Human Rights Watch. Au lieu de cela, l'ONU et d'autres organisations humanitaires devraient être autorisées à reprendre les distributions d'aide à travers Gaza à grande échelle et sans restrictions, car elles ont prouvé leur capacité à nourrir la population conformément aux normes humanitaires et comme exigé par les ordonnances contraignantes émises par la Cour internationale de Justice (en janvier, en mars et en mai 2024), dans le cadre de l’affaire portée par l’Afrique du Sud contre Israël pour génocide.
En mai, après plus de 11 semaines d’un blocus total imposé par Israël à Gaza, le mécanisme de distribution de la GHF a commencé à être mis en œuvre. Selon diverses sources, l'objectif des autorités israéliennes était de remplacer à terme l’acheminement de l’aide humanitaire par l’ONU et d’autres organisations humanitaires, par le système de la GHF.
Les autorités israéliennes ont justifié ces mesures en affirmant que le Hamas avait détourné l'aide, mais un récent article du New York Times, basé sur des sources militaires israéliennes, indique que l'armée israélienne ne dispose d’aucune preuve que le Hamas ait systématiquement détourné l'aide de l'ONU. Le système dirigé par l’ONU reste opérationnel, mais est soumis à des restrictions significatives imposées par les autorités israéliennes, notamment quant à la quantité et au type d'aide autorisée et à sa destination.
Quatre sites de distribution d'aide humanitaire par la GHF à Gaza Click to expand Image Carte montrant l'emplacement des 4 sites de distribution d'aide par l’organisme GHF à Gaza. Les zones en couleur violette représentent des zones militarisées contrôlées par les forces israéliennes, et/ou soumises à des ordres d’évacuation depuis le 18 mars. © 2025 OCHA/Graphisme Human Rights WatchLe système GHF est géré par deux sociétés privées sous-traitantes américaines : Safe Reach Solutions (SRS) et UG Solutions, en coordination avec l’armée israélienne. Ces sociétés ont déclaré qu'elles s'engageaient à « livrer uniquement de la nourriture aux civils en souffrance » et qu'elles étaient indépendantes de tout gouvernement, mais les quatre sites de distribution se trouvent dans des zones militarisées. Trois sites se trouvent à Rafah, que les autorités israéliennes ont en grande partie rasé et où elles envisagent de concentrer la population de Gaza. Le quatrieme site se trouve dans une « zone de sécurité » israélienne, connue sous le nom de corridor de Netzarim, qui coupe Gaza en deux. Aucun de ces quatre sites n'est accessible aux habitants du nord de Gaza, qui continuent de dépendre du système de distribution d’aide humanitaire géré par l'ONU.
En juillet, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 10 personnes qui étaient sur le terrain à Gaza ces derniers mois et qui ont été témoins de violences sur ou à proximité des sites d'aide, ou qui ont soigné les personnes blessées et tuées sur ces sites. Parmi les personnes interrogées figuraient Anthony Bailey Aguilar, lieutenant-colonel à la retraite des forces spéciales de l'armée américaine, qui travaillait à Gaza en tant qu'entrepreneur en sécurité pour UG Solutions, notamment dans les centres de contrôle et lors de dizaines d’opérations de distribution d’aide menées sur les quatre sites de la GHF entre mai et juin ; un travailleur humanitaire étranger qui a travaillé à Gaza en juin ; deux médecins étrangers qui ont travaillé à Gaza en mai, juin et juillet et ont soigné des civils blessés sur ou à proximité des sites de distribution d'aide de la GHF ; et six témoins palestiniens d'incidents violents liés aux distributions. Les chercheurs ont également analysé des images satellite (de différentes résolutions spatiales), vérifié des vidéos et des photographies, dont celles prises par Anthony Bailey Aguilar, analysé les métadonnées des documents et examiné les publications de la GHF sur les réseaux sociaux.
Le 19 juillet, Human Rights Watch a adressé à la GHF, à SRS, à UG Solutions, à l’armée israélienne et au gouvernement des États-Unis des courriers accompagnés d’un résumé de conclusions et d’une liste de questions. L’armée israélienne, UG Solutions, l’avocat de UG Solutions, et l’avocat de GHF/SRS ont répondu, et leurs réponses globales sont reflétées dans la version complète en anglais de ce communiqué.
Les quatre sites de distribution de la GHF ont été sélectionnés et construits par l'armée israélienne, a indiqué l'avocat de la GHF à Human Rights Watch. Grâce à l'imagerie satellite, les chercheurs ont confirmé que les sites se trouvent dans des zones militarisées, entourées d'avant-postes militaires. L'avocat de la GHF a déclaré que la Fondation avait embauché SRS pour gérer les sites de distribution, qui à son tour avait embauché UG Solutions pour assurer la sécurité des sites.
Plutôt que de livrer de la nourriture aux habitants dans des centaines de sites accessibles à travers Gaza, le nouveau mécanisme oblige cependant les Palestiniens à traverser des terrains dangereux et détruits. Selon cinq témoins, les forces israéliennes contrôlent le mouvement des Palestiniens vers les sites par l'utilisation de balles réelles. À l’intérieur des sites, la distribution de l’aide elle-même est une « mêlée générale » incontrôlée, comme l’a décrit Anthony Bailey Aguilar, qui laisse souvent les personnes les plus vulnérables et les plus faibles sans rien. Human Rights Watch a analysé les annonces faites sur la page Facebook de la GHF concernant 105 distributions sur les 4 sites, et a constaté que 54 fenêtres de distribution duraient moins de 20 minutes et que 20 distributions étaient annoncées comme terminées avant le début de leur heure d'ouverture officielle.
Un Palestinien a expliqué à Human Rights Watch avoir quitté son domicile vers 21 heures pour tenter de rejoindre un site qui devait ouvrir à 9 heures le lendemain. En chemin, a-t-il déclaré, un char israélien a ouvert le feu sur lui et sur d'autres personnes alors qu'ils se dirigeaient vers le site : « Si vous arrêtiez de marcher ou faisiez quoi que ce soit qu'ils ne voulaient pas, ils vous tiraient dessus. » Lors d'un autre incident, Anthony Bailey Aguilar a déclaré avoir été témoin d'un tir de char israélien sur un véhicule civil juste à l'extérieur du Site 4, tir qui, selon lui, a tué quatre personnes à l'intérieur du véhicule, le 8 juin. Un autre entrepreneur qui s’est exprimé sur ITV News a décrit la même attaque contre la voiture.
Un autre Palestinien qui s'est rendu sur l'un des sites d'aide a décrit le voyage difficile et risqué : « Tant de personnes qui ont besoin d'aide ne la reçoivent pas, faute de pouvoir se rendre sur le site. Ceux qui y vont tentent leur chance, et c'est remarquable s'ils reviennent vivants. »
Selon sept témoins avec lesquels Human Rights Watch s’est entretenu, les forces israéliennes tiraient régulièrement sur des civils. Trois témoins palestiniens et Anthony Bailey Aguilar ont également affirmé avoir vu des gardes armés, présents sur les sites de la GHF, utiliser des balles réelles et d'autres armes contre des civils lors des distributions d'aide. Ces gardes armés seraient apparemment des sous-traitants d'UG Solutions, étant donné que la lettre de l’avocat de la GHF et SRS a confirmé que les seuls entrepreneurs possédant des armes à l'intérieur des sites de distribution sont ceux d'UG Solutions. La GHF, SRS et UG Solutions ont nié les allégations selon lesquelles leurs sous-traitants auraient utilisé la force contre des civils et ont déclaré que le personnel d'UG Solutions n'utilisait la force létale qu'en dernier recours et n'avait jamais blessé de civils ni de demandeurs d'aide.
Le mécanisme d'aide n'a pas réussi à résoudre le problème de la famine à Gaza, a déclaré Human Rights Watch. L'avocat de la GHF a indiqué avoir livré 95 millions de repas à Gaza au 28 juillet. Cependant, même à pleine capacité sur les quatre sites, le programme de la GHF ne peut fournir qu'une soixantaine de camions de nourriture par jour, selon Anthony Bailey Aguilar, comparés aux 600 camions par jour qui sont entrés à Gaza dans le cadre du programme d'aide dirigé par l'ONU pendant le cessez-le-feu début 2025.
Le 29 juillet, les plus grands experts mondiaux en matière d’insécurité alimentaire, le Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC), ont déclaré que le « pire scénario de famine se joue actuellement dans la bande de Gaza ». Le ministère de la Santé de Gaza a indiqué qu'au 30 juillet, 154 personnes, dont 89 enfants, sont mortes de malnutrition depuis le 7 octobre 2023, la majorité d'entre elles depuis le 19 juillet. Le 27 juillet, l’armée israélienne a annoncé qu’elle reprendrait les largages aériens, désignerait des voies sécurisées pour l'entrée de l'aide et mettrait en œuvre des « pauses humanitaires » dans les zones peuplées pour faciliter l'aide.
Le droit international humanitaire ou lois de la guerre, applicable aux hostilités entre les forces israéliennes et les groupes armés palestiniens, exigent que les parties fassent à tout moment la distinction entre les civils et les combattants. Les attaques ne peuvent être dirigées que contre des objectifs militaires, les attaques qui ciblent des civils et des biens civils, ou sont indiscriminées, sont interdites. Le droit international des droits humains, qui s'applique également à Gaza, interdit l'utilisation létale intentionnelle d'armes à feu par les responsables de l'application des lois, sauf lorsque cela est « strictement inévitable pour protéger la vie ». Ces normes s’appliquent également au personnel de sécurité privée exerçant des pouvoirs de police.
En vertu de ces deux corpus juridiques, les autorités peuvent prendre des mesures pour assurer l'acheminement de l'aide, mais le recours à la force létale contre les civils est strictement limité. Par exemple, si des civils s'écartaient d'un itinéraire désigné par les forces armées israéliennes, cela ne ferait pas d'eux, en soi, des cibles pouvant être légalement attaquées. Une telle situation ne justifierait pas non plus le recours intentionnel à la force létale par les forces de police, considéré comme « strictement inévitable pour protéger des vies ». L'homicide volontaire et illégal de civils de la population occupée constitue un crime de guerre.
L'usage répété et injustifié de la force létale contre des civils palestiniens par les forces israéliennes constitue une violation du droit international humanitaire et des droits humains. Human Rights Watch n'a connaissance d'aucun élément dans les cas documentés indiquant que les personnes tuées représentaient une menace imminente pour la vie au moment où elles ont été tuées. Le recours intentionnel à la force létale par ceux qui exercent des pouvoirs de police sans justification légale constitue également une violation du droit international des droits humains. Les meurtres réguliers commis par les forces israéliennes à proximité des sites de la GHF constituent également des crimes de guerre, compte tenu de tous les éléments indiquant qu'il s'agit d'assassinats délibérés et ciblés de personnes dont les autorités israéliennes savent qu'elles sont des civils palestiniens.
Le 26 juin, un mois après que SRS a commencé à distribuer de l'aide sur les sites, le gouvernement des États-Unis a annoncé qu'il allouait 30 millions de dollars à la GHF. La source de financement du premier mois des distributions de la GHF reste inconnue ; dans sa lettre à Human Rights Watch, l'avocat de la GHF a déclaré que la Fondation avait « reçu 100 millions de dollars d'un gouvernement autre que celui des États-Unis ou d'Israël », sans préciser le gouvernement concerné.
L’administration Trump a envoyé l’allocation en contournant les approbations du Congrès. Les États-Unis sont complices des violations israéliennes des lois de la guerre à Gaza, étant donné qu’ils fournissent une aide militaire substantielle malgré la connaissance des graves violations persistantes.
Le Congrès des États-Unis devrait également exiger des notifications sur tout financement supplémentaire destiné à la GHF et réclamer un rapport sur la manière dont les fonds américains sont actuellement utilisés, notamment une évaluation de l'efficacité de l'aide aux Palestiniens affamés.
Conformément à leurs obligations en vertu de la Convention sur le génocide, les États devraient utiliser toutes les formes de pression dont ils disposent, notamment des sanctions ciblées, un embargo sur les armes et la suspension des accords commerciaux préférentiels, pour mettre fin aux atrocités criminelles continues des autorités israéliennes.
« Il est indéfendable qu’au lieu d’utiliser leur influence considérable pour faire pression sur Israël afin qu’il mette fin à ses actes de génocide en cours, les États-Unis soutiennent et financent même un mécanisme mortel qui conduit les forces israéliennes à tuer des civils palestiniens affamés comme méthode de contrôle des foules », a conclu Belkis Wille. « Les États devraient agir de toute urgence pour mettre fin à l’extermination des Palestiniens. »
Suite plus détaillée en anglais :
www.hrw.org/news/2025/08/01/gaza-israeli-killings-of-palestinians-seeking-food-a-war-crime
31.07.2025 à 06:00
Au début du mois de juillet 2025, les autorités burkinabè ont libéré cinq journalistes et un militant des droits humains qui avaient été illégalement enrôlés de force dans l'armée après avoir critiqué la junte militaire. Bien qu'il s'agisse d'une évolution positive, leur libération rappelle aussi cruellement que d'autres personnes sont toujours portées disparues, certaines depuis 2024, sans qu'aucun indice ne permette de savoir où elles se trouvent.
Le 24 mars 2024, à Ouagadougou, la capitale du pays, les autorités ont arrêté Guezouma Sanogo, Boukari Ouoba et Phil Roland Zongo, trois membres de l'Association des journalistes du Burkina (AJB), ainsi que Luc Pagbelguem, journaliste sur la chaîne de télévision privée BF1, pour avoir dénoncé les restrictions à la liberté d'expression imposées par la junte. Le 2 avril, une vidéo a circulé sur les réseaux sociaux montrant Guezouma Sanogo, Boukari Ouoba et Luc Pagbelguem en uniforme militaire, ce qui a suscité des inquiétudes quant à leur conscription. La conscription de Phil Roland Zongo n'a été rendue publique et confirmée qu’au moment de sa libération.
Le 18 juin 2024, Kalifara Séré, commentateur sur la chaîne BF1 TV, a été porté disparu après une réunion avec des membres du Conseil supérieur de la communication (CSC), l'autorité de régulation des médias au Burkina Faso. Des membres du CSC avaient interrogé Kalifara Séré au sujet d'un commentaire dans lequel il avait exprimé des doutes quant à l'authenticité de photographies montrant le chef de l'État. En octobre 2024, les autorités ont finalement reconnu qu'il avait été enrôlé dans l'armée, avec deux autres journalistes, Serge Oulon et Adama Bayala. On ignore toujours où se trouvent Serge Oulon et Adama Bayala.
Le 29 novembre 2023, des hommes en civil se présentant comme des membres des services de renseignement nationaux ont enlevé Lamine Ouattara, membre du Mouvement burkinabè des droits de l'homme et des peuples (MBDHP), à son domicile. Des proches de Lamine Ouattara ont confirmé qu'il avait aussi été enrôlé illégalement.
Human Rights Watch a documenté le recours par la junte à une loi d'urgence de vaste portée pour enrôler des détracteurs, des journalistes, des militants des droits humains et des magistrats afin de les réduire au silence.
Si les gouvernements sont habilités à enrôler des civils adultes pour la défense nationale, toute conscription doit toutefois être mise en œuvre de manière à informer les conscrits potentiels de la durée du service militaire, et à leur donner la possibilité de contester leur obligation de servir.
Les autorités burkinabè devraient immédiatement libérer toutes les personnes encore détenues illégalement, et cesser d'utiliser la conscription pour réprimer les médias et les détracteurs.
30.07.2025 à 06:00
(Vilnius) – Les autorités russes ont intensifié la censure en ligne, les perturbations d’Internet et la surveillance depuis le début de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en février 2022, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport publié aujourd’hui.
30 juillet 2025 Disrupted, Throttled, and BlockedLe rapport de 50 pages, intitulé « Disrupted, Throttled and Blocked: State Censorship, Control, and Increasing Isolation of Internet Users in Russia » (« Internet perturbé, ralenti et bloqué : Censure par l’État, contrôle et isolement accru des internautes en Russie ») documente l’impact des capacités technologiques croissantes du gouvernement et de son contrôle sur l’infrastructure d’Internet dans ce pays. Human Rights Watch a constaté que cela permet aux autorités de procéder à un blocage et à une restriction plus généralisés et non transparents des sites web indésirables et des outils de contournement de la censure, ainsi qu’à des perturbations et des coupures d’Internet sous le prétexte de garantir la sécurité publique et la sûreté nationale.
« Pendant des années, les autorités russes ont méticuleusement développé leurs outils juridiques et technologiques afin de convertir l’espace de l’Internet russe en un forum étroitement contrôlé et isolé », a déclaré Anastasiia Kruope, chercheuse adjointe auprès de la division Europe et Asie centrale à Human Rights Watch. « Leurs efforts ont conduit à une censure généralisée, à des perturbations d’Internet à grande échelle et à un affaiblissement de la sécurité et de la vie privée, en violation de leurs responsabilités en matière de droits humains en vertu du droit international. »
Human Rights Watch a mené des entretiens avec 13 journalistes et experts indépendants russes et internationaux sur la censure d’Internet et les droits numériques, la sécurité de l’information, la gouvernance d’Internet et la politique numérique. Les chercheurs ont également analysé les lois et les règlements, ainsi qu’un large éventail de sources ouvertes en anglais et en russe, telles que des articles de recherche universitaire, des forums informatiques russes et des données recueillies par des projets russes et internationaux de surveillance de la censure sur Internet.
Human Rights Watch a adressé des courriers à huit entreprises de technologie – cinq sociétés étrangères et trois sociétés russes – ainsi qu’au gouvernement russe, au sujet de ses conclusions. Les réponses de l’entreprise américaine Cloudflare et de la société de technologie russe Yandex sont reflétées dans le rapport et figurent en annexe de ce document, qui est publié sur le site web de Human Rights Watch.
Les autorités russes ont bloqué des milliers de sites web, y compris des sites de médias indépendants et d’organisations de défense des droits humains, des pages web d’opposants politiques, ainsi que des plateformes de réseaux sociaux, pour non-respect de la législation draconienne qui régit les activités en ligne en Russie.
Certains sites étrangers et diverses plateformes ont cessé de fournir des services aux internautes russes en raison des sanctions et des pressions politiques qui ont suivi l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie en février 2022.
L’accès aux applications ou aux sites web bloqués, comme Instagram ou Facebook, est quasiment impossible en Russie sans passer par un réseau privé virtuel (Virtual Private Network, VPN), outil qui permet aux internautes de contourner la censure. Pourtant, d’après certaines estimations, environ la moitié de la population du pays ne sait pas utiliser ces outils, et les autorités les bloquent de plus en plus.
Ceci, associé à une promotion active par l’État d’alternatives russes, a forcé un nombre croissant d’internautes à basculer sur les navigateurs et les plateformes de réseaux sociaux russes qui proposent à leurs utilisateurs du contenu et des interprétations des événements actuels et historiques soutenus par le gouvernement. Les internautes sont également confrontés à des risques plus élevés de voir leurs données personnelles transmises aux services de police.
La loi russe exige que les sites web qui publient des annonces consacrent 5 % à des « publicités sociales », définies comme visant « des objectifs caritatifs ou d’autres objectifs ayant une valeur sociale, ainsi que la protection des intérêts de l’État ».
Le navigateur de Yandex a affiché une « publicité sociale » du gouvernement exhortant les citoyens à rejoindre les forces armées russes, apparemment pour combattre sur le front ukrainien, plus de deux milliards de fois au cours des deux dernières années. L’entreprise Yandex affirme qu’elle interdit strictement la publicité politique.
En parallèle, les autorités russes font de plus en plus pression sur les entreprises de technologie étrangères dont les services sont populaires auprès des internautes russes, comme Apple, Google et Mozilla, afin qu’elles suppriment les VPN et autres contenus que le gouvernement juge subversifs, en les menaçant d’amendes et de blocage. Les autorités font pression sur les fournisseurs d’hébergement et les services de réseau de diffusion de contenu étrangers, tels que Cloudflare, l’un des réseaux de diffusion de contenu populaires en Russie, pour qu’ils se conforment à la législation en vigueur sous peine d’être confrontés à des ralentissements et à des blocages. En mai 2025, l’entreprise Cloudflare a indiqué à Human Rights Watch qu’elle n’est généralement pas en mesure d’identifier ou de confirmer des blocages ordonnés par le gouvernement, et qu’elle n’a jamais bloqué de sites web à la demande du gouvernement.
En décembre 2024, Apple, Amazon Web Services (AWS) et Mozilla ont répondu à des questions posées par Human Rights Watch. Apple a déclaré à Human Rights Watch que le respect des « ordres légaux » de la Russie était nécessaire « pour continuer à fournir des services de communication à la population russe ». AWS a répondu que l’entreprise « se conforme aux lois sur les sanctions applicables dans les territoires où elle exerce ses activités et qu’elle dispose de politiques et de procédures pour garantir la conformité ». La société a également confirmé qu’elle n’avait pas de bureaux ou d’infrastructures en Russie et que, depuis mars 2022, elle n’autorisait plus de nouveaux abonnements à ses services pour les personnes basées en Russie et en Biélorussie. Mozilla a souligné son engagement à soutenir les internautes en Russie et dans le monde, en plaidant pour un Internet ouvert et accessible à tous.
Le 8 juillet, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt concluant que la Russie avait violé la liberté d’expression et le droit à un procès équitable en infligeant des amendes et d’autres sanctions à Google entre 2021 et 2023, au motif que la société avait refusé de retirer des vidéos à caractère politique et d’autres contenus de YouTube à la demande des autorités russes.
La censure croissante en ligne est menée à l’aide d’un type de dispositifs appelés « moyens technologiques pour contrer les menaces » (ТСПУ ou TSPU). Ces dispositifs sont installés sur pratiquement tous les réseaux des fournisseurs d’accès Internet (FAI) du pays conformément aux exigences énoncées dans la loi dite sur « l’Internet souverain » et ses règlements, qui visent à créer un segment russe de l’Internet totalement isolé.
Les TSPU permettent également au gouvernement de procéder à des exercices d’« isolement d’Internet » et à des coupures régionales au motif de protéger la sécurité publique. Les autorités affirment que ces tests n’ont aucun impact pour les internautes moyens ; cependant, des utilisateurs ont signalé des perturbations d’Internet au cours de ces « exercices », telles que des échecs de transactions bancaires en ligne ou un accès perturbé aux sites web de l’État et aux applications de taxi.
Les autorités ont également exercé une plus grande mainmise sur Internet en Russie en prenant le contrôle de son architecture. Elles ont regroupé plus de la moitié des adresses IP russes pour en confier la gestion à sept fournisseurs d’accès Internet liés à l’État et ont diminué le nombre total de FAI. Le gouvernement a également créé un système national de noms de domaine, qui fonctionne comme un registre des adresses Internet, et des certificats de sécurité de la couche transport gouvernementaux, qui vérifient que le site web appartient à une entité de confiance et que le service est crypté.
Les zones de l’Ukraine occupées par la Russie avant et après l’invasion à grande échelle en février 2022 sont soumises à une censure en ligne et à des perturbations d’Internet similaires.
La Russie devrait mettre fin à toute censure de la liberté d’expression sur Internet protégée au niveau international et veiller à ce que toute restriction en ligne soit légale, nécessaire et proportionnée, ce qui exige qu’elle soit limitée dans sa portée et transparente. Les autorités devraient stopper leurs efforts pour regrouper et contrôler l’architecture d’Internet, qui entravent le droit de rechercher et de communiquer des informations et portent atteinte à la vie privée. Elles devraient mettre un terme aux coupures d’Internet et garantir la transparence concernant les ingérences du gouvernement dans l’Internet. Elles devraient également cesser de faire pression sur les entreprises de technologie étrangères et russes pour qu’elles divulguent les données de leurs utilisateurs et censurent les contenus de manière non conforme aux normes internationales.
Les entreprises de technologie étrangères et russes devraient résister à la pression de l’État concernant la censure des contenus et la divulgation des données de leurs utilisateurs en violation du droit international en employant tous les moyens légaux et les solutions technologiques disponibles. Elles devraient également veiller à ne pas se livrer à la censure.
Les gouvernements occidentaux ainsi que les organisations internationales et intergouvernementales devraient soutenir les efforts de la société civile pour créer des outils permettant de contourner la censure étatique afin de promouvoir l’accès à des sources d’information indépendantes et garantir la vie privée des utilisateurs en ligne.
« Les autorités russes ont mis en place un arsenal exhaustif constitué de politiques et de moyens technologiques visant à étendre leur censure et contrôle d’Internet, et qui ne sont généralement pas visibles par un internaute ordinaire », a conclu Anastasiia Kruope. « Ces mesures apparemment invisibles ont des conséquences dévastatrices pour l’accès à l’information, la vie privée et la liberté d’expression de chaque internaute en Russie. »
………..
Articles, TV
RFI La Croix Euronews
France24 (vidéo) Sur X
30.07.2025 à 05:00
(Nairobi) – La décision prise par le Conseil électoral camerounais d'exclure Maurice Kamto, leader clé de l'opposition politique et adversaire de l’actuel président, Paul Biya, de l’élection présidentielle à venir soulève des inquiétudes quant à la crédibilité du processus électoral, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch.
Le 26 juillet, le Conseil électoral du Cameroun (Elections Cameroon, ELECAM) a approuvé 13 des 83 candidats potentiels, dont Paul Biya, âgé de 92 ans et à la tête du pays depuis 1982. L’élection est prévue pour le 12 octobre. Les candidats exclus disposaient de 72 heures pour faire appel de cette décision auprès du Conseil constitutionnel.
« Le Conseil électoral du Cameroun a semé le doute sur l'élection avant même que les votants n'aient exprimé leur choix », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior au sein de la division Afrique à Human Rights Watch. « Exclure l'opposant le plus populaire du processus électoral jettera une ombre sur les résultats qui seront finalement annoncés. »
La décision d'exclure Maurice Kamto de la course à la présidence reflète l'intolérance de longue date du gouvernement à l'égard de toute opposition et de la dissidence, et intervient dans un contexte de répression accrue des opposants, des activistes et des avocats depuis le milieu de l'année 2024, alors que l’élection prévue plus tard cette année approche.
Le Conseil électoral a justifié sa décision d'exclure Maurice Kamto en expliquant que son parti, le Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (MANIDEM), soutenait également un autre candidat, Dieudonné Yebga.
Cependant, les avocats de Maurice Kamto et d'Anicet Ekane, le président du MANIDEM, ont déclaré que ce parti ne soutenait pas Dieudonné Yebga, et que la décision du Conseil était arbitraire et motivée par des considérations politiques. Le parti a tenté d'organiser une conférence de presse à son siège à Douala, la plus grande ville du Cameroun, mais les forces de sécurité l’en ont empêché.
Maurice Kamto, qui était auparavant le chef du parti d'opposition Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) et qui avait concouru contre Paul Biya lors des élections de 2018, a cherché à se présenter comme candidat du MANIDEM à l’élection prévue cette année, car le code électoral camerounais interdit aux partis sans représentants élus de présenter un candidat.
Les avocats de Maurice Kamto ont fait appel de la décision du Conseil électoral et ont déposé un recours auprès du Conseil constitutionnel le 28 juillet. Dieudonné Yebga a également annoncé qu'il ferait appel auprès du Conseil constitutionnel.
« La décision d’ELECAM n'a aucune base juridique et vise seulement à éliminer un candidat clé de l’élection, soutenant la stratégie de confiscation du pouvoir par le parti majoritaire », a déclaré Menkem Sother, l’un des avocats de Maurice Kamto, à Human Rights Watch.
Paul Biya en est à son septième mandat. Il a été réélu pour la dernière fois en 2018, après quoi Maurice Kamto a contesté les résultats officiels et s'est déclaré vainqueur de l'élection.
L'élection de Paul Biya en 2018 a déclenché une vague de répression politique. Après le scrutin, des manifestations menées par l'opposition ont éclaté dans tout le pays, et le gouvernement a réagi par une répression sévère, déployant la police, l'armée et les gendarmes qui ont fait un usage excessif de la force contre les manifestants. En janvier 2019, Maurice Kamto et plus de 200 de ses partisans ont été arrêtés et placés en détention. Maurice Kamto a été accusé d'insurrection, d'hostilité envers la patrie et d'association de malfaiteurs, entre autres chefs d'accusation. Il a été libéré le 5 octobre 2019 et les charges ont été abandonnées, mais la répression contre l'opposition s'est poursuivie.
Début septembre 2020, les autorités ont interdit les manifestations dans tout le Cameroun après que le MRC dirigé par Maurice Kamto a encouragé la population à protester contre la décision du gouvernement d'organiser des élections régionales en décembre de cette année. Les partis d'opposition avaient exprimé leurs inquiétudes quant au fait que les élections ne pourraient pas se dérouler librement et équitablement sans une réforme préalable du code électoral et sans avoir remédié à l’insécurité dans les régions anglophones minoritaires du pays, où des groupes séparatistes et les forces de sécurité se sont affrontés à plusieurs reprises.
Le 22 septembre 2020, les forces de sécurité camerounaises ont utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau et ont arrêté plus de 550 personnes, principalement des membres et des sympathisants du MRC, pour disperser des manifestations pacifiques à travers le pays. Bon nombre des personnes arrêtées ont été passées à tabac et maltraitées. Si la plupart d'entre elles ont finalement été libérées, d'autres, dont Olivier Bibou Nissack et Alain Fogue Tedom, deux dirigeants du MRC, sont toujours derrière les barreaux après avoir été condamnés à sept ans de prison.
En décembre 2023, Maurice Kamto a annoncé la création de l'Alliance politique pour le changement (APC), une coalition d'opposition dirigée par Jean-Michel Nintcheu, membre du Parlement camerounais. En mars 2024, le ministre de l'Administration territoriale a toutefois interdit la coalition, la qualifiant d'« illégale » et de « clandestine ».
Le Cameroun est un État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et, à ce titre, est tenu de veiller à ce que chaque citoyen, sans discrimination fondée sur ses opinions politiques, ait la possibilité de participer et de voter lors d'élections véritablement libres. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a estimé que « le droit à la liberté d'expression, de réunion et d'association est une condition essentielle à l'exercice effectif du droit de vote et doit être pleinement protégé ».
« La décision d'ELECAM réduit de facto le prochain scrutin à une simple formalité, enterre ce qui reste de la démocratie au Cameroun et fait craindre une recrudescence de la violence », a conclu Ilaria Allegrozzi. « Le Conseil électoral devrait revenir sur sa décision, et permettre aux Camerounais de décider eux-mêmes de leur avenir. »
29.07.2025 à 01:00
(Bangkok, 29 juillet 2025) – L'Armée d'Arakan, un groupe armé ethnique opérant dans l'État de Rakhine, dans l'ouest du Myanmar, a imposé de sévères restrictions à la population rohingya et commis de graves exactions, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.
Les gains territoriaux de l'Armée d'Arakan dans cet État s'accompagnent de restrictions de mouvement, de pillages, de détentions arbitraires, de mauvais traitements, de travail forcé et de recrutement illégal, entre autres exactions contre les Rohingyas. En outre, l'armée du Myanmar soumet depuis longtemps les Rohingyas à des atrocités criminelles, notamment le crime contre l'humanité d'apartheid.
« L'Armée d'Arakan mène contre les Rohingyas une politique d'oppression similaire à celle imposée depuis longtemps par l'armée du Myanmar dans l'État de Rakhine », a déclaré Elaine Pearson, directrice de la division Asie à Human Rights Watch. « L'Armée d'Arakan devrait mettre fin à ses pratiques abusives et discriminatoires, et respecter le droit international. »
L'Armée d'Arakan s'était engagée à instaurer une gouvernance inclusive et équitable dans les zones reprises à la junte militaire birmane, après la reprise des combats en novembre 2023. Cependant, les Rohingyas décrivent la vie sous l'Armée d'Arakan et son aile politique, la Ligue unie d'Arakan, comme dure et restrictive, avec des réglementations et des pratiques discriminatoires.
Entre avril et juillet 2025, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 12 réfugiés rohingyas qui avaient fui le canton de Buthidaung, dans le nord de l'État de Rakhine, et cherché refuge au Bangladesh.
« La vie sous le contrôle de l'Armée d'Arakan était incroyablement restrictive », a déclaré un réfugié rohingya de 62 ans arrivé au Bangladesh en juin. « Nous n'avions pas le droit de travailler, de pêcher, de cultiver la terre, ni même de nous déplacer sans autorisation. Nous étions confrontés à d'extrêmes pénuries alimentaires, la plupart des gens mendiant les uns auprès des autres. »
Les Rohingyas de l'État de Rakhine sont pris en étau entre les forces armées du Myanmar et l'Armée d'Arakan. Ces deux forces commettent de graves exactions, notamment des exécutions extrajudiciaires, des incendies criminels généralisés et des enrôlements illégaux de combattants. Depuis fin 2023, plus de 400 000 personnes ont été déplacées à l'intérieur des États de Rakhine et de Chin, et près de 200 000 personnes ont fui vers le Bangladesh.
Un autre Rohingya, également âgé de 62 ans, a déclaré avoir été déplacé avec sa femme et ses deux enfants à cinq reprises au cours de l'année écoulée. « La vie pendant cette période a été incroyablement difficile », a-t-il déclaré. « Les déplacements entre les villages étaient restreints, et nécessitaient des permis rarement accordés. »
Les villageois rohinygas ont indiqué que les permis pour se déplacer entre les villages de Buthidaung, valables une journée seulement, coûtaient entre 3 000 et 5 000 kyats (1,40 à 2,40 dollars US) et nécessitaient les signatures d’un administrateur musulman local, ainsi que de l'Armée d'Arakan ou de son aile politique. Ils ont ajouté que l'Armée d'Arakan avait instauré un couvre-feu dans la région. « S'ils trouvaient quelqu'un devant sa maison [après l’heure du couvre-feu], ils l'arrêtaient », a déclaré un homme. « Et après, on ignorait où il se trouvait. »
Les restrictions imposées par l'Armée d'Arakan aux moyens de subsistance et à l'agriculture, aggravées par l'extorsion et les prix exorbitants, ont aggravé les graves pénuries alimentaires et le blocus de l'aide humanitaire imposé par la junte, en vigueur depuis fin 2023. Certains Rohingyas ont déclaré survivre en mendiant auprès de familles recevant de l'argent de proches à l'étranger. D'autres travaillaient comme journaliers pour un salaire dérisoire, qui parfois n’était même pas payé.
« Nous avons dû lutter pour survivre », a déclaré un autre Rohingya âgé d'une soixantaine d'années, arrivé au Bangladesh en mai dernier. « Je travaillais comme ouvrier, acceptant n'importe quel travail proposé par l'Armée d'Arakan... Au début, ils nous payaient la moitié [du salaire journalier précédent], mais plus tard, ils ont complètement cessé de nous payer. »
Des villageois rohingyas ont déclaré que l'Armée d'Arakan avait confisqué des terres agricoles, des maisons, du bétail, des prises de pêche, du bois de chauffage et même des terrains de cimetières. Deux hommes originaires de Kin Taung, dans le canton de Buthidaung, ont déclaré que l'Armée d'Arakan avait démoli leur cimetière en mai, leur ordonnant d'utiliser les rizières pour des enterrements.
L'Armée du Salut des Rohingyas d'Arakan (Arakan Rohingya Salvation Army, ARSA) et d'autres groupes armés rohingyas, après avoir combattu aux côtés de l'armée du Myanmar en 2024, déploient à nouveau des combattants dans des affrontements contre l'Armée d'Arakan dans le nord de l'État de Rakhine. Les combats, ainsi que le recrutement forcé de villageois rohingyas par l'Armée d'Arakan, ont exacerbé les tensions communautaires entre les Rohingyas, majoritairement musulmans, et les Rakhines bouddhistes.
Trois Rohingyas ont déclaré avoir fui pour protéger leurs fils, dont des adolescents, contre le risque de recrutement forcé par l'Armée d'Arakan. Un réfugié rohingya de 57 ans est arrivé au Bangladesh avec sa famille en juin, après que l'Armée d'Arakan a commencé à rechercher son fils âgé de 17 ans. « J'ai dû le cacher dans différents villages pendant deux mois », a-t-il déclaré.
L'un des hommes âgés de 62 ans a déclaré que son fils avait été sélectionné pour être recruté par l'administrateur du village de Kin Taung en avril. « Je vivais dans la peur constante alors qu'ils essayaient de le forcer à s'engager », a-t-il déclaré. « Ils ciblent les enfants issus de familles pauvres. Mon fils était terrifié à l'idée d'être recruté et a fui le village il y a 45 jours. Il est porté disparu depuis. »
L'Armée d'Arakan a arrêté cet homme lorsqu’ils n’ont pas pu retrouver son fils, et l'a détenu pendant 35 jours, avec deux autres personnes. « Ils me battaient constamment », a-t-il déclaré. « Je n'ai été libéré qu'après avoir promis de leur amener mon fils. » Lorsqu'il a préféré se cacher par la suite, l'Armée d'Arakan a incendié sa maison familiale. Il a déclaré n'avoir eu d'autre choix que de fuir vers le Bangladesh.
L'Armée d'Arakan a gravement maltraité les Rohingyas qu'elle soupçonne de collaborer avec l'ARSA ou avec l'armée birmane. En décembre 2024, elle a arrêté un Rohingya âgé de 35 ans dans le village de Keya Zinga Para. « Ils m'ont accusé de travailler pour l'armée [du Myanmar] et de recevoir une formation militaire, ce qui n'était pas le cas », a-t-il déclaré. « J'ai été emmené à Buthidaung, au poste de police du quartier 3. Ils me battaient souvent et violemment, avec des bâtons de bambou. J'ai encore du mal à marcher. »
Un Rohingya de 19 ans a passé cinq mois dans l'Armée d'Arakan après avoir été enlevé du village de Nga Yat Chaung en mai 2024 pour y être soumis à du travail forcé illégal. Il a expliqué que les Rohingyas étaient souvent envoyés au front comme « boucliers humains ». « Si quelqu'un résistait, les [combattants de l’Armée d’Arakan] le frappaient, et se moquaient de lui », a-t-il déclaré. « Nous avons demandé à être traités sur un pied d'égalité. Ils ont dit qu'ils nous traiteraient comme le faisaient les Birmans [majorité ethnique], nous traitant de “kalars” [terme insultant envers les musulmans] bengalis. »
Le droit international humanitaire applicable, notamment l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 et le droit international coutumier, interdisent la torture et autres mauvais traitements infligés aux détenus, le pillage, le recrutement d'enfants (personnes âgées de moins de 18 ans) et le travail forcé dangereux, entre autres abus.
L'Armée d'Arakan ainsi que les groupes armés rohingyas collaborent avec des réseaux de passeurs, profitant de l'exode vers le Bangladesh. Les Rohingyas ont déclaré avoir payé entre 800 000 et 1,25 million de kyats (380 à 595 dollars US) par personne pour le voyage.
Le Bangladesh a enregistré 120 000 nouveaux arrivants dans les camps depuis mai 2024 ; des dizaines de milliers d'autres personnes ne sont toujours pas enregistrées. Les nouveaux arrivants ont déclaré ne bénéficier d'aucune aide ni d'aucun soutien officiels. Les autorités bangladaises affirment que le rapatriement des Rohingyas vers le Myanmar est la seule solution à cette crise. Les Nations Unies et les gouvernements concernés devraient toutefois souligner que les conditions d'un retour sûr, durable et digne vers le Myanmar ne sont pas actuellement réunies.
« Les donateurs et les gouvernements influents devraient redoubler d'efforts pour protéger le peuple rohingya, notamment son droit à la sécurité et à la liberté, que ce soit au Myanmar ou au Bangladesh », a affirmé Elaine Pearson. « Ils devraient aussi faire pression sur l'Armée d'Arakan pour qu'elle respecte les droits de toutes les communautés dans l'État de Rakhine. »
…………….