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Christophe MASUTTI
Hospitalier, (H)ac(k)tiviste, libriste, administrateur de Framasoft

STATIUM


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12.05.2016 à 02:00

Parcours VTT. Le Schneeberg

Et voilà que j’inaugure par ce billet une nouvelle section VTT à ce blog. Pour cette fois, c’est au Schneeberg que je vous propose une petite virée sympathique pour 30 km (900m D+) avec une variété de chemins intéressante.

Le départ se fait sur le parking de l’école d’Oberhaslach, derrière la mairie, où l’on peut garer son véhicule. D’emblée, le GR 531 vous tend les bras : empruntez-le jusqu’au Carrefour Anlagen. D’une part cela permet d’éviter d’emprunter un chemin forestier long et laborieux et d’autre part c’est sur un petit chemin façon single que se fera l’essentiel de cette première étape, ni trop technique ni trop fatigante, bref de quoi se mettre en jambe.

C’est au Carrefour Anlagen, que commence vraiment l’ascension de l’essentiel des dénivelés. On rejoint le Col des Pandours pour enchaîner sur le GR 532 jusqu’à rejoindre les chemins forestiers Schlangenweg puis Kohlweg jusqu’au col de l’Eichkopf. Cette partie sur chemins larges est très roulante et mettra votre endurance à l’épreuve : plat, montées, descentes. Une petite remarque : à chaque patte d’oie, prenez toujours le chemin de droite (tout fini par se ressembler au bout d’un moment).

C’est sur l’Eichkopf que commence une belle partie technique jusqu’au Schneeberg. En montant le long de l’Urstein jusqu’au Col du Hoellenwasen on peut s’amuser à essayer de ne jamais poser pied à terre : la montée n’est pas dure, c’est le terrain qui est amusant… par temps sec. En cas d’humidité… il vaudrait mieux prendre un autre chemin. Au Col du Hoellenwasen, on pénètre dans une réserve biologique. Une descente très technique s’amorce dans laquelle il faut faire preuve d’une grande prudence : les racines créent des marches hautes qu’il vaut mieux passer en douceur et en retenant toute l’attention possible. On commence alors à remonter vers le Schneeberg en rejoignant la crête et le GR 53.

Pour la descente du Schneeberg, mon conseil est de ne pas suivre tout à fait les “croix rouges” jusqu’au refuge du Schneeberg. En effet, à deux endroits un portage de vélo sera nécessaire pour franchir les talus entre sentier et chemin forestiers. Je préconise de rester un petit peu sur le GR 53 puis embrayer sur le chemin forestier des Pandours jusqu’au Col du même nom. On rejoint ensuite le Carrefour Anlagen puis je propose d’aller visiter les ruines du château du Hohenstein avant de rejoindre la D 218 et le village d’Oberhaslach (ou bien poursuivre sur le chemin et rejoindre les croix jaunes pour arriver au dessus du parking de l’école).

Caractéristiques du parcours : 30 Km, 945 m D+.

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12.05.2016 à 02:00

Le poids des cartables : de la maltraitance par négligence

Depuis de nombreuses années, le poids des cartables (surtout à l’école et collège) fait l’objet de questionnements, circulaires et préconisations. Il s’agit d’un problème de santé publique grave qui, à ce jour, ne semble pas faire l’objet de la préoccupation qu’il mérite dans la conscience du corps enseignant.

La question est même internationale. Elle a déjà fait l’objet de recommandations et de politiques publiques dores et déjà appliquées dans les pays. On relève cependant que l’American School Health Association a procédé à une comparaison de nombreuses études scientifiques. Ces dernières ne présentent pas de résultats harmonisés. Ainsi le poids maximal du cartable, toutes études confondues, est compris entre 5% et 20% de l’élève. Néanmoins, l’Institut allemand de normalisation (DIN) s’est depuis longtemps prononcé en faveur de 10% du poids de l’élève. Ce pourcentage a été repris officiellement par le Ministère Français de l’Éducation Nationale à l’occasion de la circulaire du Ministre Xavier Darcos en 2008 (cf. plus bas).

En septembre 2016, alors même que mon fils entrait au collège pour la première fois, le poids de son cartable était de 9 kg, soit 30% du poids du porteur ! Au fil des rencontres avec les enseignants, soit lors des réunions de parents d’élèves, soit lors des conseils de classe, je soumettais cette question, recevant une attention unanime de principe mais aucune volonté, de la part du corps enseignant, d’améliorer concrètement la situation. Pire : chaque enseignant, questionné séparément, insiste toujours sur l’importance d’amener chaque jour les livres et les cahiers relatifs à sa matière enseignée, sans prendre en compte les implications évidentes en termes de santé de l’enfant.

Tous les enfants sont concernés par cette question, mais surtout les demi-pensionnaires. Comme je vais le montrer, les solutions sont simples à mettre en œuvre mais changent aussi les pratiques des professeurs. J’affirme par conséquent que le poids du cartable et l’absence de volonté de la part des enseignants d’adapter leurs pratiques à cette question de santé publique, relève de la maltraitance par négligence.

Il y a d’abord le Ministère

Saisi depuis longtemps par les instances représentant les parents d’élèves, le Ministère de l’Éducation Nationale a déjà montré sa préoccupation face au constat d’alerte en santé publique que représente le poids des cartables chez les enfants. Ainsi, la Note Ministérielle du 17 octobre 1995 « poids des cartables » (BO num. 39 du 26 octobre 1995) mentionne :

(…) les membres de la communauté éducative doivent se sentir concernés par ce problème et ont un rôle à jouer, dans ce domaine, chacun en fonction de ses responsabilités.

Les enseignants peuvent veiller à limiter leurs demandes en matière de fournitures scolaires,(…)

une réduction du poids des cartables (qui ne devrait pas dépasser 10 % du poids moyen des élèves) (…)

Les rappels furent nombreux. La question soulevée à de multiples reprises tant au Parlement qu’au Sénat. On trouve en 2008, soit 13 ans plus tard, une circulaire officielle (2008-002 du 11-1-2008) et assez complète, signée du Ministre de l’Éducation Nationale Xavier Darcos, dont l’introduction commence par :

Le poids du cartable est une question de santé publique pour nos enfants : je souhaite que les établissements scolaires s’emparent de cette question, dès à présent, dans le cadre de la prévention du mal de dos en milieu scolaire.

On peut néanmoins regretter qu’en 2016, 21 ans plus tard, à l’occasion de la circulaire Ministérielle relative aux fournitures scolaires (2016-054 du 13-4-2016), il soit tout juste mentionné que « Les cahiers au format 24 x 32 cm jugés trop lourds ne figurent plus sur la liste indicative depuis 2014 », sans autre allusion à l’impact de cette liste déjà très importante sur le poids total du cartable !

En somme, lorsqu’il s’agit de porter haut cette question de santé publique, les élus et les ministres se mobilisent et font des déclarations. Mais lorsqu’il s’agit de gouverner effectivement le corps enseignant, et limiter concrètement le poids du cartable, aucun ordre n’est donné.

Quelles solutions ?

Régulièrement on voit quelques élus locaux plaider pour « les tablettes à l’école », ou mobiliser de l’argent public pour promouvoir des solutions technologiques coûteuses pour des questions essentiellement organisationnelles. Les solutions peuvent être beaucoup simples.

Les livres scolaires

Lors du choix et de l’achat d’une collection de manuels scolaires, nombreux sont les éditeurs qui proposent d’accompagner cet achat par une version électronique utilisable en classe. Ainsi, il est toujours possible, pour l’enseignant, de projeter les pages du manuel.

En classe, il s’agit concrètement d’allumer un ordinateur et un vidéo-projecteur. Si toutes les classes n’en sont pas pourvues, il reste néanmoins que les établissements proposent au moins des solutions équivalentes (comme un ordinateur et un vidéo projecteur portables).

Pour ce qui concerne le poids des livres scolaires, la question peut donc se régler à la fois facilement et pour un coût négligeable (même si, à l’échelle d’une académie, quelques rares établissements sont encore à équiper).

Ne pas opter pour cette solution, alors même que l’équipement suffisant est présent, relève donc de la négligence pure et simple, littéralement « sur le dos » de tous les enfants.

Les cahiers

Même si le fameux cahier aux dimensions 24 x 32 est déconseillé par la circulaire ministérielle, certains enseignants continuent de le réclamer dans la liste des fournitures scolaires. La raison  : il s’agit de pouvoir y coller des feuilles au format A4, c’est-à-dire des supports de cours préparés par l’enseignant mais qui pourraient très bien, moyennant un minimum de cosmétique, passer dans un cahier de format plus petit.

Que dire des enseignants réclamant des classeurs rigides et autant de feuilles de réserve, en plus des cahiers ?

Toujours est-il que l’un principaux facteurs d’alourdissement du cartable repose sur l’utilisation de cahiers, quel que soit leurs formats : en longueur d’année, la plupart de ces cahiers obligent les élèves à transporter autant de feuilles inutilisées dans la journée (et même parfois sur l’année entière). Le cahier, en soi, est un instrument bien encombrant puisqu’il consiste à trimballer des pages qui, par définition, sont inutiles chaque jour : à quoi bon promener les cours du mois dernier ou de la séquence passée ?

Là encore, il existe au moins une solution dont le seul prix à payer réside dans la mobilisation de quelques heures d’apprentissage et une surveillance un peu plus étroite : le parapheur (ou du moins un seul classeur souple et fin muni d’intercalaires). En pratique, il s’agit d’apprendre aux élèves à classer par matière les éléments de cours dans un parapheur général durant la semaine, puis classer l’ensemble à la maison dans des classeurs séparés (ou même un seul gros classeur). On peut aussi imaginer une évaluation spécifique en fin de trimestre où l’élève ramène exceptionnellement son classeur de la maison (pour rappel, ce classeur est même censé peser moins lourd que tous les cahiers confondus transportés chaque jour par l’élève).

Ce type d’apprentissage organisationnel fait partie des apprentissages et compétences demandés à chaque élève au collège. Il n’y a donc aucune contre-indication à ce que cette pratique soit systématique, bien au contraire.

Les autres fournitures

Quant aux autres fournitures demandées par les enseignants, elles sont tantôt nécessaires (comme l’équipement de sport) tantôt exagérées ou même hors de propos. Il en va ainsi des tubes de gouaches demandés à chaque séance d’Art Plastique, des supports de partition (type porte-bloc) jamais utilisés, etc. Les anecdotes ne manquent pas.

Les fausses solutions

Quelques collèges (c’est le cas de celui de mon fils) proposent des casiers. Généralement en nombre modeste, ces casiers sont parfois réservés au élèves de sixième demi-pensionnaires. S’ils permettent effectivement de stocker le casque de vélo et autres affaires non-scolaires, l’usage des casiers est en réalité une fausse solution pour deux raisons :

  • dans une journée de cours, l’élève n’a pas la possibilité d’effectuer de multiples allers-retours d’un bout à l’autre du collège pour récupérer les affaires dont il a besoin,
  • le problème du poids des cartables se pose moins à l’intérieur du collège (où le cartable peut très bien être posé à terre) qu’à l’extérieur sur le chemin du collège, car c’est bien là que les risques associés se déclarent : risque en santé (scolioses, troubles musculo-squelettiques), mais aussi en sécurité (essayez, par exemple, de faire du vélo avec un sac pesant 30% de votre propre poids…).

Quant au partage des manuels entre élèves, l’idée commune que les enseignants suggèrent régulièrement comme s’il s’agissait de la trouvaille du siècle, il ne résout qu’une petite partie du problème et encore, il repose sur l’organisation générale des élèves entre eux, alors même que l’organisation des enseignants entre eux pourrait résoudre beaucoup plus de choses.

De la négligence

Pour conclure, j’insiste sur ce point : si depuis si longtemps le poids des cartables n’a pas baissé et compte-tenu de son impact connu de tous en termes de santé publique, ce n’est pas seulement parce que les pratiques des enseignants ne sont pas adaptées, c’est parce qu’il y a un refus systématique de la part des enseignants de changer leurs propres pratiques au détriment des élèves. C’est une forme de maltraitance avérée. Car en effet comment expliquer que seuls certains établissements parviennent à faire les efforts organisationnels nécessaires alors que la majorité mène une politique de laisser-faire particulièrement condamnable ?

Il est temps de mettre fin à cette maltraitance inadmissible, parfois ignorée des parents car il existe peu de prévention, et pour cause : comment un ministère pourrait-il informer les parents qu’un cartable ne doit pas dépasser 10% du poids de l’élève, alors même que les enseignants encouragent, par leurs pratiques, au transport de sacs de plus de 30% de ce poids ?

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01.02.2016 à 01:00

Windows into the soul

We live in an age saturated with surveillance. Our personal and public lives are increasingly on display for governments, merchants, employers, hackers — and the merely curious — to see. In Windows into the Soul, Gary T. Marx, a central figure in the rapidly expanding field of surveillance studies, argues that surveillance itself is neither good nor bad, but that context and comportment make it so.

In this landmark book, Marx sums up a lifetime of work on issues of surveillance and social control by disentangling and parsing the empirical richness of watching and being watched. Using fictional narratives as well as the findings of social science, Marx draws on decades of studies of covert policing, computer profiling, location and work monitoring, drug testing, caller identification, and much more, Marx gives us a conceptual language to understand the new realities and his work clearly emphasizes the paradoxes, trade-offs, and confusion enveloping the field. Windows into the Soul shows how surveillance can penetrate our social and personal lives in profound, and sometimes harrowing, ways. Ultimately, Marx argues, recognizing complexity and asking the right questions is essential to bringing light and accountability to the darker, more iniquitous corners of our emerging surveillance society.


Marx, Gary T. Windows into the soul: surveillance and society in an age of high technology. University of Chicago Press. 2016.

Lien vers le site de l’éditeur : https://www.press.uchicago.edu/ucp/books/book/chicago/W/bo22228665.html


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09.12.2015 à 01:00

Je n'ai pas voté non plus

Bizarre comme titre, n’est-ce pas ? En fait, c’est en écho à cet article du copain Gee, auteur de Grisebouille, qui a su exprimer de manière assez claire les raisons pour lesquelles il ne vote pas (plus). La démocratie représentative serait-elle morte ? Oui. Nous avons besoin d’un reboot de la démocratie et c’est chez Jean-Jacques Rousseau qu’il faut en trouver l’amorce.

Détournements de votes

Comme disait Coluche : « dire qu’il suffirait que les gens n’en n’achètent plus pour que cela ne se vende pas ». Je n’ai jamais trop aimé Coluche – ou plutôt son humour de bistrot dont se sont emparés la plupart des réacs aigris –, mais au moins il avait le sens de la formule. Il suffirait que plus personne n’aille voter pour que la classe politique actuelle s’en aille pour de bon. Imaginons un instant une grève du vote : tous les vieux dinosaures des partis qu’on voit depuis 40 ans verraient soudainement leur légitimité en prendre un coup. Quant aux plus jeunes, persuadés de faire partie d’une « élite » républicaine (autrement dit, une aristocratie politique), ils pourraient retourner sur les bancs d’école, histoire de bien comprendre qu’on ne s’implique pas dans la politique par carriérisme. Oui, mais voilà : de fait, nous sommes des millions à ne pas aller voter. Et plutôt que de se remettre en cause, les politiques multiplient les interventions en se targuant de vouloir « barrer la route au FN » tout en assurant, comme c’est le cas à chaque élection depuis que je suis né, que « le message a été entendu ».

Mais quel message ? Pourquoi les gens s’abstiennent de voter, et pourquoi certains votent pour un parti fasciste ? Parce que contrairement à ce qu’on m’a toujours dit, le vote n’est pas un choix démocratique. C’est un levier qui légitimise l’exercice du pouvoir par certains. Ainsi, depuis que je vote, je n’ai jamais pu dire que mon vote a servi des causes que je défends :

  • quand il m’a fallu voter Chirac pour « barrer la route à Le Pen », en 2002 ;
  • quand j’ai voté « non » au référendum de 2005 sur le traité européen Rome II (parce que c’est d’une autre Europe dont je rêve), remplacé 4 ans plus tard par son clone, le Traité de Lisbonne, cette fois sans demander l’avis aux citoyens ;
  • quand j’ai voté blanc en 2007 devant les choix consternants qui nous étaient livrés, entre une grande nunuche sans programme et un petit nerveux aux idées brunes ;
  • quand j’ai voté blanc en 2012 en ayant absolument aucune illusion sur les mensonges de F. Hollande.

La démocratie représentative a vécu

Quel est mon constat, au-delà de la simple déception ? le même que Gee : la démocratie représentative a vécu. Et je coupe court tout de suite aux détracteurs qui viendront me dire que « des gens sont morts pour que nous ayons le droit de voter ». Non : ils ne sont pas morts pour le droit de vote, ils sont morts pour avoir le droit de participer à la vie politique. Ils ne sont pas morts pour que j’aie le droit de désigner un représentant qui, fondé de pouvoir, fera ce qu’il veut pendant son mandat. Ils sont morts pour que la démocratie s’exerce.

Oui, ma bonne dame, et c’est pas pareil du tout. Et pourtant on nous l’apprend depuis tout petit. Lorsqu’à l’école on n’est pas content des décisions du délégué de classe, on s’empresse de nous dire de fermer notre gueule. C’est vraiment cela, la démocratie ? Tiens, voyons ce qu’en disait ce bon vieux Jean-Jacques Rousseau, qu’il serait peut-être temps de relire parce que au pays des Lumières, certains n’ont pas le courant à tous les étages :

L’attiédissement de l’amour de la patrie, l’activité de l’intérêt privé, l’immensité des états, les conquêtes, l’abus du gouvernement, ont fait imaginer la voie des députés ou représentants du peuple dans les assemblées de la nation. C’est ce qu’en certain pays on ose appeler le tiers état. Ainsi l’intérêt particulier de deux ordres est mis au premier et second rang; l’intérêt public n’est qu’au troisième.

La souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu’elle peut être aliénée; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point : elle est la même, ou elle est autre; il n’y a point de milieu. Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires; ils ne peuvent rien conclure définitivement. Toute loi que le peuple en personne n’a pas ratifiée est nulle; ce n’est point une loi. Le peuple Anglais pense être libre, il se trompe fort; il ne l’est que durant l’élection des membres du parlement: sitôt qu’ils sont élus, il est esclave, il n’est rien. Dans les courts moments de sa liberté, l’usage qu’il en fait mérite bien qu’il la perde. […]

Quoi qu’il en soit, à l’instant qu’un peuple se donne des représentants, il n’est plus libre; il n’est plus.

— Du contrat social ou Principes du droit politique (1762), Chapitre 3.15 – Des députés ou représentants

Un peu d'explication de texte

Au premier paragraphe Rousseau montre que le principe de représentativité est d’abord une affaire de l’Ancien Régime et son administration. Ce qu’on désigne par « tiers état », ce sont les députés, provinciaux pour la plupart, censés être représentatifs des classes sociales (bougeois, commerçants, artisans, etc.) mais qui valident le modèle hiérarchique des trois ordres (noblesse, clergé, bourgeoisie). Lors de la Révolution française, qui interviendra 27 ans après l’ouvrage de ce visionnaire de Rousseau, le principe de souveraineté du peuple sera remis en cause par Sieyès qui, justement, désignera le tiers état comme un élément de la constitution. Sieyès reprendra l’ancien ordre hiérarchique pour montrer que le tiers état, comme les deux autres ordres, doit être représenté de manière proportionelle à sa population. C’était plutôt bien vu, mais en réalité, la représentatitvité de ce tiers état est tellement diversifiée (cela va du paysan au riche industriel) que c’est la haute bourgeoisie, riche et cultivée, qui finira par s’octroyer cette représentativité, pour s’assurer exactement ce que dénonce Rousseau, à savoir la sauvegarde de leurs intérêts privés, face à une noblesse déclinante et une masse « prolétarienne »1 qu’il faut absolument écarter du pouvoir. Rousseau note bien, sous l’Ancien Régime, que c’est l’intérêt public (comprendre : du peuple) qui est mis au troisième rang parce que justement les représentants du peuple ne sont là que pour limiter les intérêts des deux autres ordres, ainsi confortés dans le pouvoir. La Révolution ne changera finalement la donne qu’au regard des intérêts d’une bourgeoisie de plus en plus riche face à la noblesse déclinante, c’est tout.

Rousseau est catégorique, sans appel. Dans le second paragraphe, il répond même à Montesquieu qui, dans l'Esprit des Lois (Livre XI, 1748) se montrait admiratif de la Constitution Anglaise et écrivait pour sa part :

Comme, dans un état libre, tout homme qui est censé avoir une âme libre doit être gouverné par lui-même, il faudrait que le peuple en corps eût la puissance législative. Mais comme cela est impossible dans les grands états, et est sujet à beaucoup d’inconvénients dans les petits, il faut que le peuple fasse par ses représentants tout ce qu’il ne peut faire par lui-même. (…) Le grand avantage des représentants, c’est qu’ils sont capables de discuter les affaires. Le peuple n’y est point du tout propre; ce qui forme un des grands inconvénients de la démocratie.

Mais ce qui distingue notre Rousseau, c’est justement la conception des rôles. La conclusion de Rousseau est terrible, je la redonne ici, rien que pour le plaisir :

(…) Quoi qu’il en soit, à l’instant qu’un peuple se donne des représentants, il n’est plus libre; il n’est plus.

La démocratie ne s’exerce pas tant parce qu’il est possible de rendre la représentativité plus ou moins légitime (de toute façon une impasse pour Rousseau), mais parce qu’il est possible d’y voir s’exercer la volonté générale et, en tant que telle, elle ne peut se déléguer. Donc oui, le peuple (la société civile, dirait-on aujourd’hui) est capable de gouverner, c’est à dire exercer et instruire la volonté générale, au lieu de laisser faire des représentants qui aliènent cette volonté durant leurs mandats.

Ces mots de Rousseau il y a plus de 250 ans, je les ai entendu lors même de la série de renoncements aux engagements du clan de F. Hollande promulgués lors des élections. Pendant toute la durée du mandat, il allait faloir supporter, impuissants, les féodalités financières dont le point d’orgue fut atteint en insultant le peuple grec qui avait eu le culot, en juillet 2015, de réfuser par référendum les pires tentatives de réformes technocratiques pour remédier à un endettement historiquement organisé contre lui. Pour la plupart des électeurs, le fait d’aller voter n’était plus conçu comme l’exercice de la démocratie mais comme le seul moment de liberté avant de s’enchaîner aux grilles infranchissables qu’une classe politique dresse entre elle et le peuple.

Oui, n’en déplaise à ce pédant de Montesquieu qui pensait que le peuple est trop con pour faire de la politique, et tous les coincés du bocal pour qui la politique serait un métier, la société civile est capable à la fois d’expertise, d’expérience et de gouvernement. C’est la raison pour laquelle, sans doute, on a abruti les foules en étouffant leur activisme civique au profit du vote conçu comme une fin en soi, l’acte unique censé être la preuve d’une démocratie vivante. Rien n’est plus faux. Ce n’est pas parce qu’un peuple organise des élections qu’il est sur le chemin de la démocratie. Certains sont présidents à vie, suivez mon regard y compris dans certains fiefs électoraux de notre France.

D’autres modèles existent déjà

Si l’on regarde honnêtement l’histoire de France, en en particulier de la Cinquième République, les exemples sont nombreux où les moyens de formation du peuple à la démocratie ont été étouffés dans l’oeuf. C’est par exemple toute la tragédie de l’éducation populaire, sujet sur lequel je vous laisse la lecture de l’article de Franck Lepage dans Le Monde Diplomatique, De l’éducation populaire à la domestication par la « culture ».

La société n’est pas avare de modèles dits « alternatifs », en réalité, des expériences bien souvent probantes de modèles d’organisation politique qui démontrent les limites de la représentation. Tous ces modèles ont ceci de commun qu’ils remettent explicitement en cause le fonctionnement actuel, et sont bien plus exigeants en matière de probité et d’équité. Démocratie directe, démocratie participative, auto-gestion des entreprises ou des collectifs, partage de connaissances, collaborations techniques, j’en passe et des meilleures. Dans le milieu associatif où j’évolue à mes heures pas perdues pour tout le monde, les solutions collaboratives ne manquent pas non plus. Prendre des décisions stratégiques à plusieurs milliers, y compris sous la forme de référendums permanents, tout cela est rendu possible dans le concept de démocratie liquide, y compris des bases logicielles (plate-formes web, la plupart du temps). La société peut aujourd’hui être conçue comme un gigantesque processeur, une machine à décision ultra rapide, capable de rassembler toutes les voix, en particulier sur des bases de technologies de communication ouvertes. On se réfèrera sur ce point à cet article de Dominik Schiener (trad. fr. sur le Framablog).

Évidemment, l’aristocratie électoraliste n’est pas prête à accepter une remise en cause radicale de ses prérogatives. Les exemples, parfois tragiques, des Zones à Défendre et du militantisme écologique, sont plus qu’éloquents, à tel point que, profitant des libéralités d’un état d’urgence anti-terrorisme, on en vient à faire taire les voix trop bruyantes en plein sommet mondial pour le Climat.

Mais bien plus que les fausses excuses du terrorisme, ce qui caractérise la classe politique, c’est sa crainte de voir le peuple se débarrasser d’elle. Si la démocratie représentative est un modèle qui ne fonctionne plus, le pouvoir n’a plus qu’une seule échapatoire : la violence d’état, qui oppose la classe politique et le peuple (qui se défini alors en opposition à l’aristocratie). Si l’on considère que la représentativité est la seule légitimation de l’ordre public, alors la seule réponse à toute volonté de changement de système, c’est d’imposer un vieux modèle contre un nouveau. C’est selon moi tout le principe des lois scélérates votées récemment (comme la Loi relative au Renseignement…) et dont on voit s’accélérer les tendances, tout spécialement à l’encontre des moyens de communication qui permettent aux citoyens de se faire entendre, d’organiser et planifier l’alternance démocratique.

Après ces dénis de démocratie, les leçons sur le droit de vote sont plus que jamais malvenues. Alors, oui, voilà pourquoi je n’irai pas voter non plus dimanche prochain, et pourquoi je m’emploierai à ma mesure, à l’avènement de solutions vraiment démocratiques.


  1. Oui, ici je fais un anachronisme en utilisant ce terme, mais on comprend bien que la paysannerie était exclue de fait, alors même qu’elle représentait alors la grande majorité du peuple. Plus tard, avec la révolution industrielle, ce furent justement les prolétaires qui furent exclus, la voix du peuple étant largement confisquée par les classes bourgeoises capitalistes. Et oui, là, j’ai une lecture marxiste, mais elle en vaut bien une autre. ↩︎

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27.11.2015 à 01:00

Sortie trail au Taennchel

C’est déjà vendredi et demain c’est reparti pour un autre tour de trail dans la brume fraîche et humide des Vosges alsaciennes. Il me fallait néanmoins témoigner de ce parcours au Taennchel effectué récemment car il présente de nombreux avantages techniques.

Au dessus de Ribeauvillé, surveillé par ses trois châteaux, on voit poindre le massif du Taennchel, un endroit magnifique avec des rochers aux étranges formes : Rocher des Titans, Rocher des Géants, Rocher des Reptiles… Si l’on sait se laisser bercer par l’atmosphère des lieux, on ne revient pas effrontément d’une visite au Taennchel. La particularité géomorphologique du massif est de présenter une longue crête d’environ 6 kilomètres de la forme d’un « U » entourant le hameau de la Grande Verrerie. Sous la partie Est du massif, on peut aussi admirer le village de Thannenkirsch et, au delà et en face, le château du Haut Koenigsbourg. Quelle que soit la face par laquelle vous abordez ce massif, il faudra compter sur un dénivelé important en peu de kilomètres, ce qui permet d’avoir quelques perspectives intéressantes en matière de technique de montée et de descente sur des sentiers aux morphologies très différentes. Ce massif est d’ailleurs le terrain de jeu de l'Association Sportive Ribeauvillé Athléroute qui organise annuellement les Courses du Taennchel, dont un trail court.

Avec les collègues de l'ASCPA, la sortie du samedi matin nous a conduit en cette contrée. En partant de Ribeauvillé (on peut se garer au niveau du lyçée au nord de la ville), le parcours fait environ 20 km. Il commence et se termine par la montée / descente vers les châteaux St Ulrich et Ribeaupierre (310 m D+). Lors du retour, cette descente est très rocheuse par endroits, presque alpine. La plus grande prudence est de mise surtout avec la fatigue d’une fin de parcours et en particulier sur sol humide. Cependant, c’est un excellent entraînement à renouveler par exemple plusieurs fois sur une boucle plus courte.

Après le sentier des châteaux et un replat aux pieds du Taennchel sur chemin large, c’est vers la Grande Verrerie que l’on se dirige par un sentier en descente régulière et pierreux par endroits, pour remonter en face vers la crête du Taennchel en passant par le Schelmenkopf (380 m D+). C’est le second « coup de cul » à sérieux à supporter sur ce parcours : tout le reste de la crête du Taennchel alterne entre faux plat montant et descendant, ce qui laisse largement le temps d’admirer les lieux (lorsque la météo s’y prête). Une fois dépassé le Rocher des Géants, une longue descente sur sentier régulier s’amorçe jusqu’à l’Abri du Taennchel. Rien de spécialement technique mais attention toutefois aux animaux sauvages : un chevreuil a carrément faille me renverser en passant à 1 m de moi (tous deux lancés en pleine course) ! Magnifique souvenir mais très impressionnant sur le moment.

Les photographies çi-dessous montreront qu’en choisissant ce parcours en plein mois de novembre, ce n’est pas forcément la meilleure saison pour faire un trail touristique. Disons que nous ne nous sommes pas trop attardés à des endroits qui nous auraient incités à ralentir le rythme avec une météo plus clémente.

Comme d’habitude, ci-dessous, voici la trace du parcours :

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Taennchel 1 Taennchel 2 Taennchel 3

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18.11.2015 à 01:00

Alimenter mon dépôt Gitlab

Framasoft a ouvert un service Gitlab très facile d’utilisation. Pour qui ne serait pas encore à l’aise avec Git, voici un petit tutoriel rapide pour alimenter son propre dépôt.

Créer un nouveau dépôt

Un fois son compte créé et configuré (tout se fait en ligne), on peut créer un nouveau dépôt. Ce dernier doit être alimenté en premier par un fichier readme.md c’est à dire un fichier écrit en Markdown. Il est censé décrire le projet, et communiquer régulièrement les principaux changements.

On peut préparer ce fichier readme.md localement en prévision des premières manipulations (ci-dessous).

Générer sa clé SSH

Toutes les connexions sur votre compte Gitlab se feront de préférence de manière chiffrée et authentifiée avec une clé SSH. L’idée est simple : il faut générer une clé SSH, la stocker localement et la recopier dans les paramètres SSH de son compte Gitlab. On peut ajouter autant de clé SSH que l’on souhaite.

Pour générer et stocker une clé SSH

Entrer la commande suivante :

ssh-keygen -t rsa -C "xxxxxxxx"

(remplacer xxxxxxxx par son adresse courriel renseignée dans Gitlab)

La création d’un mot de passe n’est pas obligatoire, mais elle est préférable en tant que sécurité supplémentaire.

Une fois la clé créée, il faut la placer dans son dossier ~\.ssh et la recopier sur son compte Gitlab.

Installer et configurer Git

Après avoir installé Git (sudo apt-get install git), il faut le configurer comme suit :

git config --global user.name "nomutilisateur"
git config --global user.email "adressecourriel"

Premier dépôt

Une fois le dépôt créé via l’interface de Gitlab, on peut travailler localement.

Commencer par cloner le dépôt en local :

git clone git@git.framasoft.org:nomutilisateur/nomdudepot.git

Se rendre dans le dossier du dépôt :

cd nomdudepot

Coller dans ce dossier le readme préparé auparavant (cf. ci-dessus).

Puis ajouter ce fichier dans la file des fichiers que nous allons remonter dans le dépôt :

git add README.md

Annoncer un commit en écrivant un message explicatif :

git commit -m "ajout du fichier readme"

Pousser le tout sur le dépôt :

git push -u origin master

Précéder de la même manière pour tous les autres fichiers. Si l’on souhaite ajouter d’un coup plusieurs fichiers on peut écrire git add fichier1 fichier2 fichier3 etc.

Évidemment il ne s’agit ici que de remonter dans la file principale du projet.

Problème en https

Si l’on veut pousser des gros fichiers en https, on peut tomber sur une erreur de type

error: RPC failed; result=22, HTTP code = 411
fatal: The remote end hung up unexpectedly

C’est en fait parce que la configuration par défaut de Git en http limite à 1Mo la taille maximale des fichiers qu’on peut pousser. Il faut donc configurer Git pour accepter une taille plus importante en entrant une commande idoine :

git config http.postBuffer nombredebytes

où nombredebytes est la taille maximale des fichiers qu’on veut envoyer.

On peut configurer Git de manière globale, ainsi :

git config --global http.postBuffer 524288000
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