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Francis PISANI

MYRIADES


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19.08.2025 à 09:41

Hiroshima, coeur et raison ≈073

Francis Pisani

Ou comment un film d’amour m’aide à mieux comprendre le Japon où j’ai vécu, et l’horrible histoire - qui dure - de deux bombes pas vraiment nécessaires.
Texte intégral (2093 mots)

Quoi de plus improbable qu’une liaison entre un islandais et une japonaise ? Quoi de plus fou qu’un vieil homme partant à l’autre bout du monde en quête de son amour de jeunesse ? Quoi de plus stimulant qu’un couple qui fait face à son passé écrit tout de travers pour aborder la mort avec un sourire ?

Les acteurs sont bons, les images sont belles, le scénario tient la route, le montage est superbe… Dépêchez-vous de rentrer pour aller voir le délicieux Touch - Nos étreintes passées du réalisateur islandais Baltasar Kormákur.

Le film : Touch - Nos étreintes passées

Ce coup de coeur est loin d’être anodin. Pour des raisons personnelles d’abord : l’âge et le sourire du héros, l’inévitable retour sur l’histoire de sa vie, et le Japon que je trimballe dans tout le corps avec une tendresse pas totalement explicable, légèrement coupable. Je l’ai abordé par les arts martiaux, une fascination pour le zen et j’y ai vécu un an, faisant l’effort de commencer à apprendre cette langue étrange, facile à prononcer, difficile à maîtriser, qui s’écrit en chinois.

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Touch (traduction du titre original, Snerting en islandais) fait partie de ces oeuvres dont je me garderai bien de dire qu’elles touchent à l’universel, notion dont je me méfie, mais qui nous permettent grâce à une histoire toute simple d’accéder à des moments ou des problèmes d’une importance planétaire et qui nous concernent. En l’occurrence la bombe lancée par les US sur Hiroshima en août 1945. Il y a 80 ans. Un fait que nous connaissons tous sans y accorder, il me semble, toute l’importance qu’il mérite et sans comprendre comment il pèse encore et toujours sur le monde d’aujourd’hui.

Le fait figure dans les livres d’histoire. Comme un instant plus que comme un tournant. Comme une façon, expéditive certes mais efficace, de terminer une guerre plus que comme le lancement d’une nouvelle ère dans laquelle nous vivons encore. Et le premier champignon suffit à occuper la plupart des esprits sans qu’il soit nécessaire d’insister sur le fait qu’il y en a eu deux. Nous avons bien vu quelques images des destructions, des morts et des survivants mutilés, sans trop de profondeur. Sans la durée. Sans la dimension des horreurs qui se diffusent pendant des décennies. Nous avons une rapide idée des faits, sans vraie conscience de la réalité.

C’est ce que Touch - Nos étreintes passées (complément de titre rajouté pour la version en français) réussit à faire en douceur et sans pitié, nous distille par petites touches tout au long du film sans que nous nous en rendions vraiment compte. Jusqu’à la fin amoureuse, délicate, implacable.

Mais pourquoi s’y attarder aujourd’hui ?

Deux bombes sans finalité militaire

Parce que ces deux bombes avaient pour objectif de marquer ce tournant dans l’histoire du monde invoqué plus haut.

Le Japon étant sur le point d’accepter sa défaite elles ne correspondaient à aucun impératif militaire. La seconde encore moins que la première.

Dans un horrible billard à trois bandes il s’agissait d’abord d’inviter Staline à ne pas trop rêver et surtout d’ouvrir à la face du monde entier une ère de domination américaine dangereuse à contester. Nous y sommes toujours.

Après l’échec de ses tentatives de séduction de Kim Jung-un lors de son premier mandat, Trump a clairement voulu montrer en essayant de détruire les installations nucléaires de l’Iran le 22 juin 2025 qu’on ne l’y reprendrait plus.

Laissez un commentaire.

Un projet Manhattan 2 pour l’IA

Je doute parfois de ces raccourcis un peu rapides et qui sonnent bien. Grâce au film Oppenheimer, même les plus jeunes savent aujourd’hui que nous devons la bombe au projet Manhattan. Bien montrés, les doutes et les regrets du savant, font ressentir à certains une sorte de compassion pour l’individu, presque pour l’idée dans son ensemble. Pour l’intention. Tout le contraire de Nos étreintes passées qui par l'histoire d’un couple nous permet d’entrevoir l’horreur dans sa durée.

Permettez-moi de noter, pour finir, que le développement massif de l’intelligence artificielle prôné par Washington et les TechBros de Silicon Valley vise précisément à relancer cette dynamique qui s’essouffle. Une vision qui a conduit Trump à lancer le 21 janvier 2025 - « dès [la] première journée complète de travail » de son deuxième mandat - le projet Stargate. 500 milliards de dollars sur 4 ans pour créer le plus gros réseau mondial de data centers équipés de millions de microprocesseurs fabriqués par Nvidia, l’entreprise la plus riche du moment. Tout ça sur le sol états-unien. Premier objectif : assurer la domination des US dans le domaine de l'intelligence artificielle.

Présenté par certains comme le « projet Manhattan pour l’IA », il est techniquement piloté par Sam Altman, patron de OpenAi, l’entreprise qui produit ChatGPT. Comme pour bien marquer le coup, il s’est installé dans les laboratoires de Los Alamos. Où travaillait l’équipe de Robert Oppenheimer…

Deux notes personnelles :

  • Je suis reconnaissant à Baltasar Kormákur et à son film dont l’histoire m’a permis de percevoir une dimension du Japon que j’étais incapable de nommer : la douleur inoubliable et toujours vivante, 8O ans plus tard, d’avoir servi de cobaye au passage à l’ère nucléaire et de domination états-unienne. Il me semble que son effort pour préserver tradition et nouveauté se comprend mieux à cette lumière. Le fait par exemple qu’on y parle peu l’anglais.

  • Je ne peux pas être favorable à une victoire du régime autoritaire chinois dans la guerre de l’intelligence artificielle. Mais la volonté d’utiliser cette technologie pour dominer la planète me terrifie d’autant plus que j’en perçois la puissance, même si elle vient des États-Unis. Sans y croire vraiment j’aime bien la proposition de Guillaume Moukala Same nous invitant, plutôt qu’à un autre projet Manhattan à créer « un GIEC de l’IA ».

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04.08.2025 à 15:31

Croisé trumpien dans un café parisien ≈072

Francis Pisani

Une rencontre inopinée que j’ai faite dans un café parisien peut nous aider à comprendre l’offensive idéologique des croisés de Trump. Ils multiplient actions et menaces. Attention !
Texte intégral (2100 mots)

Bonjour,

D’abord quelques excuses qui ont trop tardé et un geste de ma part pour celles et ceux qui ont la générosité de soutenir économiquement mon travail, bien réduit ces temps-ci. Je le reconnais.

  • Parmi toutes les raisons qui m’ont poussé à moins écrire il y a la sidération de l’évolution du monde depuis le retour de Trump à la Maison Blanche. Plutôt que de dire n’importe quoi ou la même chose que tout ce qui se publie j’ai préféré réfléchir. J’y reviens dans un instant.

  • Le geste, bien normal, est une pause dans le prélèvement de vos contributions jusqu’au 15 septembre. Cela ne veut pas dire que je n’écrirai pas… seulement que rien ne vous sera débité. Profitez en pour boire un coup, prendre un café ou vous offrir une glace à notre santé à tou.te.s.

Tarifs douaniers, déportations d’immigrés, mise en coupe libre des parcs naturels, lutte contre juges, médias et universités, soutien à l’horreur contre Gaza, méga bombes sur l’Iran, j’en passe et des pires, nos médias sont plein de ces décisions, de ces nouvelles balancées à un rythme conçu pour nous hypnotiser, pour nous assommer. Qu’il s’agisse d’économie, de libertés, de menaces contre la démocratie, d’environnement ou de déni de science, chacune compte et mérite d’être suivie. Mais l’ensemble cache une dimension plus profonde et plus pernicieuse : la guerre idéologique entreprise par Trump, son entourage et ses missionnaires.

J’en ai fait l’expérience directe en juin dernier dans un café de la rue Daguerre dans le 14ème parisien.

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Les jolis côtés de ma vie en quelques minutes

Nous sommes assis avec deux amis récents, curieux d’en savoir plus sur mon parcours légèrement hors norme. Plutôt en forme ce jour là, j’ai envie de les intéresser et j’y vais franco du récit de mon année 1968 : offensive du têt à Saigon, mai à Paris, août à Prague, novembre dans l’Alabama pour les élections américaines et, décembre à La Havane où je vivrai pendant deux ans grâce à des traductions et à des cours de judo.

Suit mon intérêt pour les révolutions en Amérique centrale. Le fait qu’à l’époque j’y crois, à Fidel Castro comme aux Sandinistes avant de passer de la politique qui ne change pas grand chose aux possibilités qu’ouvrent la technologie. Installation dans la baie de San Francisco, tour du monde de l’innovation, travail sur les villes, notamment intelligentes. Mon inquiétude face à Trump et sa manipulation, entre autres, de la puissance, de la haine et de la peur. La totale. Dans la bonne humeur.

Plaisir de dire mon envie directrice de voir le monde changer, de tenter de comprendre sur le terrain tout ce qui peut y contribuer, d’affirmer mes positions de gauche devant de possibles amis en espérant qu’ils y soient sensibles et que cela nous permette d’aller plus loin. Mais l’heure tourne et je dois finir par me lever.

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Croisé à l’attaque

C’est ce juste à ce moment qu’un client assis à la table d’à côté et dont j’avais remarqué qu’il avait délaissé sa lecture pour mieux nous écouter - j’ai même eu l’infantilisme de croire qu’il s’intéressait à mon récit - interrompt nos adieux avec les mots suivants prononcés dans un français parfait enluminé d’un délicieux accent américain : « Vos histoires c’est fini. J’ai voté trois fois pour Donald Trump, pas parce que j’avais peur mais parce que je suis chrétien et qu’il défend nos valeurs. Et d’ailleurs c’est pas la peine d’essayer de revenir aux États-Unis, le FBI a sûrement toutes les informations sur vous et il ne vous laissera pas rentrer ».

Pas vraiment d’envie de me convaincre mais recours évident à la menace. Dans un café parisien. Et moi, pris dans les joliesses de mon discours, pressé par le retard à mon prochain rendez-vous, je ne trouve rien de plus malin à lui dire que : « Je me retrouverai ainsi dans la même situation qu’Oscar Arias, ancien président du Costa-Rica et prix Nobel de la paix à qui votre gouvernement a retiré son visa. Une compagnie qui m’honore ».

Il reste coi.

Je quitte la scène, plutôt content de ma répartie…

Mais il me faut quelques minutes, alors que je m’éloigne, pour comprendre mon ridicule, mon incapacité de résister au mot d’esprit facile plutôt que de réagir à l’offensive idéologique. Car c’est de cela qu’il s’agit, et c’est à cela que nous devons nous préparer, contre quoi nous devons lutter.

Les diplomates s’en mêlent

Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères, estime que l’Europe est en train de devenir « trumpienne », que les idées du magnat de l’immobilier gagnent du terrain.

Nous aurions tort de les prendre à la légère.

Elles s’appuient sur une doctrine baptisée « black enlightment » ou « Lumières [en référence au Siècle des…] noires » dont vous trouverez les principales références sur le site du Grand Continent, notamment cet article intitulé Atlas de la pensée néoréactionnaire.

Outre les bénévoles, comme celui que j’ai rencontré, l’offensive déploie ses croisés.

J.D. Vance a donné le ton lors de son fameux discours de Munich. Les sbires du département d’État prennent la relève systématiquement comme le montre un article du Monde au titre révélateur : « Les envoyés très spéciaux de la diplomatie américaine pour « évangéliser » l’Europe ». A la recherche « d’alliés civilisationnels » deux jeunes diplomates du Département d’État sillonnent le continent et multiplient les pressions.

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En Grande Bretagne ils rencontrent le plus puissant lobby antiavortement. En Irlande ils menacent de retirer les visas d’accès aux États-Unis aux fonctionnaires qui appliqueraient le Digital Services Act (DSA) mis en place par l’Union européenne, en 2023, afin de forcer les géants du Web à réguler leurs contenus.

En France, qu’ils semblent avoir comparé à la Corée du Nord, ils protestent contre l’atteinte à la liberté d’expression que représente, selon eux, la condamnation de Marine Le Pen pour détournement de fonds publics et rencontrent des cadres du parti (mais pas les deux principaux dirigeants). Selon Pierre Haski, éditorialiste de France Inter et président du conseil d’administration de Reporters sans frontières qui les a reçus « Leur démarche était clairement idéologique ».

A nous de comprendre qu’il s’agit d’une offensive en bonne et due forme… et d’y répondre. Le mépris ou les mots d’esprit, comme celui avec lequel j’ai cru m’en tirer, ne feront pas l’affaire.

A bientôt…

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22.06.2025 à 19:36

Iran, Israël, US : escalade, enlisement ou trou noir ? ≈071

Francis Pisani

Ne nous attardons pas trop sur les détails factuels. Quelle est la dynamique dans laquelle nous entraînent les actions militaires de Netanyahou et de Trump contre le régime des ayatollahs ?
Texte intégral (2256 mots)

Comme vous, peut-être, comme beaucoup, j’ai passé plusieurs semaines sidéré par la montée visible, inéluctable du recours à la force, à la violence, à la destruction systématique au cours des derniers mois.

Par la dynamique enclenchée en différents endroits de la planète à l’intérieur de multiples pays comme dans les relations internationales.

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Par son succès apparent et sa capacité à faire tâche d’huile.

Chacun avec ses raisons, parfois ses prétextes, Poutine et Netanyahou mènent la danse. Trump les suit tous les deux et, de Kagame (Rwanda) à Modi, Xi et Erdogan, pour ne mentionner que les plus visibles, un nombre croissant de dirigeants et de mouvements politiques nous entrainent dans une dynamique plus dangereuse encore qu’il ne semble. De plus en plus éloignée du droit.

Commençons par l’actualité de ce 22 juin 2025.

Simulation par la NASA de ce que pourrait représenter le plongeon dans un trou noir. Pour la vidéo, tapez sur votre moteur de recherche : black hole simulation nasa

« Escalade » ?

« Escalade » est un des termes les plus couramment employés pour décrire les évènements de ces neuf derniers jours.

Indiquant un mouvement vers le haut, il donne une tonalité presque positive à la surenchère combinée de Jerusalem et de Washington que personne, en tous cas aujourd’hui, ne semble pouvoir contenir.

  • L’appareil sécuritaire israélien fonctionne, grâce à la maîtrise de sa technologie, à un niveau dont la plupart de ses ennemis n’a pas la moindre notion. Nous l’avons vu à Gaza. De plus, les pratiques et déclarations du Hezbollah que Jerusalem a su tourner, chaque fois à son avantage, l'ont montré de façon limpide. C’est plus surprenant dans le cas de l’Iran mais, quelque soit sa sophistication dans le nucléaire (dont on n’est pas certain qu’elle soit aussi avancée que le prétendent Netanyahou et Trump), elle n’a rien à voir avec celle des technologies de l’heure : drones et intelligence artificielle. Le régime paye son obstination dans ce domaine en même temps que le rejet répandu de son fondamentalisme religieux intolérant et répressif.

  • Un suivi attentif de l’évolution d’Israël et de sa façon de mener ses guerres depuis l’attaque terroriste menée par le Hamas le 7 octobre 2023 montre que le recours massif et sans états d'âme à la force, à la destruction et aux massacres paye (à court terme en tous cas). Il est trop tôt pour dire si le programme nucléaire iranien est détruit pour toujours et si le régime tombera. Dans un cas comme dans l’autre, les doutes (de nature différente) sont permis. Mais il est clair, à court terme en tous cas, que le “patron” d’Israël depuis trois décennies peut fêter son triomphe.

  • Reconnaissons-le… en précisant que cela risque de se révéler très grave pour le reste de la planète et dans le long terme. Ce qui compte maintenant c’est d’évaluer la dynamique dans laquelle ils ont engagé le Moyen Orient et le reste du monde.

« Escalade » ne permet pas a elle seule de comprendre la logique à l’oeuvre.

« Quagmire » (bourbier) ou « black hole » (trou noir)?

Lundi dernier, en écoutant un podcast de The Economist sur la situation au Moyen Orient, j’ai entendu revenir, dans les dernières minutes, le mot « quagmire » (bourbier). A peine prononcé par un des experts il était repris par d’autres. Je le prends comme un signal d’alerte.

Car « quagmire » a une longue histoire, en tous cas depuis la guerre américaine contre le Vietnam rappelle le site PoliticalDictionary.com pour souligner que Washington y avait mis les pieds peu à peu. Certains auteurs en ont même fait une théorie pour dire que l'implication s’était faite « par inadvertance » précise Wikipedia en anglais. Une façon de se défendre en affirmant que les intentions n’étaient pas mauvaises, qu'il s’agissait d’une « tragédie sans méchants », que le Washington d’alors avait les meilleures intentions du monde.

Le même terme a été utilisé pour qualifier l’intervention lancée par Bush contre l’Iraq en 2003.

Reprenant l’image, Max Boot écrivait en 2019 dans le Washington Post que « Une guerre avec l’Iran serait la mère de tous les bourbiers » en référence à la fameuse phrase de Saddam Hussein annonçant au moment de s’attaquer à Koweit « la mère de toutes les batailles » et dont on sait comment elle s’est terminée pour lui.

Même l’enlisement pourrait se révéler une illusion.

Début septembre 2003, 5 mois après le début de l’intervention américaine lancée par Bush contre l’Iraq, un ancien militaire américain trouvait trop optimiste la notion de bourbier. Il s’agit plutôt, écrivait-il, sur le site du think tank Foreign Policy in Focus, d’un « black hole », au sens astronomique du terme, un trou noir; « un voyage à sens unique dans un « tunnel » avec une force de gravité écrasante dans lequel même la lumière se perd ». Image radicale mais, si j’ose dire, lumineuse : une fois qu’on met le doigt dedans on n’en sort plus.

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Comment aborder les mutations en cours ?

Aucun conseil à donner, bien sûr, mais permettez-moi ces quelques réflexions :

  • Chacun.e d’entre nous tend à s’inquiéter, qui des menaces contre l’environnement, qui des dangers de l’intelligence artificielle, qui de la crise économique probable, qui des bouleversements culturels ou géopolitiques. Leurs interactions semblent ouvrir une période d’authentique mutation. C’est peut-être dans ce sens que nous devons essayer de penser et d’agir.

  • Les tristes sires (« no King » disent les manifestants américains) mentionnés plus haut montrent chacun, mais de façon implacablement similaire, que leur mépris du droit vaut aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur. Ils nous enfoncent dans une période dominée par la logique de la haine, de la violence et de la puissance. Nous pouvons nous y opposer en misant sur la force des relations entre celles et ceux qui agissent en différents lieux, à différents niveaux.

Dépêchons-nous de profiter de la liberté d’expression et du droit de vote dont nous disposons pour condamner, voire punir, le manque de courage de nos dirigeants Européens.

  • Que le régime des ayatollahs soit indéfendable ne veut pas dire qu’on a le droit, qu’il soit avisé, de faire ou de laisser tomber sur lui le « Marteau de Minuit » (nom de l’opération lancée par le Pentagone).

  • Et quelle ironie destructrice. En même temps, et je choisis mes mots, qu’ils donnaient crédit à l’apparente possibilité de négociation alors que Trump préparait ses frappes, nos dirigeants se sont montrés victimes du biais cognitif bien connu sous le nom de « loi de l’instrument », selon laquelle qui possède un marteau a tendance à tout voir comme un clou !

  • Et il y a plus grave. Notre tolérance avec les guerres d’Israël choque un grand nombre d’autres pays et forces de la planète - généralement concentrées au sud - ceux que l’Amérique de Trump expulse, bannit ou cherche à détruire… et que la Chine courtise.

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07.05.2025 à 08:59

Allô « Résilience », nous avons un problème… ≈070

Francis Pisani

Nous vivons une époque de changements accélérés et sommes décidés à y faire face. Super ! mais insuffisant. Quelques éléments pour mieux poser le problème.
Texte intégral (1846 mots)

Bonjour,

Le mot « résilience » sonne bien. Un peu trop peut-être. Nous tendons à lui accorder plus de vertus qu’il n’en possède et l’usage abusif que nous en faisons risque de nous faire croire, quand nous l’adoptons, qu’il nous aide à bien poser un problème qu’en fait nous ne faisons que repousser sans nous donner une chance de bien l’aborder.

Quel problème ?

Le plus important peut-être de notre époque : comment faire face aux exigences de changements qui émergent et s’amoncellent. Comment ne pas seulement résister, voire même s’adapter à ce qui s’annonce, à ce qui nous arrive.

Une question trop souvent mal posée.

« Nous ne sommes pas arrivés là où nous sommes grâce à la notion de résilience » […], elle « étouffe les mécanismes de croissance et d'évolution » écrit l’économiste Nassim Nicholas Tayeb dans son livre Antifragile. Ce professeur à l’Université Polytechnique de New York est aussi l’auteur de la théorie du cygne noir qui traite des « événements imprévus à grandes conséquences et [de] leur rôle dominant dans l'histoire ». Exactement ce qui nous intéresse aujourd'hui.

Mais de quoi parlons-nous?

L’art japonais du kintsugi consiste à réparer une céramique ébréchée ou cassée à l’aide laque et de poudre d’or pour l’utiliser à nouveau. Exposition Entre art et résilience. Maison du Japon à Paris. https://www.mcjp.fr/fr/kintsugi-entre-art-et-resilience

Résistance, résilience, adaptabilité

« La résilience est la capacité d’un système à revenir à son état initial après avoir été perturbé, » explique le site Géoconfluences (Ressources de géographie pour les enseignants). « De façon plus précise, l’UNISDR (United Nations International Strategy for Disaster Reduction) définit la résilience comme « la capacité d’un système, une communauté ou une société exposée aux risques, de résister, d’absorber, d’accueillir et de corriger les effets d’un danger (...), notamment par la préservation et la restauration de ses structures essentielles et de ses fonctions de base ».

Un progrès quand on se préoccupe de changement dans la mesure où ce terme se propose de dépasser les limites de la résistance qui cherche, par des travaux de correction, comme une digue, à s’opposer à l’aléa, tandis que la résilience vise à en réduire au maximum les effets. « La résistance prétend éliminer les risques en éliminant les aléas, la résilience admet que ce n’est pas possible; […] Elle reconnaît que le dommage n’est plus lié à une relation entre deux facteurs, comme entre aléa et vulnérabilité, mais à un ensemble de facteurs en interaction, à un système. »

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L’intérêt principal de cette précision est, à mes yeux, d’introduire une dynamique, une évolution dans la façon de se préparer aux perturbations, aux menaces, aux bouleversements. Elle pose un début de gradation dans la stratégie envisageable au lieu d’enfermer dans une unique acception, d’autant moins utile qu’elle est utilisée à toutes les sauces.

Et maintenant que nous sommes lancés, nous n’avons aucune raison de nous arrêter là. Je parie que vous avez pensé à ce troisième terme fort utile: « adaptabilité ».

Nous sommes enfin à notre aise. Il s’agit tout simplement de la faculté de s’adapter ou, comme le propose le site Indeed (moteur pour l’offre et la recherche d’emplois), de la « compétence comportementale qui vous permet d'adopter et d'accepter des évolutions ou changements de façon rapide ».

Mais comment s’y retrouver avec ces trois notions : résistance, résilience, adaptabilité?

Pour m’en sortir j’ai demandé au chat de Mistral.ai de me simplifier tout cela. Voici sa réponse:

« En résumé, la résistance concerne la capacité à supporter des pressions sans changer, la résilience concerne la capacité à se remettre d'un choc, et l'adaptabilité concerne la capacité à changer et à s'ajuster à de nouvelles conditions. »

Content.e.?

Pas moi.

La dynamique est enclenchée mais ne s’arrête pas là. Nous sommes toujours dans la réaction.

Vers une théorie quantique de l’histoire ?

Ce qui manque?

L’anticipation d’un changement plus profond, d’une éventuelle mutation ou, mieux encore, d’une conception non-linéaire de l’histoire susceptible de se développer dans de multiples directions.

Bizarre? A première vue, bien sûr. Mais le temps est venu de prêter attention à ce qui se présente comme une « théorie quantique de l’histoire » proposée par le philosophe Slovène Slavoj ZIzek. Une approche qui s’appuie sur la physique la plus avancée et rejoint le taoïsme le plus ancien.

La « direction » de l’histoire n’est pas déterminable. Elle peut avancer, reculer ou faire un pas de côté résume Nathan Gardels dans Noéma Magazine.

C’est, peut-être, cela que nous devons comprendre.

J’y reviens aussi vite que je peux.

Plus que jamais vos commentaires, suggestions et critiques sont les bienvenus.

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02.04.2025 à 08:25

Tout casser, tout brûler, le « brokenism » pro Trump ≈069

Francis Pisani

Sur la violence qui permet à Trump de satisfaire son électorat et l’origine du terme qui l’explique...
Texte intégral (2079 mots)

Xi, Poutine et Trump ont en commun de vouloir «renverser la table», a déclaré Pierre Haski lors de sa récente intervention sur Hors Norme.

Image forte et d’autant plus belle que paradoxale.

Ils s’attaquent tous les trois à l’ordre international établi à l’issue de la deuxième guerre mondiale sous l’égide des US. On le savait du russe et du chinois dont on comprend facilement qu’ils s’en considèrent les victimes. La surprise tient au fait que Trump les rejoigne au motif que cet ordre ne lui convient plus.

Qu’il s’agisse de son besoin de simplicité, de sa sympathie pour les dirigeants autoritaires ou de son hypothétique espoir de séparer les deux autres, les tentatives d’explications les plus courantes me semblent insuffisantes.

Suivons le Klash des mots…

Brokenism-MuskChainsaw©EricLee-NYT https://www.nytimes.com/2025/02/21/us/politics/elon-musk-doge-cpac-chainsaw.html


De quelle table parlons nous? Échecs, go, poker… ou golf?

Les médias anglo-saxons parlent plus volontiers de renverser l’échiquier «overturn the chessboard». Une image que Poutine peut comprendre mais pas Xi, formé au go, ni le maître de Mar-a-Lago qui ne brille qu’au golf…

Il a pourtant dit à Zelensky qu’il n’avait pas toutes les «cartes».

Songeait-il au poker? Possible pour un homme de sa génération et de son style. Mais toujours avec son pistolet sur la table.

Dialogue vraiment difficile qu’il pourrait croire régler en renversant cette dernière, quel que soit le jeu qui s’y joue.

Mais j’ai du mal à imaginer qu’il veuille vraiment «du passé, faire table rase», comme le promettait l’Internationale, cette rengaine que Xi et Putin chantonnent depuis leur plus tendre enfance et à laquelle tout indique qu’ils ont renoncé.

Du bluff tout ça? En partie, comme toujours, mais la référence à la brutalité est omniprésente dans le jeu de Trump, plus présente encore dans sa politique interne.

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Politique intérieure

Il est courant pour les autocrates (et pas que) de mener des politiques apparemment contre productives, quand on les observe de l’étranger, mais sources de gains en politique intérieure, celle qui compte vraiment.

Or les sondages indiquent que 90% des Républicains sont contents des premières actions de leur président qui traite les autres par le mépris, la menace et parfois même la terreur sans la moindre envie de les séduire.

Début de piste?

J’en ai trouve une dans un débat organisé par le New York Times entre ses quatre chroniqueurs les plus conservateurs invités à répondre à la question : «Pourquoi tant de républicains apprécient-ils la direction que Trump donne au pays?»

On y trouve un peu de tout, l’immigration, le fossé grandissant entre parti démocrate et travailleurs, les méfaits du wokisme intolérant, la haine des élites ou le ressentiment généralisé.

Mais une explication se détache, formulée par David Brooks : «C'est l'idée que tout est cassé et qu'il faut tout brûler».

Brokenism

Il la prend dans un début de réflexion théorique formulée voici deux ans sur Tablet.com un «a Jewish magazine about the world» par sa directrice, la new yorkaise Alana Newhouse.

Sous le titre « Brokenism » («broken» veut dire cassé) , impossible à traduire, elle proposait une vision de la situation américaine selon laquelle « Le vrai débat aujourd'hui n'est pas entre la gauche et la droite. Il est entre ceux qui s'investissent dans nos institutions actuelles et ceux qui veulent en construire de nouvelles. »

En clair :

  • Les «brokenists», [celles et ceux qui se retrouvent dans cette approche] pensent que nos institutions actuelles, nos élites, notre vie intellectuelle et culturelle et la qualité des services dont beaucoup d'entre nous dépendent ont été vidées de leur substance. Pour eux, l'establishment américain, au lieu d'être une force de stabilité, est un enchevêtrement obèse et corrompu de pouvoirs fédéraux et d'entreprises qui menacent d'étouffer le pays tout entier.»

  • «Les brokenists viennent de tous les horizons de l'échiquier politique. Ils ne sont pas d'accord entre eux sur les types de programmes, d'institutions et de cultures qu'ils souhaitent voir prévaloir en Amérique. Ce sur quoi ils s'accordent - et c’est plus important que tout le reste - c'est que ce qui fonctionnait auparavant ne fonctionne plus pour un nombre suffisant de personnes.»

Laissez un commentaire.

Pour illustrer son propos elle les oppose aux «statu-quoïstes», parmi lesquels elle range aussi bien Alexandria Ocasio-Cortez, la jeune star latina et démocrate, que les Républicains opposés à Trump, comme Liz Cheney. Elon Musk et le célèbre investisseur Marc Andreessen sont des brokenists (que Deepl n’hésite pas à traduire par « cassandres »… formé à partir du mot « casser », ironie de la traduction automatique). Elle leur associe un peu vite Bernie Sanders qui ne me semble appartenir à aucun de ses deux groupes, lui qui n’a jamais confondu droite et gauche.

Je limite ici la nécessaire approche critique de la vision proposée. Il suffit, ici, d’enregistrer qu’elle existe.

« Tout casser pour que… »

Brutal. Limpide. Excellent pour la comm et manifestement simpliste, le terme « brokenism » appelle à la main mise sur la société américaine de la poignée de milliardaires réunis dans le bureau ovale. Comme me l’a fait remarquer l’ami Jacques Rosselin, il masque bien leur entreprise de destruction de l’État et tout ce qui est « bien commun ». Mais on les voit mal s’en prendre au système lui-même, l’hyper-capitalisme d'aujourd'hui.

Le terme rappelle, en fait, le doux Guépard de Lampedusa.

La violence en plus.

En passant de « tout changer pour que rien ne change » à « tout casser »… avec la même intention, il fait ressortir ce qui menace de devenir la caractéristique du régime Trump : la violence.

Symbolisée par la tronçonneuse de Musk, nous pouvons comprendre qu’elle détruise beaucoup tout en doutant qu’elle serve à trancher la branche sur laquelle ces messieurs sont - ou se croient? - bien assis.

Renverser la table autour de laquelle ils devraient causer sans scier la branche sur laquelle ils posent leurs fesses… n’est-ce pas là le défi des trumpists jouant aux brokenists?…

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20.03.2025 à 17:59

Guerre à « guerre » ≈068

Francis Pisani

Parlons Klash, nouvelle chronique sur la guerre des mots et des idées en collaboration avec le nouveau site Aquarius.news consacré à la défense, à l’Europe et à l’innovation.
Texte intégral (1755 mots)

Bonjour,

Un peu de nouveauté…

J’ajoute, à partir d’aujourd’hui, une rubrique consacrée à la guerre des mots et des idées : « Parlons Klash ».

Outre Myriades, elle apparaît aussi sur le nouveau site Aquarius.news nouveau media dédié à l’innovation civile au service de la défense et de la protection des citoyens. Une entreprise résolument européenne.

Voici comment je l’y présente:

Bonjour et bienvenue sur un champ de bataille où on perd, parfois, la vie et, trop souvent, la tête : la guerre des mots.

Mais attention : « Abandonnez toute certitude, vous qui entrez ici ».

On ne se baigne jamais deux fois dans le même mot. A nous d’en explorer la plexité (j’y reviendrai), les connexions, les réseaux de sens qu’anciens et nouveaux peuvent ouvrir, de s’y balader, d’en titiller les confins.

En bref, il faut se battre avec les mots, contre, pour et sans eux (ça arrive même aux clavitifs).

Parlons Klash!

« Guerre » ne veut plus rien dire

Chez nous, en Ukraine, la guerre est là.

A Varsovie, Berlin, Stockholm ou Chisinau, le mot est sur bien des bouches et dans bien des têtes. Elle guette, elle est proche, présente même.

Mais le mot n’a plus de sens. L’utiliser ne fait qu’augmenter la confusion, le brouillard qui l’accompagne toujours dirait-on en anglais (fog of war).

Le mot - pas sa réalité - ne veut plus rien dire.

Larousse le définit comme une « Lutte armée entre États »… « considérée comme un phénomène historique et social (s'oppose à paix) » précise Le Robert.

Ceux qui la font, Poutine, Netanyahou et plein d'autres, se gardent bien d’utiliser le terme qui les obligerait à respecter les règles du droit international.

Qui la déclare - George Bush contre la terreur et Macron contre la COVID - s’en prend à des problèmes que la guerre ne saurait résoudre et qu’on ne peut considérer comme réglés. « Une guerre peut prendre fin lorsqu'il y a reddition et capitulation de l'État vaincu » explique le site officiel Vie Publique.

L’Ukraine et la Russie sont donc bien « en guerre », même si l’agresseur ne le reconnaît pas. Destructions et victimes sont là pour en porter l’horrible témoignage. Mais l’invasion russe reste, officiellement, une « opération spéciale ».

Interrogez votre IA ou votre moteur de recherche préféré et vous verrez qu’à part trois conflits non conclus par des traités de paix, le monde ne connaît pas de guerre officielle en ce moment. Et pourtant, le nombre de conflits armés en cours s’élève à près de 60 pour le Peace Research Institute d’Oslo, à 110 selon la Geneva Academy.

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Une piste : « conflagration »

Le Figaro nous donne une belle et courte histoire de la vie française du mot « conflagration ».

  • Désignant au départ - en 1690 - un « incendie de ville, le terme s’applique aujourd’hui à un « Conflit international de grande envergure ».

  • L’évolution s’explique par l’origine latine du terme. « Flagrare » veut dire brûler. Accompagné du préfixe con (ensemble) il indique plusieurs éléments brûlant ensemble.

Et c’est là que, pour moi, con-flagration prend toute sa force.

« Guerre » a l’énorme défaut d’être strictement binaire. Il y a, ou il n’y a pas, on est, ou on n’est pas en « guerre ». Or il s’agit toujours de dynamiques complexes dont on espère rendre compte en les disant « hybrides » ce qui ne fait guère avancer le schmilblick (un autre terme sur lequel je pourrais revenir…).

Reste l’adjectif. On peut dire d’une situation et, avec encore plus de pertinence, d’une dynamique, qu’elle est « conflagrationnelle ».

Qui se refuse à dire que l’Europe est déjà en « guerre » aura du mal à nier qu’elle vit une situation « conflagrationnelle ».

Ça suffit pour se préparer, pour se mettre au travail comme Aquarius.news nous y invite.

Maintenant.

Pauvre Tolstoï

Mais, implacable logique, le mot « paix » auquel on aspire dans toute situation « conflagrationnelle » est aussi peu utilisable et, peut-être, encore plus mensonger que « guerre ». Pauvre Tolstoï !

Diplomates et politiciens s’en gargarisent.

Dès qu’ils brandissent le terme nous savons qu’ils se et nous trompent.

Shooté aux réalités alternatives Trump la promet. Moquette.

Je vois mal une figure responsable promettant de « déflagrer » la zone entre la Russie et l’Europe, mais aussi le Moyen Orient, les mers de la Chine du sud, le Myanmar, le Soudan etc.

Peu vraisemblable… mais que ce serait bon d’entendre parler Klash…

Allez vite y faire un tour sur Aquarius.news et... abonnez-vous.

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