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Humans Right Watch enquête sur les violations des droits humains commises à travers le monde

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30.07.2025 à 05:00

Cameroun : Le principal candidat de l'opposition exclu de l’élection présidentielle

Human Rights Watch

Click to expand Image Le homme politique camerounais Maurice Kamto, nouvellement désigné comme candidat à la présidentielle du Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (MANIDEM), s'exprime lors d'une conférence de presse à Yaoundé, le 19 juillet 2025. © 2025 AFP via Getty Images

(Nairobi) – La décision prise par le Conseil électoral camerounais d'exclure Maurice Kamto, leader clé de l'opposition politique et adversaire de l’actuel président, Paul Biya, de l’élection présidentielle à venir soulève des inquiétudes quant à la crédibilité du processus électoral, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch.

Le 26 juillet, le Conseil électoral du Cameroun (Elections Cameroon, ELECAM) a approuvé 13 des 83 candidats potentiels, dont Paul Biya, âgé de 92 ans et à la tête du pays depuis 1982. L’élection est prévue pour le 12 octobre. Les candidats exclus disposaient de 72 heures pour faire appel de cette décision auprès du Conseil constitutionnel.

«  Le Conseil électoral du Cameroun a semé le doute sur l'élection avant même que les votants n'aient exprimé leur choix », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior au sein de la division Afrique à Human Rights Watch. « Exclure l'opposant le plus populaire du processus électoral jettera une ombre sur les résultats qui seront finalement annoncés. »

La décision d'exclure Maurice Kamto de la course à la présidence reflète l'intolérance de longue date du gouvernement à l'égard de toute opposition et de la dissidence, et intervient dans un contexte de répression accrue des opposants, des activistes et des avocats depuis le milieu de l'année 2024, alors que l’élection prévue plus tard cette année approche.

Le Conseil électoral a justifié sa décision d'exclure Maurice Kamto en expliquant que son parti, le Mouvement africain pour la nouvelle indépendance et la démocratie (MANIDEM), soutenait également un autre candidat, Dieudonné Yebga.

Cependant, les avocats de Maurice Kamto et d'Anicet Ekane, le président du MANIDEM, ont déclaré que ce parti ne soutenait pas Dieudonné Yebga, et que la décision du Conseil était arbitraire et motivée par des considérations politiques. Le parti a tenté d'organiser une conférence de presse à son siège à Douala, la plus grande ville du Cameroun, mais les forces de sécurité l’en ont empêché.

Maurice Kamto, qui était auparavant le chef du parti d'opposition Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC) et qui avait concouru contre Paul Biya lors des élections de 2018, a cherché à se présenter comme candidat du MANIDEM à l’élection prévue cette année, car le code électoral camerounais interdit aux partis sans représentants élus de présenter un candidat.

Les avocats de Maurice Kamto ont fait appel de la décision du Conseil électoral et ont déposé un recours auprès du Conseil constitutionnel le 28 juillet. Dieudonné Yebga a également annoncé qu'il ferait appel auprès du Conseil constitutionnel.

« La décision d’ELECAM n'a aucune base juridique et vise seulement à éliminer un candidat clé de l’élection, soutenant la stratégie de confiscation du pouvoir par le parti majoritaire », a déclaré Menkem Sother, l’un des avocats de Maurice Kamto, à Human Rights Watch.

Paul Biya en est à son septième mandat. Il a été réélu pour la dernière fois en 2018, après quoi Maurice Kamto a contesté les résultats officiels et s'est déclaré vainqueur de l'élection.

L'élection de Paul Biya en 2018 a déclenché une vague de répression politique. Après le scrutin, des manifestations menées par l'opposition ont éclaté dans tout le pays, et le gouvernement a réagi par une répression sévère, déployant la police, l'armée et les gendarmes qui ont fait un usage excessif de la force contre les manifestants. En janvier 2019, Maurice Kamto et plus de 200 de ses partisans ont été arrêtés et placés en détention. Maurice Kamto a été accusé d'insurrection, d'hostilité envers la patrie et d'association de malfaiteurs, entre autres chefs d'accusation. Il a été libéré le 5 octobre 2019 et les charges ont été abandonnées, mais la répression contre l'opposition s'est poursuivie.

Début septembre 2020, les autorités ont interdit les manifestations dans tout le Cameroun après que le MRC dirigé par Maurice Kamto a encouragé la population à protester contre la décision du gouvernement d'organiser des élections régionales en décembre de cette année. Les partis d'opposition avaient exprimé leurs inquiétudes quant au fait que les élections ne pourraient pas se dérouler librement et équitablement sans une réforme préalable du code électoral et sans avoir remédié à l’insécurité dans les régions anglophones minoritaires du pays, où des groupes séparatistes et les forces de sécurité se sont affrontés à plusieurs reprises.

Le 22 septembre 2020, les forces de sécurité camerounaises ont utilisé des gaz lacrymogènes et des canons à eau et ont arrêté plus de 550 personnes, principalement des membres et des sympathisants du MRC, pour disperser des manifestations pacifiques à travers le pays. Bon nombre des personnes arrêtées ont été passées à tabac et maltraitées. Si la plupart d'entre elles ont finalement été libérées, d'autres, dont Olivier Bibou Nissack et Alain Fogue Tedom, deux dirigeants du MRC, sont toujours derrière les barreaux après avoir été condamnés à sept ans de prison.

En décembre 2023, Maurice Kamto a annoncé la création de l'Alliance politique pour le changement (APC), une coalition d'opposition dirigée par Jean-Michel Nintcheu, membre du Parlement camerounais. En mars 2024, le ministre de l'Administration territoriale a toutefois interdit la coalition, la qualifiant d'« illégale » et de « clandestine ».

Le Cameroun est un État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et, à ce titre, est tenu de veiller à ce que chaque citoyen, sans discrimination fondée sur ses opinions politiques, ait la possibilité de participer et de voter lors d'élections véritablement libres. Le Comité des droits de l'homme des Nations Unies a estimé que « le droit à la liberté d'expression, de réunion et d'association est une condition essentielle à l'exercice effectif du droit de vote et doit être pleinement protégé ».

« La décision d'ELECAM réduit de facto le prochain scrutin à une simple formalité, enterre ce qui reste de la démocratie au Cameroun et fait craindre une recrudescence de la violence », a conclu Ilaria Allegrozzi. « Le Conseil électoral devrait revenir sur sa décision, et permettre aux Camerounais de décider eux-mêmes de leur avenir. »

29.07.2025 à 01:00

Myanmar : L'Armée d'Arakan opprime les musulmans rohingyas

Human Rights Watch

Click to expand Image Une famille de Rohingyas ayant fui la ville de Buthidaung, dans l’État de Rakhine au Myanmar, photographiée devant leur hutte dans le camp de réfugiés de Cox's Bazar, au Bangladesh, le 25 juin 2024. © 2024 Mohammad Ponir

(Bangkok, 29 juillet 2025) – L'Armée d'Arakan, un groupe armé ethnique opérant dans l'État de Rakhine, dans l'ouest du Myanmar, a imposé de sévères restrictions à la population rohingya et commis de graves exactions, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Les gains territoriaux de l'Armée d'Arakan dans cet État s'accompagnent de restrictions de mouvement, de pillages, de détentions arbitraires, de mauvais traitements, de travail forcé et de recrutement illégal, entre autres exactions contre les Rohingyas. En outre, l'armée du Myanmar soumet depuis longtemps les Rohingyas à des atrocités criminelles, notamment le crime contre l'humanité d'apartheid.

« L'Armée d'Arakan mène contre les Rohingyas une politique d'oppression similaire à celle imposée depuis longtemps par l'armée du Myanmar dans l'État de Rakhine », a déclaré Elaine Pearson, directrice de la division Asie à Human Rights Watch. « L'Armée d'Arakan devrait mettre fin à ses pratiques abusives et discriminatoires, et respecter le droit international. »

L'Armée d'Arakan s'était engagée à instaurer une gouvernance inclusive et équitable dans les zones reprises à la junte militaire birmane, après la reprise des combats en novembre 2023. Cependant, les Rohingyas décrivent la vie sous l'Armée d'Arakan et son aile politique, la Ligue unie d'Arakan, comme dure et restrictive, avec des réglementations et des pratiques discriminatoires.

Entre avril et juillet 2025, Human Rights Watch a mené des entretiens avec 12 réfugiés rohingyas qui avaient fui le canton de Buthidaung, dans le nord de l'État de Rakhine, et cherché refuge au Bangladesh.

« La vie sous le contrôle de l'Armée d'Arakan était incroyablement restrictive », a déclaré un réfugié rohingya de 62 ans arrivé au Bangladesh en juin. « Nous n'avions pas le droit de travailler, de pêcher, de cultiver la terre, ni même de nous déplacer sans autorisation. Nous étions confrontés à d'extrêmes pénuries alimentaires, la plupart des gens mendiant les uns auprès des autres. »

Les Rohingyas de l'État de Rakhine sont pris en étau entre les forces armées du Myanmar et l'Armée d'Arakan. Ces deux forces commettent de graves exactions, notamment des exécutions extrajudiciaires, des incendies criminels généralisés et des enrôlements illégaux de combattants. Depuis fin 2023, plus de 400 000 personnes ont été déplacées à l'intérieur des États de Rakhine et de Chin, et près de 200 000 personnes ont fui vers le Bangladesh.

Un autre Rohingya, également âgé de 62 ans, a déclaré avoir été déplacé avec sa femme et ses deux enfants à cinq reprises au cours de l'année écoulée. « La vie pendant cette période a été incroyablement difficile », a-t-il déclaré. « Les déplacements entre les villages étaient restreints, et nécessitaient des permis rarement accordés. »

Les villageois rohinygas ont indiqué que les permis pour se déplacer entre les villages de Buthidaung, valables une journée seulement, coûtaient entre 3 000 et 5 000 kyats (1,40 à 2,40 dollars US) et nécessitaient les signatures d’un administrateur musulman local, ainsi que de l'Armée d'Arakan ou de son aile politique. Ils ont ajouté que l'Armée d'Arakan avait instauré un couvre-feu dans la région. « S'ils trouvaient quelqu'un devant sa maison [après l’heure du couvre-feu], ils l'arrêtaient », a déclaré un homme. « Et après, on ignorait où il se trouvait. »

Les restrictions imposées par l'Armée d'Arakan aux moyens de subsistance et à l'agriculture, aggravées par l'extorsion et les prix exorbitants, ont aggravé les graves pénuries alimentaires et le blocus de l'aide humanitaire imposé par la junte, en vigueur depuis fin 2023. Certains Rohingyas ont déclaré survivre en mendiant auprès de familles recevant de l'argent de proches à l'étranger. D'autres travaillaient comme journaliers pour un salaire dérisoire, qui parfois n’était même pas payé.

« Nous avons dû lutter pour survivre », a déclaré un autre Rohingya âgé d'une soixantaine d'années, arrivé au Bangladesh en mai dernier. « Je travaillais comme ouvrier, acceptant n'importe quel travail proposé par l'Armée d'Arakan... Au début, ils nous payaient la moitié [du salaire journalier précédent], mais plus tard, ils ont complètement cessé de nous payer. »

Des villageois rohingyas ont déclaré que l'Armée d'Arakan avait confisqué des terres agricoles, des maisons, du bétail, des prises de pêche, du bois de chauffage et même des terrains de cimetières. Deux hommes originaires de Kin Taung, dans le canton de Buthidaung, ont déclaré que l'Armée d'Arakan avait démoli leur cimetière en mai, leur ordonnant d'utiliser les rizières pour des enterrements.

L'Armée du Salut des Rohingyas d'Arakan (Arakan Rohingya Salvation Army, ARSA) et d'autres groupes armés rohingyas, après avoir combattu aux côtés de l'armée du Myanmar en 2024, déploient à nouveau des combattants dans des affrontements contre l'Armée d'Arakan dans le nord de l'État de Rakhine. Les combats, ainsi que le recrutement forcé de villageois rohingyas par l'Armée d'Arakan, ont exacerbé les tensions communautaires entre les Rohingyas, majoritairement musulmans, et les Rakhines bouddhistes.

Trois Rohingyas ont déclaré avoir fui pour protéger leurs fils, dont des adolescents, contre le risque de recrutement forcé par l'Armée d'Arakan. Un réfugié rohingya de 57 ans est arrivé au Bangladesh avec sa famille en juin, après que l'Armée d'Arakan a commencé à rechercher son fils âgé de 17 ans. « J'ai dû le cacher dans différents villages pendant deux mois », a-t-il déclaré.

L'un des hommes âgés de 62 ans a déclaré que son fils avait été sélectionné pour être recruté par l'administrateur du village de Kin Taung en avril. « Je vivais dans la peur constante alors qu'ils essayaient de le forcer à s'engager », a-t-il déclaré. « Ils ciblent les enfants issus de familles pauvres. Mon fils était terrifié à l'idée d'être recruté et a fui le village il y a 45 jours. Il est porté disparu depuis. »

L'Armée d'Arakan a arrêté cet homme lorsqu’ils n’ont pas pu retrouver son fils, et l'a détenu pendant 35 jours, avec deux autres personnes. « Ils me battaient constamment », a-t-il déclaré. « Je n'ai été libéré qu'après avoir promis de leur amener mon fils. » Lorsqu'il a préféré se cacher par la suite, l'Armée d'Arakan a incendié sa maison familiale. Il a déclaré n'avoir eu d'autre choix que de fuir vers le Bangladesh.

L'Armée d'Arakan a gravement maltraité les Rohingyas qu'elle soupçonne de collaborer avec l'ARSA ou avec l'armée birmane. En décembre 2024, elle a arrêté un Rohingya âgé de 35 ans dans le village de Keya Zinga Para. « Ils m'ont accusé de travailler pour l'armée [du Myanmar] et de recevoir une formation militaire, ce qui n'était pas le cas », a-t-il déclaré. « J'ai été emmené à Buthidaung, au poste de police du quartier 3. Ils me battaient souvent et violemment, avec des bâtons de bambou. J'ai encore du mal à marcher. »

Un Rohingya de 19 ans a passé cinq mois dans l'Armée d'Arakan après avoir été enlevé du village de Nga Yat Chaung en mai 2024 pour y être soumis à du travail forcé illégal. Il a expliqué que les Rohingyas étaient souvent envoyés au front comme « boucliers humains ». « Si quelqu'un résistait, les [combattants de l’Armée d’Arakan] le frappaient, et se moquaient de lui », a-t-il déclaré. « Nous avons demandé à être traités sur un pied d'égalité. Ils ont dit qu'ils nous traiteraient comme le faisaient les Birmans [majorité ethnique], nous traitant de “kalars” [terme insultant envers les musulmans] bengalis. »

Le droit international humanitaire applicable, notamment l'article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 et le droit international coutumier, interdisent la torture et autres mauvais traitements infligés aux détenus, le pillage, le recrutement d'enfants (personnes âgées de moins de 18 ans) et le travail forcé dangereux, entre autres abus.

L'Armée d'Arakan ainsi que les groupes armés rohingyas collaborent avec des réseaux de passeurs, profitant de l'exode vers le Bangladesh. Les Rohingyas ont déclaré avoir payé entre 800 000 et 1,25 million de kyats (380 à 595 dollars US) par personne pour le voyage.

Le Bangladesh a enregistré 120 000 nouveaux arrivants dans les camps depuis mai 2024 ; des dizaines de milliers d'autres personnes ne sont toujours pas enregistrées. Les nouveaux arrivants ont déclaré ne bénéficier d'aucune aide ni d'aucun soutien officiels. Les autorités bangladaises affirment que le rapatriement des Rohingyas vers le Myanmar est la seule solution à cette crise. Les Nations Unies et les gouvernements concernés devraient toutefois souligner que les conditions d'un retour sûr, durable et digne vers le Myanmar ne sont pas actuellement réunies.

« Les donateurs et les gouvernements influents devraient redoubler d'efforts pour protéger le peuple rohingya, notamment son droit à la sécurité et à la liberté, que ce soit au Myanmar ou au Bangladesh », a affirmé Elaine Pearson. « Ils devraient aussi faire pression sur l'Armée d'Arakan pour qu'elle respecte les droits de toutes les communautés dans l'État de Rakhine. »

…………….

28.07.2025 à 06:01

Venezuela : La persécution politique continue, un an après l’élection présidentielle

Human Rights Watch

Click to expand Image Deux femmes agenouillées par terre plaçaient des photos de leurs proches détenus parmi d’autres photos, lors d’une manifestation tenue devant le bureau du Procureur général à Caracas, le 21 novembre 2024, pour demander la libération de prisonniers politiques au Venezuela. © 2024 Federico Parra/AFP via Getty Images

(Washington) – Un an après l'élection présidentielle, les autorités vénézuéliennes commettent des exactions généralisées contre leurs détracteurs, notamment par le biais d'arrestations basées sur des motifs politiques, a déclaré Human Rights Watch aujourd'hui.

Quelques heures après la fermeture des bureaux de vote le 28 juillet 2024, le Conseil national électoral (Consejo Nacional Electoral, CNE) avait annoncé la réélection de Nicolás Maduro. Toutefois, des observateurs internationaux avaient alors critiqué le processus en raison de son manque de transparence et d'intégrité, et remis en question les résultats annoncés. À ce jour, les autorités vénézuéliennes n'ont toujours pas publié le décompte officiel des voix, tandis que les décomptes publiés par l'opposition indiquaient une victoire du candidat de l'opposition, Edmundo González. Depuis l’élection, les autorités vénézuéliennes ont exercé une répression brutale, marquée par des meurtres, des disparitions forcées, des arrestations arbitraires et des actes de torture. Au 21 juillet, 853 prisonniers politiques se trouvaient toujours derrière les barreaux, selon l'organisation de défense des droits humains Foro Penal.

« Les autorités vénézuéliennes commettent systématiquement des violations des droits humains à l’encontre de personnes qui les critiquent », a déclaré Juanita Goebertus, directrice de la division Amériques à Human Rights Watch. « Les récentes libérations de personnes détenues arbitrairement ne masquent pas le fait que des centaines d’autres prisonniers politiques restent derrière les barreaux. »

Suite à l'annonce de la réélection de Nicolás Maduro, des milliers de Vénézuéliens étaient descendus dans la rue, principalement dans des quartiers pauvres. En réponse, le gouvernement avait lancé son « Opération Toc Toc » (« Operación Tun Tun »), une campagne d'intimidation, de harcèlement et de répression à l’échelle nationale.

Human Rights Watch a documenté des meurtres de manifestants et l'arrestation de centaines d'opposants politiques, de défenseurs des droits humains et de détracteurs du gouvernement, dont des ressortissants étrangers. De nombreuses personnes ont été inculpées de crimes comme « incitation à la haine » et « terrorisme », définis de manière vague et passibles de peines pouvant aller jusqu'à 30 ans de prison. Plusieurs personnes ayant mené des actions protégées par le droit international relatif aux droits humains – comme manifester, critiquer le gouvernement ou participer à des activités de l'opposition – ont été détenus arbitrairement, et soumises à des procédures judiciaires entachées de graves irrégularités.

Des autorités vénézuéliennes ont fréquemment nié avoir procédé à des arrestations ou à des disparitions forcées, caractérisées selon le droit international par le refus de divulguer des informations au sujet d’une personne détenue, y compris le lieu de sa détention. Des familles ont été contraintes de rechercher leurs proches dans des centres de détention et des morgues pendant des jours, voire des semaines. De nombreux détenus ont été placés à l’isolement, certains depuis le jour de leur arrestation ; ils ont été privés de la possibilité de recevoir la visite de leurs proches ou de leur avocat, ou de consulter les dossiers juridiques les concernant. Nombre d'entre eux ont été inculpés lors d'audiences virtuelles et collectives, ce qui a encore davantage porté atteinte à leur droit à une procédure régulière.

Certains détenus ont été détenus au secret pendant des mois. Parmi eux figurent Freddy Superlano, coordinateur national du parti d'opposition Voluntad Popular ; Perkins Rocha, coordinateur juridique du parti d'opposition Vente Venezuela ; Jesús Armas, membre de l'équipe de campagne de l'opposant Edmundo González ; Enrique Márquez, candidat à l’élection présidentielle de 2024 ; et Eduardo Torres, avocat auprès du Programme vénézuélien d’éducation et d’action en matière de droits humains (Programa Venezolano de Educación Acción en Derechos Humanos, PROVEA).

Certains détenus ont été soumis à des mauvais traitements et à la torture, notamment des coups, des décharges électriques, l'usage asphyxiant de sacs plastiques, l'isolement cellulaire et la détention dans des cellules disciplinaires exiguës, sombres et surpeuplées.

Le Bureau du Procureur général affirme avoir libéré des centaines de détenus, bien que nombre d'entre eux fassent toujours l'objet d'une enquête criminelle. De nombreux individus ont été contraints de signer des documents leur interdisant de divulguer des informations sur leur arrestation ou les poursuites judiciaires engagées contre eux. Certains ont été contraints de participer à l’enregistrement de vidéos dans lesquelles ils affirmaient que leurs droits avaient été respectés pendant leur détention.

Le 18 juillet, les autorités vénézuéliennes ont annoncé la libération de 80 personnes. Elles ont également libéré 10 citoyens et résidents permanents américains, en échange de la libération de 252 migrants vénézuéliens que le gouvernement américain avait expulsés vers le Salvador ; ils y étaient détenus au secret au Centre de confinement du terrorisme (Centro de Confinamiento del Terrorismo, CECOT), une immense prison de triste notoriété.

Selon le parti Vente Venezuela, une quarantaine d'autres détracteurs du gouvernement ont été arrêtés depuis les récentes libérations. Certains ont été ensuite remis en liberté.

« Depuis des années, le gouvernement Maduro pratique le système de la “porte tournante”, libérant certaines personnes qui étaient détenues arbitrairement, tout en en arrêtant d'autres individus », a observé Juanita Goebertus. « Les gouvernements étrangers, y compris les États-Unis, devraient se rendre compte qu'ils sont manipulés par un gouvernement qui libère des prisonniers politiques tout en en détenant d'autres, consolidant ainsi son régime autoritaire. »

Les gouvernements étrangers devraient dénoncer la politique de la carotte et du bâton employée par le président Maduro, selon Human Rights Watch. Ce système récompense les autorités et les forces de sécurité responsables d’abus, renforçant ainsi leur loyauté envers le gouvernement, tout en punissant, torturant ou poussant à l'exil des opposants, des détracteurs et même des membres des forces de sécurité qui soutiennent la démocratie et les droits humains.

Les gouvernements étrangers devraient soutenir pleinement les efforts visant la reddition de comptes pour les violations des droits humains au Venezuela, et faire pression sur les autres gouvernements ou acteurs économiques qui contribuent à cette répression. Ils devraient aussi accroître le soutien à la société civile, aux journalistes indépendants et à tous ceux qui œuvrent pour la défense de la démocratie et des droits humains au Venezuela, et étendre d'urgence les protections pour toutes les personnes contraintes de quitter ce pays.

La communauté internationale devrait saisir toutes les occasions de faire pression pour aboutir à des progrès significatifs en matière de droits humains au Venezuela. Cela implique de s'appuyer sur les forums régionaux et internationaux, comme le prochain sommet Union européenne -Communauté des États latino-américains et caribéens (Comunidad de Estados Latinoamericanos y Caribeños, CELAC) qui se tiendra en Colombie en novembre. Le Vatican devrait également saisir l'occasion de la canonisation de deux Vénézuéliens, prévue en octobre, pour réclamer la libération inconditionnelle de tous les prisonniers politiques dans ce pays.

« Un an après l’élection présidentielle de 2024, de nombreux Vénézuéliens continuent de risquer leur vie et leur liberté pour défendre la démocratie », a conclu Juanita Goebertus. « Les gouvernements qui dialoguent avec Nicolás Maduro ne devraient pas se contenter de libérations isolées de prisonniers : ils devraient exiger des améliorations substantielles et durables en matière de droits humains, afin de démanteler la machine de terreur d'État qui contrôle actuellement le Venezuela. »

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