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Michel LEPESANT
Conférencier, animateur de la Maison commune de la Décroissance

DÉCROISSANCES


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30.07.2025 à 23:02

Pour la traduction espagnole de mon livre de 2012 : une nouvelle préface

Michel Lepesant

Écrit en 2012, mon livre Politique(s) de la décroissance (éditions Utopia), vient d’être traduit en espagnol. A cette occasion, j’ai écrit une nouvelle préface, un prólogo. Une assez bonne occasion aujourd’hui de marquer le chemin idéologique parcouru depuis plus de 10 ans ; mais aussi celui parcouru depuis son écriture
Texte intégral (2732 mots)

Écrit en 2012, mon livre Politique(s) de la décroissance (éditions Utopia), vient d’être traduit en espagnol. A cette occasion, j’ai écrit une nouvelle préface, un prólogo. Une assez bonne occasion aujourd’hui de marquer le chemin idéologique parcouru depuis plus de 10 ans ; mais aussi celui parcouru depuis son écriture en octobre 2023. Je défends depuis le début une conception radicalement politique ou politiquement radicale de la décroissance, je crois y être et avoir toujours été fidèle à cette exigence.

Prólogo 2024

Revenir sur un texte écrit il y a plus de dix ans est un test quelque peu sournois : ne pas s’y retrouver, c’est devoir soupçonner que les fondements de l’argumentation étaient moins solides qu’on ne l’avait cru ; mais, s’y retrouver totalement, comme si le réel et la poursuite de la réflexion n’avaient pas apporté leur lot de réfutations et de controverses, c’est l’indice que les propos tenus relevaient plus de la séparation au réel que de son attention.

Heureusement, ni je ne m’y retrouve, ni je ne m’y perds. Il y a donc un tri à faire entre ce que je pourrais reprendre et ce que je préférerais écarter, ou reformuler, ou nuancer, ou approfondir, ou compléter, ou enrichir… Dois-je alors présumer que ce qui sera modifié ne portait que sur l’accessoire et que l’essentiel sera conservé ? Même pas ; à condition que tout changement soit la marque d’une trajectoire. Ce qui est le cas, c’est ce que j’espère.

Ce livre avait un triple objectif : définir la décroissance, pointer la politique comme son véritable moteur, s’adresser à celui que j’appelle un « militant-chercheur » pour le mettre en garde contre un excès de présomption quand il s’agit de « penser et faire la transition ».

Ces trois objectifs ont poursuivi leurs trajectoires, radicalement ; et de façon convergente. Car le mouvement de la décroissance est peut-être en train de sortir du brouillard définitionnel qui l’avait vu naître. Quand on pense que la première apparition du terme dans le titre du livre de Nicholas Georgescu-Roegen (Demain, la décroissance, 1979) était le choix de ses traducteurs et qu’il ne traduisait pas l’anglais « degrowth » mais « decline », on s’étonne moins de constater que beaucoup de livres actuels sur la décroissance, faute d’assumer la responsabilité de défendre une définition commune du terme, se félicite de voir dans l’hétérogénéité du mouvement une richesse, osant même se réjouir qu’il « demeure souvent flou et traversé d’interprétations divergentes ». Faute de grives, on mange des merles.

Pourtant, la distinction entre décroissance et objection de croissance est toujours décisive ; et elle s’est formidablement enrichie. D’abord parce qu’est apparue l’expression de « post-croissance ». Il ne faut pas se cacher que son « succès » de départ a tenu d’abord à la possibilité pour certains « objecteurs de croissance » d’éviter de dire « décroissance ». Mais cet évitement a pu être retourné : tout simplement en s’appuyant sur le triptyque du rejet, du trajet et du projet. Entre le rejet de la croissance à laquelle on objecte et le projet de post-croissance, s’intercale le trajet, celui de la décroissance.

Mais cette définition temporelle de la décroissance – comme transition, comme trajet – est inséparable de deux autres définitions. Une définition formelle : la décroissance, c’est le contraire de la croissance. Ce devrait être la plus évidente, la plus spontanée, et pourtant elle est, elle aussi, victime de réticences : pire, elle est même quelquefois citée comme le contresens qu’il ne faudrait surtout pas commettre ! Et pourtant, le préfixe « dé- » est explicite, il signifie une opposition ; tout comme le préfixe « anti- ». « Ah oui, mais le « dé-« , c’est négatif », entend-on souvent, trop souvent. Que répondre à celui qui viendrait formuler les mêmes réticences à propos de l’antiracisme, ou de l’anticapitalisme ? Que ses réticences envers le « négatif » du préfixe ne sont en réalité qu’un accord envers le radical qu’il précède.

Voici donc ce qu’il faut assumer : que la décroissance est, fondamentalement, le contraire de la croissance. Et si on rajoute que cette opposition est politique, cela aboutit à une définition substantielle : la décroissance est l’opposition politique à la croissance.

Une telle définition incite immédiatement à multiplier les questions. Mais qu’est-ce que cette croissance à laquelle la décroissance s’oppose politiquement ? En quoi cette opposition consiste ? En quoi est-elle politique ?

C’est à partir de ces questions que l’extension du domaine de la croissance va impliquer une extension du domaine de la critique de la croissance.

Si la croissance est définie comme objectif macroéconomique, alors la décroissance est la décrue de la consommation et de la production, et même de l’extraction et l’excrétion (les déchets). Et comme cette croissance économique repose sur l’utilisation de « ressources » énergétiques et matérielles, alors la décroissance est aussi un recul de leurs utilisations. Et comme il ne va pas s’agir de décroître pour décroître, alors cette décrue est censée s’arrêter au temps de la post-croissance qui sera économiquement un état stationnaire.

Mais cette croissance économique a colonisé la société au point d’en faire non pas une société avec une économie de croissance mais une société de croissance. La croissance est un « monde ».  La croissance et son monde exercent leur emprise bien au-delà des modes de production mais jusqu’aux modes de consommation, de loisir : aux modes de vie. Le monde de la croissance est alors un monde dont les valeurs sont colonisées par l’imaginaire croissanciste : toujours plus, plus vite, plus neuf. La décroissance est la décolonisation de l’imaginaire de la croissance.

Mais il ne faut pas s’arrêter là dans l’extension de la critique dirigée contre la croissance : j’avais tort d’écrire que « la croissance n’est pas une idéologie mais un effet de l’idéologie productiviste ». Car la croissance est davantage qu’une économie, davantage qu’un « monde ». C’est aussi un « régime »  qui peut être défini par l’hégémonie qu’une certaine « forme » exerce sur nos activités comme sur nos représentations de ces activités et de nos places dans la société. Cette forme est la logique poussée jusqu’au bout de l’idéal de la modernité libérale, à savoir ce contrat politique tacite selon lequel les institutions – l’État et ses administrations, le Marché avec ses banques et ses entreprises – prétendent s’interdire de hiérarchiser les différentes conceptions privées de la vie bonne et prétendent accorder un égal respect à toutes celles qui sont compatibles avec celles des autres. La « liberté » libérale est le droit accordé à chaque individu de mobiliser toutes les ressources nécessaires à la réalisation de sa conception individuelle de la vie bonne. La croissance n’est alors que l’exigence d’une mise à disposition illimitée des « ressources ». Cette prétendue absence de hiérarchisation – et il faudrait montrer comment l’illibéralisme est en réalité le destin du libéralisme – se manifeste dans une forme horizontale dans laquelle toutes les valeurs se valent 1, dans laquelle les institutions prétendent être neutres. Cet horizontalisme est en pratique un principe d’équivalence et on peut faire l’hypothèse qu’il vient de l’économie libérale pour laquelle l’argent est l’équivalent généralisé de tous les autres biens.

C’est seulement dans ce troisième sens – après la décrue et la décolonisation, l’émancipation de la tyrannie de l’horizontalisme – que la décroissance peut prendre toute son ampleur politique. D’abord en confiant les clefs de la réflexion politique ni aux « chercheurs » et autres académiques de la décroissance, ni aux « activistes » qui sont trop souvent les relais d’une sorte d’intimidation permanente à agir dans l’urgence, mais aux « militants-chercheurs », c’est-à-dire à ces décroissants qui voient bien que la pratique des « alternatives » et des « utopies concrètes » est la source de « problèmes » mais qui acceptent de les repérer, de les définir, de les discuter en fabriquant, en bricolant, les concepts qui vont permettre de nommer les frottements et les conflits. Il s’agit là de mettre en garde contre une pente qui rejette tout problème à l’extérieur – qui les externalise – et qui impose à l’intérieur des milieux décroissants une sorte de « bienveillance » forcée qui n’est qu’une version soft d’un surmoi culpabilisant dirigé contre tous et toutes celles qui n’acceptent pas de se raconter que tous nos engagements se déroulent dans une bulle rose. Cette bienveillance est en réalité une forme sournoise de dépolitisation, et une variante de cet horizontalisme libéral que l’on prétend pourtant critiquer.

Ensuite, en rompant avec tout un faisceau de récits concernant les stratégies de transition et les scénarios qui en découlent. Les fables de la préfiguration, de l’essaimage, de la masse critique, de la bifurcation ont encore la peau dure. Au point de se demander comment elles peuvent résister à l’évidence sinon de leur échec mais à tout le moins de leur invisibilité. C’est qu’elles se maintiennent en se racontant sans cesse que l’addition des petits pas fera les grandes enjambées, que l’urgence des catastrophes va accélérer la prise de conscience, que « cette fois-ci, ce sera la bonne ». Bref, leur prise de conscience s’arrête au moment de s’apercevoir que leur déni repose sur les valeurs du monde de la croissance : le nombreux, le vite et la nouveauté.

Tout au contraire, une politisation radicale de la décroissance consisterait à renvoyer dos à dos tant les fables de la transition comme Grand soir que celles de la « transformation sociale et écologique » comme « petits matins », les unes comme les autres parce qu’elles ne sont que des variantes d’une façon de concevoir les processus historiques comme déterminés : matériellement pour les unes par les rapports de production, idéalement pour les autres au nom de « valeurs » qui en marqueraient la supériorité éthique. Mais alors est-il permis d’espérer que la transition comme trajet d’émancipation de la croissance économique et du régime de croissance débute un jour ?

Si l’espoir se confond avec la croyance que les désirs deviendront réalité, c’est non. Tout simplement parce qu’on ne fait de la politique ni avec des prophètes, ni avec des magiciens ; autrement dit, si un jour la transition vers la post-croissance, par la décroissance, se déclenche, ce jour ne peut ni se prévoir, ni se provoquer. Pour autant, il peut se préparer.

C’est dans ce rapport prudent, plus exactement prudentiel, de la décroissance à sa repolitisation que je trouve la seule véritable modification dans la façon de concevoir des Politique(s) de la décroissance. En effet, je concluais le livre de 1993, par une « carte de la décroissance » dont les trois pôles étaient constitués de ce que j’appelais des « pieds » : celui des alternatives, celui de la visibilité et celui du projet. Sans remettre en cause ni leurs existences, ni leurs interrelations, il me semble que si la décroissance doit (se) préparer, alors l’un des trois pieds est particulièrement boiteux, est particulièrement impréparé. C’est celui du projet, celui de la théorie, celui des définitions, celui des distinctions conceptuelles, celui des discussions et donc des controverses, des critiques tant internes qu’externes.

Il me semble même pouvoir y déceler comme un effet du régime de croissance et de sa tyrannie de l’horizontalisme qui fonctionne comme une machine anti-intellectuelle ; comme s’il y avait toujours ici et maintenant quelque chose à faire avant de réfléchir pour demain. Il y a là, me semble-t-il, comme une insensibilité à la dimension historique de l’action politique.

C’est pourquoi aujourd’hui, si utilité il doit y avoir, je la vois plutôt dans un roboratif et radical travail théorique. Si la décroissance a besoin de politique, la politique a besoin de théorie. Pas de la théorie pour de la théorie : pas plus de théorico-théorique que de pratico-pratique. Mais une théorie qui creuse jusqu’à la remise en question la plus radicale des racines du régime de croissance. A commencer par son option libérale pour son indifférence (affichée) envers les conceptions privées de la vie bonne. A contrario, si le sens de la vie n’est pas une question privatisée, alors la décroissance comme théorie politique et comme trajet d’émancipation doit assumer un principe responsabilité, celui de faire de la question du sens une question politique. La croissance pour la croissance est une absurdité et une impasse, un non-sens.

Ce n’est pas d’abord parce qu’une croissance infinie est impossible dans un monde fini que nous critiquons la croissance, c’est parce qu’elle est absurde, et elle le serait encore même dans un monde sans limites.

Les limites – sociales, écologiques – ne sont des contraintes que pour celui qui n’a pas reconnu que l’émancipation est dans l’autolimitation : c’est le sens de la décroissance.

Alors ne tardons pas trop dans la reconstruction d’un espace public de discussion démocratique autour des enjeux du sens.

Charpey, octobre 2023.

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Les notes et références
  1. L’horizontalisme est politiquement un libéralisme, ontologiquement un nominalisme, dialogiquement un relativisme, socialement un individualisme.
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13.04.2025 à 12:08

Fécondité politique de l’hypothèse du « régime de croissance »

Michel Lepesant

Et si avant tout la croissance n’était ni une boussole économique ni même un « monde » mais qu’elle était aussi un « régime politique » ? Dans ce cas, la décroissance ne pourrait se réduire ni à une « décrue » (économique), ni même à une « décolonisation » (des imaginaires de la croissance) mais elle devrait s’étendre jusqu’à prôner un renversement de régime politique.
Texte intégral (1749 mots)

Et si avant tout la croissance n’était ni une boussole économique ni même un « monde » mais qu’elle était aussi un « régime politique » ? Dans ce cas, la décroissance ne pourrait se réduire ni à une « décrue » (économique), ni même à une « décolonisation » (des imaginaires de la croissance) mais elle devrait s’étendre jusqu’à prôner un renversement de régime politique.

Cette hypothèse est formulée depuis plusieurs années par le sociologue italien, Onofrio Romano, compagnon de la MCD, et qui vient de publier un livre dans lequel il rassemble ses arguments en sa faveur : Critique du régime de croissance (2024, chez Liber, traduction française de Towards a Society of Degrowth, 2020, Routledge).

En 2017, lors de nos (f)estives, Onofrio nous avait déjà présenté son hypothèse ; qui nous avait impressionnée ; ce qui nous a demandé plusieurs années pour l’intégrer au corpus idéologique de la décroissance défendu par la MCD.

Et Onofrio sera présent cet été aux (f)estives organisées par la MCD : deux journées entières lui seront consacrées. Superbe occasion pour prendre le temps de creuser ensemble cette hypothèse.

*

Qu’est-ce qui fait la fécondité politique de cette hypothèse ?

  1. Montrer que la croissance est un régime politique. Alors que le capitalisme s’adosse à un régime politique, mais il ne l’est pas lui-même. Ce qui explique que les modalités politiques du capitalisme sont variables : capitalisme libéral, capitalisme d’État, capitalisme autoritaire… Par rapport au capitalisme, beaucoup de décroissants croient qu’il leur suffit de dénoncer le capitalisme pour politiser leurs propos : mais c’est parce qu’ils évitent de se poser ce qu’Harmut Rosa nomme la « question sérieuse : La société moderne est-elle donc équivalente à la société capitaliste ? Est-ce que j’entends simplement « capitalisme » lorsque je me réfère à la structure de base de la société moderne ? La réponse est : le capitalisme est un moteur central, mais la stabilisation dynamique s’étend bien au-delà de la sphère économique »2. Cette expression de « stabilisation dynamique » peut être comprise comme synonyme de « la croissance pour la croissance ».
  2. Quel est ce régime politique ? Un régime de dépolitisation. Qui repose sur un naturalisme, un individualisme, un illimitisme. Le naturalisme n’est pas tant la vision de la nature comme stock de ressources gratuites que le présupposé que la nature est d’abord source de déterminismes. L’individualisme est une conception de la société comme agrégat d’individus isolés. L’illimitisme n’est pas l’affirmation ou la croyance qu’il n’y a pas de limites, c’est le regret qu’il puisse en avoir.
  3. Cette hypothèse permet de résoudre 2 problèmes et elle fournit des explications :
    • Premier problème : d’où vient le succès de la croissance ? Certes ce succès – emprise, hégémonie – est la domination que la croissance économique exerce sur la société non seulement dans son registre propre mais aussi dans celui du « monde » (par des normes, des valeurs, des modes de vie, des imaginaires, des récits, des représentations…) ; mais d’où vient ce succès économique sur l’économie et la culture ? Car, à moins de s’autoriser un raisonnement circulaire et de se raconter que l’économie domine pour des raisons… économiques, c’est là qu’une hypothèse politique peut être une explication.
    • Second problème : d’où viennent les échecs globaux des alternatives, que ce soient ceux des expérimentations minoritaires ou des « autres » paradigmes ? En particulier, comment expliquer  que nos arguments – qui reposent pourtant solidement tant sur des données scientifiques que sur des valeurs humanistes – n’arrivent jamais à faire basculer le monde de la croissance dans une transition vers « d’autres mondes possibles » ? Pourquoi nos argumentations tant rationnelles que raisonnables font-elles « plouf » ?
    • « Expliquer », c’est relier des effets à une cause (sans présupposer que cette cause soit la seule qui est déterminante). Si l’hypothèse du régime de croissance est une explication générale, alors elle doit éclairer des effets, c’est-à-dire des modalités de la dépolitisation généralisée.
  4. On peut rajouter deux autres raisons pour défendre cette hypothèse du régime de croissance :
    • Si d’autr.e.s ont d’autres hypothèses pour résoudre les 2 problèmes évoqués, alors chiche, qu’on en discute. Mais qu’ils les mettent sur la table, qu’ils les exposent…
    • En tant que décroissant critique de la croissance, voir dans la croissance un « succès » et dans la décroissance un « échec », c’est s’opposer à la façon la plus courante de critiquer où on dénonce les contradictions de ce à quoi on s’oppose et on met un couvercle sur toute critique interne3. L’hypothèse du régime politique de croissance prend résolument le contrepied de ces facilités : non seulement on cherche à creuser au plus profond des causes de la croissance mais aussi on ne peut s’empêcher de remarquer que la critique décroissante mainstream ne fournit le plus souvent qu’une version cool du régime de croissance. Or, à chérir les causes que l’on dénonce, on ne fait que les renforcer.
  5. Si l’hypothèse du régime de croissance comme régime de dépolitisation permet d’expliquer des effets, alors (par contraposition) celui qui s’insurge devant de tels effets ne peut nourrir quelque espérance politique qu’à condition de concevoir la décroissance comme d’un projet politique de repolitisation.

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→ Pour un inventaire des succès du capitalisme : https://decroissances.ouvaton.org/2022/09/30/la-decroissance-au-dela-de-lanticapitalisme/#2_Mais_alors_quest-ce_que_le_capitalisme

→ Pour une analyse des échecs et du « plouf » :

→ Pour un inventaire de quelques « effets » du régime de croissance : https://decroissances.ouvaton.org/2024/02/08/pour-decroitre-changeons-de-regime/#c_De_quelques_effets_du_regime_de_croissance

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Les notes et références
  1. https://decroissances.ouvaton.org/2024/07/30/pourquoi-faut-il-renverser-le-regime-de-croissance/
  2. Harmut Rosa, « ‪Dynamic Stabilization, the Triple A. Approach to the Good Life, and the Resonance Conception‪ », Questions de communication, vol. 31, no. 1,2017, pp. 437-456.
  3. C’est peut-être aujourd’hui le seul héritage de la vulgate militante post-marxiste : on continue de se réconforter en se racontant que le système ne pourra pas ne pas finir par s’effondrer sous le poids de ses contradictions, mais en interne, aucune autocritique radicale n’est jamais vraiment mise à la discussion. Cette externalisation des contradictions est grosse de sectarisme ; ce qui peut expliquer l’actuelle dégringolade de certain.e.s décroissant.e.s dans le complotisme et la fréquentation de l’extrême-droite.
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12.01.2025 à 13:12

La croissance, c’est la restriction du domaine de l’empathie

Michel Lepesant

Face à la croissance de l'agressivité couplée à une dégringolade de l'empathie, la décroissance doit entrer en dissidence, sous le drapeau de l'anti-croissance, en arrêtant de se tirer des mots-obus dans le pied, et en cessant de faire revenir par la fenêtre la croissance que l'on vient de faire sortir par la porte.
Texte intégral (690 mots)

En 1973, dans la revue La Nef consacrée aux « objecteurs de croissance », André Amar publie le premier texte dans lequel la décroissance est assumée en tant que mot et en tant qu’idée, c’est-à-dire dans son opposition radicale à la croissance. Croissance qu’il définit explicitement comme « croissance de l’agressivité ».

Pour valider ce jugement, il n’est pas possible d’en rester à une critique économique de la croissance, il faut au contraire procéder à une extension du domaine de la croissance et la critiquer comme boussole (économique), comme imaginaire, mais aussi comme régime politique.

Le plus simple est même d’identifier le plus possible ce régime politique avec le libéralisme, c’est-à-dire cette idéologie fondée sur la promotion inconditionnelle de la liberté individuelle. On peut même faire remarquer qu’en passant au néolibéralisme, cette politique est passée d’une défense de la liberté (donc individuelle) à celle de l’individu (donc libre).

Et c’est ainsi que le modèle libéral des interactions humaines est passée de la lutte de chacun contre chacun (les uns contre les autres, le marché concurrentiel, la main invisible…) à une conception de la société comme juxtaposition d’individus égoïstes (les uns sans les autres, la dissociété…).

Il faut lire et relire Ayn Rand (1905-1982) dont le roman La Grève (Atlas Shrugged, 1957) est pour les américains le livre le plus influent après la Bible.

« Croyez-vous qu’il soit toujours juste d’aider un autre homme ? Non, si celui-ci prétend qu’il a droit à votre aide ou que vous avez le devoir moral de l’aider. Oui, si cela correspond à votre désir personnel, au plaisir égoïste que vous trouvez à apporter votre soutien à un homme et à des efforts que vous estimez ».

Faut-il alors s’étonner si la croissance comme croissance de l’agressivité impose son emprise en favorisant un idéal pathologique de celui qui a « réussi sa vie » ?

  • En 2005, quand les psychologues Belinda Board et Katarina Frizon comparent le profil psychiatrique de chefs d’entreprise avec les malades mentaux et les psychopathes de l’hôpital de haute sécurité de Broadmoor (RU), le verdict est terrifiant : les hommes d’affaires présentent des scores plus élevés que les internés de Broadmoor : personnalité histrionique, narcissisme et troubles compulsifs1.
  • Les biographies d’Elon Musk mettent en avant son « déficit d’empathie » : pour lui si la direction d’entreprise ressemble à un jeu vidéo, c’est que, dans les deux cas, le manque d’empathie est un atout.
  • Comment aussi ne pas constater qu’un nouvel ordre géopolitique est en train de s’installer, « multipolaire » et « transactionnel » : et que cette dérive droitière du monde révèle que la vérité du néolibéralisme est l’illibéralisme ?
  • Comment ne pas s’effrayer d’une xénophobie généralisée dont les multiples variantes s’insinuent jusque dans les mouvements politiques qui se prétendent « progressistes » ?

Face à cette croissance de l’agressivité couplée à une dégringolade de l’empathie, la décroissance doit entrer en dissidence, sous le drapeau de l’anti-croissance, en arrêtant de se tirer des mots-obus dans le pied, et en cessant de faire revenir par la fenêtre la croissance que l’on vient de faire sortir par la porte.

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Les notes et références
  1. Kate Pickett & Richard Wilkinson, Pour vivre heureux vivons égaux !, Les Liens qui Libèrent, février 2019, pages 357-360
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20.11.2024 à 17:12

Décroître pour préserver la vie en commun. Paris, le 16 novembre

Michel Lepesant

Réécriture de mon intervention lors de la première étape, parisienne, de la Caravane contre-croissance, le samedi 16 novembre, à l’académie du Climat (Paris). Dans la défense d’un noyau politique que devrait partager tout décroissant, je propose de savoir distinguer entre le fondement (la réponse à la question pourquoi décroître), l’objectif
Texte intégral (4122 mots)

Réécriture de mon intervention lors de la première étape, parisienne, de la Caravane contre-croissance, le samedi 16 novembre, à l’académie du Climat (Paris). Dans la défense d’un noyau politique que devrait partager tout décroissant, je propose de savoir distinguer entre le fondement (la réponse à la question pourquoi décroître), l’objectif (la réponse à la question vers quoi décroître) et le mobile (la réponse à la question comment décroître). Cette première édition de la caravane a donc pour ambition de colporter l’idée que pour renverser le régime de croissance, il faut renverser l’illimitisme, l’individualisme et l’inégalitarisme ; plus positivement il faut assumer de faire un triple éloge, celui des limites, de la vie sociale et la dépense. Cette intervention se place dans l’éloge de la vie sociale.

1. De quoi parlons-nous quand nous parlons de « vie en commun » ?

Idée générale : aller le plus loin possible dans l’extension du domaine de cette « vie en commun ».

Controverse : si nous prenons cette vie en commun comme point de départ alors nous nous opposons explicitement à la thèse libérale selon laquelle le point de départ, ce sont les individus. Cette thèse libérale se décline dans plusieurs domaines : en épistémologie, c’est l’individualisme méthodologique ; en philosophie, c’est le nominalisme…

Thèse : c’est le commun qui est au départ, c’est le commun qui est préalable. C’est par exemple la thèse de Martin Buber (Communauté, 2018, éditions de l’Éclat1) qui ne voit une communauté que comme une association de communautés. Si la décroissance fait l’éloge de la vie sociale, c’est parce qu’elle rejette la « société des individus » (Norbert Elias), qui n’est qu’une « juxtaposition accommodante de l’un à côté de l’autre » (Buber, op. cit.). Nous ne voulons pas « toujours-moins-de-communauté » (id., p.61), mais au contraire nous désirons une humanité qui soit de plus en plus capable de communauté. Nous défendrons ainsi la thèse suivante : que la vie commune doit être préservée parce qu’elle est à la fois un début et un but.

Justification : Pourquoi dire que l’on ne peut pas partir des individus pour constituer une communauté, pourquoi refuser le modèle libéral de l’association par contrat entre individus ? Parce que, quand on procède ainsi, on tombe dans ce qu’Alexis de Tocqueville, dès la première moitié du 19e siècle dénonçait comme « individualisme » quand il le définissait comme ce « sentiment réfléchi et paisible qui dispose chaque citoyen à s’isoler de la masse de ses semblables et à se retirer à l’écart avec sa famille et ses amis ; de telle sorte que, après s’être ainsi créé une petite société à son usage, il abandonne volontiers la grande société à elle-même »2.

Ce qu’anticipe Tocqueville, c’est qu’un processus de démocratisation est une horizontalisation de la vie sociale : le danger c’est que ce processus soit un dispositif de division, de séparation 3 : parce que, quand on pousse à sa limite un tel processus de division, il ne peut s’arrêter que quand on ne peut plus diviser, autrement dit à l’indivisible, à l’in-dividu ; mais jusqu’à quel point accepter qu’un processus de démocratisation aboutisse à une individualisation généralisée si on s’aperçoit que l’individualisation est une dépolitisation4 ? N’y a-t-il pas un paradoxe, sinon une contradiction, à ce que la démocratisation se conclut par une dépolitisation ?

C’est pourquoi si on ne veut pas réduire la vie en commun à la fréquentation de ses proches et de ses semblables alors il faut voir jusqu’où on peut étendre cette conception de la vie en commun :

  • Pour la MCD, le point de départ a été une demande du philosophe François Flahault qui avait demandé, lors de l’utilisation d’un de ses textes pour l’Anthologie du revenu universel, de remplacer l’expression « vie en société » par « vie sociale ».
  • Comment différencier les deux expressions . La « vie en société », c’est la vie des individus dans la société, comme si la société était une totalité séparée des individus qui la composent. La vie sociale, c’est la vie de la société, comprise à la fois comme une réalité propre (« la société existe ») et comme une condition de la vie individuelle qui doit être un objectif.
  • La réalité de la vie sociale est nous dit Flahault une « ambiance », une « atmosphère » (une « résonance » dirait Hartmut Rosa) :

« L' »ambiance », l' »atmosphère » qui règne dans un groupe plus ou moins nombreux constitue un bien commun vécu par les membres de ce groupe. Ce type de bien commun, intangible mais très réel, répond aux mêmes critères que les autres (libre accès et non-rivalité) ; plus un troisième critère : non seulement le fait d’être plusieurs ne diminue pas le bien-être vécu par chacun, mais le fait d’être plusieurs est la condition nécessaire pour que ce bien se produise. »

François Flahault, Où est passé le bien commun ? (2011), 1001 nuits, p.118.

Cette « pluralité » comme 3ème critère permet de ne pas réduire cette vie sociale à la simple interdépendance5.

  • L’idée politique : c’est que pour nous les humains, cette vie sociale comme condition de notre vie humaine est aussi un objectif politique.
    • C’est une condition parce qu’elle est déjà là quand nous naissons ; c’est la magnifique définition fournie par Marcel Mauss et Paul Fauconnet : « Sont sociales toutes les manières d’agir et de penser que l’individu trouvent préétablies […]. Il serait bon qu’un mot spécial désignât ces faits spéciaux, et il semble que le mot institution serait le mieux approprié. Qu’est-ce qu’en effet qu’une institution sinon un ensemble d’actes ou d’idées tout institué que les individus trouvent devant eux et qui s’impose plus ou moins à eux ». Marcel Mauss et Paul Fauconnet, Article « Sociologie » extrait de la Grande Encyclopédie, vol. 30, Société anonyme de la Grande Encyclopédie, Paris, 1901. Cité par Lordon, Vivre sans (page 107).
    • Mais que ce soit un objectif pour nous les humains comme animaux politiques n’interdit pas d’inclure dans la vie en commun toutes les formes de vie sociale : je fais référence là aux travaux du sociologie Bernard Lahire (Les structures fondamentales des sociétés humaines (2023), La découverte) qui montrent, dans le sillage des travaux d’Alain Testart, tout ce que les sociétés humaines doivent à la longue histoire du vivant. Ce qui revient a) à étendre la notion de vie sociale non seulement aux animaux mais à tout le vivant ; b) à condition de ne pas confondre ce qui va résulter d’une évolution sociale ou bien d’une évolution proprement culturelle (altricialité secondaire).
  • Autrement dit, si nous voulons penser la vie commune comme vie sociale la plus étendue possible, nous ne devons pas restreindre, par exemple, la notion d’attachement au seuls humains (Serge Paugam, L’attachement social (2023), Seuil) mais l’étendre au vivant, comme « milieu » pour des « entités » (Charles Stépanoff, Attachements, Enquête sur nos liens au-delà de l’humain (2024), La Découverte).

Si toute vie est vie sociale, vie commune, alors ce que nous avons en commun ce n’est pas tant notre « sociabilité » que notre « vitalité ». Ce qui est commun, ce n’est pas la société, c’est la vie. Mais alors comment échapper aux critiques de notre « compagnon », Onofrio Romano, quand il montre que la défense de « la vie pour la vie » n’est qu’une variante de « la croissance pour la croissance » ? C’est là qu’un éloge de la vie sociale n’est pas suffisant s’il ne s’articule pas avec un éloge des limites et surtout un éloge de la dépense. On peut le voir assez facilement quand on pose la question de la destinée des « surplus » : une fois la « part servile » garantie, la « part maudite » doit être dépensée en commun, sans pour autant toucher à ce que Baptiste Mylondo et moi défendons comme la « part inaliénable » du partage6.

2. Pourquoi faut-il préserver la vie en commun ?

2.1 Pourquoi cette préservation est-elle un objectif désirable ?

Pourquoi la vie sociale mérite-t-elle d’être un objectif politique ?

→ C’est chez Axel Honneth, L’idée du socialisme (2015, NRF), que je trouve un bon argument quand il cherche à retrouver l’intention première du socialisme, par-delà sa version scientifique qui a cédé à un tropisme industrialiste et à un « monisme économique » (p.113). Son objectif est de rendre au socialisme quelque chose de « son ancienne virulence » (p.45) : jusqu’à ce que la société devienne enfin sociale, « au sens plein du terme » (p.140).

Et pour cela, la thèse d’Honneth va consister à adresser un reproche au socialisme originel : celui de n’avoir pas disposé – à cause de sa réduction de toute vie en société à la sphère économique de la production et du travail – d’une conception de la société qui aurait pris acte de « la différenciation fonctionnelle des sociétés modernes » (p.73).

En ne développant – faute de s’affranchir de l’esprit de l’industrialisme » (p.106) – le « modèle fécond de la liberté sociale » (p.105) que dans la sphère de l’agir économique, les socialistes des débuts se sont interdits de pousser leur revendications dans les deux autres sphères, celle des relations personnelles et celle de la formation démocratique de la volonté.

Reste à résoudre un problème éminemment politique : des 3 sphères de l’agir économique, des relations personnelles et de la volonté générale, laquelle doit, prima inter pares, assumer le pilotage de l’articulation entre elles ? C’est dans la réponse à cette difficulté qu’Axel Honneth, me semble-t-il, pourrait être le plus fécond pour la décroissance reconsidérée comme un socialisme de la vie sociale ; mais il frôle plus qu’il ne l’explicite le véritable enjeu de sa propre réponse.

Il confie sans surprise le « pilotage » de la coordination des trois sphères à la sphère de l’agir démocratique « parce qu’elle constitue le seul espace où les dysfonctionnements rencontrés dans tous les recoins de la vie sociale commune peuvent être exprimés d’une manière audible pour tous et donc traités comme une tâche collective » (p.127). Autrement dit, ce n’est que dans la sphère de la formation démocratique de la volonté que l’existence de la vie sociale peut devenir l’objet de la volonté politique. Ce qui dans le vivant s’organise spontanément en raison sa structure interne, doit, dans la vie démocratique « être pris en charge par ses acteurs eux-mêmes » (ibid.). Mais tout cela n’a de sens qu’à condition de reconnaître que toute cette organisation et cette différenciation fonctionnelle de la société n’ont qu’un objectif : « la reproduction de la société » (p.119), « la reproduction permanente de l’unité supérieure constituée par la société globale » (p.121). C’est en cela que la vie sociale est un « bien commun vécu » (François Flahault). S’il n’y a d’existence humaine que sociale, et si la liberté sociale consiste à exercer sa liberté que pour et avec les autres, alors c’est que la vie sociale n’a qu’une finalité : la persévérance dans son existence. Une vie individuelle n’est réussie qu’à condition de vouloir la poursuite de la vie sociale en tant que telle.

Si nous lisons attentivement ce qu’Honneth dit, alors nous comprenons que l’objectif politique est la « reproduction de la société ».

→ Référence ici à la théorie de la reproduction sociale7 (TRS) avec comme précurseuse Françoise d’Eaubonne8. Le socle sur lequel repose la vie sociale n’est pas la sphère économique mais la sphère sociale du soin, celle où on ne fait pas des profits mais où on maintient la société.

→ Ce que David Graeber appelle le « communisme de base », la common decency de George Orwell.

2.1 Pourquoi est-elle aujourd’hui menacée ?

Parce que les logiques d’individuation et de compétition sont en train de saper les logiques de coopération sur lesquelles elles reposent encore ; mais pour combien de temps9 ?

  • Je trouve dans le livre de François Dubet, Sociologie de l’expérience (1994, Seuil), un cadre général pour penser les conduites individuelles des membres d’une société comme la combinaison de 3 rationalités différentes : le sentiment d’appartenance à une communauté, les calculs pour tirer profit d’une situation de concurrence, les exigences d’une authenticité personnelle. Mais, à la différence de François Dubet qui équilibre ces 3 logiques au sein de ce qu’il nomme « expérience sociale », je prétends que l’une des 3 logiques fournit la base aux 2 autres. Ma conviction est factuelle : non seulement, les sociétés « archaïques » ont quasiment été seulement des « communautés » (ce qui signifie une priorité absolue de l’intégration sur la rivalité et la créativité) mais aucune société ne fournit l’exemple de se fonder exclusivement soit sur la concurrence (à moins d’adhérer à la fiction d’une pur marché libre) soit sur l’individualisme le plus radical (à moins d’adhérer à la fable libérale-libertaire parfaitement résumée par M. Tatcher  :  « la société n’existe pas »).
  • Et si je prends l’image d’un arbre – la nature comme racine, la coopération comme tronc et la compétition et la subjectivation comme branches – alors chacun comprend que de la même façon qu’il est absurde de scier la branche sur laquelle on est assis, alors il est tout aussi absurde de saper les racines et de couper le tronc de la vie sociale : or c’est très exactement ce que les logiques d’individuation et de concurrence sont en train de provoquer. Alors même qu’elles ne sont possibles que sur la base de la solidarité, du partage et de la proximité, elles détruisent les conditions même qui les rendent encore possibles.

3. En quoi la décroissance est-elle en capacité de porter cette responsabilité ?

Parce que pour la MCD, la préservation de la vie sociale appartient au noyau commun de la décroissance (fondement, noyau, mobile).

Parce que, pour réaliser cet objectif de préservation, la décroissance doit diriger ses critiques contre la forme horizontaliste du débat public, celle qui neutralise toute critique :

Parce que l’extension du domaine de la vie sociale entraîne une extension du domaine de la critique → l’image de l’iceberg → le régime de croissance.

Comment ? A quel type de stratégie référer la décroissance ?

_____________________
Les notes et références
  1. Pour une recension : https://decroissances.ouvaton.org/2019/10/01/communaute-buber/
  2. A. de Tocqueville, De la démocratie en Amérique (II), Gallimard, 1835, 1961, p.143.
  3. Un exemple contemporain de ce type de danger, c’est la modernisation du racisme qui passe d’un modèle vertical basé sur une hiérarchie entre « races » à une forme horizontale basée sur la différenciations entre « cultures » : au lieu de vouloir imposer à l’Autre la condescendance du Même, la xénophobie se contente de rejeter l’Autre comme Autre ; on passe alors d’une volonté qui nie les différences à l’indifférence du « chacun chez soi », « à chacun sa vérité »…
  4. Caillé, A. (2005) . Démocratie, totalitarisme et parcellitarisme. Revue du MAUSS, no 25(1), 95-126. https://doi.org/10.3917/rdm.025.0095.
  5. Pour une critique de l’abus de cette notion d’interdépendance, on peut lire l’analyse d’Éric Dacheux, compagnon de la MCD, qui préfère « la solidarité démocratique à l’interdépendance systémique » : Éric Dacheux, « Point de vue : Critique de la notion d’interdépendance », Mondes en décroissance [En ligne], 3 | 2024, mis en ligne le 22 juillet 2024, consulté le 15 novembre 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/revue-opcd/index.php?id=452
  6. Voir la conclusion de l’intervention de Baptiste Mylondo lors de cette rencontre : « La décroissance pour mieux partager ».
  7. https://ladecroissance.xyz/2020/07/11/feminisme-pour-les-99-un-manifeste/#La_reproduction_sociale
  8. Michel LEPESANT, « J’ai relu Le féminisme ou la mort, de Françoise d’Eaubonne », Mondes en décroissance [En ligne], 1 | 2023. URL : http://revues-msh.uca.fr/revue-opcd/index.php?id=268
  9. https://decroissances.ouvaton.org/2018/02/14/la-decroissance-doctrine-sociale/
  10. Michel LEPESANT, « Pourquoi une cartographie systémique des trajectoires de décroissance », Mondes en décroissance [En ligne], 2 | 2023, mis en ligne le 25 janvier 2024. URL : http://revues-msh.uca.fr/revue-opcd/index.php?id=344
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