Fort de son rôle d'opposant et toujours dans la ligne de ses critiques et craintes concernant le nouveau régime en Syrie, le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil a taclé dans un entretien télévisé diffusé jeudi soir les autorités libanaises, auxquelles il a reproché le manque de fermeté dans les discussions avec Damas. L'interview sur la chaîne Russia Today a été diffusé au lendemain de la visite d'une délégation judiciaire libanaise en Syrie, pour traiter le dossier des prisonniers syriens au Liban et au cours de laquelle la position de Beyrouth aurait déçu les Syriens, faisant craindre quelques tensions diplomatiques.
Pour M. Bassil, les autorités sont « soumises, négligentes et elles agissent en position d'infériorité dans toutes leurs relations avec la Syrie. » Il a fustigé une « concession » faite par le gouvernement de Nawaf Salam en acceptant « le simple fait » de négocier sur la question des détenus syriens. « « Les prisonniers ayant tué, kidnappé ou attaqué des soldats de l’armée ne doivent pas faire l’objet d’un marchandage », a-t-il lancé. La Syrie veut accélérer la libération des milliers de Syriens dans les prisons libanaises surpeuplées, alors que certains n'ont jamais été jugés. Mais le Liban insiste à respecter le cadre légal défini par le ministre de la Justice Adel Nassar : tous ceux qui sont accusés de crimes de « terrorisme », de viol ou d'attaques contre l’armée ne seront pas transférés en Syrie. Une prise de position tranchée qui semble avoir « déçu » les Syriens, selon une source gouvernementale libanaise à L’Orient-Le Jour.
Concernant également la Syrie, le député de Batroun, connu pour ses virulentes sorties contre les réfugiés et migrants syriens, a dénoncé les célébrations qui ont eu lieu lundi pour le premier anniversaire de la chute le 8 décembre 2024 du régime de Bachar el-Assad, après une offensive éclair de groupes rebelles jihadistes emmenés par le nouveau président syrien, Ahmad el-Chareh, alors connu sous le nom de Mohammad al-Jolani. Évoquant le « débarquement » d'une « armée », il a estimé que les scènes de liesse observées, marquées en soirée par des tensions avec l'armée à Beyrouth et des heurts avec des partisans du tandem chiite à Saïda (Sud), « auraient pu mener à la discorde. » Et de condamner une fois de plus le « silence » du gouvernement face à ces tensions et réclamer le rapatriement « immédiat » des réfugiés et migrants en Syrie, leitmotiv du chef du CPL et des responsables aounistes depuis des années.
Depuis la chute du régime Assad, près de 400 000 réfugiés et migrants syriens ont regagné leur pays depuis le Liban, selon des chiffres publiés le 4 décembre par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Des centaines d'entre eux sont notamment rentrés via des rapatriements organisés par la Sûreté générale, avec des organisations internationales, qui permettent aux rapatriés de recevoir une aide de 100 dollars ainsi qu’une exemption des amendes en cas de séjour irrégulier.
Gebran Bassil a encore critiqué une déclaration faite dimanche à Doha par l'émissaire américain en Syrie Tom Barrack, qui a estimé qu'il fallait « réunir le Liban et la Syrie », sans s'attarder sur la question, et qui faisait écho à d'autres propos polémiques de l'été dernier concernant un retour au Bilad el-Cham.
« Certains vivent dans l’idée d’annexer le Liban à la Syrie, cette impulsion a également existé chez certains Syriens à travers l’histoire, ainsi qu'au Liban ». Mais se prévalant de « l'idée de liberté, souveraineté et indépendance, nous ne pouvons accepter ce discours, qu'il provienne de source américaine, européenne, arabe, syrienne ou libanaise. »
Le chef du CPL s'est en outre penché sur la question du désarmement du Hezbollah, estimant que ce dernier, un ancien allié avec qui les ponts ont été coupés, « doit reconnaître qu’il n’est plus en mesure de protéger le Liban, car sa formule de dissuasion n’existe plus ». Le parti chiite est sorti lourdement affaibli de l'offensive israélienne de grande envergure de l'automne dernier, au cours de laquelle il a perdu une partie de son arsenal, et surtout son chef emblématique, Hassan Nasrallah. Il a reproché au tandem chiite son manque « d'honnêteté avec le peuple et le gouvernement » en n'établissant pas clairement ce qu'il compte faire de ses armes. Le parti chiite doit être désarmé dans tout le pays dans le cadre de la résolution 1701 de l'ONU (2006) qui sert de base à l'accord de cessez-le-feu de novembre 2024. S'il accepte que l'armée démantèle son arsenal dans le Sud, il refuse jusqu'à présent catégoriquement de le faire à l'échelle de tout le pays.
Une position qui pousse Israël à reprocher au gouvernement de Beyrouth la lenteur du désarmement et à agiter la menace d'une nouvelle offensive. À ce sujet, Gebran Bassil a estimé que la nomination de Simon Karam, un diplomate civil, pour négocier avec Israël dans le cadre du comité de surveillance du cessez-le-feu, a permis de gagner du temps jusqu'à la fin de l'année », sans pour autant désamorcer une éventuelle guerre. Celle-ci, si elle a lieu, « sera d'un autre type », a-t-il pressenti.
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Veuillez vous connecter pour visualiser les résultatsLe Turkménistan accueille vendredi un rare défilé de chefs d'État parmi lesquels les présidents russe Vladimir Poutine, turc Recep Tayyip Erdogan et iranien Massoud Pezeshkian.
Ces dirigeants d'Etats aux relations conflictuelles avec les Occidentaux ont été invités pour célébrer le trentième anniversaire de la « neutralité permanente » du régime, une doctrine ayant contribué à faire du Turkménistan l'un des pays les plus fermés du monde.
Voici ce qu'il faut savoir sur cette ex-république soviétique désertique d'Asie centrale regorgeant de gaz.
Le Turkménistan, qui est notamment bordé par l'Iran, l'Afghanistan et la mer Caspienne, a connu trois présidents depuis son indépendance de l'Union soviétique en 1991.
Après le règne de Saparmourat Niazov, autoproclamé « président à vie » et « Père des Turkmènes » (Turkmenbachi), mort en 2006, la famille Berdymoukhamedov est aux commandes. Le fils, Gourbangouly, a passé la main au petit- fils Serdar en 2022 mais tous deux gouvernent de facto en tandem et font l'objet d'un culte de la personnalité.
Gourbangouly, officiellement « Chef de la nation » et « Héros-Protecteur » (Arkadag), a fait bâtir une ville en son honneur avec une statue de 43 mètres de haut le représentant en conquérant à cheval, tandis que Serdar est loué quotidiennement dans les médias étatiques.
Le Turkménistan est l'un des pays les plus secrets, au monde, régulièrement comparé à la Corée du Nord pour la difficulté d'y accéder. La « neutralité permanente » du Turkménistan, accordée par les Nations unies en 1995, est un pilier de l'idéologie du régime : une « arche de la neutralité » d'une centaine de mètres de haut avec une statue dorée du premier président trône dans la capitale.
Le président Serdar Berdymoukhamedov a publié en amont du sommet un énième livre, présenté comme un « précieux cadeau au peuple » turkmène et qui vante les mérites de cette neutralité permanente. Ce statut, qui implique le refus d'adhérer pleinement à toute union ou alliance militaire, est utilisé par le régime pour mettre en place l'une des politiques les plus isolationnistes du monde.
Le Turkménistan entretient principalement des relations avec la Chine, la Russie, l'Iran et la Turquie via des accords sur le gaz et la coopération avec l'Occident reste limitée. Selon Amnesty international, ce pays est « de facto fermé aux ONG internationales de défense des droits humains, aux mécanismes spéciaux des Nations unies et aux médias indépendants ». L'information parcellaire, cadenassée et généralement invérifiable, « vise uniquement à faire l'éloge du régime », selon Reporters sans Frontières (RSF), tandis que nombre de réseaux sociaux sont inaccessibles.
Le Turkménistan dispose des quatrièmes ou cinquièmes réserves mondiales de gaz mais l'eau manque, une situation qui va empirer en raison du changement climatique, selon les scientifiques. Il est recouvert aux trois quarts par le désert du Karakoum que traverse un canal d'irrigation long d'environ 1.400 kilomètres, l'un des plus grands de la planète.
Ce canal vieillissant détourne les eaux de l'Amou-Daria, l'un des deux principaux fleuves centrasiatiques, pour irriguer les cultures dans ces régions désertiques. La culture du coton, importante pour l'économie turkmène, est extrêmement exigeante en eau et participe à l'assèchement de la mer d'Aral, qui a quasiment disparu.
Surnom donné au cratère gazier de Darvaza en combustion continue depuis 1971, les « portes de l'enfer » brûlent dans le Karakoum après un incendie accidentel provoqué par des scientifiques. Principale attraction touristique nationale, ce cratère rejette du méthane, un gaz à effet de serre contribuant au changement climatique.
La part de Darvaza dans les immenses rejets de méthane du Turkménistan reste marginale mais ce cratère est le symbole d'une catastrophe environnementale : ce pays détenait en 2024 le record du monde du nombre des fuites massives de méthane, d'après l'Agence internationale de l'énergie. Les autorités turkmènes ont promis d'éteindre ce foyer mais les particularités géologiques du Karakoum compliquent les opérations.
La race locale de cheval - l'akhal-teke - et celle de chien - l'alabaï, ou berger d'Asie centrale - ont des jours fériés en leur honneur et font partie des piliers de la culture turkmène telle que la conçoit le régime. Des statues représentant des alabaïs et akhal-tekes ont été érigées sur ordre de Berdymoukhamedov père, qui a composé une chanson pour son cheval favori. Le fils a le titre d' « honorable éleveur » d'alabaïs et dirige l'association nationale des akhal-tekes. Dans le cadre du culte de leur personnalité, les Berdymoukhamedov s'affichent en train de cajoler ces animaux.
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Veuillez vous connecter pour visualiser les résultatsLe président américain Donald Trump a fait part jeudi de son exaspération face à l'absence de résultat des pourparlers pour mettre fin à la guerre en Ukraine, Washington sommant Kiev d'accepter des concessions territoriales qui pourraient comprendre une zone démilitarisée.
« Le président est extrêmement frustré par les deux camps impliqués dans cette guerre, et il en a assez des réunions qui n'ont d'autre but que de se réunir », a déclaré à la presse la porte-parole de la Maison Blanche Karoline Leavitt. « Il ne veut plus des paroles. Il veut des actes. Il veut que cette guerre prenne fin », a-t-elle poursuivi.
Les discussions se sont accélérées depuis que l'administration américaine a proposé il y a près de trois semaines un plan visant à résoudre la guerre déclenchée par l'invasion russe à grande échelle de février 2022, qui reprenait des exigences majeures de Moscou. Alors que Kiev a remis en début de semaine une version amendée de ce texte comprenant des contre-propositions, le président ukrainien a confirmé jeudi que les États-Unis souhaitaient conclure un accord « le plus tôt » possible.
Selon Volodymyr Zelensky, les deux questions essentielles restant à négocier sont le contrôle de la région orientale de Donetsk, où se déroule l'essentiel des combats, et le statut de la centrale nucléaire de Zaporijjia, occupée par Moscou dans le sud de l'Ukraine.
M. Zelensky a assuré aux journalistes, dont ceux de l'AFP, que Washington « voit les forces ukrainiennes se retirer » de la partie de la région de Donetsk qu'elles contrôlent encore et qui serait transformée en « zone économique libre » ou « zone démilitarisée ».
En échange, l'armée russe se retirerait des zones sous son contrôle dans les régions de Soumy, Kharkiv et Dnipropetrovsk (nord, nord-est et centre-est), mais se maintiendrait dans celles de Kherson et Zaporijjia (sud). La région de Donetsk, contrôlée à plus de 80% par la Russie, et celle voisine de Lougansk, presque totalement sous son contrôle, sont l'objectif prioritaire du Kremlin en Ukraine. Moscou revendique depuis 2022 leur annexion, tout comme celle de deux autres régions du sud, celles de Kherson et Zaporijjia, que les forces russes occupent partiellement.
L'idée d'une zone démilitarisée dans des territoires que la Russie n'a pas réussi à conquérir en près de quatre ans d'intenses combats représenterait une concession majeure de Kiev, qui éviterait cependant d'y renoncer formellement.
« Qui gouvernerait ce territoire, qu'ils (les Américains) appellent déjà +zone économique libre+ ou +zone démilitarisée+, (les États-Unis) l'ignorent », a relevé M. Zelensky.
Son conseiller Mikhaïlo Podoliak a cependant semblé se rallier à cette idée, déclarant au journal français Le Monde qu' « une zone démilitarisée devra exister de part et d'autre de la ligne » où serait déployé « un contingent étranger » : « C'est un format naturel de fin de conflit, sachant qu'une partie du territoire restera malheureusement sous occupation de facto de la Russie et qu'une ligne de séparation sera fixée de toute façon. »
M. Zelensky a assuré que dans tous les cas, une « élection » ou un « référendum » sera nécessaire en Ukraine pour trancher sur les questions territoriales. Mardi, il s'était dit prêt à organiser une présidentielle si la sécurité du scrutin pouvait être assurée par les États-Unis, avec les Européens.
La version du plan américain révisée par les Ukrainiens lors de négociations à Genève et en Floride n'a pas été rendue publique. Un texte divisé en quatre parties a également été soumis au Kremlin lors d'un voyage de l'émissaire américain Steve Witkoff à Moscou la semaine dernière. Ces efforts américains interviennent à un moment difficile pour l'Ukraine : la présidence a été déstabilisée par un vaste scandale de corruption impliquant des proches de Volodymyr Zelensky, l'armée est en recul sur le front et la population est soumise à des coupures de courant à cause des frappes russes.
Sur le terrain, l'armée russe a revendiqué jeudi la capture de la ville de Siversk, dans la région de Donetsk (est), l'un des derniers verrous qui l'empêchait d'approcher les grandes cités régionales de Kramatorsk et de Sloviansk, à une trentaine de kilomètres plus à l'ouest. Une annonce démentie par le commandement des troupes ukrainiennes du front oriental, évoquant des "petits groupes" de militaires russes qui "tentent de s'infiltrer à Siversk".
« La semaine à venir sera décisive » pour l'Ukraine, a souligné la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen après avoir participé jeudi à une réunion de la « coalition des volontaires » qui réunit des soutiens de Kiev.
Outre les discussions sur un règlement du conflit, les jours à venir seront marqués par un sommet des dirigeants européens le 18 décembre, où sera discutée l'utilisation éventuelle des avoirs russes gelés en Europe pour aider l'Ukraine. Sur ce dossier, les 27 pays de l'Union européenne ont levé un obstacle clé en pérennisant les sanctions contre Moscou qui servent de base à leur immobilisation, a annoncé la présidence danoise de l'UE.
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