flux Ecologie

la Maison commune de la décroissance

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17.03.2025 à 22:26
Rédaction
Texte intégral (2777 mots)

C’était il y a 5 ans, nous avions proposé cette tribune qui avait ensuite été largement enrichie par les un.e.s et les autr.e.s. Cinq années plus tard, nous acceptons de passer l’épreuve de la relecture. Et bien, pas sûr que nous devions changer grand chose. Un vrai pincement : que 5 ans après, certain.e.s de nos ami.e.s décroissant.e.s n’aient pas réussi à rester sur la crête ; et dans ce cas, ils dégringolent.

Tribune publiée dans Libération le 28 avril 2020. Dans ce journal elle peut être mise en perspective entre une tribune provocatrice de Laurent Joffrin, « Joies de la décroissance », et la tribune de Paul Ariès, « La décroissance n’est pas le confinement ». Pour l’un comme pour l’autre, être ou ne pas être le confinement, serait la question pour la décroissance. Les signataires de cette tribune pensent que la réalité politique de la décroissance est plus « sur la crête » que cela, entre des vécus très différents et des idéaux comportant des nuances.

C’était un mardi, à midi, et nul ne l’avait prédit. Sans guère de résistance, nous avons accepté le bouleversement. Une autolimitation collective puis individuelle, ou l’inverse. Ce n’est pas « le pas de côté » que nous autres décroissants espérions. N’est-il pas évident que les mesures du confinement telles que nous les subissons révèlent en amont de la pandémie la faillite des politiques publiques qui en aval se traduit par une gestion autoritaire et techno-scientiste. Ce sont-là les deux faces d’une même biopolitique de croissance, gestionnaire, élitaire, indécente et insensible. Néanmoins, il y a dans le confinement comme un pas suspendu de la cigogne. Et ce n’est pas à dédaigner ! Après le confinement, il y aura encore la récession, des rebonds et des répliques ; mais pendant la période du confinement, conjoncturellement, il y a une espèce de décroissance ; oui, mais alors laquelle ?

Il s’agit d’un moment historique, parce que subitement c’est l’impératif économique de l’accélération et de la démesure qui est suspendu, mis entre parenthèses. Une parenthèse ouverte le 17 mars 2020 en France. Parenthèse qui se refermera peut-être en mai, ou juin, mais ouverte, maintenant, en plein cœur de la mondialisation et dans le monde entier. Plus de la moitié de la population mondiale est confinée ! Parenthèse partout ouverte sur moins de production, moins de consommation, et par conséquent moins d’extraction, moins de déchets, moins de pollutions, moins de  déplacements, moins de bruit, moins de travail et donc moins de revenus, mais aussi plus du tout de vacances, plus du tout de musée ou de concert, plus du tout de rencontres sportives ni de « matchs » : plus rien qu’un « essentiel » qui reste à redéfinir…

© Philippe Verspeek. A moitié vide, à moitié plein, le temps qui passe

Que nous vivions à la campagne ou en ville, une qualité de vie est maintenue, avec des degrés très inégaux de « résilience » (jardin ou balcon ou fenêtre ?) et de souffrance qu’il ne faut pas écarter : décroissance à demi-subie, décroissance à demi-choisie. Dans des conditions encore plus difficiles de vie pour les plus vulnérabl-e-s – en particulier dans le cas des violences familiales –, la sobriété se fait néanmoins plus présente, nos relations sociales, familiales, amicales sont nos précieux remèdes. Nous entendons parler relocalisation, circuits-courts, ralentissement, renoncement. Nous participons ou assistons à des manifestations de solidarité, de créativité, nous contemplons l’éveil du printemps. Bref une joie simple d’exister se manifeste, et cela grâce à… notre organisation sociale commune, fruit d’un minimum de vie démocratique depuis 1945, qui garantit encore l’essentiel : une certaine paix sociale. Certes le Président Macron a déclaré « Nous sommes en guerre. ». Mais ce n’est pas une guerre parce qu’il n’y a aucun ennemi à vaincre ni aucun humain à tuer, à moins de tordre le sens des mots, à des fins biopolitiques. Certes il y a des morts : c’est donc peut-être une demi-guerre, mais nul ennemi à l’horizon. demi-guerre, et donc demi-paix très largement assurée par les personnels des services publics et du soin à la personne qui limitent la pandémie en permettant l’accès des malades aux soins. Services publics mais aussi tous ces emplois – cette « France d’en bas » dont beaucoup hier étaient sur les ronds-points – qui sont aujourd’hui mis « en première ligne de corvée » : sans effondrement général. Même pas un effondrement de l’État, pourtant comme abasourdi par son audace d’avoir pris la décision politique d’un coup de frein économique ; malheureusement il se rassure en poussant le plus qu’il peut son autorité policière et ses expérimentations juridiques d’exception.

Demi-guerre avec la mort qui rôde, demi-paix parce qu’il est devenu interdit de rôder. La mort – qui est la limite de toute vie – fait peur. Surtout en régime politique de croissance prétendument infinie, croissance qui peut être interprétée comme l’organisation sociale du déni de la mort. La mort peut faire peur, et une mauvaise peur est toujours bonne à prendre pour tout pouvoir qui veut se conserver : d’où la demi-guerre.

Leçon pour la décroissance : si elle touche en quoi que ce soit avec une mauvaise peur, alors elle s’effondre. La décroissance, c’est une parenthèse mais dans la paix.

Confinés, accordons-nous quand même un temps de réflexion sur ce constat : « l’imprévisible est advenu ». Prenons-en pleine conscience : par le confinement, les gouvernants ont choisi d’épargner des vies plutôt que l’économie. Le pas suspendu de la vergogne ? Quelle que soit la diversité de nos conditions sociales de vie, et elles sont évidemment loin d’être aussi faciles pour tou-te-s, osons goûter finement ces moments : l’allègement de l’empreinte écologique, la texture des liens qui nous unissent, l’épaisseur des silences, l’air qui s’allège, la couleur de nos vies, le bruissement du vivant. Carpe diem ! Gardons cette saveur en mémoire, celle du sel, du sens à notre vie commune. Carpe dies relegationis !

Bref, ce confinement est une demi-décroissance : osons affirmer que rien n’a jamais ressemblé plus à la décroissance que ce moment consenti de confinement ; d’autant qu’il y a aussi une part de rationnement pour (presque) tous.

Trajet d’une société honnie à une société désirable

Notre empreinte écologique décroit globalement et pacifiquement pour le moment. « Par le fait », ce moment est écologiquement un peu plus soutenable par l’humanité. Le bilan écologique de cette parenthèse décroissante sera irréfutable : « c’était un temps de répit, un temps de repos. » Mais après le confinement, à quoi s’attendre ?

Économiquement, il est évident que ce sera une autre histoire. Pire, socialement, notre attention à l’autre et notre souci de l’autre nous obligent à dénoncer sans concession le côté obscur de ce confinement. Force est de constater que la pandémie va surtout atteindre les démunis, les appauvris par le système économique. Et surtout l’indécence des ultra-riches, certes confinée, n’a pas disparu. Aucun miracle de la part des gouvernements. Pas (encore ?) question de siphonner les richesses des enrichis (par des prélèvements exceptionnels sur les patrimoines et les revenus comme en temps d’après-guerre) pour assurer le partage et le bien-vivre de toutes et tous dans une société socialement décente. La décroissance des inégalités ce n’est pas encore maintenant.

Pour le moment, c’est plutôt changement d’heure… et d’année au programme : 1984 te voilà ! Big Brother est vraiment là, il nous regarde, nous envoie des SMS, nous surveille, nous enregistre, nous parle du haut de son drone, nous traque via notre ordiphone, nous dissocie, nous individualise. Le sens de la technique est bien politique… Télétravail, télémédecine, télé-enseignement, skype-apéro, etc. Les écrans étriquent nos mondes sensibles. Accélération des réseaux sociaux qui ne peuvent relier que celles et ceux qui sont préalablement séparé-e-s. Là non plus, petit détail politique, nul miracle en ce qui concerne le partage des pouvoirs : les gouvernements continuent de décider seuls, sans nous, donc contre nous. Partout la démocratie est placée en quarantaine. La potion de cheval est là : ordonnances à tout va ! Ce n’est pas la joie démocratiquement parlant. Surtout quand nous nous rappelons qu’on nous a déjà fait le coup de l’état d’urgence qui s’infiltre dans la loi ordinaire.

Ce sont, là, pour le moment, des leçons du confinement. a/ Ce confinement a ouvert une parenthèse. Chères décroissantes, chers décroissants, ayons-le bien présent à l’esprit. Nous ne sommes pas en train de rêver : notre rêve de décroissance est donc possible. En ce sens, la décroissance serait une période particulière entre parenthèses, un trajet auto-organisé vers des sociétés écologiquement soutenables, socialement décentes et démocratiquement organisées, passant par les baisses de l’extraction, de la production, de la consommation, de la circulation et des déchets. b/ Quand la parenthèse du confinement va officiellement se refermer, nous savons bien que nous n’arriverons pas miraculeusement dans un monde décolonisé par l’imaginaire de la croissance, que l’économie aura beau jeu de réimposer ses narratifs, ses dettes, ses réajustements, qu’elle instrumentalisera une relocalisation cosmétique au service d’une souveraineté biaisée… Mais même à l’heure de leur revanche, nous disposerons d’un nouvel argument : oui, le politique peut prendre la décision de donner un coup de frein à l’économie. Nous en aurons vécu l’expérience dans notre chair.

La décroissance, c’est le bon sens pour (re)pauser le monde à l’endroit.

 

Olivier Zimmermann (Suisse), Élodie Vieille-Blanchard, Jacques Testart, Mathilde  Szuba, Christian Sunt, Agnès Sinaï, Michel Simonin, Luc Semal, Onofrio Romano (Italie), Olivier Rey, Christine Poilly, Irène Pereira, Jean-Luc Pasquinet, Baptiste Mylondo, Karine Mauvilly, Vincent Liegey, Michel Lepesant, Bernard Legros (Belgique), Francis Leboutte (Belgique), Stéphane Lavignotte, Antony Laurent, François Jarrige, Mathilde  Girault, Maële Giard, Loriane Ferreira, Guillaume Faburel, Robin Delobel (Belgique), Alice Canabate, Thierry Brulavoine, Thierry Brugvin, Geneviève Azam, Alain Adriaens (Belgique).

→ Contact média : demi-resonance@ouvaton.org, 06 77 89 09 35

Crédit photo. Avec l’aimable autorisation de Philippe Verspeek : Dans le cadre du Collectif Cov’Art initié par http://cn2r.fr/covart/

04.03.2025 à 12:25
Michel Lepesant
Texte intégral (2283 mots)

L’argument principal s’appuie sur l’hypothèse que tout logiciel impérialiste repose sur la conception d’un humain tronqué, parce que dépourvu de rationalité morale, celle qui exige de respecter les accords conclus, le droit international, celle qui se fonde sur le partage d’un certain nombre de valeurs. Mais attention, je ne prétends pas pour autant qu’il suffirait d’imposer nos valeurs pour que la paix revienne ; pourquoi ? Parce que le conflit géopolitique que nous subissons aujourd’hui est beaucoup plus profond qu’un conflit des valeurs. Parce qu’aujourd’hui, il serait même plus réaliste d’affirmer qu’il n’y a pas de conflit des valeurs ; pourquoi ? Parce que le régime politique sur lequel s’appuie la croissance économique repose sur un « régime de croissance » dont l’objectif et l’effet premier sont la neutralisation de tout conflit des valeurs.

Pourquoi est-il plus facile pour la Russie de Poutine de coloniser le narratif de Trump que de réussir sa guerre d’agression contre l’Ukraine ? Et inversement : en quoi la reprise par Trump et son administration du narratif russe n’est-elle qu’un nouvel épisode d’une économisation du monde qui accompagne depuis quelques siècles l’emprise que la croissance exerce sur nos vies ?

Commençons par reconnaître que même le comportement le plus irrationnel peut toujours être interprété a posteriori comme une logique ; car interpréter n’est ni prédire ni expliquer. C’est pourquoi une interprétation repose très souvent sur une analogie.

Reconnaissons aussi que si nous cherchons une analogie pour interpréter le comportement de « Trump et son monde », alors il y a pléthore :

  • C’est le plus costaud dans la cour de récréation qui prend plaisir à martyriser le plus faible, à se satisfaire d’exercer son insuffisance morale sur un souffre-douleur. Dans un grand nombre de westerns ou de séries américaines, c’est souvent le fils méprisé d’un père aussi gros con que le sera son fils. Dans les années 50, ce fils finissait mal la plupart du temps ; mais on n’est plus au millénaire précédent.
  • C’est l’enfant qui n’a de plaisir qu’à casser ses jouets, parce qu’il veut être le centre de l’attention. On peut ainsi imaginer la jouissance que le 47ème président des USA doit ressentir quand on survole la liste des dégâts qu’il ne cesse, depuis son intronisation, de commettre dans l’administration américaine :
    • Contre le National Endowment for Democracy (NED, la « Fondation nationale pour la démocratie »).
    • Mise sur pause de tous les travaux de la Cybersecurity and Infrastructure Security Agency (CISA), l’administration fédérale américaine chargée de la protection informatique des États-Unis, en particulier la sécurisation des élections.
    • Réduction des effectifs et du budget (de 65%) de l’Agence de protection de l’environnement (EPA).
    • Suppression de 92% des financements de programmes à l’étranger par l’Agence des Etats-Unis pour le développement international (Usaid).
    • Retrait de l’OMS, refus de participer à la dernière réunion des experts du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), licenciement de près de 1000 rangers des parcs nationaux, de 10 % des effectifs des instituts nationaux de la santé et de l’Agence météorologique et océanographique (NOAA)…
    • Gel de toutes les activités du Consumer Financial Protection Bureau (CFPB). Fondée après la grande crise financière de 2008, l’agence est chargée de lutter contre la fraude financière. Arnaques en ligne, dettes médicales abusives, agences de recouvrement de créances qui recourent à l’intimidation… Le CFPB s’occupe aussi bien des petits remboursements de consommateurs floués que de fraude à grande échelle. Mais le 8 février son nouveau directeur envoyait un courriel à ses 1 700 salariés : « Merci de ne plus accomplir aucun travail. »
    • Nomination à la tête du FBI d’un soutien des émeutiers du Capitole et partisan déclaré de QAnon, Kash Patel.
    • Licenciement de 800 employés de l’Agence nationale d’observation océanique et atmosphérique (NOAA).
    • La National Science Foundation (NSF), principal bailleur de fonds de la recherche fondamentale, subit aussi une large vague de révision de ses programmes. Des employés de la NSF ont fait fuiter les critères qui seraient appliqués, comme la présence, dans la description d’un projet, d’une liste de termes éliminatoires qui ratisse très large : « handicap », « activisme », « diversité », « équité », « ethnicité », « femme », « minorité », « socio-économique »
    • Dès le premier jour de son mandat, Donald Trump avait signé 46 directives sur l’immigration, la justice ou le climat…
  • Les téléfilms américains regorgent de ces scénarios dans lesquels un groupe d’adolescent.e.s biberonné.e.s au MacDo et au Coca persécutent le dernier arrivé dans le collège ou dans l’université : confréries, fraternités, clubs de pom-pom girls, concours du bureau des élèves, autant de milieux toxiques dans lesquels le bizutage est permanent…

Mais il ne faudrait surtout pas croire que l’ami Donald n’est qu’un enfant gâté au milieu d’un monde d’adultes, qui ne tarderont pas à lui rappeler quelques principes de bonne civilité.

Parce qu’aujourd’hui, et plus exactement depuis près de 4 siècles, le monde des adultes a glissé lentement mais sûrement au bas de la pente de l’économisation généralisée de toute vie humaine : et si le logiciel trumpiste est aujourd’hui si facilement colonisé par le logiciel poutiniste, c’est d’abord parce que tous ces logiciels partagent une même vision tronquée de ce qu’est un être humain.

Cette vision tronquée est partagée aussi bien par les régimes totalitaires que par l’économie libérale de marché. Cela peut sembler une incongruité, sinon une absurdité, mais pourtant c’était déjà la thèse soutenue par Karl Polanyi dans La Grande Transformation (1944) quand il cherchait à expliquer comment l’échec du marché autorégulateur (qui reposait sur des fictions, celles qui marchandisaient le travail, la nature et la monnaie) avait abouti à la montée des fascismes tant en Italie qu’en Allemagne.

« C’est la réalité d’une société de marché que l’on perçoit dans le totalitarisme. »

Karl Polanyi, Écrits, p.386

Pas de société encastrée dans l’économie sans la fiction d’un individu réduit à ne plus agir qu’en vue du « gain », que pour son intérêt personnel. A partir d’une telle fiction anthropologique, qui est celle de l’homo œconomicus, il faut remarquer que la priorité accordée à la rationalité utilitaire, technique, permet d’envisager le marché comme ce dispositif économique où toutes les actions humaines peuvent être rendues équivalentes et ramenées à un calcul. Du coup, l’emprise de l’économie devient une emprise politique.

C’est ainsi que Karl Polanyi faisait le lien entre la victoire des fascismes dans l’entre-deux guerres et l’effondrement de l’économie de marché : en quelque sorte, le fascisme est toujours une tentative de réponse politique à la désocialisation générale provoquée par le marché autorégulateur mais cette réponse n’est envisageable que parce que le marché et le fascisme reposent sur un même réductionnisme anthropologique, celui qui ne voit dans l’humain qu’un automate insensible et calculateur dont les actions sont seulement déterminées par l’appât du gain, sans plus guère d’usage de la rationalité dans sa dimension morale c’est-à-dire raisonnable au sens premier de capable d’être raisonné par des arguments raisonnables.

C’est le constat de cette incapacité à être raisonné par le raisonnable – dans le spectacle délirant d’une inversion et du rapport au réel et du rapport au droit international – qui nous saisit quand nous ne pouvons que juger que les narratifs trumpistes et poutiniens se rejoignent, dans une négation commune et affichée de ce que peut vraiment dire la « paix ».

Du coup, il n’y a plus de raison de s’étonner de ne pas réussir à faire beaucoup de différences entre :

  • le roi autoproclamé du deal et de l’approche transactionnelle, autrement dit du rapport de force imposé sous le masque hypocrite du contrat négocié,
  • le dealer en train de prendre le monopole local de son commerce de drogues en s’imposant par la violence pour conquérir des « points de deal »,
  • le chef d’entreprise adepte du lean management et de la gestion des « RH » par la brutalisation et le harcèlement,
  • le chef d’État qui se croit investi d’une mission quasi divine pour accroître la puissance de son pays,
  • le Léviathan décrit par Thomas Hobbes (1751) pour expliquer comment le sacrifice de la liberté était le prix à payer pour garantir la sécurité d’être humains tronqués et dont toute la psychologie se réduisait au désir de désirer sans cesse, à la peur de n’en avoir jamais assez, à une raison réduite au calcul de l’intérêt et de l’utilité. Dans ces 3 traits psychologiques, chacun aura pu remarquer qu’ils suffisent pour décrire l’individu de la société de consommation (drogué à la quête incessante du nouveau, frustré de n’en avoir jamais assez, n’ayant que l’intérêt égoïste comme mobile de ses actes).

Car ce qu’ils partagent tous, c’est le même imaginaire colonisé, celui d’un être humain dénué de sens moral et qui réduit la réalité aux seuls rapports de force. Quand le juste devrait toujours être la défense du faible contre le fort, quand la démocratie devrait toujours être le respect des minorités, quand la paix ne devrait être conceptualisée que par des anciens dominés (suivant l’intuition géniale d’Hannah Arendt), on voit à quel point aujourd’hui la perte de la capacité de « se mettre à la place de tout autre être humain » (Kant) est une catastrophe anthropologique, parce qu’elle devrait être la faculté humaine la plus respectée et la plus défendue.

Au lieu de cela, fleurissent partout les discours identitaires, qui alimentent une xénophobie généralisée (parmi les mesures proclamées aux USA, il faut ajouter : il n’y a plus qu’une seule langue officielle, il n’y a plus officiellement que 2 genres), qui défendent les inégalités de fait, qui tissent une internationale des individus tronqués, mobilisés par la peur et le ressentiment.

Cela promet de beaux jours !


Une pensée pour les pacifistes prorusses qui depuis 3 ans nous expliquent que l’Ukraine n’est que la marionnette de l’impérialisme américain et de l’agressivité de l’Otan. Ces trois années de guerre pendant lesquelles l’Otan a été aux abonnés absents ont juste prouvé qu’il y a bien un marionnettiste…

03.03.2025 à 12:01
Rédaction
Texte intégral (1424 mots)

Nous reprenons un article de notre ami Claude Le Guerrannic qu’il vient de publier dans le premier numéro (février-mars 2025) d’un petit journal qu’il vient de lancer : Un Courrier Cordais. Comment ne pas penser en lisant la dernière phrase à ce titre de Léon Bloy : Le sang du pauvre, c’est l’argent ?

Le présent article tire pour l’essentiel sa matière du livre de Fabien Lebrun, avec autorisation de l’éditeur.

« Ce ne sont pas les illusions à la Balzac qui concernent les individus en particulier dont il est question ici mais les illusions d’une société dans son ensemble, » « quoi que… »

Illusion autour d’un progrès technologique illimité et tout azimut que rien ne pourrait arrêter. Comme si ce progrès n’était que bénéfice pour l’humanité. Cependant les catastrophes en série que ce soi-disant progrès provoque, sautent de plus en plus aux yeux de tous. Ces catastrophes sont climatiques, environnementales, guerrières, humanitaires et même sociales, aujourd’hui il n’est plus permis d’en douter, les preuves et les constats s’accumulent. Les innovations du début du siècle sont concentrées autour de l’industrie numérique avec pour dernier développement l’intelligence artificielle, ce qui conduit notre société tout droit vers l’enfer, ce dont la jeunesse n’a certainement pas conscience. L’addiction qu’une connexion presque permanente chez les jeunes entraîne annihile tout recul et discernement et entretient l’illusion d’un monde rêvé et sans alternative. Le livre de Fabien Lebrun « Barbarie numérique » aux Éditions de l’Échappée, nous offre un tout autre regard, beaucoup plus sombre et réaliste grâce à sa scrupuleuse enquête, il invite à réagir vite, avant que le navire ne sombre complètement. L’industrie numérique est tout sauf virtuelle, Fabien Lebrun qui détaille les trafics en tout genre de l’exploitation minière au Congo est là pour nous le rappeler.

L’auteur trace l’histoire du Congo à partir des premiers convois esclavagistes vers l’Amérique au 16ème siècle, et la poursuit jusqu’à nos jours. Pourquoi le Congo, précisément parce qu’il se situe sur un territoire que d’aucuns considèrent comme un véritable scandale géologique, tellement il est riche en ressources de toute nature : végétales (le caoutchouc et le bois), hydrocarbures (pétrole) et surtout minerais (coltan, cobalt, germanium, cuivre et diamant). Le Congo détient près de 80 % des réserves mondiales de cobalt à lui seul !

Des  enfants dans les mines du Congo

Ces différents minerais entrent tous dans la composition de tout ce qui se fabrique dans le monde, que ce soit dans l’industrie, la pharmacologie, l’aéronautique, le spatial, la communication et le numérique. Le Congo est un concentré de guerres meurtrières pour l’acquisition de ces ressources, cela donne une idée de ce qui peut se passer partout dans le monde où une ressource quelle qu’elle soit attirera la convoitise, comme l’eau par exemple.

Minerai de cuivre

Les guerres coloniales actuelles (Ukraine, Palestine, Congo) et celles qui menacent par l’entremise de la nouvelle administration américaine ont toutes pour motif souvent caché la main mise sur les ressources. Ce sont des guerres engendrées par le capitaliste mondial. Derrière chaque guerre cherchez l’intérêt, le profit qui s’y cache.

Ces guerres, aux alliances changeantes  s’expliquent par la volonté de s’accaparer la jouissance de ces ressources minières indispensables à nos smartphones, ordinateurs, GPS, aux satellites et autres engins de l’exploration spatiale. Sans ces précieux métaux, tous nos gadgets connectés ne pourraient pas fonctionner. Pourtant, aucun des dirigeants politiques et encore moins économiques de la planète ne font allusion à la fin inéluctable de ces ressources. Certains de ces métaux précieux seront remplacés par d’autres, mais la tension autour de l’approvisionnement ira en augmentant, fatalement.  On ne veut pas savoir, qu’il s’agisse du modeste utilisateur de téléphone portable aux plus grands décideurs, personne ne veut savoir. On ferme les yeux sur les conditions de travail de ces fameux creuseurs du Congo. On entretient l’illusion de ressources sans limites, on entretient l’illusion par la mise en œuvre d’un  développement durable c’est à dire de la poursuite du saccage de la planète par des moyens que l’on croit plus vert.

En attendant qui fait tourner cette machine infernale ? Et bien nous tous, des milliardaires véreux et criminels aux populations désinformées tout en bas de l’échelle sociale, les milliardaires en spéculant et en cherchant toujours davantage de profits par l’exploitation de la misère humaine, les États par une surveillance généralisée et en imposant une numérisation de la moindre de nos démarches administratives, mais aussi chacun de nous par une consommation effrénée du moindre objet connecté.

Pourtant nous, consommateurs lambda, avons le pouvoir énorme d’influer sur les choix sociétaux par nos achats et nos pratiques, mais nous ne l’utilisons pas la plupart du temps parce que nous sommes pris par une sorte d’addiction. Une curiosité naturelle nous pousse à aller vers le nouveau, le « jamais vu », le « jamais fait » le « toujours plus » sans en mesurer à aucun moment les conséquences, ce que les fabricants, les commerciaux s’échinent à nous cacher le plus soigneusement du monde. Nous cédons au miroir aux alouettes comme des enfants qui n’ont pas encore appris le discernement.

Des chercheurs sincères et honnêtes tentent de nous alerter, de nous donner l’information qui nous manque, mais comme l’avait si bien dit Jacques Chirac à Johannesburg, le monde brûle et nous regardons ailleurs. Ce qui, soit dit en passant, ne l’empêcha pas de poursuivre une politique si peu écologique ! Les belles promesses n’engagent que ceux qui y croient.

Extrait du livre de Fabien Lebrun :

« Au Congo, les mineurs sont dénommés creuseurs, du fait d’une extraction manuelle dite « artisanale » : « Le creuseur semble incarner le Congolais du XXIe siècle, l’homme de la débrouille individuelle, celui qui affronte la crise ne comptant que sur ses propres forces. » Des carrières désaffectées ou délaissées par les investisseurs, ils creusent pour leur compte, équipés d’une pelle et d’une pioche, dotés au mieux de bottes, sinon pieds nus ou chaussés de tongs. Les creuseurs sont d’anciens ouvriers qualifiés, techniciens spécialisés ou enseignants. Ils ont quitté le commerce et l’agriculture avec des conséquences dramatiques : « La population katangaise creuse, exploite et juge ingrat le travail de la terre, ce qui provoque des pénuries de nourriture dans les cités minières et une explosion de la malnutrition. » page 297 plus loin : on estime le nombre de creuseurs au Congo à 2 millions.

Sans creuseurs et les mines du Congo la Tesla n’existe pas. Nos smartphones sont tachés de sang mais nous ne le savons pas.

Claude Le Guerrannic

25.02.2025 à 06:28
Rédaction
Texte intégral (727 mots)

Pourquoi diffuser sur notre site ce communiqué du MAN ? A l’époque des fakes et des « faits alternatifs », nous apprécions particulièrement l’effort qui y est fait de montrer que l’usage des mots n’est jamais arbitraire et surtout qu’il ne peut avoir de commun dans la communication qu’à condition de respecter des distinctions : parce que les distinctions sémantiques sont des conditions de la clarté politique.

Ainsi, « otage » n’est pas l’antonyme de « prisonnier » mais une espèce de prisonnier : tous les prisonniers ne sont pas des otages mais tous les otages sont des prisonniers. Au sens strict, un « otage » est un prisonnier traité comme un « moyen », de pression, de chantage, d’échange… Dès qu’un prisonnier est traité comme un moyen de pression, c’est un « otage ».

Il en va de même pour « terroriste » et « résistant » : tous les résistants ne sont pas des terroristes, mais il y a des résistants qui le sont, et ils le sont parce qu’ils pratiquent une politique au moyen de la terreur. C’est cette pratique qui fait le terroriste et c’est pourquoi un État peut l’être. Et surtout l’antonyme de « résistance » n’est pas « terrorisme » mais « collaboration ».

Voici donc quelques rappels de vocabulaire pour montrer qu’aujourd’hui à Gaza et en Cisjordanie, l’asymétrie n’est pas que militaire, elle est aussi sémantique. Voilà pourquoi, ici en France, il faut rappeler qu’une information qui se fait dans les termes de la propagande ne respecte pas sa déontologie.

« Dans cette guerre de tous les records avec le plus d’enfants tués au 21ème siècle, le plus de journalistes tués, le plus de bombes lancées, le plus d’espaces civils détruits

Dans cette guerre où chaque action d’un civil peut engendrer surveillance, intimidation, censure, emprisonnement et torture le MAN ne peut que souligner la trêve actuelle dans tout ce qu’elle peut apporter d’amélioration des conditions de survies des populations impactées et inciter à la poursuite de tous les mouvements de mobilisation pour que cette tragédie ne devienne pas un fait de plus dans l’actualité.

Cette trêve est également l’occasion de revisiter nos perceptions de la situation, d’alerter sur une utilisation réactive de termes chocs dans les médias.

Distinguons les termes d’otage et de prisonnier, de terroriste et de résistant.

Quel pays est occupé ? Dans quel territoire sont enlevés des civils et par qui ? 

Comment appelle-t-on un groupe qui combat pour résister à une occupation ?

Quels sont les intérêts en jeu pour les dénommer résistant ou terroriste ?

Quels sont les droits d’un prisonnier de guerre ?

Le terrorisme désigne une technique d’action violente utilisée contre des civils par un groupe clandestin dans le but de faire valoir des revendications politiques (J_M Muller, Dictionnaire de la non-violence) mais si l’on prend en compte l’histoire du conflit israélo-palestinien plutôt que la date particulière du 7 octobre 2023, les points de vue, l’analyse et la façon d’en parler se modifie… et ouvre à utiliser les dénominations autrement.

Le terrorisme est aussi le fait d’un État qui sème la terreur en bombardant les populations civiles. Et pourtant, il est rare d’entendre cette qualification dans les médias… 

Sans s’aveugler sur la fragilité de la trêve et des négociations en cours, Le MAN croit fermement aux analyses qui ouvrent des espaces de résolutions, d’avancée… vers plus d’humanité. »

Xavier Dormont, porte-parole du MAN

Contact : Maeva Rougé, coordinatrice fédérale du MAN : man@nonviolence.fr

21.02.2025 à 11:23
Rédaction
Texte intégral (1205 mots)

Nous diffusons sans retenue ce rapport de Terre de Liens sur l’état de l’agriculture en France. Il met parfaitement en lumière les absurdités d’une approche productiviste et exportatrice d’une agriculture qui aujourd’hui marche largement sur la tête. Nous ne cachons pas non plus notre inquiétude quand on voit les résultats des dernières élections professionnelles ainsi que l’adoption par le Parlement du projet de loi d’orientation agricole.

« À l’approche du Salon de l’agriculture et alors que la tension dans le monde agricole est toujours palpable, le Sénat devrait adopter mardi, la loi d’orientation pour la souveraineté agricole et le renouvellement des générations en agriculture.

Dans son 4ème rapport sur l’état des terres agricoles en France publié lundi 17 février, Terre de Liens révèle que la France a perdu la capacité à nourrir sa population. En l’état, la nouvelle Loi qui devrait être adoptée ne devrait qu’aggraver 75 ans de déconnexion politique entre agriculture et alimentation. 

2100 m2 de terres par habitant, là où il en faudrait le double

Avec un potentiel nourricier de 130 %, la France dispose en théorie d’assez de terres agricoles pour nourrir sa population. Mais dans son nouveau rapport sur l’état des terres agricoles, Terre de Liens révèle que cette prétendue souveraineté alimentaire est aujourd’hui réduite à une chimère politique. Tandis qu’elle exporte la production de 43 % de ses terres (12 millions d’hectares), la France importe aujourd’hui l’équivalent de 10 millions d’hectares de terres, la surface de l’Islande, pour notre alimentation. Dans ces conditions, en France, la surface de terres nourricières est réduite à 2 100 m2 par habitant, quand il en faudrait le double pour nourrir une personne. 

Les pâtes illustrent l’absurdité de la situation : avec nos 250 000 hectares de blé dur cultivés chaque année, nous pourrions aisément produire 15 kg de pâtes par personne, surpassant la consommation moyenne de 8,5 kg/personne. Hélas, le blé produit sur deux tiers de ces surfaces est vendu hors de nos frontières et de nos estomacs. Résultat : la France importe trois quarts des pâtes et semoules qui nourrissent sa population

Ou encore le lait. Tandis que Lactalis réduit sa collecte de lait de 9 % en France, laissant sur le carreau plusieurs centaines d’éleveurs laitiers, il n’a pas fait mystère de son intérêt pour le lait en poudre néo-zélandais, dont l’importation est facilitée par un récent accord de libre-échange.

La situation de l’agriculture française se résume en un triste palmarès : accro aux intrants importés pour produire en masse et tenir la cadence des exportations, la France ne cesse d’accroître ses importations pour remplir nos assiettes. Elles ont doublé en 20 ans. 

Agriculture et alimentation, 75 ans de déconnexion politique

D’un côté de la chaîne, les agriculteurs·trices crient leur désespoir d’un revenu indigne face à la concurrence mondiale. De l’autre, la précarité alimentaire des Français augmente et les conséquences de notre alimentation sur notre santé se chiffrent en milliards.

Dans son rapport, Terre de Liens dresse un état des lieux effarant : entre agriculture et alimentation, 75 ans de déconnexion politique ont conduit à la situation que nous connaissons aujourd’hui. À l’heure où la France entend se doter d’une loi d’orientation agricole pour “préserver” sa souveraineté alimentaire, Terre de Liens appelle le gouvernement à prendre acte que cette dernière n’est plus. Ce dont il s’agit aujourd’hui, c’est de mettre en cohérence production agricole et besoins alimentaires, de toute urgence. Les leviers sont éminemment politiques : 

  • La PAC, dont aujourd’hui 20 % des plus gros bénéficiaires perçoivent 51 % des aides directes, encourage une production industrielle tournée vers le commerce international, au détriment de la durabilité des systèmes. Il est impensable de maintenir en l’état ce levier financier, qui représente en moyenne 74 % du revenu courant avant impôt des agriculteurs·trices, calibré de telle sorte qu’il nous prive de souveraineté alimentaire ;
  • Les accords de libre-échange (Nouvelle Zélande, CETA, Mercosur) accroissent les kilomètres entre le champ et l’assiette, faisant perdre de vue où et comment est produite l’alimentation. Il est temps d’en finir avec la mauvaise foi du gouvernement qui a signé des dizaines de traités de libre-échange ;
  • Les acteurs de l’aval (transformation, distribution) reçoivent chaque année 16,4 milliards principalement sous forme d’exonérations fiscales et de cotisations sociales. Or, ces acteurs orientent considérablement la production agricole. Ces exonérations fiscales représentent donc un levier important de politique publique. 
  • Le départ massif à la retraite des agriculteurs entraîne la disparition de 200 fermes par semaine en France. Une véritable politique d’accès à la terre et d’installation doit voir le jour sans plus tarder pour remplir les objectifs de renouvellement des générations inscrits dans la loi.

En l’état, la loi qui devrait être adoptée mardi passe à côté de son objectif : des terres et des agriculteurs·trices pour une souveraineté alimentaire préservée. Sans moyens sur l’enjeu de renouvellement des générations et de la résilience des fermes (le long terme qui devrait être central dans une loi d’orientation), elle a fait semblant de donner des gages aux agriculteurs•trices par un abaissement généralisé des normes qui ne règlera pas leur problème de revenu et consacre dans le même temps une vision de la souveraineté alimentaire calquée sur la balance commerciale de la France. »

Liens et accès au rapport

RAPPORT :

https://ressources.terredeliens.org/les-ressources/souverainete-alimentaire-un-scandale-made-in-france-rapport-4

SYNTHÈSE :

https://ressources.terredeliens.org/les-ressources/souverainete-alimentaire-un-scandale-made-in-france-synthese-rapport-4

21.02.2025 à 08:32
Rédaction
Texte intégral (662 mots)

Dans notre dernière lettre en date du 7 janvier et intitulée « La xénophobie est à la mode », nous nous inquiétions de la banalisation du rejet et de la peur de l’autre. Certains des messages reçus après cette lettre nous confortent dans l’idée qu’il y a là une bataille politique à mener : celle de la question sociale, qui se préoccupe de l’égalité, contre la question sociétale,  qui se préoccupe de l’identité. La décroissance a donc quelques pistes pour « grand remplacer » l’extrême-droite : 

  • Préférence pour l’altérité contre préférence nationale : parce que vivre ensemble ça n’est pas vivre uniquement avec des gens qui nous ressemblent.
  • Pluriversalisme contre occidentalisation des mœurs : pour un universel qui n’érige pas la particularité occidentale comme modèle ni ne tombe dans le piège du relativisme culturel : un universalisme en construction permanente et nourri de la diversité, à la recherche de notre commune humanité.
  • Civilisation du temps libéré contre éloge du travail et de l’esprit d’entreprise : pour un revenu inconditionnel accordé à tout membre de la société, sans aucune exclusion et accordé sans contrepartie « laborieuse ».
  • Goût pour les limites contre technosolutionnisme : quand bien même nous trouverions des solutions techniques aux problèmes écologiques, nous questionnerions les impacts de ces technologies sur la vie sociale.
  • Décolonisation contre rémigration : défense d’une triple émancipation : de la nature, des femmes et des colonies, que le capitalisme considère comme des ressources gratuites et illimitées.
  • Écologie contre survivalisme :  pour se réinstaller dans les interdépendances avec le vivant et la nature.
  • Égalité contre sécurité : la première des libertés n’est pas la sécurité mais l’égalité : la première décroissance est donc celle des inégalités.
  • Priorités aux activités de soin plutôt que ressentiment contre l’assistanat : parce que sont les activités de conservation et de reproduction de la vie de la société qui comptent réellement et qui sont « la plateforme », « la base » sur laquelle toute activité productive repose.
  • Biorégionalisme contre souveraineté nationale : pour des territoires qui ne soient pas des espaces d’exclusion politique définis par des frontières arbitraires mais dessinés par des limites géographiques prenant en compte les communautés humaines et les écosystèmes.
  • Démocratie contre illibéralisme : contre certaines faiblesses de la démocratie représentative c’est toujours de la démocratie qu’il faut (assemblées populaires, part de démocratie directe, encadrement des mandats, jurys citoyens…) et non pas une remise de nos destins aux mains d’une figure providentielle et autoritaire.

Si ces belles valeurs veulent pouvoir arriver à réellement contrer celles de l’extrême-droite, à cette époque de grande insensibilité politique, il faut se demander pourquoi aujourd’hui personne ne les écoute : c’est tout l’intérêt de réfléchir aux racines du mal : celle de la domination du régime de croissance, qui neutralise les effets du discours des valeurs par toute une série d’outils de dépolitisation (individualisme, neutralisme institutionnel, horizontalisme…)

Amitiés xénophiles renouvelées

19.02.2025 à 16:48
Rédaction
Lire plus (184 mots)

Chargé de cours en sciences sociales dans l’enseignement supérieur (notamment à Sciences-Po Lyon et à l’université Lyon II) et en formation continue (à l’Institut Transitions). Auteur et traducteur de plusieurs livres de critique sociale. Derniers ouvrages parus : « Ce que nos salaires disent de nous » (Payot, 2023) et « Travailler sans patron », coécrit avec Simon Cottin-Marx (Gallimard, 2024).

Ses domaines d’intervention :

Baptiste Mylondo

  • décroissance,
  • justice environnementale,
  • travail,
  • limites sociales de la croissance,
  • perspectives post-croissance.

Sur la zone géographique, il faut que ce soit accessible facilement en train à partir de Lyon (Marseille, Montpellier, Clermont-Ferrand, Grenoble, Paris, Dijon).

18.02.2025 à 18:03
Fleur Bertrand-Montembault
Texte intégral (626 mots)

Le mot de la MCD : David Cham nous a fait le plaisir et l’honneur de venir écouter les intervenants de la Caravane contre-croissance lors de l’étape nantaise, et d’en tirer trois podcasts qu’il a publiés sur sa chaîne de podcasts « Taf Punk« . Un grand merci à lui pour ces enregistrements de qualité. De ces trois interviews, voilà ce que nous retenons de nature à consolider le corpus commun décroissant :

  1. Avec Vincent d’Eaubonne : l’apport de Françoise d’Eaubonne et de l’écoféminisme a été de démontrer que la nature et la domination des femmes (et l’on pourrait y ajouter les colonies, comme d’autres auteures l’ont fait) ont une racine commune : le patriarcat. Plus spécifiquement, « Françoise », comme l’appelle simplement Vincent, a démontré que la recherche de l’égalité hommes-femmes au travail est une récupération de ce combat d’émancipation pour alimenter le développement du capitalisme : il n’y a rien à espérer d’un féminisme qui cherche à rattraper les hommes dans les aliénations de la sphère productive. Comme Vincent, nous sommes les héritiers de cette pensée écoféministe, qui fait de Françoise d’Eaubonne l’une des précurseuses de la décroissance.
  2. Avec Tristan Riom : l’idée que la pratique politique a besoin de se nourrir d’une réflexion de fond et de concepts qu’elle peut ensuite traduire au quotidien : c’est le projet qui porte la MCD dans le champ de la décroissance. Ensuite, il est intéressant de noter qu’il existe actuellement des matrices politiques toutes faites, nourries des imaginaires dominants de compétition, de concurrence, de standardisation… pour penser les territoires : attractivité, compétitivité, développement urbain… La décroissance doit pouvoir proposer d’autres matrices pour les territoires, comme celle soulignée par Tristan : l’économie de la subsistance ; ou celle proposée par la MCD, l’espace écologique (penser des politiques publiques systématiquement encadrées par des mesures « plancher » et « plafond »).
  3. Avec Romain Allais : la distinction entre consommation obligatoire (de satisfaction des besoins), ostentatoire (de positionnement social) et compensatoire (pulsionnelle et de récompense). De plus, l’idée que nous avons besoin de commun et donc de communautés, qui ne peuvent être recréées virtuellement et sur les réseaux sociaux que parce que les individus ont été préalablement séparés. Ce qui nous anime en tant que décroissant-es, c’est de conserver et préserver ces communs préalables aux individus, à même de donner du sens à nos vies.

Pour écouter les autres podcasts de la chaîne Taf Punk : https://shows.acast.com/tafpunk.

Il est également possible de ré-écouter l’émission de Radio Campus Clermont-Ferrand qui présente l’événement, « La caravane contre-croissance s’arrête à Clermont-Ferrand ! » enregistrée en décembre 2024 .

13.02.2025 à 15:58
Rédaction
Lire plus (316 mots)

Membre depuis 2013 du MOC puis de la MCD depuis sa création en 2017 je navigue en eaux décroissantes depuis plus de dix ans désormais. Je suis le référent audiovisuel de la Maison commune et je fabrique les vidéos que nous produisons et je gère notre page Youtube.

Sofian Achabe

Dans le même temps j’ai pu venir à bout de quelques films documentaires, sur des sujets tels que la cueillette de plantes sauvages dans les Pyrénées, la décroissance via le parcours atypique d’un candidat aux législatives de 2017 ou sur le mouvement autonome italien des années 70.

Mes domaines de compétences sont plutôt limités, mais je peux intervenir sur :

  • la décroissance en tant que contre-culture
  • la décroissance comme « décolonisation de l’imaginaire »
  • atelier de communication décroissante (où comment réaliser des petits films de propagande…)
  • décroissance et cont(r)e histoire, qui sont les premiers décroissants de la préhistoire ? Récit imagé d’une réalité fantasmé
09.02.2025 à 14:29
Rédaction
Texte intégral (994 mots)

2024

Socialter, Hors-série « Décroissance, réinventer l’abondance » coordonné par Timothée Parrique, « Un cliché et deux malentendus sur la décroissance« , novembre 2024

Radio Campus Clermont-Ferrand, « La caravane contre-croissance s’arrête à Clermont-Ferrand !« , décembre 2024

Vosges TV, Reportage sur les festives 2024, août 2024

Vosges Matin, « Les rencontres nationales de la décroissance organisées cette semaine à Provenchères-et-Colroy« , août 2024

Radio Albigès, L’Abécédaire de la MCD dans l’émission Commun Lundi, par Bruno Barbay, adhérent de la MCD, 2024

2023

Revue française d’œnologie n°319, Interview Grand Angle avec « Michel Lepesant, un apôtre d’une décroissance épicurienne », par Claudine Galbrun, octobre-décembre 2023

Radio Albigès, Echo des Festives 2023, par Bruno Barbay, adhérent de la MCD, novembre 2023

Marianne, « Rendre désirable la décroissance : mission impossible ? », Mickaël Faujour, 4 septembre 2023

France 3 Occitanie, Reportage « La décroissance mieux à même de répondre aux actuels défis. Les décroissants cherchent leur action politique », août 2023

Regards, Pour une retraite inconditionnelle, tribune de Michel Lepesant, fondateur de la MCD, 2 mars 2023

Politis, « Retraites : pas de revendication offensive sans une réforme systémique« , tribune de Michel Lepesant et Thierry Brulavoine, fondateur et président de la Maison commune de la décroissance (MCD), co-auteurs de La décroissance et ses déclinaisons (Utopia, 2022), février 2023

Le Monde, Retraites : « Dans un système solidaire par répartition, il ne devrait pas y avoir de calcul des annuités car il apporte le poison de l’individualisation », tribune de Michel Lepesant, fondateur de la MCD, 21 janvier 2023

Demain en mains, Les chroniques de la MCD, par Fleur Bertrand-Montembault, porte-parole de la MCD, du 10 juin 2022 au 27 février 2023

Low-tech journal n°25, Grand Angle Décroissance, interview croisée de Fleur Bertrand-Montembault, porte-parole de la MCD, Vincent Liegey et Timothée Parrique, janvier – février 2023

2022

Demain en mains, Les chroniques de la MCD, par Fleur Bertrand-Montembault, porte-parole de la MCD, du 10 juin 2022 au 27 février 2023

Radio Libertaire, Le livre « La décroissance et ses déclinaisons » sur les ondes de Radio Libertaire, entretien avec Thierry Brulavoine, président de la MCD mené par Jean-Manuel Trémond dans l’émission « Le proton se rebiffe », 19 septembre 2023

Vosges TV, Reportage sur les Festives 2022, 18 août 2023

2021

La Dépêche, « En nombre croissant, les décroissants organisent leurs « Rencontres nationales » en Ariège jusqu’au 15 août« , août 2021

La Dépêche, « La décroissance heureuse se discute en Ariège: « La pandémie a montré que le politique peut décider que l’économie n’a plus la priorité« , août 2021

La Dépêche, « Ariège : l’écoféminisme au cœur du débat sur la décroissance« , août 2021

2020

France Inter, « Déjà Debout : Michel Lepesant, philosophe de la décroissance« , 18 novembre 2020

Libération, « Confinement : en demi-résonance avec notre décroissance« , tribune collective initiée par la MCD, mars 2020

Revue de presse de notre tribune « Confinement : en demi-résonance avec notre décroissance« , 2020

Reporterre, Le monde qui vient n’a rien d’une utopie, c’est un cauchemar, tribune de Michel Lepesant, fondateur de la MCD, mars 2020

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