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Thomas Piketty
Chercheur en sciences sociales

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13.05.2025 à 07:19

La France doit 30 milliards d’euros à Haïti

piketty

Texte intégral (1986 mots)
Il y a deux siècles, en 1825, l’Etat français imposait à Haïti un tribut afin de compenser les propriétaires d’esclaves pour leur perte de propriété. Cette dette, que le frêle Etat haïtien a du péniblement rembourser jusqu’aux années 1950, a lourdement handicapé le développement du pays, qui est aujourd’hui l’un des plus pauvres du monde. Tous les régimes qu’a connu la France au cours de cette période – monarchies, empire, républiques – ont continué de percevoir ces sommes, versées en toute bonne conscience à la Caisse des dépôts. Tous ces faits sont bien documentés et ne sont contestés par personne.
 
Disons-le d’emblée: la France doit environ 30 milliards d’euros à Haïti et devrait dès maintenant lancer des discussions sur les modalités de restitution. L’idée selon laquelle la France n’aurait pas les moyens d’un tel paiement ne tient pas. La somme est importante pour Haïti mais représente moins de 1% de la dette publique française (3 300 milliards) et à peine 0,2% des patrimoines privés (15 000 milliards): on est dans l’épaisseur du trait. Si l’on craint que l’argent soit mal utilisé, alors on peut imaginer qu’il soit placé dans des fonds dédiés réservés à des infrastructures d’éducation et de santé indispensables, comme le proposent explicitement depuis 2014 les pays de la Communauté des Caraïbes (CARICOM). Cette proposition a été approfondie dans un remarquable rapport publié en 2023 par le « Centre for Reparation Research »  de l’université de Kingston (Jamaïque) et l’Association américaine de droit international. Coordonné par Patrick Robinson, ancien président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et juge jamaïcain à la Cour international de justice, ce rapport va au-delà du cas haïtien et constitue sans doute le document le plus important publié à ce jour sur la question des réparations post-esclavagistes. Ses conclusions chiffrées sont désormais reprises officiellement par la Communauté des Caraïbes et l’Union africaine. Le fait même qu’elles aient été si peu débattues dans les pays occidentaux témoigne des inquiétantes déconnexions Nord-Sud qui caractérisent notre époque.
 
En ces temps troubles où le trumpisme tente de ressusciter l’idéologie extractiviste coloniale la plus brutale, la France gagnerait à entamer une démarche inverse, en montrant qu’elle est capable d’assumer et de corriger les injustices du passé, en commençant avec le cas spécifique mais hautement symbolique d’Haïti. Au 18e siècle, Saint-Domingue est la perle des colonies françaises, la plus profitable d’entre toutes, grâce à ses productions de sucre, de café et de coton. Les esclaves transportés d’Afrique représentent 90% de la population de l’île et atteignent un demi-million de personnes à la veille de 1789. Il s’agit de la plus forte concentration d’esclaves de l’espace atlantique de l’époque. Les esclaves se révoltent et prennent le contrôle de l’île en 1791-1792. Sous leur pression, la Convention abolit l’esclavage en 1794.
 
Les propriétaires se mobilisent et obtiennent dès 1802 son rétablissement dans les autres îles esclavagistes françaises (Martinique, Guadeloupe, Réunion, où l’esclavage se prolongera jusqu’en 1848). Mais malgré plusieurs tentatives, la France ne parvient pas à reprendre le contrôle de Saint-Domingue, qui proclame son indépendance en 1804 sous le nom d’Haïti.
 
L’Etat français finit par reconnaître Haïti en 1825, mais uniquement en imposant le fameux tribut de 125 millions de francs-or. Pour Haïti, la somme représente environ 300% de son revenu national, trois années de production. Il est impossible de la payer en une seule fois. Un consortium de banquiers français avance la somme, avec intérêts. C’est cette dette qu’Haïti va trainer comme un boulet jusqu’en 1950. En 1904, les autorités de la IIIe République refusent d’aller aux cérémonies du centenaire de l’indépendance afin de protester contre les retards de paiement. En 2004, dans un contexte très différent, Jacques Chirac renonce à se rendre au bicentenaire, car il craint les demandes de restitution. Que fera-t-on en 2104 ?
 
Pour transcrire le tribut de 1825 en montant de 2025, le plus transparent est d’appliquer la même proportion du revenu national haïtien actuel, ce qui conduit à une somme minimale de l’ordre de 30 milliards d’euros, compte tenu des remises de dette. Si l’on indexait la somme initiale non pas sur la croissance nominale de l’économie mais sur le rendement moyen du capital, on obtiendrait un montant 5 ou 10 fois plus élevé. L’indexation minimaliste proposée ici est proche de celle retenue dans le rapport Robinson de 2023. Ce dernier aboutit toutefois à des sommes totales autrement plus importantes (plusieurs milliers de milliards de dollars de réparations post-esclavagistes dans le cas français, et environ cent mille milliards à l’échelle mondiale, soit environ une année de PIB mondial), car il inclut non seulement le tribut de 1825 mais aussi et surtout une estimation de tous les salaires non versés aux esclaves sous l’esclavage, ainsi qu’une évaluation des maltraitances subies (pour un montant comparable aux salaires). L’approche se défend et a le mérite d’être très clairement expliquée dans le rapport.
 
On peut aussi considérer que l’on ne pourra pas tout régler avec des réparations explicites, et qu’il faut inscrire cette discussion dans un débat plus général sur la réforme du système économique et financier international et des défis sociaux et climatiques du 21e siècle, ce qui est également l’esprit du rapport Robinson. Le cas haïtien justifie à mon sens une restitution directe, dans la mesure où il met en jeu des versements interétatiques bien documentés. A un niveau plus général, mieux vaut sans doute privilégier une approche en termes de justice universaliste et prospective, ce qui de facto aboutira à des sommes au moins aussi élevées que dans la perspective de justice réparatrice. Ce qui est certain, c’est que les pays occidentaux ne pourront éternellement éviter ces débats, sauf à se couper durablement du reste du monde.           
 

 

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13.05.2025 à 07:16

France owes 30 billion € to Haïti

piketty

Texte intégral (1664 mots)
Two centuries ago, in 1825, the French state imposed a tribute on Haiti to compensate slave owners for their loss of property. This debt, which the fragile Haitian state had to struggle to repay until the 1950s, heavily crippled the country’s development, and it is, today, one of the poorest in the world. All the regimes France has experienced during this period – monarchies, empires and republics – continued to collect these sums, which were paid to the Caisse des Dépôts bank in due form. All of these facts are well-documented and are contested by no one.
 
Let’s state it outright: France owes approximately €30 billion to Haiti, and should immediately start restitution talks. The notion that France cannot afford such a payment does not hold up. While the sum is significant, it represents less than 1% of France’s public debt (€3.3 trillion) and barely 0.2% of private wealth (€15 trillion): It’s like a drop in the ocean.
 
If people are worried that the money might be misused, it could be placed in dedicated funds, earmarked for essential education and health infrastructure, as the Caribbean Community (CARICOM) countries have been explicitly proposing since 2014. This proposal was further explored in a remarkable 2023 report, published by the Centre for Reparation Research at the University of the West Indies (Kingston, Jamaica) and the American Society of International Law. Coordinated by Patrick Robinson, the Jamaican former president of the International Criminal Tribunal for the Former Yugoslavia (ICTY) and an ex-judge of the International Court of Justice, the report looks beyond the Haitian case only, and is likely the most important document published on post-slavery reparations to date. Its conclusions, backed by figures, have since been officially endorsed by the Caribbean Community and the African Union. The very fact that they have been so little debated in Western countries reflects the alarming North-South disconnections that characterize our era.
 
In these turbulent times, in which Trumpism is attempting to resurrect the most brutal strains of colonial extractivist ideology, France would benefit from adopting an opposite approach, by demonstrating its ability to acknowledge and correct past injustices, starting with the specific but highly symbolic case of Haiti.
 
In the 18th century, Haiti, then known as Saint-Domingue, was the crown jewel of French colonies, the most profitable of them all, thanks to its sugar, coffee and cotton production. Slaves transported from Africa accounted for 90% of the island’s population, which reached half a million people before 1789. This represented the highest concentration of slaves in the Atlantic area at the time. They revolted and took control of the island in 1791-1792. Under pressure from this uprising, France’s Convention regime abolished slavery in 1794.
 
Slave owners mobilized and quickly secured the reinstatement of slavery in other French slaveholding islands (such as Martinique, Guadeloupe and Reunion Island, where slavery continued until 1848). However, despite several attempts, France could not take back control of Saint-Domingue, which declared its independence in 1804, under the name of Haiti.
 
The French state eventually recognized the country in 1825, but only through imposing the infamous tribute of 125 million gold francs. For Haiti, the sum represented about 300% of its national yearly income, three years of production. It was impossible to pay it all at once. A consortium of French bankers advanced the sum, with interest. This is the debt that Haiti dragged around, like a ball and chain, until the 1950s. In 1904, the authorities of France’s Third Republic refused to attend Haiti’s ceremonies for the centenary of its independence, to protest against debt payment delays. In 2004, in a very different context, then-president Jacques Chirac decided not to attend the bicentenary, as he feared restitution demands. What will we do in 2104?
 
To translate the 1825 tribute into an amount for 2025, the most transparent approach is to apply the same proportion to Haiti’s current national income, leading to a minimum sum of around €30 billion, taking debt reductions into account. If the initial amount were indexed not on nominal economic growth but on the average return on capital, the amount would be five or 10 times higher! The minimalist indexation proposed here is similar to the one used in the 2023 Robinson report.
 
However, the report concludes with much larger total sums (several trillion dollars in post-slavery reparations for France, and about $100 trillion on a global level, about one year of global GDP), because it not only includes the 1825 tribute but also an estimation of all wages not paid to slave workers under slavery, as well as an evaluation of the mistreatment suffered (an amount comparable to the total wages). This approach is defensible and is very clearly explained in the report.
 
We can also consider that not everything can be resolved with explicit reparations, and that this discussion must be framed within a more general debate on reforming the international economic and financial system and addressing the 21st century’s social and climatic challenges, which is also the spirit behind the Robinson report. The Haitian case, in my view, justifies direct restitution, insofar as it involves well-documented inter-state payments. On a more general level, it is probably better to prioritize a universal and forward-looking approach to justice, which would lead to sums that are at least as large as those that would be paid from the perspective of restorative justice. What is certain is that Western countries cannot indefinitely avoid these debates, except by permanently isolating themselves from the rest of the world.
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09.05.2025 à 15:53

We call on the European Union to endorse a confederation of the states of Israel and Palestine in one homeland

piketty

Texte intégral (1709 mots)

Condemning atrocities or expressing abstract support for a ‘two-state solution’ is no longer sufficient, argues an international group of 121 academics and intellectuals. This call was published in Le Monde on April 29 2025.

The European Union must urgently support a political shift toward a just and equal future for Palestinians and Israelis through a confederation of two sovereign states. Rooted in the principles of A Land for All, this confederation – under the principle of two states in one homeland – is based on full political equality, mutual recognition, freedom of movement, shared Jerusalem, and a return mechanism for refugees through cooperation – not separation.

As the war devastates the lives of Palestinians and Israelis, and as Jewish and Palestinian communities around the world reel from pain, fear, and grief, we believe Europe must act with courage and clarity. A Land for All is a political movement that includes Palestinians and Israelis from across the homeland.

The ongoing cycle of war, occupation, and displacement has reached a political and moral breaking point. The continued support – whether implicit or explicit – of the international community for the status quo has allowed deepening violence, impunity, and authoritarianism to flourish. It is no longer enough to condemn atrocities or express support for a « two-state solution » in the abstract. What is needed is concrete backing for a new political horizon: one rooted in justice, dignity, and the shared humanity of both peoples.

The confederation model – two states in one homeland – offers this horizon. It is a practical, deeply considered framework created by Palestinians and Israelis working together, grounded in international law and present-day realities. Based on our commitment to international law and recognition of the realities on the ground, we offer a pragmatic path forward: Both peoples feel a deep connection to the land – and that will not change. This connection must be acknowledged, and any political process must begin from the current reality, not from the diplomatic frameworks of 30 years ago, at the time of the Oslo Accords.

This model addresses the longstanding deadlocks – water, settlements, refugees, and Jerusalem – not by postponing them, but by offering pragmatic, cooperative solutions from day one. It is grounded in the reality of intertwined lives and deep interdependence between Palestinians and Israelis – in the economy, climate, natural resources, Jerusalem, and the homeland itself. Even security and regional integration depend on mutual cooperation rather than control. A Land for All provides a realistic, future-oriented framework that responds to these shared challenges and connections.

We wish to affirm and strengthen what has already been said: the connection between defending the system of international laws and human rights and defending the rights of Palestinians to liberty and self-determination, which the international community has long failed to guarantee. There can be no true international stability without rights for Palestinians; this vacuum undermines the entire international system.

It is the duty of the EU – historically, politically and morally – to lead in supporting this shift. Europe has experienced the devastation of nationalist conflict and the power of integration. The EU was built on the promise that shared sovereignty and cooperation can replace war. That lesson must now be applied beyond its borders, especially in a region where Europe has long played a decisive role.

A confederation is the only realistic foundation for long-term security, economic development, welfare, and environmental sustainability for both Israelis and Palestinians. It can prevent further cycles of dehumanization and ensure that both peoples can live in dignity and peace. Continuing to support governments that prioritize expansion, occupation, and control over life and equality is a betrayal of Europe’s foundational values.

We call on the European Union to take a principled and courageous stand for peace, justice, and equality in the shared homeland of both Israelis and Palestinians. This means publicly endorsing the confederation model as a viable, just, and visionary alternative to the crumbling status quo. It means recognizing the State of Palestine not as a symbolic gesture, but as a transformative step toward ending the occupation and enabling equal sovereignty. It means using Europe’s economic and diplomatic influence to take immediate and drastic measures to stop the war and annexation, and incentivize concrete steps toward equality, including support for bi-national cooperation. It means providing robust support to grassroots and civil society initiatives that promote peace, democratic resistance, shared governance, mutual recognition, and the hard work of transitional justice.

This is not a time for silence or ambiguity. The EU must take a stand for peace over domination, for equality over oppression, for a future shared by both peoples and rooted in justice. The era of neutrality is over. The moment for European leadership is now!

First signatories: Annie Ernaux, writer and Nobel Prize in Literature in 2022; Sari Hanafi, professor of sociology at the American University of Beirut; François Héran, professor at the Collège de France; Cécile Laborde, professor of political theory at the University of Oxford; Chibli Mallat, lawyer and professor emeritus of law at the University of Utah; Florian Meinel, professor of constitutional law at the University of Göttingen; Samuel Moyn, professor of law and history at Yale University; Thomas Piketty, professor of economy at the Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales and Paris School of Economics and professor at the Paris School of Economics; Kenneth Pomeranz, professor of history at the University of Chicago; Julie Ringelheim, professor of law at the University of Louvain; Gisèle Sapiro, professor of sociology at the Ecole des Hautes Etudes en Science Sociales and National Center for Scientific Research (CNRS); Svetlana Slapsak, professor of anthropology of ancient worlds; Abram de Swaan, professor emeritus of social sciences at the University of Amsterdam; Olga Tokarczuk, writer and Nobel Prize in Literature in 2018; Dag Tuastad, professor in Middle Eastern studies at the University of Oslo.

This declaration can be signed here:

https://www.2s1hdeclaration.com/

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09.05.2025 à 15:48

Nous appelons l’Union européenne à soutenir le modèle d’une confédération des Etats d’Israël et de Palestine au sein d’un seul et même pays

piketty

Texte intégral (2254 mots)

Condamner les atrocités ou exprimer un soutien abstrait à une « solution à deux Etats » n’est plus suffisant, estime un collectif international de 121 universitaires et intellectuels. Cet appel a été publié dans Le Monde le 29 avril 2025.

L’Union européenne (UE) doit soutenir de toute urgence un changement politique en faveur d’un avenir juste et équitable pour les Palestiniens et les Israéliens, par le biais d’une confédération de deux Etats souverains. Basée sur le principe de deux Etats dans un seul pays confédéré, suivant la proposition du mouvement A Land for All, cette confédération sera fondée sur la pleine égalité politique, la reconnaissance mutuelle, la liberté de mouvement, le partage de Jérusalem et un dispositif de retour pour les réfugiés par la coopération entre les deux Etats – et non par la séparation.

Alors que la guerre dévaste la vie des Palestiniens et des Israéliens, et que les juifs et les Palestiniens du monde entier sont en proie à la douleur, à la peur et au deuil, nous pensons que l’Europe doit agir avec courage et clarté. A Land for All est un mouvement politique qui regroupe des Palestiniens et des Israéliens de tout le territoire.

Le cycle actuel de la guerre, de l’occupation et du déplacement a atteint un point de rupture politique et moral. Le soutien continu – implicite ou explicite – de la communauté internationale au statu quo a permis l’aggravation de la violence, de l’impunité et de l’autoritarisme. Condamner les atrocités ou exprimer un soutien abstrait à une « solution à deux Etats » n’est plus suffisant. Ce qu’il faut, c’est un soutien concret à un nouvel horizon politique : un horizon ancré dans la justice, la dignité et l’humanité partagée des deux peuples.
Interdépendance profonde

Le modèle de la confédération – deux Etats dans un seul pays confédéré – propose cet horizon. Il s’agit d’un cadre pratique, mûrement réfléchi, créé par des Palestiniens et des Israéliens travaillant ensemble, fondé sur le droit international et les réalités actuelles.

Sur la base de notre attachement au droit international et de la reconnaissance des réalités de terrain, nous proposons une voie pragmatique : les deux peuples ressentent un lien profond à cette terre – et cela ne changera pas. Ce lien doit être reconnu et tout processus politique doit partir de la réalité actuelle, et non des cadres diplomatiques d’il y a trente ans, tels qu’ils existaient au moment des accords d’Oslo.
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Ce modèle s’attaque aux impasses de longue date – l’eau, les colonies, les réfugiés et Jérusalem – non pas en les remettant à plus tard, mais en proposant des solutions pragmatiques et coopératives dès le premier jour. Il est fondé sur la réalité des vies entremêlées et de l’interdépendance profonde entre Palestiniens et Israéliens – dans la vie économique, l’environnement, l’accès aux ressources naturelles, Jérusalem et le territoire lui-même. La sécurité et l’intégration régionale dépendent elles aussi de la coopération mutuelle, plus que du contrôle. A Land for All offre un cadre réaliste,

Il est essentiel d’affirmer et de renforcer ce qui a déjà été dit : le lien entre, d’un côté, le respect du droit international et des droits humains, de l’autre, la défense du droit des Palestiniens à la liberté et à l’autodétermination, que la communauté internationale a trop longtemps manqué de garantir. Il ne peut y avoir de véritable stabilité internationale sans droits pour les Palestiniens. Ce vide sape l’ensemble du système international.

Il est du devoir de l’UE – historiquement, politiquement et moralement – de prendre l’initiative de soutenir ce changement. L’Europe a fait l’expérience des ravages produits par les conflits nationalistes et du pouvoir de l’intégration. L’UE s’est construite sur la promesse que le partage de la souveraineté et la coopération peuvent remplacer la guerre. Cette leçon doit maintenant être appliquée au-delà de ses frontières, en particulier dans une région où l’Europe a longtemps joué un rôle décisif.

Une confédération est la seule base réaliste en vue de la sécurité à long terme, du développement économique, du bien-être et de la durabilité environnementale, tant pour les Israéliens que pour les Palestiniens. Elle peut empêcher de nouveaux cycles de déshumanisation et garantir que les deux peuples puissent vivre dans la dignité et la paix. Continuer à soutenir des gouvernements qui privilégient l’expansion, l’occupation et le contrôle au détriment de la vie et de l’égalité est une trahison des valeurs fondamentales de l’Europe.

Nous appelons l’UE à adopter une position de principe courageuse en faveur de la paix, de la justice et de l’égalité dans le pays commun des Israéliens et des Palestiniens.

Cela signifie soutenir publiquement le modèle de confédération comme une alternative viable, juste et visionnaire au statu quo en voie d’effondrement. Cela signifie reconnaître l’Etat de la Palestine non pas comme un geste symbolique, mais comme une étape transformatrice vers la fin de l’occupation et la mise en place d’une égale souveraineté. Cela signifie user de l’influence économique et diplomatique de l’Europe pour prendre des mesures immédiates et drastiques afin de mettre fin à la guerre et à l’annexion, et encourager des dispositifs concrets en faveur de l’égalité, y compris le soutien à la coopération binationale. Cela signifie apporter un soutien solide aux initiatives « d’en bas » et de la société civile qui promeuvent la paix, la résistance démocratique, la gouvernance partagée, la reconnaissance mutuelle et le difficile travail de la justice transitionnelle.

L’heure n’est pas au silence ou à l’ambiguïté. L’UE doit prendre position pour la paix plutôt que pour la domination, pour l’égalité plutôt que pour l’oppression, pour un avenir partagé par les deux peuples et ancré dans la justice. L’ère de la neutralité est révolue. Le moment est venu pour l’Europe d’assumer un rôle moteur.

Premiers signataires : Annie Ernaux, écrivaine et Prix Nobel de littérature en 2022 ; Sari Hanafi, professeur de sociologie à l’université américaine de Beyrouth ; François Héran, professeur au Collège de France ; Cécile Laborde, professeure de théorie politique à l’université d’Oxford (Royaume-Uni) ; Chibli Mallat, avocat et professeur émérite de droit à l’université d’Utah ; Florian Meinel, professeur de droit constitutionnel à l’université de Göttingen (Allemagne) ; Samuel Moyn, professeur de droit et d’histoire à l’université Yale (Connecticut) ; Thomas Piketty, directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) et professeur à l’Ecole d’économie de Paris ; Kenneth Pomeranz, professeur d’histoire à l’université de Chicago (Illinois) ; Julie Ringelheim, professeure de droit à l’université de Louvain (Belgique) ; Gisèle Sapiro, directrice d’études à l’EHESS et directrice de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; Svetlana Slapsak, professeure d’anthropologie des mondes anciens ; Abram de Swaan, professeur émérite de sciences sociales de l’université d’Amsterdam ; Olga Tokarczuk, écrivaine et Prix Nobel de littérature en 2018 ; Dag Tuastad, professeur en études du Moyen-Orient à l’université d’Oslo.

Chacun peut signer cette déclaration ici: 

https://www.2s1hdeclaration.com/

 

 

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