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17.12.2025 à 12:25

Malgré ses engagements, l'Union européenne garde la porte grande ouverte aux lobbys du tabac

Séverin Lahaye

Malgré la ratification par l'Union européenne et ses États membres d'un traité antitabac il y a vingt ans, les industriels du secteur continuent de fréquenter assidument les institutions bruxelloise. Et cherchant notamment à ce que le vieux continent fasse pression contre les règles mises en place par d'autres pays, au nom du « libre-échange ».
« Nous voulons forcer la main de l'Union européenne (UE) pour qu'elle respecte enfin le cadre qu'elle s'est fixé », explique Martin Drago, chargé (…)

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Texte intégral (1588 mots)

Malgré la ratification par l'Union européenne et ses États membres d'un traité antitabac il y a vingt ans, les industriels du secteur continuent de fréquenter assidument les institutions bruxelloise. Et cherchant notamment à ce que le vieux continent fasse pression contre les règles mises en place par d'autres pays, au nom du « libre-échange ».

« Nous voulons forcer la main de l'Union européenne (UE) pour qu'elle respecte enfin le cadre qu'elle s'est fixé », explique Martin Drago, chargé de plaidoyer au sein de l'organisation non gouvernementale (ONG) Contre-feu. Dans un rapport intitulé « Lobby du tabac : quand l'industrie utilise l'UE pour influencer les politiques de santé dans le monde », celle-ci met en lumière la stratégie d'influence des industriels du tabac et la complaisance des instances européennes. Et ce, en totale contradiction avec un traité signé par l'UE il y a vingt ans.

À travers notamment son article 5.3, la Convention-cadre de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour la lutte antitabac, ratifiée par l'Union européenne et ses États-membres en 2005, exige en effet que les contacts avec l'industrie du tabac soient strictement limités et totalement transparents : « Lors de l'élaboration et de la mise en œuvre de leurs politiques de santé publique en matière de lutte antitabac, les Parties ne devraient interagir avec l'industrie du tabac que lorsque et dans la mesure où cela est strictement nécessaire pour leur permettre de réglementer efficacement l'industrie du tabac et les produits du tabac. »

« Leurs lobbyistes disent agir dans le domaine du commerce »

Or, c'est tout l'inverse qui se passe. « En 2025, l'industrie du tabac a déclaré avoir participé à plus de 58 consultations publiques et contribué à 56 “feuilles de route” de la Commission européenne », détaillent les auteurs du rapport. Plusieurs de ces actions concernaient directement des réglementations liées à la lutte contre le tabagisme. « Ce lobbying en amont du processus législatif s'avère rentable et efficace, déplore Christophe Clergeau, eurodéputé du Parti socialiste. Cela leur permet d'influencer directement l'élaboration des textes pour qu'ils soient en leur faveur. »

Leur objectif : utiliser le pouvoir diplomatique de l'UE afin de saper les politiques de lutte antitabac adoptées par des pays tiers.

Les grandes multinationales du tabac, comme Philip Morris International (PMI), l'entreprise britannique Imperial Brands PLC ou British American Tobacco (BAT), ont particulièrement investi le champ du commerce international via la Direction générale du commerce (DG Trade). Leur objectif : utiliser le pouvoir diplomatique de l'UE afin de saper les politiques de lutte antitabac adoptées par des pays tiers, par exemple en évitant le bannissement des nouveaux produits développés par l'industrie (vapoteuse, tabac chauffé, snus…). La liste des nations ainsi ciblées inclut l'Inde, l'Argentine, le Brésil, le Mexique, le Japon, la Turquie, le Vietnam, Singapour, Taïwan et la Thaïlande.

« C'est un coup de génie, juge Martin Drago. Les lobbyistes disent ne pas agir dans le champ de la santé publique en Europe, mais dans le domaine du commerce, pour éviter de tomber sous le coup du cadre imposé par le traité de l'OMS. Mais leur but reste toujours de nuire à la santé des habitants de pays extérieurs ! »

L'extrême droite attentive aux industriels

Les industriels du tabac ont aussi investi le Parlement européen. Entre 2023 et 2025, Contre-feu a recensé 257 entretiens entre des députés européens et divers représentants d'intérêts de la filière. Les élus d'extrême droite semblent être les plus attentifs aux arguments des industriels : le député danois Anders Vistisen, du groupe des Patriotes pour l'Europe (PfE), les a rencontrés sept fois en deux ans, d'après le registre de l'ONG Transparency International. Côté français, l'eurodéputée du Rassemblement national (RN) Marie-Luce Brasier-Clain a participé à deux rendez-vous : le premier en septembre avec un représentant de Philip Morris International, le second en novembre avec Imperial Brands PLC. Ses collègues RN à Bruxelles Aleksandar Nikolic, Thierry Mariani et Angéline Furet ont chacun rencontré au moins une fois un représentant de la filière.

Le groupe Patriotes pour l'Europe, dont fait partie le RN, a rencontré 19 fois le cigarettier Philip Morris International depuis 2023.

Comme nous l'indiquions dans une récente enquête (lire Quels lobbies les eurodéputés d'extrême droite (et les autres) rencontrent-ils à Bruxelles ?), les Patriotes pour l'Europe ont rencontré 19 fois le cigarettier Philip Morris International, ce qui en fait le troisième lobby le plus consulté par le groupe politique. « La rhétorique libertarienne utilisée par les lobbys du tabac fait mouche auprès des députés d'extrême droite, estime Martin Drago. Ils ne veulent pas d'une hausse des taxes au niveau européen sur les cigarettes, car cela constituerait une forme de privation de liberté pour les fumeurs. »

« L'extrême droite se fait le porte-parole des puissances de l'argent, dont l'industrie du tabac », dénonce Christophe Clergeau. Lui n'a jamais rencontré de représentants de la filière, mais assure recevoir de nombreuses sollicitations, comme des cartes postales vantant les mérites de la puff. « Et ce n'est que la partie immergée de l'iceberg. Leur lobbying se fait aussi de façon plus pernicieuse, par exemple en finançant des think tanks, en organisant des colloques ou en rencontrant des décideurs politiques sans le déclarer. »

Une industrie encore florissante

Leur implantation économique en Italie, Grèce ou Suède permet de faire du chantage à l'emploi auprès des décideurs.

« L'industrie du tabac reste très puissante financièrement », note Martin Drago. D'après le rapport de Contre-feu, elle dépense près de 14 millions d'euros par an dans ses activités de lobbying, soit une hausse de 164 % par rapport à 2012. Ces investissements témoignent de la vitalité du secteur, qui a trouvé une seconde vie dans les produits à base de nicotine ou de tabac chauffé. Certains sont directement produits en Europe, comme en Italie, où Philip Morris a investi il y a quelques années un milliard d'euros dans une nouvelle usine à Bologne. « Les multinationales du tabac ont investi plusieurs milliards d'euros en Europe, notamment en Italie, en Grèce ou en Suède, rappelle Martin Drago. Ces États sont d'ailleurs les plus réticents à imposer de nouvelles taxes sur les nouveaux produits de l'industrie. » « Cette implantation économique leur permet de faire du chantage à l'emploi auprès des décideurs », ajoute l'eurodéputé Christophe Clergeau.

Pour tenter de limiter cette influence, l'ONG Contre-feu réfléchit à porter le dossier devant un tribunal, face au non-respect de la Convention-Cadre de l'OMS. « Pour cela, il faut trouver des actes attaquables en justice et prouver que cette convention-cadre puisse être invocable devant un tribunal », détaille Araceli Turmo, maîtresse de conférences en droit européen à l'université de Nantes.

Christophe Clergeau appelle quant à lui à une loi encadrant plus fermement le lobbying dans l'Union européenne. « Nous faisons face à une grave défaillance qu'il faut régler au plus vite », juge-t-il. Mais il devra faire face à l'alliance assumée entre les partis du centre et d'extrême droite au Parlement européen. Le Parti populaire européen (PPE) et les Conservateurs et réformistes européens (CRE) ont bloqué le 28 novembre dernier l'adoption d'une résolution non contraignante visant à interdire les nouveaux produits de l'industrie dans certains lieux publics. Un exemple supplémentaire de la nouvelle alliance entre droite et extrême droite qui se structure au sein du Parlement européen depuis plusieurs mois (lire Au centre du jeu bruxellois, l'extrême droite sonne la charge contre l'écologie et le climat).

12.12.2025 à 11:45

La vérité des chiffres. La lettre du 12 décembre 2025

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Dix ans, ça passe trop vite

Le 12 décembre 2025, nous fêterons le dixième anniversaire de l'adoption de l'Accord de Paris sur le climat.

À l'époque, l'Observatoire des multinationales avait consacré de nombreuses enquêtes aux préparatifs de la COP21 à Paris et au rôle joué par les grandes entreprises et leurs lobbys. C'était une époque d'unanimité apparente, où les grands industriels tricolores, même dans les secteurs les plus polluants, ont multiplié les professions de foi et les promesses pro-climat.

Nous avions examiné, en partenariat avec le Basic, la réalité des pratiques derrière les beaux discours, à travers un rapport intitulé « Gaz à effet de serre : doit-on faire confiance aux entreprises pour sauver le climat ? ». Ce rapport soulignait les limites de la transparence des entreprises françaises sur leurs émissions, la mauvaise prise en compte des émissions au niveau de toute la chaîne de valeur (amont et aval), et l'absence d'alignement sur les objectifs européens à long terme de réduction des émissions, avec souvent des paris sur des solutions technologiques incertaines pour atteindre ces objectifs.

Dix ans plus tard, nous nous sommes à nouveau penchés sur la question, sur la base d'un échantillon de douze entreprises représentatives de la diversité du CAC 40, avec une question simple : comment ont évolué les émissions de gaz à effet de serre déclarées par les groupes français depuis 2015 ?

Malheureusement la réponse n'est pas simple, et globalement négative. La moitié des entreprises de notre échantillon a vu ses émissions de gaz à effet de serre augmenter ou stagner depuis 2015. Dans l'autre moitié, les réductions d'émissions constatées sont parfois significatives, mais elles s'expliquent par la revente des actifs les plus polluants à d'autres acteurs (donc zéro bénéfice net pour le climat) ou par la chute des ventes de voitures et d'avions au moment de la pandémie de Covid, pas encore rattrapée.

On constate que les groupes français parviennent à peu près à baisser leurs émissions directes, par exemple en remplaçant de l'électricité polluante par de l'électricité renouvelable, mais que quand il s'agit de réduire les émissions indirectes, liées aux chaînes de valeur dans leur ensemble, les réponses manquent cruellement.

Un point positif : les entreprises sont plus transparentes sur toutes leurs émissions indirectes qu'il y a dix ans, mais c'est récent, grâce à la mise en œuvre d'une directive européenne aujourd'hui attaquée au nom de la « simplification ».

Lire l'enquête : Dix ans après l'accord de Paris, le CAC 40 a-t-il avancé ?

Nuit du bien commun : Stérin et ses copains

L'édition parisienne de la « Nuit du bien commun » s'est tenue le 4 décembre dernier aux Folies Bergères, sur fond de manifestations. Cette soirée caritative est en effet associée à Pierre-Édouard Stérin, le milliardaire désormais bien connu pour ses liens avec l'extrême droite et le soutien qu'il a apporté à une multitude d'associations intégristes, anti-droits sexuels et anti-migrants.

On a vu dans certains médias circuler le « narratif » - conçu par l'agence Image 7 d'Anne Méaux – selon lequel Pierre-Édouard Stérin serait depuis longtemps désengagé la Nuit du bien commun et qu'en s'attaquant à cette dernière on s'attaquerait en réalité à la philanthropie privée et au financement des associations en général.

Notre dernière enquête montre que ce n'est que de la poudre aux yeux. Même si Stérin n'est plus – depuis quelques mois seulement – au conseil d'administration de la « Nuit », qu'il a cofondée, il reste lié à l'événement de multiples manières, et notamment via la société organisatrice Obole, dont il est actionnaire.

De Stanislas de Bentzmann et Charles Beigbeder à Denis Duverne en passant des dirigeants de Domino RH, ManoMano ou Payfit, Pierre-Édouard Stérin a associé de nombreuses figures du monde des affaires à ses activités caritatives, dont beaucoup continuent de graviter dans cet écosystème. Certains partagent les visées de plus en plus clairement politiques de cette « philanthropie », d'autres ont choisi de les ignorer.

À lire : Derrière la Nuit du bien commun, l'ombre embarrassante de Stérin et toute une galaxie d'hommes d'affaires

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En bref

Enquête officielle sur Christophe Castaner et Shein. Il y a quelques mois, l'Observatoire des multinationales avait adressé, avec les Amis de la Terre, un signalement à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique au sujet du lobbying orchestré par Shein contre le projet de loi « fast-fashion » (lire Pourquoi il faut faire la lumière sur le lobbying de Shein et le rôle de Christophe Castaner). Plusieurs des acteurs de ce dossier ont mis à jour leurs déclarations de lobbying suite à cette alerte, et il est désormais confirmé qu'une enquête officielle est en cours sur le rôle exact de l'ex ministre Christophe Castaner. Recruté par le géant chinois, il a toujours prétendu, sans trop convaincre, que ce n'était pas pour faire du lobbying. Malheureusement pour lui, l'ex ministre Véronique Louwagie en a rajouté une couche dans le Complément d'enquête diffusé le 11 décembre sur France Télévisions (pour lequel nous avons été interrogé, et qui utilise des courriels que nous avons obtenus de l'Elysée) : elle raconte avoir reçu de nombreux SMS de son ex collègue lui demandant de lui parler de Shein pour « dédiaboliser » l'entreprise. À suivre.

Dans les coulisses du lobbying contre le devoir de vigilance. L'ONG néerlandaise SOMO s'est procurée des documents internes du cabinet de relations publiques Teneo, qui lèvent le voile sur une partie de l'offensive qui a conduit l'UE à vider de sa substance sa directive sur le devoir de vigilance des multinationales (voir ici et dans nos précédentes lettres). Une structure a été créée par Teneo, la « table-ronde sur la compétitivité » (Competitiveness Roundtable) regroupant surtout des multinationales pétrolières, majoritairement américaines, mais aussi TotalEnergies, pour coordonner le travail d'influence. Les entreprises se sont par exemple « répartis » les gouvernements des Etats-membres sur lesquels elles feraient pression, en fonction de leurs implantations dans les pays concernés. TotalEnergies s'est chargé de la France, mais aussi de la Belgique et du Danemark. Lire ici les révélations de SOMO et l'article en français de Mediapart.

L'optimisation en chiffres. Les multinationales ne délocalisent pas seulement les usines, mais également les profits : 10 milliards d'euros de profits échappent chaque année à la France, selon une étude de l'Observatoire européen de la fiscalité basée sur des données fiscales en général inaccessibles aux chercheurs. Cela représente une perte de revenus fiscaux de 3,7 milliards. Cette optimisation passe par des transferts financiers intra-groupes, « notamment via des filiales spécialisées dans la propriété intellectuelle, la R&D ou des activités financières, permettant d'attribuer les profits à des juridictions à fiscalité réduite » (Luxembourg, Suisse, Singapour, Pays-Bas et Hong-Kong).

Pour 2,9 milliards t'as plus rien. En 2023, le gouvernement français annonçait en grande pompe une subvention de 2,9 milliards d'euros pour l'extension d'une usine de ST Microelectronics à Crolles, près de Grenoble. L'opération devait se faire en partenariat avec Global Foundries, un groupe ayant son siège outre-Atlantique mais propriété à 82% du fonds souverain émirati Mubadala. Depuis, Global Foundries semble s'être désengagé sans le dire. L'association Actionnaires pour le climat, a cherché à obtenir la convention encadrant la subvention et fini par mettre la main sur une lettre d'engagement de ST, qui table sur « la création d'un minimum de 1 000 emplois à temps plein nets » d'ici 2027. Ce dont le groupe, qui a annoncé en avril la suppression d'un millier d'emplois en France, semble très loin. Une raison de suspendre la subvention, dont 630 millions d'euros auraient déjà été versés ? C'est ce que pense l'association, même si la valeur juridique d'une telle clause reste incertain. Lire le récit de Libération. ST Microelectronics vient de recevoir un nouveau financement public d'un milliard d'euros de la Banque européenne d'investissement.

Gaz offshore au Mozambique : deux pays européens disent non à TotalEnergies. Le Royaume-Uni puis les Pays-Bas ont successivement annoncé la fin de leur soutien (sous la forme de crédit export et de garantie d'emprunt) au projet gazier de Cabo Delgado de TotalEnergies. Celui-ci-avait été gelé suite aux violences dans cette province du pays. Le traitement des populations civiles par l'armée a d'ailleurs donné lieu au dépôt d'une plainte pour « complicité de crime de guerre » contre l'entreprise, dont nous avons parlé dans une précédente lettre. Ce double retrait fragilise la relance annoncée du projet, dans un contexte d'insécurité persistante, même si l'administration Trump, elle, a accordé un prêt de 4,7 milliards de dollars au groupe pétrogazier français.

Idée cadeau. Comment est né le mouvement « anti-monopoles » aux États-Unis ? Comment le ketchup est devenu si sucré ? Comment Shenzhen a attiré les multinationales du monde entier avant de donner naissance à des géants chinois comme Huawei et BYD ? Comment Unilever a construit sa prospérité d'aujourd'hui sur le dos du Congo belge et de sa population ? Nous publions quelques nouvelles bonnes feuilles du livre Multinationales. Une histoire du monde contemporain, paru chez La Découverte. Un livre riche en substance et en infos intéressantes, à mettre sous tous les sapins. Toutes les infos ici.

Cette lettre a été écrite par Olivier Petitjean.

12.12.2025 à 00:08

Dix ans après l'accord de Paris, peu de progrès et beaucoup de questions pour le CAC 40

À l'occasion du dixième anniversaire de l'Accord de Paris sur le climat, bilan des progrès accomplis (ou non) par les groupes du CAC 40 en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre.

- Dix ans après l'accord de Paris, le CAC 40 a-t-il avancé ? / , , , , , , , , , , , , , , , ,
Texte intégral (809 mots)

À l'occasion du dixième anniversaire de l'Accord de Paris sur le climat, l'Observatoire des multinationales dresse le bilan des progrès accomplis - ou non - par les groupes du CAC 40 en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Le chemin semble encore très long pour décarboner réellement le modèle productif et commercial des grandes entreprises françaises, et rares sont celles qui ont pris des mesures concrètes à la hauteur de leurs discours.

Le 12 décembre 2025, nous fêterons le dixième anniversaire de l'adoption de l'Accord de Paris sur le climat. Pour l'occasion, l'Observatoire des multinationales s'est penché sur la performance climatique d'un échantillon de douze entreprises du CAC 40, représentatives de différents secteurs d'activité : Airbus, ArcelorMittal, BNP Paribas, Carrefour, Danone, Engie, L'Oréal, LVMH, Michelin, Renault, Saint-Gobain et TotalEnergies. Avec une question simple : comment ont évolué les émissions de gaz à effet de serre déclarées par ces groupes français depuis 2015 ? Ont-elles baissé drastiquement, comme semblait le promettre la floraison d'engagements et d'initiatives qui ont accompagné la COP21 et la signature de l'Accord de Paris ? Ou bien constate-t-on un écart entre les discours et les promesses et la réalité concrète ?

Principales conclusions de l'étude :

  • La moitié des entreprises étudiées a vu ses émissions d'ensemble (directes et indirectes) augmenter ou stagner entre 2019 et 2024.
  • Dans la plupart des cas, la réduction d'émissions atteintes par certains groupes s'expliquent par la simple revente d'actifs polluants, sans bénéfice net pour le climat, ou par la chute des ventes d'avions ou de voitures pendant la pandémie.
  • Les entreprises parviennent généralement à réduire leurs émissions directes, quoiqu'avec certains effets de trompe-l'oeil dus à l'utilisation de « mécanismes de marché ». En revanche, les émissions indirectes, au niveau de l'ensemble de la chaîne de valeur, continuent souvent d'augmenter, alors qu'elles sont souvent beaucoup plus importantes. Beaucoup de groupes ne semblent pas avoir de véritable réponse sur les moyens de renverser la tendance.
  • Grâce à la mise en œuvre de la directive européenne CSRD, aujourd'hui attaquée, les entreprises sont enfin plus transparentes sur leurs émissions indirectes.

Il y a dix ans, en amont de la conférence climat parisienne, l'Observatoire des multinationales avait publié avec le Basic un rapport intitulé « Gaz à effet de serre : doit-on faire confiance aux entreprises pour sauver le climat ? », portant sur un échantillon de dix grandes entreprises françaises (dont sept que l'on retrouve dans notre nouvel échantillon). Ce rapport soulignait les limites de la transparence des entreprises françaises sur leurs émissions, la mauvaise prise en compte des émissions au niveau de toute la chaîne de valeur (amont et aval), et l'absence d'alignement sur les objectifs européens à long terme de réduction des émissions, avec souvent des paris sur des solutions technologiques incertaines pour atteindre ces objectifs. La présente étude confirme, dix ans plus tard, une grande partie de ces constats.

Si aucune n'a officiellement abandonné ses objectifs climatiques, on assiste chez certaines entreprises à un mouvement de recul ou du moins de plus grande prudence par rapport aux objectifs et aux engagements affichés au moment de l'Accord de Paris et dans les années qui ont suivi. Au-delà du contexte politique immédiat, cette baisse relative d'enthousiasme affiché s'explique peut-être aussi par la prise de conscience par ces entreprises des difficultés concrètes à réduire véritablement leurs émissions et à atteindre la neutralité carbone en 2050, et les coûts induits.

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