16.12.2025 à 14:52
Human Rights Watch
Chaque année, Human Rights Watch fait le point sur les progrès réalisés en matière de droits des enfants dans le monde. De l'amélioration de l'accès à l'éducation au renforcement des protections en temps de guerre, voici quelques faits marquants de l'année 2025.
De nouvelles données de l'Organisation internationale du travail et de l'UNICEF ont révélé que le nombre d'enfants obligés de travailler avait diminué de 20 millions par rapport à 2020.Le Malawi et le Japon ont tous deux supprimé les frais de scolarité dans les écoles secondaires publiques. Le Vietnam a instauré la gratuité des frais de scolarité pour tous les élèves des écoles publiques, de la maternelle au secondaire.Le Brésil a adopté une loi historique pour protéger les droits des enfants en ligne, devenant ainsi le premier pays d'Amérique latine à adopter une loi spécifique en faveur des enfants.La Bolivie, la Grenade, le Burkina Faso, le Portugal et le Koweït ont tous relevé l'âge minimum légal du mariage à 18 ans. Aux États-Unis, les états du Maine, de l'Oregon et du Missouri ont interdit le mariage des enfants.En septembre, 92 pays se sont réunis pour la première fois afin d'examiner officiellement la possibilité d'un nouveau traité international pour garantir la gratuité de l'éducation pour tous les enfants, de la maternelle au secondaire. À ce jour, 60 pays se sont engagés à soutenir ce traité.La Thaïlande, la Tchéquie et la Suisse ont interdit toutes les formes de châtiments corporels infligés aux enfants, portant à 70 le nombre total de pays ayant adopté une telle interdiction.Les États-Unis et le Kosovo ont approuvé la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, un engagement politique visant à protéger l'éducation pendant les conflits armés, portant à 122 le nombre de pays ayant approuvé cette déclaration.La Chine a lancé un programme de subventions pour les familles ayant des enfants de moins de 3 ans, tandis que les Fidji, le Japon, le Maroc, la Turquie et la Tunisie ont augmenté les allocations pour les enfants, et le Royaume-Uni a annoncé qu'il supprimerait la « limite de deux enfants » pour les familles bénéficiant d'une aide sociale liée aux enfants. Ces mesures peuvent jouer un rôle important dans la réduction de la pauvreté infantile: rien qu'au Royaume-Uni, la suppression de la limite de deux enfants devrait permettre à environ 450 000 enfants de sortir de la pauvreté relative d'ici 2030.Le procureur de la Cour pénale internationale a demandé des mandats d'arrêt contre deux hauts dirigeants talibans pour des violations graves commises à l'encontre de femmes et de filles en Afghanistan, invoquant la persécution fondée sur le genre, un crime contre l'humanité.Le gouvernement de l'État d'Australie-Occidentale a annoncé un nouveau programme de réparation pour les « générations volées », des enfants autochtones qui ont été retirés de force à leurs familles dans le cadre de politiques racistes mises en place au début des années 1900 et qui ont perduré jusqu'aux années 1970.Partout dans le monde, les enfants continuent de faire face à de graves menaces pour leurs droits, mais ces exemples montrent que des améliorations réelles sont possibles.
16.12.2025 à 06:00
Human Rights Watch
(Nairobi) – Des miliciens ont tué au moins 22 civils et en ont blessé beaucoup d'autres lors d'une attaque menée fin novembre 2025 contre un village du territoire de Kwamouth, dans l'ouest de la République démocratique du Congo, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch. Des témoins originaires du village de Nkana, situé à environ 75 kilomètres au nord-est de Kinshasa, la capitale, ont déclaré que des miliciens armés de fusils et de machettes avaient mené une attaque apparemment en guise de représailles, dans le cadre de tensions intercommunautaires croissantes.
Des témoins ont déclaré que le 23 novembre, vers 4 heures du matin, des combattants Mobondo de l'ethnie Yaka ont attaqué le village de Nkana. Les assaillants sont allés de maison en maison, tuant principalement des villageois de l'ethnie Teke, dans leurs maisons et alors qu'ils tentaient de fuir. Des villageois ont expliqué que les combattants avaient accusé les Teke de Nkana de refuser d'installer un nouveau chef coutumier Yaka et avaient envoyé des messages à certains Teke avant l'attaque, leur disant qu'ils seraient punis.
« Les violences à Kwamouth ne sont qu'un exemple parmi de nombreux conflits ethniques meurtriers en RD Congo », a déclaré Lewis Mudge, directeur pour l'Afrique centrale à Human Rights Watch. « L'attention mondiale portée aux accords de paix dans l'est de la RD Congo ne doit pas faire oublier les violences et les injustices qui sévissent sans contrôle ainsi que les cycles d'impunité dans d'autres domaines. »
Human Rights Watch a mené des entretiens avec 18 personnes en novembre et décembre, dont 5 témoins, 6 proches des victimes, des membres du personnel médical local et des chefs communautaires du territoire de Kwamouth, dans la province de Maï-Ndombe.
Depuis juin 2023, la milice Mobondo, nommée d'après ses amulettes mystiques et armée de machettes, de couteaux, de lances, d'arcs et de flèches, ainsi que de fusils de chasse et d'assaut militaires, a attaqué des villages Teke, incendié des maisons et tué des dizaines de personnes.
Depuis des années, les activistes de la société civile, les groupes de défense des droits humains et les autorités traditionnelles mettent en garde contre la présence et les activités croissantes des milices ethniques. Les violences récentes font écho à la crise intercommunautaire documentée par Human Rights Watch entre 2022 et 2023, lorsque des milices des communautés Teke et Yaka ont tué des centaines de civils lors d'une vague d'attaques dans la région.
Cette récente attaque souligne l'incapacité du gouvernement congolais à renforcer la sécurité dans la région malgré des avertissements répétés concernant les violences, a déclaré Human Rights Watch.
« Quand ils ont enfoncé ma porte, je me suis enfuie avec mon petit-fils », a déclaré une femme de 70 ans à propos des récentes violences. « Ils m'ont tiré dessus plusieurs fois. Une balle a touché mon pied, mais j'ai continué à courir. Si j'étais restée une seconde de plus, ils nous auraient tués. »
Un autre villageois a raconté que les combattants avaient tiré sur sa famille alors qu'elle tentait de s'échapper : « Ma mère portait ma fille sur son dos. La première balle l'a touchée [sa mère] en plein cœur. La deuxième lui a transpercé les côtes et a touché ma fille au ventre. » Sa mère est morte sur le coup, et sa fille de 5 ans est décédée à l'hôpital le 5 décembre.
Human Rights Watch a documenté la mort de 22 civils, dont quatre femmes et quatre enfants. Parmi les personnes tuées figuraient deux fils du chef coutumier du village, le président local de la Croix-Rouge et un fonctionnaire des impôts de la province. Un soldat de l'armée congolaise, qui gardait le village avec un petit contingent de militaires de la marine qui s'est enfui en traversant le fleuve Congo lorsque l'attaque a commencé, a également été tué. Les villageois ont déclaré que les proches des victimes avaient enterré les membres de leurs familles après le départ des assaillants. D'autres ont été enterrés par les soldats à leur arrivée dans le village.
Click to expand Image © 2025 Human Rights WatchLe personnel médical de la commune de Maluku, à l'est de Kinshasa, a déclaré que plusieurs patients étaient arrivés dans un état critique, tandis que d'autres civils blessés avaient fui vers le Congo-Brazzaville par le fleuve pour se faire soigner.
L'attaque a contraint des centaines d'habitants à fuir vers Maluku ou à traverser le fleuve pour se réfugier au Congo-Brazzaville. Des témoins ont déclaré que les familles avaient tenté d'évacuer les personnes âgées, les blessés et les jeunes enfants. Depuis, l'armée a tenté d'encourager les villageois à retourner à Nkana, mais beaucoup ont refusé et ont ainsi perdu l'accès à leurs maisons et à leurs champs, aggravant une situation humanitaire déjà très précaire.
À la suite de l'attaque, les autorités congolaises ont déployé des militaires dans la région et ont annoncé l'ouverture d'une enquête sur les meurtres. Les habitants ont raconté qu'une délégation de membres de la communauté Teke s'était rendue à Kinshasa avec les corps des victimes pour protester contre ce qu'ils ont qualifié de silence et d'inaction du gouvernement. Certains législateurs ont appelé l’Assemblée provinciale de Maï-Ndombe à adopter des mesures urgentes pour faire face à la crise humanitaire.
Le peuple Teke a historiquement possédé une grande partie des terres et des titres coutumiers du territoire de Kwamouth, qui fait partie du plateau de Bateke (littéralement « le plateau du peuple Teke ») qui s'étend jusqu'à la périphérie de Kinshasa. Au fil des années, les membres des communautés Yaka, Mbala, Suku et d'autres communautés des provinces voisines de Kwilu et Kwango ont formé la main-d'œuvre agricole des propriétaires fonciers du territoire de Kwamouth ou sont devenus agriculteurs en échange d'une taxe coutumière versée aux chefs coutumiers Teke, que les agriculteurs Teke paient également.
Les milices Mobondo ont multiplié les attaques depuis le milieu de l’année 2025, ciblant des villages situés le long du fleuve Congo, notamment Mbanzale et Mayala en juin, une attaque le long de la Route nationale 17 en août et une attaque le 2 septembre dans la zone forestière de Limpwobo. Malgré des déploiements militaires périodiques, aucune présence sécuritaire permanente du gouvernement n'a été établie, laissant les communautés rurales exposées à de nouvelles attaques.
Les autorités congolaises devraient garantir une enquête approfondie et impartiale sur les responsables des attaques des milices, a déclaré Human Rights Watch. Elles devraient également veiller à ce que les villageois touchés bénéficient d'une aide médicale et psychologique et que les personnes déplacées aient accès à un abri, à de la nourriture et aux services de base.
Le gouvernement devrait mettre en œuvre, avec une participation significative des communautés concernées, un programme de démobilisation des combattants Mobondo, annoncé le 2 décembre, et convoquer un forum de paix pour apaiser les tensions intercommunautaires dans la province de Maï-Ndombe, annoncé en septembre.
« La lutte contre la violence communautaire dans l'ouest de la RD Congo requiert la justice et l’obligation de rendre des comptes, la mise en place de systèmes d'alerte efficaces, et un engagement concret à démanteler les structures qui permettent aux groupes armés de prospérer », a conclu Lewis Mudge. « Les gouvernements concernés et les organes des Nations Unies devraient aider les autorités congolaises à y parvenir. »
15.12.2025 à 19:09
Human Rights Watch
(New York, 15 décembre 2025) – La condamnation par la Haute Cour de justice de Hong Kong de Jimmy Lai, fondateur du journal Apple Daily qui a été contraint à la fermeture, est le dernier signe en date de l’évolution dramatique observée à Hong Kong, a déclaré aujourd'hui Human Rights Watch ; dans cette ville, le respect de la liberté de la presse a été remplacé par une hostilité ouverte envers les médias. Les autorités de Hong Kong devrait annuler cette condamnation sans fondement, et libérer immédiatement Jimmy Lai.
Le 15 décembre, la Haute Cour qui jugeait Jimmy Lai, 78 ans, l’a reconnu coupable de deux chefs d'accusation de « complot en vue de collusion avec des forces étrangères » en vertu de la loi draconienne sur la sécurité nationale, et d'un chef d'accusation de « complot en vue de publier des publications séditieuses » en vertu de l'Ordonnance sur les crimes. Il encourt une peine pouvant aller jusqu'à la prison à vie.
« La condamnation de Jimmy Lai sur la base d'accusations fallacieuses après cinq ans d'isolement cellulaire est une cruelle parodie de justice », a déclaré Elaine Pearson, directrice pour l'Asie à Human Rights Watch. « Les mauvais traitements infligés à Jimmy Lai par le gouvernement chinois visent à réduire au silence tous ceux qui osent critiquer le Parti communiste. »
La Haute Cour a jugé que Jimmy Lai était le « cerveau » des complots présumés, cités dans les trois chefs d'accusation. Selon le tribunal, Jimmy Lai aurait conspiré avec d'autres personnes pour se rendre coupable de « collusion avec des forces étrangères » en se livrant à un « lobbying international » et en exhortant des gouvernements étrangers à imposer des « sanctions ou des blocus, ou à se livrer à d'autres activités hostiles » contre le gouvernement chinois par le biais de ses écrits, de ses émissions-débats et de ses interviews dans les médias.
Le tribunal a également jugé que Lai avait conspiré avec l’ONG Stand with Hong Kong, qui a organisé des campagnes à l'étranger appelant à des sanctions contre les autorités chinoises et hongkongaises.
En ce qui concerne l'accusation de sédition, les procureurs ont affirmé que 161 articles du journal Apple Daily, dont 33 écrits par Lai, constituaient des publications séditieuses car ils auraient alimenté la méfiance et la haine du public envers les autorités. Le tribunal a donné raison à l'accusation, jugeant que Lai avait utilisé son « influence personnelle pour mener une campagne cohérente visant à saper la légitimité » des gouvernements chinois et hongkongais.
Poursuivre quelqu'un pour avoir exercé son droit à la liberté d'expression viole le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui est intégré dans le cadre juridique de Hong Kong via la constitution de facto de la ville, la Loi fondamentale, ainsi que dans la Loi sur la déclaration des droits. Toutefois, la Loi sur la sécurité nationale en vigueur à Hong Kong est incompatible avec ces garanties en matière de droits humains.
Six anciens dirigeants et rédacteurs en chef d'Apple Daily avaient déjà plaidé coupables à des accusations similaires dans la même affaire. Une audience visant à examiner les circonstances atténuantes est prévue le 12 janvier 2026, suivie du prononcé de la peine. En vertu de l'article 29 de la Loi sur la sécurité nationale, les personnes reconnues coupables de « collusion avec l'étranger » de « nature grave » encourent une peine de 10 ans à perpétuité, tandis que les autres encourent une peine de 3 à 10 ans. L'accusation de « sédition », en vertu de l'Ordonnance sur les crimes, est passible d'une peine maximale de 2 ans de prison.
Les poursuites engagées contre Jimmy Lai ont été entachées de nombreuses violations graves du droit à un procès équitable, notamment le fait d'avoir été jugé par des juges choisis par le gouvernement de Hong Kong, de s'être vu refuser un procès devant jury, d'avoir été soumis à une détention provisoire prolongée et de s'être vu refuser le droit de choisir son avocat. En 2023, la Haute Cour a confirmé la décision du gouvernement d'interdire à un avocat britannique, Timothy Owen, de représenter Lai. Les autorités ont également refusé à Lai, citoyen britannique, l'accès au consulat du Royaume-Uni, en violation de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, à laquelle la Chine est un État partie.
Jimmy Lai purge déjà une peine de 5 ans et 9 mois de prison pour « fraude » et « participation à un rassemblement non autorisé ». Il souffre de diabète et est détenu en isolement cellulaire prolongé, une forme de torture, depuis décembre 2020. Sa famille a exprimé à plusieurs reprises ses inquiétudes concernant la détérioration de son état de santé, notamment des problèmes cardiaques et des signes de déclin physique.
Depuis que Pékin a imposé la Loi sur la sécurité nationale à Hong Kong en juin 2020, au moins 14 médias indépendants ont été fermés, dont Apple Daily en juin 2021 et Stand News en décembre 2021. Ces deux médias influents ont été contraints de fermer à la suite de descentes de police très médiatisées et de l'arrestation de leurs rédacteurs en chef pour des crimes contre la sécurité nationale.
En août 2024, deux journalistes de Stand News ont été condamnés pour « sédition » en vertu de l'ordonnance sur les crimes. Le gouvernement de Hong Kong a également harcelé à plusieurs reprises l'Association des journalistes de Hong Kong et des journalistes, exigeant le paiement d'arriérés d'impôts sans aucune justification évidente.
« Suite au simulacre de procès subi par Jimmy Lai, les gouvernements étrangers devraient faire pression sur les autorités hongkongaises pour qu'elles annulent sa condamnation et le libèrent immédiatement », a conclu Elaine Pearson. « Le gouvernement chinois et les autorités de Hong Kong devraient subir des conséquences pour leurs efforts incessants visant à museler la presse hongkongaise. »
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