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18.09.2025 à 21:36

Comment répondre aux menaces de Donald Trump sur le mouvement antifasciste

CrimethInc. Ex-Workers Collective

Donald Trump has declared that he is designating “Antifa” a “terrorist organization.” What does that mean? How can we prepare to weather the storm?
Texte intégral (3812 mots)

Le 17 septembre, dans un post publié sur Truth Social, Donald Trump a déclaré qu’il allait désigner « Antifa » comme « une organisation terroriste majeure ». Qu’est-ce que cela signifie ? Comment pouvons-nous nous préparer à affronter la tempête ?


Il est toujours difficile de savoir à quel point il faut prendre au sérieux les déclarations performatives de Trump. Il fait souvent des déclarations délirantes pour tester leur impact sur son public : il lance des idées en l’air pour voir ce qui fait mouche, et ensuite il s’acharne là où il n’y a pas de réaction en retour.

Mais cette fois, son administration suit à la lettre le manuel classique du fascisme. Un de ses partisans est même allé jusqu’à déclarer, sans ironie, que l’assassinat de Charlie Kirk était « l’incendie du Reichstag américain ».

L’étape suivante de ce manuel est évidente : élargir ses cibles, allant des immigré·es jusqu’aux anarchistes, aux gauchistes, et s’étendant au bout du compte à tous les opposant·es au régime.

Alors oui, par le passé, Trump a déjà fait des déclarations dans lesquelles il désignait « Antifa » comme une « organisation terroriste », notamment au début de la révolte qui a fait suite au meurtre de George Floyd.

Mais à l’époque, le reste du gouvernement fédéral jouait en grande partie un rôle de frein à son impulsivité1 alors qu’aujourd’hui, l’ensemble de l’exécutif fédéral est composé de serviteurs zélés qui sont incapables de distinguer leurs propres intérêts de ceux de Trump.

Certes, aucune loi ne permet au président de désigner des organisations terroristes intérieures. Mais même sans nouvelle législation ou nouveau décret, Trump a un contrôle direct sur le ministère de la Justice, le ministère de la Sécurité intérieure, le FBI et d’autres agences fédérales. Ce qu’il publie sur les réseaux sociaux indique probablement ce qu’il ordonnera bientôt à ses subordonnés.

Le fait que « Antifa » ne désigne pas une organisation en soi, mais plutôt une catégorie floue qui peut inclure à peu près n’importe quel opposition à son programme autoritaire, cela en fait un terme très pratique pour Trump 2. Cela signifie que peu importe qui vous êtes ou ce que vous faites, vous aussi pourriez devenir une cible.

Si aucune désignation d’« organisation terroriste intérieure » n’existe actuellement (et il n’existe aucun mécanisme évident pour en créer une), les procureurs d’extrême droite ont déjà l’habitude de porter des accusations infondées de terrorisme, pour intimider les militant·es et les participant·es aux mouvements sociaux. Trump a explicitement appelé à l’utilisation de la loi RICO3 pour réprimer ses détracteurs et détractrices. Certains sénateurs républicains soutiennent déjà un projet de loi qui ajouterait les émeutes à la liste des infractions poursuivies sous la loi RICO.

Il y a des précédents à ce qui pourraient se passer : ainsi, il y a deux ans, un grand nombre de personnes à Atlanta (Géorgie) ont été accusées au hasard sous la loi RICO pour leur implication dans le mouvement Stop Cop City.

Les procès ont été reportés sans cesse, et il y a moins d’une semaine, un juge a finalement rejeté la majorité des charges pour vice de procédure.4

Il reste à savoir dans quelle mesure l’administration mettra réellement à exécution les menaces de Trump, et si elle commencera par s’attaquer à des groupes de base ou agira de manière descendante, en ciblant de grandes institutions libérales et des plateformes de financement.

Dans tous les cas, notre avenir à long terme dépendra de notre capacité à permettre à un grand nombre de personnes d’agir solidairement, en adoptant des formes d’action directe à la base, qui peuvent être efficaces même si les personnes au pouvoir refusent d’écouter.

C’est pourquoi chacun devrait consulter les suggestions ci-dessous, que vous pensiez ou non qu’elles vous concernent directement. Plutôt que de céder à la panique, il s’agit de se préparer concrètement afin d’aborder cette situation calmement et efficacement.

Ne pas se laisser intimider.

Garder le moral est essentiel à la résistance. Ne nous rendons pas sans lutter ! Nos adversaires veulent nous soumettre par la peur, car ils savent qu’ils ne peuvent pas nous vaincre par la seule force brute. N’oubliez pas que la gestion des perceptions est au cœur du projet fasciste : ils cherchent à projeter leur force en permanence, précisément parce qu’ils ne sont pas invincibles. Même lorsque la situation semble désespérée, gardez espoir et continuez le combat ! Le défaitisme ne sert que l’ennemi.

Plusieurs exemples récents montrent qu’un mouvement déterminé peut vaincre la répression. Ainsi, le 20 janvier 2017, quelques heures après l’investiture de Trump, des centaines de personnes ont été arrêtées et chargé·es de huit chefs d’inculpation chacun·e (dont deux qui n’existaient même pas dans la loi). Plutôt que de plaider coupable ou de se battre individuellement, près de 200 personnes ont choisi de se défendre collectivement. Après un an et demi, toutes les charges ont été abandonnées.

L’affaire RICO de Stop Cop City a échoué jusqu’à présent pour les mêmes raisons, car ces affaires reposent souvent sur la capacité à effrayer certains accusé·es pour les pousser à coopérer. Si les accusé·es forment un front uni et sont soutenu·es avec force, les principaux atouts de l’État s’évanouissent. La solidarité, c’est le pouvoir !

Misez sur vos points forts.

Trump dirige des institutions centralisées, hiérarchiques, figées et axées sur le profit. Il préfèrerait affronter un adversaire qui leur ressemble. Or, à l’opposé, nos mouvements sont pour une très large part horizontaux, décentralisés, sans hiérarchie officielle ni dépendance financière. C’est une bonne chose, car cela rend moins crédibles les fables inventées par les procureurs, et les autorités ne savent pas qui cibler : si elles doivent se concentrer sur la population toute entière, si la résistance peut surgir de toutes parts, elles ne pourront pas concentrer leurs forces.

Les autocrates de tout poil ne sont pas en mesure de réprimer toutes celles et tous ceux qui s’opposent au fascisme. Le 14 juin 2025, ce sont plus de 5 millions de personnes qui sont descendues dans la rue lors de la manifestation « No King » pour défier Trump. La sécurité ne viendra pas de la clandestinité, mais bien de la diffusion massive de nos tactiques, au sein d’un élan de résistance le plus large possible.

Toutes celles et tous ceux qui s’opposent au fascisme sont antifascistes. En cherchant à cibler tous ceux qui s’opposent au fascisme, Trump ne peut pas digérer ce qu’il tente d’avaler, à condition de ne pas le laisser faire.

Préparez-vous à des perquisitions.

Apprenez quoi faire en cas de visite de la police ou d’agents fédéraux, que ce soit pour une demande d’information, une assignation à comparaître, ou une perquisition. Sauvegardez vos données informatiques et stockez-les en lieu sûr. Retirez de chez vous tout ce qui pourrait être compromettant entre de mauvaises mains. Mettez vous en lien dès maintenant avec un·e avocat·e.

Si une perquisition a lieu chez quelqu’un d’autre, filmez-la : plus l’attention sera portée sur chaque attaque de l’État, plus il y aura de monde en sécurité.

Informez vos ami·es à l’avance de la manière dont ils peuvent vous soutenir en cas de perquisition ou d’arrestation, qu’il s’agisse de nourrir votre chat, de vous occuper de vos enfants ou de contacter votre employeur ou des membres de votre famille. Faites connaître vos intentions à l’avance : par exemple, si vous êtes arrêté·e, préférez-vous être libéré·e sous caution immédiatement ou attendre de voir si votre caution est réduite ? Plus vous préciserez ce que vous souhaitez à l’avance, mieux ce sera. Dans le pire des cas, vous éviterez que des branches rivales de votre comité de soutien se disputent vos préférences sans pouvoir les trancher.

Soyez transparent·e face à la répression.

Si vous êtes ciblé·e par la répression, parlez-en ouvertement. Leur objectif est de vous isoler et de vous rendre paranoïaque. Si vous êtes déjà dans leur collimateur, vous n’avez aucun intérêt à essayer de cacher qu’ils vous ciblent. Ne leur facilitez pas la tâche, ne vous rendez pas inutilement facile à repérer, mais renforcez vos relations publiques. Si des agents fédéraux vous rendent visite ou vous assignent à comparaître, le meilleur moyen d’obtenir le soutien nécessaire et de conserver la confiance de votre communauté est de refuser de coopérer, de documenter toutes les rencontres et de les rendre publiques afin que tout le monde soit au courant.

Ne soyez pas irremplaçable.

Si vous participez à un projet formel ou informel, assurez-vous que les autres sachent comment faire la même chose que vous. Cela vaut pour vous, individuellement, comme pour tous les groupes auxquels vous participez. Diffusez vos compétences et vos connaissances à grande échelle. Faites une copie de la clé de la librairie, partagez les identifiants de votre compte de réseau social avec une personne de confiance, aidez les autres à organiser une distribution alimentaire ou fournir une aide juridique… Faciliter la tâche des autres pour vous remplacer peut diminuer le risque d’être ciblé·e.

De même, diffusez au plus grand nombre les informations sur la lutte contre la répression : organisez des formations dans votre communauté sur la sécurité et distribuez des documents à ce sujet. Expliquez aux gens comment réagir si des agents de l’État les poussent à devenir des informateurs ou les assignent à comparaître devant un grand jury. Plus les gens sont informés, mieux c’est, car les agents fédéraux commencent parfois par exercer des pressions sur celles et ceux qu’ils perçoivent comme étant en marge des mouvements sociaux.

Organisez un soutien collectif.

Tendez la main à celles et ceux qui sont dans la même situation : par exemple, si vous gérez une librairie ou un groupe étudiant, vous pouvez créer un réseau de projets similaires afin que chacun·e puisse agir dès que l’un·e d’entre vous est ciblé·e par la répression. Réfléchissez aux moyens de pression que vous pouvez utiliser pour vous assurer que toute attaque contre vous va mobiliser les gens au lieu de les intimider.

Préparez une liste de contacts et une liste de réponses adaptées à différents scénarios. Distribuez des copies de ces documents aux camarades sur lesquels vous pouvez compter pour vous soutenir en cas de répression, afin que, dès qu’un incident se produit, chacun·e soit informé·e et sache quoi faire. Exemple de message : « Si nous sommes arrêtés et non libérés immédiatement, [nom du groupe] tiendra une conférence de presse le lendemain, [nom de la personne] mènera une campagne de communication en ligne et [une autre personne] organisera une collecte de fonds. »

Discréditer la police et les tribunaux.

Alors que Donald Trump et ses hommes de main cherchent à plier le système juridique à leur volonté et à le contourner carrément quand ce n’est pas possible, cela comporte certains inconvénients, car cela délégitime les institutions desquelles ils dépendent malgré tout. De manière encourageante, plusieurs grands jurys ont refusé d’inculper des personnes accusées par les procureurs à la solde de Donald Trump. Nous devrions populariser la tactique de l’annulation du jury comme un moyen par lequel les jurés ordinaires peuvent gripper les engrenages de la répression fédérale. Dans la mesure du possible, nous devrions éroder la foi aveugle du public dans les institutions que Trump utilise pour mener ses actions répressives.

Malgré les fausses promesses des politiciens libéraux, la vague d’élan vers le définancement de la police qui a culminé en 2020 n’a pas assuré de changements majeurs dans la législation ou les budgets ; le seul effet durable du mouvement a été que, grâce à l’action populaire, de nombreuses personnes ont été contraintes de quitter les forces de police. Aujourd’hui, exercer une pression continue de basse intensité contre l’administration Trump et ses laquais diminuera le nombre de personnes qui sont prêtes à servir Trump en tant que traîtres à leurs communautés, que ce soit en tant qu’agents de l’ICE ou à un autre titre.

Fracturer la classe politique.

Nous avons besoin d’une stratégie pour obliger les politicien·nes de « l’opposition » à entraver réellement l’État policier plutôt que de simplement se tenir à distance. Sans pression, la plupart des politicien·nes vont simplement cultiver leur image plutôt que d’aider celles et ceux qui sont attaqué·es. Leur image dépend de la façon dont est perçue leur opposition à Trump : cela peut offrir des points d’appui pour les pousser à prendre position.

Identifiez chaque institution, groupe et individu influent auquel vous avez accès et qui n’est pas inextricablement investi dans la montée du fascisme. Voyez de quels moyens vous disposez pour faire pression sur chacun d’eux. Avec certain·es, une conversation suffira ; avec d’autres, cela pourra nécessiter d’autres moyens. Fixer des objectifs concrets : dissuader les demandeurs d’emploi de travailler pour l’ICE, obtenir de personnalités influentes qu’elles fassent des déclarations de solidarité ou contraindre des politiciens locaux à demander à la police de ne pas coopérer avec les opérations fédérales. L’État policier exige le bon fonctionnement de l’ensemble de l’appareil de pouvoir ; cela le rend vulnérable à de multiples niveaux.

Les libéraux qui ont contribué à créer une fracture entre Trump et Elon Musk simplement en tenant des pancartes chez les concessionnaires Tesla ont démontré comment diviser l’alliance qui soutient Trump. Cela devrait être reproduit encore et encore, en ciblant en particulier celles et ceux qui sont impliqué·es à la marge, plutôt que celles et ceux qui sont plus profondément engagé·es dans son projet autoritaire. Il faut saper les piliers de sa structure de soutien un par un.

Les États-Unis sont polarisés et divisés, tant au niveau régional que local. Si les communautés, les villes ou des régions entières peuvent éventuellement se mettre concrètement hors de portée de la répression fédérale, un modèle de véritable résistance émergera.

Passer à l’offensive.

Aux échecs, avec un jeu purement défensif, vous perdrez la partie. Pour faire face à la prise de pouvoir de Trump, nous avons besoin de stratégies proactives. Plutôt que de simplement réagir encore et encore, nous devons choisir l’heure et le lieu des conflits ; cela peut être un moyen de bloquer les ressources et les cycles de travail qui seraient autrement dirigés contre nous.

Les politiques oligarchiques de Trump appauvrissent des millions de personnes à travers le monde. Nous devons montrer comment répondre aux besoins urgents qu’il crée, en véhiculant une vision révolutionnaire de changement social. La meilleure défense, c’est l’attaque !

Refuser la division.

Lorsque la répression réussit, son effet le plus dommageable n’est pas son impact immédiat, mais les lignes de fracture qu’elle ouvre. L’objectif principal de Trump est de nous faire douter de nous-mêmes, et de nous monter les un·es contre les autres. Résoudre les malentendus et les conflits est un élément fondamental de la résistance.

Présentez des critiques de bonne foi, en ouvrant la porte à celles et ceux qui sont actuellement vos rivales et rivaux pour qu’iels deviennent éventuellement des allié·es, à condition qu’iels apprennent à se comporter de manière responsable. Ceux qui répandent la division et entretiennent des relations toxiques font le travail de l’État.


Thanks to La Horde for the translation.

  1. Par exemple, le tweet de Trump à la fin du mois de mai 2020 a été suivi d’une déclaration similaire du procureur général William Barr, qui s’était déjà plaint publiquement de Trump et avait été contraint de démissionner quelques mois plus tard. Le directeur du FBI à l’époque, Christopher Wray, a reconnu lors d’une audition que « antifa » est une idéologie, pas une organisation. 

  2. À noter qu’en Italie, les procureurs ont souvent traité des mouvements flous tels qu’Autonomia Operaia comme s’il s’agissait d’organisations formelles, et ont fabriqué de toutes pièces des organisations imaginaires là où il n’en existait pas, comme dans le cas de l’« Organisation révolutionnaire anarchiste insurrectionnelle ». 

  3.  NdT : le Racketeer Influenced and Corrupt Organizations Act est une loi fédérale américaine qui concerne les activités d’une organisation criminelle. 

  4. Sous Donald Trump, de nombreuses agences fédérales sont désorganisées, ce qui expliquent les accusations RICO de manière chaotique en Géorgie il y a deux ans. Si l’évolution de l’affaire RICO liée au mouvement Stop Cop City peut servir d’indication sur la manière dont d’autres persécutions via la loi RICO contre des activistes pourraient se dérouler, la principale menace n’est peut-être pas que la répression voulue par Trump envoie des gens en prison, mais plutôt que ces accusations découragent et paralysent les personnes visées, créant ainsi les conditions pour que son administration remplace cette forme de répression par quelque chose de pire. 

04.09.2025 à 12:00

Depuis les soulèvements Indonésiens : « Affan Kurniawan est vivant dans nos rues. »

CrimethInc. Ex-Workers Collective

Cet article compile une interview l’entretien d’un écrivain anarchiste indonésien emprisonné et des témoignages de différents groupes anarchistes ayant activement pris part à la révolte.
Texte intégral (4563 mots)

Fin août 2025, une vague de manifestations s’est propagée à travers l’Indonésie. Cet article compile une interview l’entretien d’un écrivain anarchiste indonésien emprisonné et des témoignages de différents groupes anarchistes ayant activement pris part à la révolte.


Après l’annonce de nouvelles mesures d’austérité, des manifestations se sont répandues pendant des semaines à travers l’Indonésie avant de culminer la semaine du 25 août pour dénoncer le mépris et la corruption de l’élite politique du pays.

Le gouvernement indonésien rémunère les représentants du parlement d’un salaire mensuel de 100 millions de roupies indonésiennes (environ 5 193,29 €) - soit à peu près trente fois le salaire minimum à Jakarta, où les salaires sont pourtant les plus élevés du pays. La colère a éclaté lorsque les gens ont appris que les députés s’apprêtaient à bénéficier d’une allocation de logement de 50 millions de roupies chaque mois, alors que le pays connait une grave inflation, que la pauvreté s’étend et que des mesures austéritaires sont mises en place.

En réaction, les syndicalistes, les anarchistes, les étudiants, les gauchistes et la jeunesse en générale ont envahi les rues la semaine du 25 août. La répression policière, aux ordres de l’ancien ministre de la défense et actuel président, Prabowo Subianto a été très dure. Le 28 août, un véhicule blindé de la police nationale a percuté et tué Arfan Kurniawan, un livreur de 21 ans qui passait par-là pour une course.

Un manifestant en Indonésie tient une pancarte où l’on peut lire : « Arfan Kurniawan- tué par la police ».

En réponse au meurtre d’Affan, les livreurs, les anarchistes et les jeunes de différents milieux se sont révoltés. Les manifestants ont saccagé plusieurs commissariats, brulé et pillé des maisons de politiciens, et mis le feu a plusieurs bâtiments du gouvernement.

La situation a forcé le premier ministre à annuler sa participation au sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai. Le gouvernement a suggéré qu’ils pourraient supprimer certains avantages accordés aux politiciens et certaines des mesures d’austérité qui ont déclenché le soulèvement.

Néanmoins, le président Prabowo Subianto a choisi d’intensifier la répression et fait appel à l’armée. Au moins 6 morts ont été recensés : un étudiant a été battu à mort par la police à Yogyakarta et un vélo-taxi est décédé des suites d’une exposition aux gaz lacrymogènes à Solo. Le nombre exact de morts est inconnu. 

Gouverné par les colons hollandais jusqu’à 1949, l’Indonésie est un pays très divisé avec de grandes disparités de moyens et de pouvoir. Dans les années 1960, la répression des sympathisants présumés parti communiste d’Indonésie a fait des centaines de milliers de morts. Le mouvement anarchiste contemporain a émergé à la fin des années 80, grâce, notamment, à l’apparition de groupes de punk. En 2011, la police a créé une division « anti-anarchistes » et à de nombreuses occasions, celles et ceux perçus comme des punks anarchistes ont été enlevés et incarcérés dans des camps de rééducation de l’État. Malgré cela, le mouvement anarchiste a continué de prendre de l’ampleur.

Au vu du niveau de répression global à travers le monde, le courage de la révolte indonésienne a de quoi inspirer toutes celles et ceux qui rejettent l’ordre des choses capitaliste. Les manifestants en Indonésie ont rencontré des formes variées de répression et de blocage des moyens de communications numériques. Il est vraisemblable que ces mesures s’intensifient à mesure que le mouvement continue de croître. Nous espérons que ces premiers comptes rendus attireront l’intérêt et la solidarité que le soulèvement mérite et que chacun en tirera les enseignements nécessaires.

Affan Kurniawan ne sera pas oublié et ses tueurs ne seront pas pardonnés. Solidarité avec celles et ceux qui, dans la rue, s’en assurent.

-Des anarchistes solidaires du soulèvement indonésien

Des manifestants se rassemblent devant le quartier général de la police de la région de Jakarta.


Une conversation avec le prisonnier anarchiste et auteur, Bima

Bima est un écrivain anarchiste, traducteur et chercheur indépendant d’Indonésie emprisonné depuis 2021. Il reste actif derrière les barreaux en tant que membre de la fédération anarchiste.

Il est également le fondateur de la maison d’édition DIY Pustaka Catut et l’auteur du livre Anarchy in Alifuru : The History of Stateless Societies in the Maluku Islands, aux éditions Minor Compositons. Vous pouvez soutenir Bima via son Patreonet en savoir plus sur la campagne FireFund.

Cette interview a été menée dans les premiers jours de Septembre 2025.

Comment peut-on te présenter ?

Je suis un écrivain, un prisonnier et un membre d’une fédération anarchiste choisissant de rester anonyme pour des raisons de sécurité en ces temps effrayants.

Peux-tu nous éclairer sur le contexte du soulèvement en cours ?

Cette vague de rébellion d’août 2025 a été causée par une accumulation de colère concernant des problèmes politiques et économiques variés. Il n’y avait pas une seule et unique cause. Mais tout s’est aggravé en raison des augmentations conséquentes des impôts fonciers à travers la région, cela du fait du déficit du budget du gouvernement.

En même temps, les membres du parlement ont multiplié leurs salaires par dix. Tout a été exacerbé par les déclarations souvent facétieuses des politiciens. Par exemple, le régent de Pati (le politicien en charge de superviser le gouvernement local, les politiques et les services publics dans la régence de Pati, Central Java) a déclaré : « ces impôts ne vont pas baisser, même si une manifestation de masse de cinquante mille personnes a lieu. »

Pati a été la première ville a s’embraser avec un rassemblement d’environ cent mille personnes le 10 août 2025. Les manifestations contre l’augmentation des impôts se sont propagées jusqu’à Bone (dans la province de Sulawesi du Sud), puis dans d’autres villes. Pendant une manifestation le 28 août à Jakarta, un livreur d’une plateforme en ligne de livraison a été tué après avoir été percuté par un véhicule de police au milieu d’une manifestation. Le jour suivant, les manifestations se sont étendues à de nombreuses villes et elle continuent de s’étendre pendant que je vous écris.

Au moins six civils ont été tués directement par la répression policière jusqu’à présent, diverses maisons d’officiels ont été pillées et une demi douzaine de bureaux de représentants du conseil représentatif du peuple ont été partiellement ou entièrement brûlés. Nous étions convaincus que la rébellion allait se calmer, mais ce n’est pas le cas.

Des étudiants font face à la police durant une manifestation aux quartiers généraux régionaux de la police de Jakarta, Indonésie. 29 août 2025.

Quels types de groupes ont été impliqués dans le soulèvement ? Et dans quelle mesure s’organisent-ils ensemble ?

Il y a eu beaucoup d’organisations, de réseaux et de groupes qui ont formulé des revendications. On pourrait dire que chaque ville a ses propres revendications. De manière générale, il y a deux revendications « révolutionnaires » : la première vient du parti socialiste d’Indonésie, Perserikatan Sosialis (PS), et l’autre d’un réseau informel, décentralisé , qui a diffusé la Déclaration de la révolution fédéraliste indonésienne de 2025, qui appelle à la dissolution de l’État du système du DPR (chambre des représentants d’Indonésie) et à son remplacement par un confédéralisme démocratique. Ahmad Sahroni, un membre de la chambre des représentants (DPR) du parti démocrate national (NasDem), a qualifié ces revendications de « stupides ». Cela a entrainé l’attaque et le pillage de sa maison de Jakarta, le 30 août.

Les anarchistes insurrectionnels, individualistes, et post-gauchistes se concentrent sur les attaques et les affrontement urbains, ils appelant à la destruction de l’État et du capitalisme, mais ne se soucient pas des plate-formes et programmes qui appellent à réformer l’organisation sociale en place. De manière générale, il n’ya pas de front uni, mais nous évitons le sectarisme idéologique excessif.

Malheureusement, il y a aussi la gauche progressiste avec des revendications plus réformistes, comme la 17+8 demand (un slogan « pro-démocratie » appelant à des réformes avant le 5 septembre). Ce groupe est hautement influencé par les influenceurs libéraux en ligne qui appellent à la fin des manifestations. Ces influenceurs ont été jusqu’à déclarer que si la loi martiale était instaurée ce serait à cause de l’intensité de la résistance dans la rue et que les manifestants en seraient donc responsables. Soit une tentative de récupération centriste typique par le gaslighting et la diabolisation des organisations révolutionnaires.

Heureusement, tous les éléments de gauche et anarchistes sont d’accord sur le fait que les manifestations doivent s’intensifier. Nous ne savons pas ce qui va se passer pour l’instant, étant donné que cette guerre des discours est toujours en cours.

Pour être honnête, il y a trop de groupes impliqués dans le soulèvement pour offrir une réponse simple. La gauche entière et le mouvement anarchiste de différentes organisations a pris la rue, mais il n’y avait pas de front uni. Dans chaque ville, des progressistes, qu’ils soient des étudiants, des syndicats ou même des élèves, se rejoignent dans les actions. Certaines de ces actions, comme les attaques de commissariats, sont des initiatives spontanées sans réelle coordination.

Un poste de police de la circulation brûle, le 29 août 2025.

Comment les anarchistes contribuent-ils au soulèvement ?

Je suis un révolutionnaire pessimiste, influencé par les discours anarcho-nihilistes. Mais je plaide tout de même pour une révolution sociale parce qu’il n’y a pas d’espace social vide. l’Indonésie est l’archipel le plus multi-culturel du monde, avec de milliers de langues et d’ethnies. Un discours de séparatisme refait surface dans certaines régions. Certains nobles émanant de monarchies anciennes poussent pour leur renouveau. Il y a aussi des islamistes autoritaires, fondamentalistes et djihadistes qui veulent un califat dans le pays. Donc je pense qu’il est nécessaire pour les révolutionnaires de proposer leur programme comme alternative à toutes ces mauvaises possibilités. La vague de rébellion est le symptôme d’une grande division imminente et les anarchistes doivent assumer le rôle qu’ils ont à jouer. Sinon, les autres options sont mauvaises. Très mauvaises.

Que penses-tu qu’il va advenir de ce soulèvement ? Et comment vois-tu le futur du mouvement anarchiste en Indonésie ?

Je suis pessimiste a ce sujet. Nous nous sommes établis dans un certain nombre de villes, mais nous sommes relativement faibles de manière générale, même si nous sommes fondamentalement assez militants.

Nous sommes influencés par l’approche uruguayenne de Espesifismo qui implique deux aspects organisationnels. Cela veut dire qu’en plus que de rejoindre les organisations politiques, nous rejoignons aussi les mouvements populaires comme les syndicats, les organisations étudiantes, les organisations indigènes, etc.

Nous utilisons toujours la définition classique du mot révolution mais cela requiert une base organisationnelle solide pour qu’elle advienne. Malgré cela, les récents soulèvements se sont répétés, comme un cycle, depuis 2019. C’est excitant car cela signifie que nous devons nous pousser a tenir le rythme avec les soulèvements populaires et la volonté des masses. Mais nous devons croitre et augmenter notre militance pour rester pertinent vis-à-vis de la rage des gens.

Je ne crois pas qu’il y aura de réformes, a moins qu’il y ait un violent renversement du pouvoir et des réformes promises. La classe gouvernante a formé une coalition élargie qui contient tous ses anciens opposants et leur donne une part du gâteau. Pour l’instant, nous sommes les seuls membres de réseau informel, décentralisé et anti autoritaire a réclamer la départ du président et du vice président. Donc, la refonte va encore prendre du temps et une révolution anarchiste est impossible en raison de la faiblesse organisationnelle et l’absence de syndicats progressistes capables de mener une grève générale.

Toutefois, il y a eu des avancées qui seraient parues inimaginables il y a quelques décennies : la revendication populaire de dissolution du parlement avec le hashtag #bubarkanDPR [“dissoudre le DPR”], l’implication de masses plus diverses de gens dans les manifestations (l’Indonésie est connue pour romancer l’avant-gardisme des étudiant de 1965 et 1998) et l’usage généralisé de la violence. Les anarchistes ont joué un rôle crucial dans tout cela. Cependant, je ne pense personnellement pas que le mouvement anarchiste va mener a une révolution anarchiste, même si l’opportunité existe. Mais cela pourrait exercer une immense influence libertaire à travers un front uni travaillant à l’intérieur des groupes établis. Par exemple, la proposition d’un confédéralisme démocratique révolutionnaire, qui est en fait alignée sur les propositions anarchistes classiques, pourrait être acceptée par le spectre entier de la gauche existante et des mouvements séparatistes de libération nationale dans certaines régions. C’est en tous cas de l’ordre du possible.

Les manifestations de 2020 contre la loi Omnibus étaient elles aussi importantes mais celles de cette année sont les plus violentes (de nombreuses et considérables parties de la société se radicalisent). Pour l’instant, le soulèvement n’a pas dépassé en intensité la chute du gouvernement militaire de Suharto en 1998. Cependant, je crois que cela pourrait arriver bientôt.

Malheureusement, j’ai prévenu que le moment venu, nous ne serons pas prêts pour la révolution, même si nous prendrons activement part aux affrontements de rue.

Des anarchistes bloquent des rues et brûlent des choses pendant les émeutes de nuit à Bandung City, west Java, en portant le drapeau anarchiste rouge et noir et celui du Jolly roger, de One pièce.


D’autres voix d’Indonésie

 En plus de l’interview de Bima, nous avons reçu le 2 septembre ce récit de Reza Rizkia à Jakarta :

La vague de manifestations qui a débuté le 25 août 2025 à travers l’Indonésie se poursuit, laissant derrière elle une traînée de tragédies et de troubles. Ce qui avait commencé comme une protestation contre la proposition d’une allocation mensuelle de 50 millions de roupies pour les membres du Parlement s’est transformé en un mouvement national avec des revendications plus larges : l’évaluation des actions du parlement, la réforme de la police et la fin de l’usage excessif de la force par les forces de sécurité. 

Le 28 août, les tensions se sont intensifiées après qu’un chauffeur de taxi-moto, Affan Kurniawan, a été percuté et tué par un véhicule tactique de la Brigade mobile (Brimob) à Bendungan Hilir, Jakarta. La vidéo de l’incident s’est rapidement répandue sur les réseaux sociaux, déclenchant des manifestations de solidarité de la part des étudiants et des communautés de chauffeurs en ligne. Cette tragédie a marqué un tournant, amplifiant l’ampleur des manifestations dans la capitale et dans tout le pays.

La violence s’est rapidement propagée à d’autres grandes villes. À Makassar, des manifestants ont incendié le bâtiment du parlement régional (DPRD), tuant trois membres du personnel piégés à l’intérieur. À Solo, un conducteur de pousse-pousse nommé Sumari a trouvé la mort lors d’affrontements, tandis qu’à Yogyakarta, l’étudiant Rheza Sendy Pratama a été tué lors d’une manifestation devant le siège de la police régionale. Une autre victime, Rusmadiansyah, un chauffeur en ligne, a été battu à mort par une foule après avoir été accusé d’être un agent des services de renseignement. Certains rapports font également état d’autres victimes, notamment un élève d’une école professionnelle à Pati. Au total, au moins sept à huit personnes ont perdu la vie dans les troubles qui ont secoué le pays jusqu’à la fin du mois d’août.

Le gouvernement a réagi en présentant ses condoléances. Le président Prabowo Subianto a ordonné l’ouverture d’une enquête, tandis que le chef de la police nationale et le chef de la police de Jakarta ont présenté des excuses publiques pour les victimes. Sept agents de la Brimob liés à la mort d’Affan Kurniawan ont été placés en détention et font l’objet de poursuites judiciaires. Cependant, la colère populaire ne semble pas s’apaiser.

Au 2 septembre, les manifestations se poursuivent dans plusieurs régions avec une intensité soutenue. Des milliers de manifestants ont été arrêtés au cours de la semaine dernière, avec un pic le 29 août où plus de 1 300 personnes ont été arrêtées en une seule journée. Dans le même temps, l’Alliance des journalistes indépendants (AJI) a signalé des cas de violence et d’ingérence à l’encontre de journalistes couvrant les manifestations.

Les manifestations de fin août constituent l’une des plus grandes vagues de protestations de ces dernières années en Indonésie. Avec le nombre croissant de morts, les arrestations massives et les dégâts matériels généralisés, la population attend désormais de voir si le gouvernement et le parlement répondront aux demandes des citoyens par de véritables réformes, ou s’ils prendront le risque d’aggraver encore la crise.

Le drapeau national rouge et blanc a été abaissé, remplacé par le drapeau anarchiste rouge et noir et le drapeau Jolly Roger de One Piece (aujourd’hui symbole populaire de la résistance en Indonésie). Le bâtiment incendié était la Chambre des représentants de la ville de Pekalongan, Central Java.


Lorsque le soulèvement a commencé à faire la une des journaux internationaux, des anarchistes anonymes ont rédigé plusieurs déclarations signées L’archipel du feu. Nous avons souhaité relayer leurs voix également.

25 août 2025

« Jakarta n’appartient plus aux élites corrompues. Des milliers de personnes venues des quatre coins du pays ont pris d’assaut la capitale. Il ne s’agit pas seulement d’une manifestation, mais d’une explosion collective de rage contre la hausse des taxes foncières, la corruption sans fin et les chiens de garde militaires et policiers de l’État.

De l’aube jusqu’à minuit, les rues se transforment en champ de bataille de la défiance. Les cris, les incendies et les pierres deviennent le langage de la fureur du peuple.

Ce n’est pas un spectacle de marionnettes orchestré par les élites ; c’est une colère brute, sauvage, sans chef et impossible à contrôler. »

29 août 2025

« Les jeunes en colère se soulèvent, poussés par la hausse des impôts et une armée répressive. Il n’y a pas d’organisation ; l’insurrection est menée par de jeunes anarchistes, nihilistes et incontrôlables. De nombreux jeunes anarchistes issus d’associations d’élèves du secondaire sont arrêtés. Les lycéens sont notre source d’énergie. Selon les rapports, environ 400 d’entre eux ont été arrêtés le 25 août. La plupart des actions sont coordonnées en direct sur les réseaux sociaux.

« Habituellement, un syndicat libéral ou un parti d’opposition contrôle le discours, mais pas cette fois-ci. Même les médias traditionnels reconnaissent que les réseaux sociaux sont la source de l’information. Les politiciens ne peuvent plus contrôler le discours. Depuis des décennies, les instances étudiantes exécutives sont généralement les instigatrices de ce type de manifestations, mais chaque année, ces intermédiaires sont mis dehors. Par les étudiants eux-mêmes. C’est pourquoi les ONG, les syndicats, les « anarchistes civils » et les associations étudiantes de gauche et de droite détestent la faction anti-organisationnelle.

 « Qu’ils aillent tous se faire foutre. Nous incitons les jeunes à agir par eux-mêmes.

Les individus ne sont plus effrayés par le devoir idéologique, les normes et toutes ces valeurs externes.

 Hier soir (28 août 2025), la police a assassiné quelqu’un. Des émeutes contre la hausse des impôts ont éclaté dans tout le pays. Dans plusieurs villes, les émeutes étaient spontanées et auto-organisées. L’image publique de la police continue de s’effriter, car la population soutient les émeutiers. Des cellules ont coordonné d’autres actions, et la plupart des prises de paroles nihilistes et insurrectionnelles dominent le discours. 

Des comptes anonymes sur les réseaux sociaux, suivis par des milliers d’abonnés, appellent à l’insurrection anti-politique. Chaque jour, ils lancent des appels et donnent des explications pertinentes.

Les négociateurs syndicaux ont annoncé qu’ils seraient dans la rue et qu’il n’y aurait « pas d’émeutes », mais les jeunes et les émeutiers se moquent immédiatement d’eux sur les réseaux sociaux. Nous laissons faire les jeunes. Nous ne pouvons que les encourager à être encore plus incontrôlables. La nuit, Internet est devenu ingérable. Alors que les « anarchistes civils » appellent à la création de conseils populaires, nous appelons à tout foutre en l’air. Nous fournissons uniquement une coordination en réseau et des informations techniques sur les actions de rue. Nous n’organisons jamais vraiment les gens. 

« Depuis le vendredi 29 août, les anarchistes contrôlent essentiellement le discours. Partout dans le pays, les gens répondent à l’appel à attaquer les commissariats et les policiers eux-mêmes. Les médias de masse ont perdu le contrôle de l’information et de l’actualité.

« Notre réseau continue d’appeler à la vengeance depuis le meurtre commis par la police hier soir, et la situation s’envenime. Les cellules sont dans la rue.

 « Vous pouvez voir le soulèvement sur diverses chaînes d’information, mais toutes les bonnes vidéos ne sont disponibles que sur les réseaux sociaux. »

-Archipel de feu

« Cela dépasse nos prévisions. Habituellement, lors d’une manifestation, les manifestants se contentent de jeter des pierres ou de brûler un pneu devant le bureau. Ils ne prennent jamais d’assaut le bâtiment et ne le brûlent jamais. »

Anarchistes anonymes en Indonésie

Graffiti anarchiste vu à Lamongan, en Indonésie, pendant les troubles actuels.


À lire aussi


Thanks to Lundimatin for the translation.

01.07.2025 à 22:27

Une autre guerre était possible

CrimethInc. Ex-Workers Collective

En revisitant les luttes de ce début de siècle du point de vue de notre dystopie actuelle, nous pouvons bien mieux comprendre tout ce qui ce joue dans les combats d’aujourd’hui.
Texte intégral (4278 mots)

En revisitant les luttes de ce début de siècle du point de vue de notre dystopie actuelle, nous pouvons bien mieux comprendre tout ce qui ce joue dans les combats d’aujourd’hui.

Le texte qui suit apparaît en introduction du livre Another war was possible, publié par PM PRESS, qui retrace et documente les expériences de lutte d’un anarchiste luttant contre le capitalisme et l’État sur trois continents différents au cours du mouvement anti-globalisation. Vous pouvez en lire plus à ce sujet dans l’annexe.


C’était la fin du 20e siècle et le capitalisme avait triomphé.

« Le socialisme réel » s’était effondré. Des élections avaient lieu partout, amenant de nouveaux politiciens au pouvoir pour signer des accords commerciaux néolibéraux. Au lieu des dictatures, le libre marché règnait victorieusement.

Francis Fukuyama l’appelle « la fin de l’histoire », proclamant

« le point final de l’évolution idéologique humaine et l’universalisation de la démocratie libérale occidentale comme forme finale et absolue de gouvernement. »

Pour les politiciens, les éditorialistes et les patrons d’entreprise, c’était une période de jubilation.

Les ébullitions sociales des années 1960 avaient cessé. Aux États-Unis, la pensée politique radicale avait surtout subsisté dans les milieux de contre-culture—les mouvements écologistes, les librairies engagées, les scènes hip-hop et punk. L’Europe avait aussi la scène rave, le mouvement squat avec son réseau de centres sociaux et les vestiges des mouvements puissants du milieu du 20e siècle. Du côté opposé, il y avait des fascistes, mais eux aussi étaient largement confinés dans des milieux sous-culturels. En dehors de ces enclaves, la paix sociale prévalait, pendant que tout le monde se précipitait pour obtenir sa part du gâteau.

C’était un paradis malsain. Le capitalisme mondialisé faisait circuler la richesse plus rapidement et plus loin que jamais auparavant, mais dans le processus, il la concentrait entre de moins en moins de mains, appauvrissant lentement la grande majorité. Les anarchistes savaient que l’unanimité apparente autour du nouvel ordre mondial ne durerait pas éternellement. Finalement, il y aurait une autre série de conflits et l’histoire continuerait à avancer. La vraie question était comment les lignes seraient tracées.

Nous nous sommes rencontrés à des concerts de punk hardcore. Nous avons lu sur les Panthers, les Yippies, les Ranters, les Diggers, Up Against the Wall Motherfucker. Lorsque nous avons entendu dire que quelqu’un avait peint à la bombe « NE TRAVAILLEZ JAMAIS » sur le mur du boulevard de Port-Royal lors du soulèvement de mai 1968, nous l’avons pris au pied de la lettre, en nous lançant dans une vie de criminel.

Avec d’autres outils, certains ont adopté une approche différente. Nous avons quitté nos emplois ; ils ont syndiqué les lieux de travail. Nous avons squatté des bâtiments ; ils ont organisé les locataires. Nous avons rejeté l’organisation formelle ; ils ont créé des fédérations. Nous avons fait de l’auto-stop aux événements ; ils sont arrivés avec des camionnettes pleines d’équipement.

Finalement, nous avons commencé à nous rencontrer lors de conférences et de manifestations. Tout ceux qui se lèvent doivent se rassembler.

Un anarchiste navigue sur la police porté par ses camarades lors des manifestations contre l’investiture présidentielle du 20 janvier 2001.

Heureusement, les anarchistes n’étaient pas les seuls à avoir un compte à régler avec le pouvoir en place. Le premier jour de 1994, juste au moment où l’Accord de libre-échange nord-américain entrait en vigueur, l’Armée Zapatiste de Libération Nationale s’est soulevée contre le gouvernement mexicain au Chiapas, donnant un exemple puissant de lutte populaire contre le néolibéralisme. Inspirés par l’EZLN et d’autres mouvements anticoloniaux et anticapitalistes, des personnes du monde entier ont commencé à s’organiser en lançant des manifestations, des réseaux, des occupations, des journées mondiales d’action.

Pour la plupart des gens aux États-Unis, affronter le pouvoir semblait absurde, si ce n’est carrément inutile. Les éditorialistes de tout poil ont même refusé de dire le mot capitalisme à voix haute, le substituant à « anti-mondialisation » comme si nous faisions partie d’un mouvement engoncé dans des valeurs de repli sur nous-même. Les critiques les plus acerbes concernaient la « violence », c’est-à-dire savoir s’il était acceptable de répondre de manière proportionnée à la perpétuelle violence « légitime » de l’État. Mais le défi le plus difficile était de permettre aux gens d’imaginer que l’ordre mondial capitaliste n’était pas inévitable, qu’un autre monde était possible.

Néanmoins, pendant quelques années—disons, de 1999 à 2001 — le principal conflit qui se jouait sur la scène mondiale était entre le capitalisme néolibéral et les mouvements populaires qui s’y opposaient. Le 18 juin 1999, des milliers de personnes ont convergé vers Londres pour une journée d’action annoncée comme le carnaval contre le capitalisme. Une mobilisation au cours de laquelle certains activistes ont presque réussi à détruire la bourse de Londres. En novembre suivant, des manifestants ont réussi à bloquer et faire fermer le sommet de l’Organisation mondiale du commerce à Seattle. Au cours des deux années suivantes, presque tous les grands sommets commerciaux internationaux ont provoqué de violentes émeutes dans les rues.

« Est-ce qu’on devrait pas essayer de passer ? » Criai-je, mais on courrait déjà, c’était une décision prise en une fraction de seconde, on était déjà sur le pont au moment où elle a répondu « On passe ! —On est en train de le faire », on a sprinter de l’autre côté. Derrière nous, je pouvais entendre le POP, POP alors que les flics tiraient des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc ; autour de nous, je pouvais sentir l’impact des balles, le cliquetis lorsque les palets arrivaient au sol, le sifflement lorsque leur contenu nocif remplissait l’air ; devant, je ne voyais rien, le gaz cachait le ciel, il n’y avait que l’inconnu—et au-delà, si on avait la chance de l’atteindre, une ville à détruire, un monde à créer.

Les enjeux étaient plus élevés que ce qu’on pensait. Si toutes les personnes qui vivaient cette phase finale du capitalisme impitoyable ne comprenaient pas qu’il était la source de leurs malheurs, elles seraient alors perméables au nationalisme, au racisme, à la xénophobie et à la démagogie lorsqu’elles réaliseraient que le libre marché ne pourrait pas répondre à leurs problèmes. Cependant si on pouvait montrer que le capitalisme était la principale cause de leur misère, ils pourraient peut-être se joindre à nos efforts pour construire une nouvelle société. La fenêtre temporelle était extrêmement mince, mais il existait malgré tout un champ des possibles où on pouvait réussir.

C’était la guerre à laquelle l’auteur de ce livre a participé—une guerre menée pour prévenir toutes les guerres insensées qui ont suivi. Nous luttions pour un monde dans lequel tous les êtres humains pourraient se rencontrer en tant qu’égaux, dans lequel l’impératif de profit ou la menace du changement climatique ne primerait pas sur les besoins des êtres humains.

Nous sommes partis du campus à midi. Des centaines de personnes étaient là, prêtes, habillées—cagoules, casques, plastrons, tout l’attirail. Un groupe poussait une catapulte grandeur nature. Je marchais derrière un groupe qui tirait une marionnette géante représentant la Banque mondiale. Des masses cachées dans du papier maché ne cessaient de tomber sur l’asphalte.

Au cœur de la foule, j’ai reconnu l’équipe du mois de janvier de l’année précédente. Tu développes un instinct pour ces trucs, même quand tout le monde est masqué. Dans les conversations randoms de tous les jours et les forums en ligne, nous étions rivaux. Mais il est clair que dans une situation comme celle-ci, tu veux que tout le monde soit là.

À un moment donné, la police a lancé son canon à eau directement dans la foule. Une personne masquée a couru droit dessus et a fracassé la fenêtre avant qu’il ne puisse réellement tirer. Le conducteur a eu vite fait de reculer son camion.

Wow, c’est complétement fou, pensais-je.

Peut-être que si tout le monde avait pu voir ce qui se passait, plus de gens se seraient battus aussi dur que l’auteur de ce livre. Peu de gens comprenaient à quel point la situation était désastreuse.


Malheureusement, nous n’étions pas la seule force en présence pour déterminer comment les lignes de conflit seraient tracées au 21e siècle. Provoqués par des siècles de violence coloniale, les djihadistes salafistes ont attaqué le Pentagone et le World Trade Center le 11 septembre 2001. Les néoconservateurs de l’administration Bush ont saisi l’occasion d’envahir l’Afghanistan puis l’Irak, précipitant le soi-disant « choc des civilisations » sur lequel ils avaient tant fantasmé. Le nouveau siècle s’est ouvert avec une série de bains de sang.

Cette déclaration de guerre a servi à obscurcir la possibilité de toute autre guerre, tout autre enjeu pour lequel les gens pourraient se battre. Les autorités des États-Unis et leurs adversaires symétriques dans al-Qaïda visaient à affirmer leur rivalité comme le conflit central de l’histoire, en écartant les rebelles du Chiapas et les manifestants qui avaient fermé le sommet de l’OMC à Seattle.

Aux États-Unis, les partis socialistes autoritaires ont profité de la situation pour reprendre la main sur les anarchistes et les anti-autoritaires. De nombreux projets organisés de manière horizontal furent captés, notamment le mouvement anti-guerre à travers des groupes réformiste (Not in Our Name pour le Parti Communiste Révolutionnaire, en réponse au WWW, Workers World Party). Les fondements transformatifs du mouvement anticapitaliste aux portées révolutionnaires ont cédé la place à des manifestations de réaction s’adressant aux politiciens indifférents.

Le gouvernement américain adopta le Patriot Act. Le FBI intensifia les opérations ciblant les musulmans, mais aussi les écologistes et les militants pour la libération des animaux. Les politiciens élargirent et militarisèrent la police. Le 30 novembre 1999, la municipalité de Seattle n’avait déployé que 400 policiers pour défendre le sommet de l’Organisation mondiale du commerce ; en 2017, 28 000 agents des forces de l’ordre ont défendu l’investiture de Donald Trump.

À l’étranger, les pratiques impérialistes brutales des États-Unis en Irak et en Afghanistan ont coûté près d’un million de vies, poussant encore plus de personnes dans les rangs des djihadistes. La montée de l’État islamique en Irak et en Syrie une décennie plus tard a montré que les invasions n’avaient fait que renforcer les forces que les néoconservateurs prétendaient attaquer. En 2010, lorsqu’une vague de révolutions a commencé en Tunisie et s’est répandue dans tout le Moyen-Orient, elle s’est heurté à un mur en Syrie, en partie à cause de l’État islamique et de ses partisans. Nous ne saurons jamais ce que les soulèvements du soi-disant Printemps arabe et d’autres mouvements sociaux dans la région auraient pu accomplir sans le mal causé par la soi-disant « guerre au terrorisme ». Lorsque les talibans ont repris l’Afghanistan en 2021, cela n’a fait que souligner à quel point les invasions américaines avaient été inutiles et destructrices.

Bachar al-Assad a fait massacrer des centaines de milliers de personnes pour maintenir son emprise sur la Syrie, tout cela pour finalement perdre le pouvoir. Les États-Unis ont fait de même en Afghanistan. Ces tragédies inutiles et horribles ne sont qu’un aperçu de ce qui nous attend si nous continuons sur cette voie.

La violence et la pauvreté ayant résulté de toutes ces guerres, occupations et insurrections ont poussé des réfugiés vers l’Europe depuis l’Afrique et le Moyen-Orient par millions. Quelque chose de similaire se passait au sud de la frontière américaine, alors que les ravages causés par l’Accord de libre-échange nord-américain et la militarisation de la police et des paramilitaires plongeaient des régions entières dans le sang. Les fascistes des deux côtés de l’Atlantique ont profité du désespoir des réfugiés pour attiser le racisme et la peur.

Pendant ce temps, dans l’ancien bloc de l’Est, les profits capitalistes ont laissé beaucoup de gens dans une situation économique pire qu’avant la chute du mur de Berlin. Cela généra des vagues de nationalisme, permettant à des autocrates comme Vladimir Poutine et Viktor Orbán de consolider leur contrôle. À l’instar de leur modèle, des politiciens comme Donald Trump, Jair Bolsonaro et Giorgia Meloni sont arrivés au pouvoir dans les Amériques et en Europe occidentale. Ils ont canalisé la rage de la classe moyenne en voie d’érosion vers une politique ouvertement fasciste, encourageant leurs partisans à blâmer les réfugiés, les personnes queer et trans, les juifs et les « communistes » pour la manière dont le libre marché leur avait manqué.

Poussé par un industrialisme rampant, le changement climatique a frappé les côtes et incinéré les forêts. La pandémie de COVID-19—la propagation des théories du complot et de la désinformation — la concentration des richesses entre les mains de quelques milliardaires—le génocide à Gaza : tout cela vous sera familier à moins qu’il n’ait été éclipsé par encore pire au moment où vous lirez ceci. L’invasion russe de l’Ukraine ne sera pas la dernière des guerres à venir si nous continuons sur cette voie—guerres rendues possibles par la consolidation du pouvoir autocratique, inévitables par les crises économiques et écologiques. En examinant l’armement des frontières entre la Biélorussie et la Pologne et l’utilisation de prisonniers comme chair à canon en Ukraine, nous pouvons voir que—à moins que nous changions de cap — le prix de la vie humaine va être de moins en moins cher au 21e siècle.

Le 18 juin 2023, soit 24 ans exactement après le Carnaval contre le capitalisme à Londres, la Une du New York Times reconnaissait ce que nous disions depuis un quart de siècle : la mondialisation capitaliste crée des inégalités de richesse catastrophiques, détruisant la biosphère et générant des nationalismes d’extrême-droite. L’article reprend tous les points de discussion du manifestant anticapitaliste moyen de 1999, jusqu’aux critiques du Fonds monétaire international. Même les capitalistes eux-mêmes souhaitent aujourd’hui que nous ayons gagné.

Toutes ces tragédies n’avaient pas encore eu lieu lorsque les luttes décrites dans ce livre ont eu lieu. Qui sait—si nous avions été plus nombreux à lutter davantage, nous aurions peut-être évité certaines d’entre elles.

Mais nous ne pouvons pas blâmer l’auteur de ce livre. Il était toujours en première ligne.

Un Black Bloc se forme pour affronter la police lors des émeutes à Québec pour protester contre la proposition (finalement abandonée) de création de « zone de libre-échange des Amériques » en avril 2001.

Nous nous sommes rencontrés à une foire au livre quelques années après les événements décrits dans ces pages. Je le connaissais de regards dans les rues, mais nous n’avions jamais eu de réelle conversation.

De manière inattendue, nous nous sommes bien entendus immédiatement. Personnellement, ça m’était égal que nous soyons respectivement un aventurier démissionnaire et un plateformiste ennuyeux.

Il voulait savoir si nous allions sortir la suite d’un certain mémoire controversé publié sur un délinquant en cavale. « Politiquement, c’est de la merde », dit-il. « Mais en tant qu’histoire, c’est grave excitant. »

Je n’ai pas partagé sa haute opinion à ce sujet. Je pensais que l’humour compensait le manque de développement du personnage, mais en parlant en tant que criminel de carrière, le sujet était positivement banal. Nous l’avions imprimé comme une stratégie pour saper le matérialisme et la timidité des jeunes en galère, pas pour séduire les anarchistes chevronnés comme lui.

Il persista. « Allez, tu dois faire une suite ! »

Je lui dis qu’il devrait écrire ses propres mémoires, racontant ses aventures dans les rues. Ça vaudrait la peine d’être publié, dis-je.

Ça lui a seulement pris vingt ans.


L’histoire du monde est vaste. À l’échelle de toute l’humanité, chacun de nous n’est qu’un sur des milliards. Cependant c’est à nous de décider comment aborder notre rôle dans ce drame. Nous pouvons nous voir comme des spectateurs et accepter passivement notre destin—ou nous pouvons percevoir en chacun un protagoniste du monde en action et partir à la découverte du changement que l’on peut exercer sur le cours des événements.

L’auteur de ce livre a adopté cette dernière approche. En conséquence, il a participé à un nombre surprenant d’événements historiques du tournant du siècle. La litanie de ses aventures atteste de tout ce qu’une seule personne peut accomplir avec un peu de détermination, que ce soit en période de paix sociale ou de conflit ouvert. Heureusement, il a survécu et, avec un peu d’encouragement, a réussi à écrire une partie de ce qu’il a vécu.

Le résultat est le précieux document historique que vous tenez entre vos mains. Tous ceux qui vivent des combats de rue historiques sur trois continents n’ont pas la possibilité d’écrire un tel mémoire. Buenaventura Durruti ne l’a pas fait.

Comme les Mémoires d’un révolutionnaire de Pierre Kropotkin ou Vivre ma vie d’Emma Goldman, ce livre offre un recueil de première main d’une période charnière. Vous en apprendrait davantage sur la manière dont les choses se sont passé avec un texte comme celui-ci plutôt qu’à partir de n’importe quel résumé d’analyste extérieur.

Mais ce n’est pas seulement un document de référence historique. Aucune des luttes décrites dans ce livre n’a abouti à une conclusion. Toutes se poursuivent à une échelle beaucoup plus grande et avec des enjeux encore plus élevés : la lutte contre le fascisme, contre la violence des frontières, contre la subordination des écosystèmes et des communautés aux exigences du capitalisme, contre la violence de la police et de l’armée, contre le pouvoir autocratique.

Une autre guerre était possible—et elle l’est encore aujourd’hui. Si les conséquences de notre échec à abolir le capitalisme au tournant du siècle ont été deux décennies de boucherie, de crise économique, de catastrophe écologique et de réaction fasciste, pensez à ce qui s’ensuivra si nous échouons cette fois-ci à relever le défi. L’histoire n’avait pas à se dérouler comme en 2001—elle n’a pas besoin de continuer sur cette voie maintenant. Ce livre reste pertinent car il raconte une partie d’une histoire que vous devez terminer.

Il existe de nombreuses façons de participer à ces luttes. Combattre physiquement les fascistes et les policiers n’est qu’une tactique parmi d’autres, et ce n’est guère la plus importante. De l’auteur de ce livre, vous pouvez apprendre ce que certains de ceux qui sont venus avant vous ont essayé et ce que vous pourriez peut-être faire vous-même. Nous—les survivants du tour précédent — combattrons à vos côtés.

Si nous ne nous dépêchons pas, le capitalisme mettra un siècle ou plus à s’effondrer. Cela nous entraînera dans des guerres comme jamais auparavant. La catastrophe qui en résultera nous enterrera tous dans ses débris.

Luttons ensemble pour un avenir meilleur. Une autre guerre est possible.

« À travers des siècles d’obscurité, nous pouvons déjà voir d’ici—le soleil à l’horizon d’une aube nouvelle. »


À lire aussi


ANNEXE : Another War Is Possible

Au tournant du siècle, le mouvement contre le capitalisme mondialisé a explosé partout dans sur la planète avec des mobilisations de masse à Québec, Washington, Gênes et dans d’autres villes. Les anarchistes ont affronté des chefs d’État, des dirigeants de grandes enterprises et des policiers anti-émeute par milliers. Alors que les autorités cherchaient à plier tous les êtres vivants à l’impératif du profit, des personnes ont entrepris de démontrer qu’une façon de lutter pourrait ouvrir la voie à un avenir au-delà du capitalisme. Le vingt-et-unième siècle était à saisir. Et chaque fois, Tomas Rothaus était là, combattant en première ligne.

Dans Une autre guerre est possible, nous suivons Tomas de ses jours en tant que jeune militant jusqu’à son édition de la publication Barricada. Dans une prose vivante, il raconte les leçons qu’il a apprises des vétérans de la CNT espagnole—sa première expérience d’échange de coups avec la police dans les rues de Paris — les aventures qu’il a traversé pour se faufiler au-delà des frontières dans le but de participer à des grandes émeutes de l’époque. Avec Tomas, nous respirons des gaz lacrymogènes, nous abattons des clôtures, nous visitons des squats et champs de bataille de trois continents.

En chemin, Tomas montre que les tragédies du XXIe siècle n’étaient pas inévitables—qu’une autre guerre était possible. Son témoignage est la preuve qu’un autre monde reste possible aujourd’hui.


Thanks to La Grappe for the translation.

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